lundi 17 août 2015

La Russie a commencé à protéger ses intérêts en Arctique



La Russie s’est engagée dans un effort massif et très médiatisé afin de sécuriser les 6 200 km de sa Frontière Nord et être prête à défendre ses intérêts dans les territoires arctiques jusqu’à 500 km de sa frontière. Ceci signifiant que 3 100 000 km2 d’une zone extrêmement difficile et inhospitalière doivent être mis sous protection. Vous pouvez réaliser l’immensité de la tâche.
Premièrement et essentiellement, afin de protéger les immenses ressources enfermées dans les terres et les eaux arctiques, estimées à 15% des réserves mondiales restantes d’hydrocarbures et plus de 30% des gisements gaziers. Deuxièmement, la Russie désire développer la Route maritime du Nord-Est qui, merci au Réchauffement climatique, est devenue plus sûre pour la navigation. Aujourd’hui, seulement 4 millions de tonnes de fret transitent à travers le raccourci – la route maritime du nord de l’Europe vers l’Asie dure 35 jours contre 48 par le Canal de Suez – mais dans le futur les Russes estiment que le trafic pourra être multiplié par 20 jusqu’à atteindre 80 millions de tonnes. Les ressources allouées pour la protection de cette route sont immenses et comprennent des drones, des satellites spatiaux, des stations de contrôle sous-marines et un réseau de radars. La Russie construit aussi 14 nouveaux brise-glaces, comprenant de nombreuse unités à propulsion nucléaire. Mais le plus grand effort est essentiellement militaire.
La Russie a décidé de créer un État-major stratégique unifié du Nord, (JSCN), qui sera basé dans la Flotte du Nord, laquelle est habituellement subordonnée au District militaire de l’Ouest. Le JSCN n’aura pas de statut officiel ou de direction stratégique de district, mais pour un usage pratique il peut devenir unifié, indépendant, sous commandement stratégiquement opérationnel avec le concours d’une puissante composante navale (la Flotte du Nord est aussi la plus puissante des 4 flottes russes), et une composante aérienne très élargie qui comprend les recherches et sauvetages en mer, la guerre sous-marine, les hélicoptères et aéronefs d’alerte et, par exemple, des intercepteurs long courriers, avec les formidables MIG-31BM. Les missiles de défense côtière de la classe Rubezh peuvent être aussi mis en œuvre.
Les composants de la défense aérienne incluront immédiatement le Système Pantsir-S1, mais dans le futur la Russie prévoit de déployer ses nouveaux S-400 Triumf sur ses frontières du Nord. Des unités de districts militaires variés ont été aujourd’hui réattribuées au JSCN et une Force unifiée tactique (JTG) a aussi été créée. Il est trop tôt pour prédire la taille de ce JTG mais les manœuvres organisées en Arctique par la Russie cet été, comprenant 80 000 hommes, 220 aéronefs, 41 navires, et 15 sous-marins, peuvent probablement donner une appréciation correcte de ce qui est planifié.
Pour finir, le Service de sécurité fédérale (FSB) et le Comité antiterrorisme (ATK) ont annoncé qu’en raison de l’immense, fragile et coûteuse infrastructure déployée par la Russie, les Services de sécurité russes feront un effort spécial pour contrarier toute attaque terroriste dans ce secteur sensible. Si on prend en compte la fragilité écologique de l’Arctique il s’agit d’une mesure très raisonnable.
Jetons maintenant un œil sur une carte qui illustre la situation actuelle :

Agrandir la carte. Un grand merci à SouthFront qui a produit cette carte pour notre analyse
Comme prévu, l’Occident s’est déclaré horrifié par ces efforts russes. Les réactions évoluent de l’inquiétude à l’effarement, jusqu’à la panique manifeste. La pure et simple hypocrisie de tous ces gémissement dépasse l’entendement.
En réalité, bien évidemment, l’Ouest avait planifié le contrôle des ressources arctiques depuis des années. Les acteurs de cette planification sont le  Council on Foreign Relations, le Pentagone et l’ US Navy.
En fait, c’est clairement un consensus déclaré à Washington, l’Oncle Sam désire s’approprier le plus possible de terres arctiques qu’il pourra. Le problème est que que contrairement à la Russie, l’Oncle Sam n’a que la volonté, et pas les moyens financiers ni la capacité de le faire. Prenons pour exemple l’US Navy.
L’ US Navy a toujours été, dès le début, une marine d’eaux tempérées. Avec de 10 à 14 porte-avions la fonction principale de l’US Navy a toujours été de positionner des aéronefs à la limite des eaux territoriales des pays pouvant contrarier l’autoproclamée Puissance hégémonique mondiale . L’US Navy est malgré tout la plus puissante flotte d’eaux profondes (blue water) de la planète. A contrario, la marine soviéto/russe est une marine d’eaux côtières (green water), qui a toujours eu des missions différentes. Premièrement elle doit essentiellement protéger les sous-marins russes (SSBNs) et leurs missiles intercontinentaux, (SLBM), et protéger les côtes russes. Les deux plus puissantes flottes soviéto/russes sont traditionnellement la Flotte du Nord et la Flotte du Pacifique qui ont toujours opéré dans les hautes latitudes, essentiellement dans l’Arctique et la Mer d’Okhotsk ou les sous-marins russes sont basés. Le deux autre flottes plus modestes, la Flotte de la Baltique et la Flotte de la mer Noire ont un rôle bien plus minime. Ainsi on peut dire que la partie la plus importante et la plus capable de la marine soviéto/russe a toujours été située dans les hautes latitudes, en Arctique. D’ailleurs, l’unique porte-avions russe a simplement une mission de défense et ne possède à l’origine aucun avion d’attaque à son bord.
C’est généralement vrai aussi pour le reste des Forces armées des USA et de Russie. Les premières sont plus dirigées vers des engagements à de basses latitudes – en dessous du 50e parallèle – alors que les dernières sont bien plus orientées vers des opérations dans des conditions plus froides. Ces particularités sont confortées par le fait que le système GPS est plus précis dans les basses latitudes alors que le Système GLONAST est plus affûté dans les hautes latitudes.
Cette spécialité [des Russes, NdT] est actuellement en train de hanter les planificateurs des forces américaines qui doivent penser à la création d’une Force polaire US capable de confronter des Russes qui ont eu 80 ans pour se préparer. Il n’y a pas de doute que les USA, le Canada, la Norvège et les autres pourront gagner au moins quelques nouvelles capacités avec le temps, mais la grande différence réside ici : la capacité militaire russe en Arctique est aujourd’hui une réalité, et pas un but à réaliser dans une décade ou plus.
Les politiciens occidentaux ont, par exemple, tenté de présenter ces développements comme d’autres preuves de défiance ou même d’agressivité accrue, mais la réalité est évidemment que la politique russe est en phase avec la Nouvelle stratégie russe qui aujourd’hui favorise les objectifs vers le Nord et l’Est : la Sibérie, l’Arctique et aussi, la Chine. Parallèlement, il n’y a pas de volonté de la Russie d’exclure quiconque d’une collaboration en Arctique. Les compagnie d’hydrocarbures occidentales ont été activement appelées à investir dans les efforts d’exploitation russes et la Russie a grandement bénéficié des connaissances acquises dans ces projets coopératifs. La Russie peut avec plaisir coopérer avec l’Ouest en Arctique, mais la Russie veut aussi s’assurer les moyens de protéger et défendre ses intérêts dans cette région stratégique.
Les perspectives en Arctique sont en réalité très bonnes. Plus tôt les dirigeants occidentaux auront compris que l’Arctique est une terre russe et que des négociations, et non des actions hostiles et unilatérales devront être entreprises pour mettre les choses au point, alors ces négociations seront profitables pour toutes les parties engagées.
– Source unz.com

Carter: l’existence même de la Russie est un danger pour les Etats Unis

Le chef du Pentagone, A. Carter, vient de déclarer que la Russie en général et V. Poutine en particulier représentent un danger existentiel pour les États-Unis. Qui en aurait douter? Mais de là à l’affirmer aussi clairement, c’est intéressant.
Carter: l’existence même de la Russie est un danger pour les Etats UnisSelon le chef du Pentagone, A. Carter, le Président russe sur de nombreux points est l’ennemi des Etats Unis. La haine est donc bien personnelle et elle est avouée. Freud s’en donnerait à cœur joie!
Pour continuer sur sa lancée, Carter affirme que la Russie menace les États-Unis non seulement en raison de ses dimensions, mais également vu son potentiel nucléaire. Au moins les choses sont dites. Et effectivement, l’enjeu est existentiel. C’est l’existence même de la Russie qui pose un problème à l’actuel gouvernement américain.
Ce qui permet de largement relativiser les explications faciles droit de l’hommistes justifiant le retour des tensions. Car ce n’est pas la politique menée par la Russie qui est en cause, c’est la Russie elle-même.
Quel dommage, il est plus facile de bombarder Bagdad que Moscou. Comme quoi toute puissance a ses limites et c’est justement cela qui semble déranger au plus haut point les responsables américains dans leur mégalomanie.