vendredi 10 juin 2016

Ce satané lac Assad !

Pour les petits hommes en noir de Daech, Assad est le diable incarné... jusque dans le lac qui porte son nom ! Il est vrai que ce plan d'eau artificiel vieux de quatre décennies est en train de sérieusement compliquer la stratégie du faux calife voire la survie de l’État Islamique.

Résultat de recherche d'images pour "coût économique religion islamique"Tout commence avec la double offensive YPG kurdes-armée loyaliste dont nous avons parlé il y a quelques jours. La situation devient sérieuse pour l'EI. Les Kurdes poussent toujours plus à l'ouest de l'Euphrate et sont en passe d'encercler totalement Manbij, importante tête de pont daéchique vers la frontière turque. De leur côté, les forces du régime continuent leur avancée vers Raqqah et ne se trouvent plus qu'à 30 km de l'aéroport stratégique de Taqbah.
Ce double mouvement en tenaille menace de couper tout simplement le territoire de l'EI en deux et d'isoler la partie que tient Daech le long de la frontière turque.
Ce satané lac Assad !
Résultat, alors qu'ils étaient en pleine bourre au nord d'Alep il y a quelques semaines encore, les petits hommes en noir sont en train de dégarnir et même d'abandonner plusieurs de leurs positions afin de renforcer leur présence plus au sud et ne surtout pas perdre Manbij et Taqbah.
Si les deux villes tombent, la seule voie de communication avec le nord et la frontière turque se résumera... au lac Assad. Inutile de dire que les Sukhois russes s'en donneront à coeur joie pour couler les embarcations brinquebalantes. A Raqqah, on doit maudire le nom d'Assad pour mille générations.
Notons que ce repositionnement de Daech profite à plein aux terroristes "modérés" qaédistes si chers à l'Occident et à Erdogan, au bord de l’asphyxie il y a peu et qui reprennent maintenant du terrain au nord d'Alep. Ironie de l'histoire, ce retour à la vie est permis par l'offensive de leurs pires ennemis : Assad, les Kurdes et les Russes ! L'Orient est décidément bien compliqué...
Et ici, les choses deviennent très intéressantes. L'EI est condamné depuis le début ; il n'a jamais été que le paravent, l'instrument des manigances et contre-manigances des grands en Syrie. C'est autour des terroristes "modérés" et des Kurdes que tout se joue.
L'offensive kurde sous patronage US a-t-elle été décidée par les Américains afin de sauver Al Qaeda et Ahrar al-Cham au nord d'Alep ? Même si les Kurdes ont leur propre agenda et occupent des villages dans cette zone au détriment des djihadistes "modérés" qui restent leurs ennemis, on peut sans doute répondre à la question par l'affirmative. Washington a à plusieurs reprises demandé aux Russes de ne pas bombarder Al Qaeda autour d'Alep afin de soit-disant dissocier les "rebelles modérés" des djihadistes. Mais le seul résultat aura été de gagner du temps et de renforcer ces mêmes djihadistes, comme cela avait été le cas avec le cessez-le-feu de février.
Il se peut toutefois que ce soit encore plus complexe, le double jeu américain pouvant en réalité bien être un triple jeu. Sous couvert d'aider les djihadistes d'Erdogan via l'offensive kurde (ô ironie), les Etats-Unis préparent peut-être le terrain à l'unification du Kurdistan syrien ; une entente russo-américaine sur le dos du sultan en quelque sorte. Les atermoiements de Washington étant à peu près impossibles à décrypter, seul l'avenir nous le dira...
Qu'il soit double ou triple, le jeu US fait perdre patience aux Russes qui reviennent lentement mais sûrement au niveau de leur intervention automnale. Le rythme des bombardements s'intensifie depuis une semaine dans la région d'Alep et il est même question d'un possible déploiement de troupes.au sol (où l'on pourrait reparler de ce que nous évoquions il y a quelques mois, à savoir une éventuelle intervention tchétchène). Notons également que si les ministres de la Défense iranien, russe et syrien se sont rencontrés aujourd'hui à Téhéran, ce n'est pas pour parler de la pluie et du beau temps. Cette fois, il n'y aura pas de deuxième chance pour les "rebelles" qui n'auront pas déposé les armes...

9 Juin 2016 , Rédigé par Observatus geopoliticus