lundi 6 février 2017

L’“homme de Davos” a rejoint l’homme de Néandertal



Il est (ou était) extrêmement rare, par les temps qui courent (ou coururent) au rythme des anathèmes contre Moscou et sa terrible machine de propagande dont RT est l’arme et l’âme principales, de voir et d’entendre un officiel US du rang d’ambassadeur US auprès de l’UE répondre à une interview de dix minutes. (“Rare” et même sans précédent à notre connaissance pour la période rappelée ci-dessous...).
Ted Malloch, qui attend sa nomination dès que le secrétaire d’État Tillerson se mettra effectivement au travail après le processus de sa confirmation du Congrès qui vient de se terminer, répondait donc ce 4 février aux questions de Afshin Rattansi qui le recevait dans son émission Underground, sur RT. Depuis l’interview qu’il a donnée à la BBC, Malloch a acquis une célébrité qui a été jusqu’à donner à un député européen, allemand bien entendu et bien informé, l’idée martiale de demander, ou bien d’exiger qui sait, que l’UE réfute et refuse cet ambassadeur. (Pourtant, quatre jours après cette interview de Malloch à la BBC, les cadres dirigeants de l’Union Européenne n’étaient pas encore informés, ni de l'émission, ni de son contenu. Ils ont donc appris grâce à l’intervention de Jo Leinen ce que Malloch pense d’eux.)
Tant pis, RT n’est plus l’antre du diable moscovite pour le gouvernement US, s’il l’est plus que jamais pour la presse-Système et l’“opposition” progressiste-sociétale dans le bloc-BAO. Voici donc le début de l’interview de Malloch par Rattansi, de RT, ce 4 janvier. (L’interview dans son intégralité peut être visionnée sur une vidéo qui accompagne le texte RT référencé ; l’ensemble est également repris sur ZeroHedge.com.)
RT: «Le Parlement de l'UE essaie en quelque sorte de mettre le veto à votre nomination en tant que prochain ambassadeur US auprès de l'Union européenne. Quelle est votre réaction? »
Ted Malloch: «Ils ne doivent pas avoir remarqué que Donald Trump a remporté l'élection américaine. Bien entendu, les ambassadeurs sont choisis par leurs pays d'origine pour représenter ces pays et leurs intérêts nationaux dans les capitales étrangères, et, dans ce cas, à Bruxelles. »
RT: «Est-ce symptomatique du fait que les politiciens européens ne comprennent pas vraiment le pouvoir de leurs relations avec Washington? »
Ted Malloch: «Je pense qu'il y a un peu de cela dans ce que vous dites. Mais il y a aussi un soupçon, en particulier dans certains milieux politiques de gauche en Europe, pour souhaiter que Trump disparaisse, ou pour penser que, dans quatre ans, ils pourraient avoir Obama de retour. Ou bien, fondamentalement ils pourraient me désigner comme «malveillant», ce qui exige alors une théorie pour déterminer le «bon et du mauvais», théorie qu'ils n'ont pas. »
RT: «Comment les élites européennes les médias grand public continuent-ils d'être loin des réalités lorsqu’il s’agit de Trump? »
Ted Malloch: «Je ne pense pas que ce soit juste pour l'Europe. C'est certainement le cas partout dans le monde. L'homme de Davos est mort. Nous avons eu le Davos World Economic Forum l'autre semaine, et bien sûr ils avaient beaucoup de « has-been » là-bas. Les orateurs principaux étaient tous les gens qui quittaient leur fonction comme, par exemple, le secrétaire d'État américain John Kerry. Xi Jinping a été leur « garçon d’affiche » pour la mondialisation, et en effet, la Chine a été un bénéficiaire de la mondialisation. Les 300 millions d'emplois qui ont été créés en Chine étaient un fait économique important, mais beaucoup de ces emplois ont été retirés d'Europe occidentale et d'Amérique. »
RT: Dans le monde diplomatique, l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Washington, Sir Kim Darroch, estime que «l'inexpérience de Trump pourra être exploitée par le Royaume-Uni.» Est-il sage pour la Grande-Bretagne d'avoir un diplomate qui pense comme ça? »
Ted Malloch: «Bonne chance. Bien sûr, facétieusement, Donald Trump a suggéré que quelqu'un d'autre soit l'ambassadeur du Royaume-Uni, évidemment, cela ne s'est pas concrétisé et n'allait pas se produire. Tout le monde a sous-estimé Donald Trump depuis un an et demi. Qu’est-il arrivé aux dix-sept candidats dans les primaires républicaines ? Et à  Hillary Clinton, la plus expérimentée dans la politique américaine ? »

Bien entendu, le fait même de l’interview à RT est très significatif, sinon exceptionnel. Beaucoup de citoyens US, commentateurs, chroniqueurs, journalistes, experts, etc., sont quotidiennement interviewés par RT (RT-America dans ce cas), mais pas des officiels en activité. La politique officielle des USA, jusqu’à l’arrivée de Trump, était de considérer RT comme une officine de propagande type-Guerre froide de la Russie-type URSS, – selon les développements de la narrative surréaliste depuis la crise ukrainienne commencée en février 2014 par un coup d’État complètement opérationnalisé par la CIA et complètement interprété comme une riposte démocratique à l’ingérence constante de la Russie dans les affaires ukrainiennes (ainsi va la narrative, avec les obligations terroristes du déterminisme-narrativiste). En conséquence de tout cela, l’exceptionnalité de l’interview de Malloch tient en ce qu’il dit clairement que l’administration Trump écarte de facto cette interprétation terroriste et déterministe-narrativiste sur le statut, le rôle, la fonction de RT par rapport aux USA ; il s’agit, pour l’administration Trump, d’une organisation normale, sinon amie (certainement plus amie que la presse-Système US), de communication de l’information et non pas d’une organisation de propagande dans une quasi-guerre totale de la communication.
On lit donc ci-dessus ce que Malloch pense de l’Europe, des jugements extérieurs sur Trump, etc. (Il faut entendre son “Bonne chance” [Good luck] chargé d’ironie défiante, sinon sarcastique, qui vient en réponse à la citation par Rattansi des nouvelles d’il y a deux mois selon lesquelles, selon un mémo “fuité”, les Britanniques entendent profiter de l’inexpérience supposée de Trump pour le manipuler à leur avantage.) Le passage sur Davos est surtout ce qui attire l’attention par la force de la formule, mais il s’agit simplement de confirmer que, pour l’administration Trump, le globalisme est mort et enterré, devenu une vieillerie sans plus aucun intérêt, passé de mode et dont le temps a passé, – par conséquent, fin de séquence et point final. “L’homme de Davos” a rejoint l’homme de Neandertal et l’on a vu effectivement combien, à la dernière rencontre, les présents étaient des has-been qui ne comptent plus guère... Les intéressés apprécieront. [La présence d’un fossile salafiste comme Rached Ghannouchi, l’un des chefs des Frères Musulmans, une Internationale Islamiste Terroriste, en dit long sur cette réunion des has-been°].
Le reste de l’interview est également très intéressant... On y relève notamment les idées suivantes, qui ont pour intérêt, notamment, de remettre à jour et en place certains jugements récents sur ce qui serait l’évolution de la politique extérieure de Trump. Voici comment nous les interprétons :
• Sur la Russie, Malloch est tranchant et définitif. Tout doit être fait pour rétablir les meilleures relations possibles avec cette puissance. De ce point de vue, Malloch retrouve la ligne clairement mise en évidence par Trump durant sa campagne ; laquelle ligne, semble-t-il de plus en plus précisément, sera fondamentalement la “ligne Tillerson”, du secrétaire d’État qui commence désormais son travail puisque le Congrès vient de donner son aval à sa nomination : Tillerson sera l’homme qui, à l’intérieur du cabinet, donnera son impulsion à cette orientation majeure de l’administration Trump.
(Il y a deux jours, The Independent a recueilli des déclarations de l’ancien ministre russe de l’énergie Yousoufov, absolument enthousiaste à l’égard de Tillerson. C’est aussitôt l’occasion pour le quotidien londonien, plus presse-Système que jamais à cet égard, de reprendre le refrain du “complot russe” [Tillerson, sorte d’“homme de main”, ou Manchurian Secretary of State de Poutine]. La stupidité et l’aspect absolument rassis et fripé de cette narrative qui se voulait si pimpante il y a trois ou quatre mois ne découragent aucun des plumitifs commis à cette besogne ; l’entrain des robots, c’est bien connu, ne connaît aucune limite tant qu’ils sont alimentés comme il importe qu’ils soient, et l’effet de leur travail complètement aveugle et absurde devrait être de renforcer la détermination de ceux dont ils sont la cible :
«Le nouveau secrétaire d'État américain, Rex Tillerson, a reçu l'aval de l'ancien ministre russe de l'énergie. S'adressant à The Independent, Igor Yusufov a déclaré que son expérience de travailler avec M. Tillerson, ancien directeur général du géant pétrolier ExxonMobil, avait été "fantastique", ajoutant qu'il avait les «meilleures qualités» d'un cadre supérieur. Ses remarques viennent au milieu de l'inquiétude dans certains milieux sur la proximité de l'administration Trump avec Vladimir Poutine. Ainsi, l'agence de renseignement américaine rapporte que les agents russes ont interféré dans les élections américaines pour aider le milliardaire républicain à battre Hillary Clinton. M. Tillerson a fait son nom en Russie en aidant à transformer un projet techniquement difficile, en réalisant avec succès les forages des puits de pétrole au large de l'île de Sakhaline, en faisant gagner ainsi des milliards de dollars de recettes fiscales pour Moscou. Le magazine Fortune a même suggéré que M. Poutine pourrait avoir une «sorte de fixation» sur le nouveau Secrétaire d'État ... »
Sur la politique européenne, la logique implicite du discours de l’administration Trump est plus que jamais populiste. Deux points sont mis en évidence : le Brexit d’une part, qui est l’évasion d’une souveraineté emprisonnée dans un contexte de contrainte supranationale : un référendum type-Brexit devrait, selon Malloch, avoir lieu dans tous les pays de l’UE pour permettre aux peuples d’exprimer leurs positions sur l’appartenance à l’UE. D’un point de vue plus général, la politique européenne de Trump commence à prendre forme d’une manière conceptuelle sous la forme d’un axe Washington-Bruxelles-Moscou.
Tous les mots chaleureux à l’égard des Russes qu’on a mentionnés plus haut, se trouvent intégrés dans une conception qui se résumerait par un propos lapidaire de cette sorte : “Si vous voulez le rétablissement d’un axe transatlantique entre les USA et l’Europe (après que les peuples des nations européennes aient parlé quant à leurs positions vis-à-vis de leur union, et sous quelle forme, etc.), alors il faut l’envisager comme se prolongeant jusqu’à Moscou dans le respect des intérêts de chacun. L’entente de l’Europe avec la Russie est aussi indispensable que l’entente des USA avec la Russie...” Symboliquement, Malloch rappelle la fameuse photo des trois “grands“ de la deuxième Guerre mondiale à Yalta (Roosevelt-Churchill-Staline) aussi bien qu’à Potsdam (Truman-Churchill-Staline), cela étant entendu avec le fait capital que la Russie n’est plus l’URSS et n’est donc plus menaçante : l’axe transatlantique continuera à vivre s’il est prolongé jusqu’à Moscou et devient l’axe fondamental de la paix du monde.
• Interventionnisme ? Les positions de Malloch peuvent-elles considérées comme une ingérence dans les affaires européennes ? Curieusement et joliment, Malloch utilise l’argument des antiaméricanistes et des anti-européistes selon lequel les USA (CIA & le reste) ont été fondateurs de ce qui est devenu l’Europe-UE pour mieux la contraindre au travers d'un carcan supranational, mais complètement à front renversé : “N’oubliez pas, dit-il, que nous avons été à la base du relèvement et de la de la fondation de l’Europe, en intervenant dans la Deuxième Guerre mondiale puis avec le plan Marshall. Cela nous donne le droit d’avoir notre mot à dire, et ce mot est aussi bien Brexit pour tout le monde et accommodement avec Moscou...” On voit combien l’antiSystème est un art, y compris dans sa dialectique la plus resserrée, constitué de souplesse, de contrepied et de “faire aïkido.
• Sur l’évolution de ces derniers jours, qui a beaucoup inquiété ceux qui attendent une politique extérieure antiSystème de l’administration Trump, Malloch a été catégorique tout en restant très général : les diverses postures, aussi bien vis-à-vis de l’Iran que vis-à-vis de l’Ukraine à l’ONU, sont les effets d’une mise en marche toujours complexe et contradictoire, lorsqu’on passe d’une politique à l’autre, avec nécessairement des interférences de l’ancienne politique. Malloch parle en termes apaisants (c’est-à-dire entente avec la Russie) de la Syrie, de l’Ukraine, et même de la Crimée dont il juge qu’en négociant on peut arriver à une apparence de compromis qui permettrait de régler l’aspect international du problème.

Mis en ligne le 5 février 2017
Source : http://www.dedefensa.org/article/lhomme-de-davos-a-rejoint-lhomme-de-neandertal

Ted Malloch représentant US auprès de l’UE? L’Europe voit rouge

Les critiques du candidat au poste d’ambassadeur américain à l’UE Ted Malloch envers l’organisation et les chefs de ses institutions ne sont pas passées inaperçues. Outrée, l’Union a exprimé sa ferme intention de bloquer sa candidature.
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Junker (à gauche) et Malloch (à droite)

Le Parlement européen envisage de bloquer la nomination du professeur Ted Malloch au poste d'ambassadeur américain à l'Union Européenne, a annoncé The Guardian. Les partis conservateurs, socialistes et libéraux du Parlement européen ont appelé les chefs de la Commission européenne et du Conseil européen à rejeter la nomination éventuelle de Ted Malloch au poste de représentant permanent des États-Unis auprès de l'Union européenne. Selon des hommes politiques, il manifeste une « animosité criante à l'égard des valeurs européennes fondamentales ».
Au cœur de la polémique sont les propos de M. Malloch, qui a annoncé que la monnaie unique « pourrait s'effondrer » dans les 18 prochains mois et affirmé que « l'UE pourrait sombrer à l'avenir comme l'a fait l'URSS autrefois ».
billets de 50 euros
De même, le professeur, connu pour son euroscepticisme affiché, n'a pas hésité à critiquer, dans une interview à la chaîne BBC, le président de la Commission européenne Jean-Claude Junker, dont les compétences — selon lui — ne lui permettent d'occuper qu'un petit poste de maire « dans une bourgade du Luxembourg ». Le sujet du Brexit n'a pas non plus été négligé par M. Malloch. Il a ajouté que Washington et Londres pourraient conclure un accord de libre-échange dans les 90 jours suivant la sortie officielle du Royaume-Uni de l'UE. Selon lui, il serait préférable pour les États-Unis que la Grande-Bretagne effectue une rupture « nette » avec le bloc commercial européen.
Hannibal GENSERIC