Jihâd et guerre sainte
Les
disputes théologiques internes aux grandes religions peuvent
mener à des guerres au nom de l'orthodoxie, comme les nombreuses guerres de
religion lors de l'avènement du protestantisme ou les combats entre sunnites et chiites en Islam. Dans la pratique, les raisons de ces
guerres sont plus souvent qu'on ne l'affirme des raisons économiques ou
géopolitiques. Les successeurs du Prophète étaient des califes, c'est-à-dire
des chefs d'État, et ce qui a donné naissance au chiisme, c'est une querelle
concernant la succession du prophète Mahomet.
1- Cependant, l’histoire des religions
monothéistes est inséparable des guerres.
1- Le judaïsme s'est constitué au cours
de guerres contre les Philistins, les Égyptiens, les Babyloniens, les Grecs,
les Romains: l'arche d'alliance était promenée au milieu des armées d'Israël
pour leur donner du courage. Sans la guerre, le judaïsme n'aurait pu se
développer.
Les Croisés exterminent les Cathares |
2- La guerre sainte est
un concept d’origine chrétienne. C’est une guerre lancée au nom d’un Dieu ou
approuvée par une religion. Le concept apparaît, pour la première fois,
chez Saint Augustin d'Hippone (354-430, soit 2 siècles avant l'islam),
l’un des génies maghrébins, dans son célèbre ouvrage La cité de Dieu
contre les païens où il expose que, si les païens ne veulent pas
comprendre les beautés et les vérités du christianisme, il faudra se
résoudre à leur faire la guerre. Compte tenu du caractère structurant pour les
hommes et les peuples de leur foi, cette idée fit fortune
ultérieurement et de telles guerres sont particulièrement longues et dures. Les
chrétiens considèrent comme guerres saintes les croisades du Moyen Âge (1)
contre les musulmans, et (2) contre les Cathares (12ème siècle),
d’autres chrétiens considérés alors comme hérétiques. Contre les Cathares, il
n'était pas question de chercher des conversions : les Cathares
furent tous tués. C’est lors de cette croisade contre les Cathares qu’Arnaud
Amaury, légat du pape, émit une sentence terrible et sans appel. A la question
suivante : comment distinguer les hérétiques des catholiques ? Il
répondit : «Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens».
3- L’islam primitif s'est forgé au fil de
batailles, dont la première, celle de Badr, a eu lieu contre les polythéistes
bourgeois de La Mecque, les suivantes contre des mécréants. Le premier siècle
de l'islam fut celui de la guerre sainte: en 732, un siècle après la mort de
Mahomet, les armées arabes étaient à la fois en France, à Poitiers, et sur le
fleuve Indus. Cette expansion foudroyante de l'islam militaire s'est produite
au moment où s'élaborait la doctrine musulmane, qui a ainsi été imprégnée d'un
esprit de conquête et de violence. La guerre sainte en Islam s’appelle le
« Jihâd Fi sabil Allah », c'est à dire la guerre sainte pour Dieu, ou
simplement Jihâd.
Les catégories de jihâd selon Ibn Roushd, Averroès
(1126-1198)
Dans son ouvrage intitulé Muqaddimah, le philosophe, théologien et
juriste musulman andalou du XIIe siècle, Ibn Roushd classe le Jihâd dans quatre
catégories :
I) Le Jihâd du cœur est la lutte de l'individu contre
ses désirs, ses passions, ses idées fausses et ses compréhensions erronées.
Cela inclut la lutte visant à purifier le cœur, à corriger ses propres actes et
à réaliser les droits et les responsabilités de tous les êtres humains.
II) Le Jihâd de la langue : l'éducation et les
conseils.
III) Le Jihâd de la main : s'instruire et
enseigner la science. Le jihâd de la main signale l'usage de l'écriture, il est
écrit dans le Coran : « Qui a enseigné par le calame, a enseigné à
l'homme ce qu'il ne savait pas.» [96:4-5] L'usage de l'ordinateur et de toutes
les formes de publication font partie de l'écriture.
IV) Le Jihâd de l'épée : la guerre. Le jihâd
de la main implique la lutte avec l'épée. Ibn Roushd, en tant que Cadi,
écrit que la majorité des oulémas soutient que le jihâd armé n'est
pas une obligation pour tous les musulmans, seule une armée dressée par l'Amîr
al- Mu'minîn (le Commandeur des croyants) est obligée de participer à la
guerre.
Le fanatique islamiste diabolise son contradicteur
L’islamiste diabolise son ennemi, il confond le mal en tant que principe et
le mal en tant que personne. Et tuer l'ennemi, fût-il musulman, revient à
supprimer une force maléfique.
- Sur le plan exogène: tous les Occidentaux, et même tous les non musulmans, sont pour lui des incarnations du principe du mal.
- Sur le plan endogène, c'est-à-dire au sein de la Oumma - la Communauté des croyants - , tous les opposants sont taxés de mécréants, donc susceptibles d’être trucidés au nom d’Allah : les laïques, les intellectuels, les artistes, les journalistes, les occidentalisés, les francophones (mais, bizarrement, pas les anglophones), les philosophes, les femmes divorcées ou non voilées, etc. En Syrie et en Irak, de nos jours, les islamistes sunnites tuent d’autres musulmans innocents (les autres sunnites, les chiites, les druzes, etc.), pour la simple raison qu’ils ne sont pas d’accord avec eux sur un plan politique.
Le fanatisme islamiste sunnite dispose, de nos
jours, d’une arme difficile à contrer : le kamikaze. Nous savons que
cette tradition a existé chez les musulmans depuis longtemps. Il y a mille ans,
les kamikazes nizarites (chiites ismaéliens), appelés les Assassins, semaient
la terreur chez tous les gouvernants musulmans du Moyen Orient. Mais, contrairement
aux terroristes islamistes d’aujourd’hui, les Assassins ne s’attaquaient pas à
la population, ils ne visaient que les tenants du pouvoir: vizirs,
gouverneurs, sultans.
Et la grande faiblesse des occidentaux et des
musulmans non islamistes, c'est que, pour eux, le prix de la vie est
incommensurable. Ce n’est pas le cas chez les terroristes kamikazes. On a vu, à
la télévision tunisienne sous gouvernement islamiste, des femmes exprimant leur
joie et leur fierté à l’annonce de la mort de leur fils, parti guerroyer en
Syrie contre d’autres musulmans, pour une poignée de dollars qataris ou
saoudiens.
La notion de martyre
Il y a un facteur aggravant dans tous les monothéismes: la promesse du
paradis aux martyrs.
Cela commence en 167 avant Jésus-Christ, lors de la guerre des Maccabées,
opposant les résistants juifs aux occupants grecs. Dans le second livre des
Maccabées, chapitre 7, verset 9, quand les bourreaux grecs torturent les frères
Maccabées, ceux-ci répondent: "Scélérat, tu nous exclus de la vie
présente, mais le roi du monde [c'est-à-dire Dieu], parce que nous serons morts
pour ses lois, nous ressuscitera pour une vie éternelle". Les martyrs
chrétiens furent promis au paradis, et canonisés. Même chose pour l'islam. Dans
le Coran, à la sourate 3, verset 169, on lit: "Ceux qui ont péri pour la
cause d'Allah sont vivants en présence de leur Seigneur." En d'autres
termes: au paradis.
La notion de martyre est aussi ancienne que la naissance de l'islam,
cependant les attentats suicides sont
sévèrement condamnés par les autorités –non islamistes- de l'islam. Les bases
sur lesquelles s'appuient les oulémas sont principalement :
- l'interdiction de tuer des innocents (« Épargner les enfants, les fous, les femmes, les prêtres, les vieillards et les infirmes, sauf s'il ont pris part au combat » ); (Cor. V, la Table servie : 31-32) : « Tuer une seule personne (innocente) est comme tuer toute l'humanité ».
- l'interdiction de provoquer le chaos (al-fitna) (Cor. II, La vache : 190-191) : « Le chaos (fitna) est pire que la guerre. Tant qu'eux ne vous combattront pas dans l'enceinte sacrée, ne leur livrez pas la guerre. Si eux vous déclarent la guerre alors tuez-les. Voilà la fin des infidèles ».
- le suicide, clairement condamné dans le Coran (Cor. IV, Les femmes : 28-29) : « ne vous donnez pas la mort ».
Le fanatique islamiste préfère la
mort à l’amour
Bien que la majorité des musulmans croit qu'il y a une autre vie après la
mort, cette majorité de gens préfère réussir ici-bas sa vie professionnelle et familiale.
En revanche, lorsque l'on vit misérablement ici-bas, et que l’on n’a aucune
perspective de s’en sortir, et que, grâce à un bon lavage de cerveau, on vous
promet le paradis assuré et ses vierges houris, perdre sa vie devient alors
beaucoup moins grave que de perdre son âme. Dans sa très belle lettre à
Einstein, écrite à la demande de la Société des Nations, en 1932, Freud voyait
dans la guerre une victoire du principe de la mort, Thanatos, sur le principe
du désir, Eros. Une pulsion de mort qui renvoie à la frustration sexuelle. Chez
beaucoup de fanatiques, il peut y avoir un manque de plaisir sexuel, une
solitude affective induisant un dessèchement du cœur et de l'âme, qui les
conduisent, non seulement à mépriser ces femmes qui donnent la vie, mais aussi
à privilégier la mort. Tout amour - amour rime avec toujours - a pour but de
prolonger la vie, parfois de la donner. Faites la guerre, pas l'amour, en
somme...
Le fanatisme islamiste exprime également une exigence de pureté, un refus
du métissage et des mariages mixtes, une peur du syncrétisme (mélange de
croyances), bref, un refus de l'autre. Ce refus trouve sa meilleure
expression dans les guerres menées actuellement contre la Syrie et l’Irak. Ces
deux pays ont toujours été, depuis la nuit des temps, les berceaux de
l’Humanité, où plusieurs religions, plusieurs peuples, plusieurs langues, ont
coexisté. Ce qui est insupportable pour des islamistes fanatiques. Ces deux
guerres visent, en premier lieu, un nettoyage ethnique, à l’image de ce que les
Serbes ont commencé à faire en ex Yougoslavie. La « communauté
internationale », c'est-à-dire l’Occident, avait, hier, arrêté le génocide
perpétré par les Serbe. Aujourd’hui, elle cautionne le nettoyage ethnique
perpétré par les islamistes sunnites. Et ceci, pour une simple cause : les
Serbes n’avaient ni gaz, ni pétrole. Les islamistes sunnites, avec à leur tête
l'Arabie Saoudite et le Qatar, en sont les premiers exportateurs mondiaux.
Conclusion
En
dépit des efforts de nombreux intellectuels musulmans, qui n'ont pas une
audience suffisante dans les populations, l'islam en est resté, chez les
islamistes, à une lecture fondamentaliste du Coran.
De
plus, les islamistes se sont arc-boutés sur des traditions proche-orientales
anté-islamiques, que l’Islam a, sans succès, essayé d’éliminer. Les exemples
abondent : les peines de lapidation ou d'amputation étaient déjà
inscrites dans les codes mésopotamiens il y a trois mille ans, et la
première mention du port obligatoire du voile se trouve dans la tablette dite
"A 40" des lois du roi assyrien Téglath-Phalasar Ier, mille ans avant
Jésus-Christ! La polygamie et l’infériorisation de la femme sont tout aussi
anté-islamiques et d’origine sémites et bédouines.
Mais
l’Histoire montre que les musulmans peuvent parfaitement s'adapter à la
modernité et en être les moteurs, comme ce fut le cas du temps du Bagdad
abasside et de l’Andalousie omeyade. Les révolutions du Printemps arabe
ont été une promesse dans ce sens.
Gouvernant
la quasi-totalité du monde arabe, les islamistes annoncent le retour aux
traditions proche-orientales de l’Antiquité d’il y a trois mille ans.
Les
victimes en seront non seulement les Arabes, mais aussi tous les peuples du
monde. Les attentats ont eu lieu aussi bien à Alger, Damas ou Bagdad, qu’à
New-York, Paris ou Moscou. Ils se répèteront ici et ailleurs. Les attentats
contre les ambassades américaines à Tunis et à Benghazi n’en sont qu’un début.
Les USA ont créé Al-Qaïda. Ils n’ont pas fini d’en subir les effets.
Les
Occidentaux ont hébergé, aidé, protégé les islamistes, jusqu’à leur offrir le
pouvoir dans nos pays. Un jour ou l'autre, ils en subiront les conséquences.
Hannibal Genséric
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