Début Juin 2014, lors de sa tournée en Europe, Obama avait fait miroiter aux dirigeants européens la possibilité de
fournir du gaz nord-américain afin de ne plus dépendre des livraisons
russes et d’asseoir leur « indépendance énergétique » (sic). C'est un gros mensonge.
Ainsi, à l’issue du sommet du G7 à Bruxelles, le président de la
Commission européenne José Manuel Barroso a adroitement esquivé ce mensonge, en affirmant la non faisabilité
d’un changement de fournisseur gazier :« Il faut être réaliste et ne pas s’illusionner en croyant que le gaz livré par les États-Unis réglera nos problème. Pour organiser ces livraisons, il faudrait du temps. Nous devons faire en sorte que des relations fondées sur la confiance réciproque s’établissent entre la Russie et l’Ukraine dans le domaine énergétique. À défaut de cette confiance, nos intérêts seront également affectés. »
Le
nouveau rêve américain – redevenir les rois du pétrole - n'était bien
qu'un rêve : l'EIA (Energy Information Administration) a ramené sur
terre leurs espoirs de trouver en quantité énorme du gaz et du pétrole de
schiste en Californie en diminuant les estimations de 2011 de 96%. Au
lieu de contribuer activement à l'autonomie énergétique souhaitée par
les Etats-Unis, cette réserve ne devrait plus fournir que 32 jours de
pétrole à l'économie américaine. Ce n'est pas sans conséquence sur le
prix du pétrole et l'évolution du dollar.
La déception des prévisions
En 2011, la société Intek publiait
une étude démontrant que le sol californien regorgeait d'un trésor : de
l'or noir ou du gaz en abondance. La réserve nouvellement étudiée était
ainsi censée contenir l'équivalent de 15,4 milliards de barils,
autrement dit le site de Monterey représentait donc 64% des ressources
américains en pétrole de schiste. Le début d'un nouvel âge d'or pour les
Etats-Unis.
Finalement, après correction faite par l'EIA il semble que les réserves réelles soient inférieures de 96% à celles annoncées précédemment, soit 600 millions de barils... Au final c'est donc une dépréciation de deux tiers des espoirs partis en fumée.
Finalement, après correction faite par l'EIA il semble que les réserves réelles soient inférieures de 96% à celles annoncées précédemment, soit 600 millions de barils... Au final c'est donc une dépréciation de deux tiers des espoirs partis en fumée.
Les retombées pourraient être dramatiques pour les Américains, et plus particulièrement pour la Californie. En effet cette immense réserve supposée devait permettre de créer 2,8 millions d'emplois et rapporter quelques 24,6 Mds $ de recettes fiscales. Les Américains envisageaient même d'exporter le pétrole et le gaz nouvellement découverts, en modifiant l'Export Administration Act de 1979 (jusqu'ici l'énergie fossile est considérée comme étant une ressource stratégique en cas d'embargo et donc interdite d'export). Pour ce faire, il aurait évidemment fallu que l'extraction de pétrole soit plus que suffisante pour satisfaire les besoins des Etats-Unis, pour que le pays stoppe ses importations. Ce scénario semble bien loin désormais. Ces espoirs n'étaient fondés que sur du vent ; beaucoup de vent même.
Comment la première étude a-t-elle pu être aussi imprécise ? Certains spécialistes, dont le géologue David Hughes, avaient pourtant mené des estimations empiriques et conclue que la Californie ne devrait pas, pour son futur économique et énergétique, compter sur ces ressources car les réserves probables étaient bien trop optimistes. De même il y a un an, Bill Powers (auteur de Cold Hungry and in the Dark) contredisait les chiffres et dénonçait les manipulations de la « la machine médiatique de l'industrie pétrolière ». Lorsque l'EIA anticipait 100 ans d'indépendance énergétique, Bill Powers n'y voyait que 5 à 7 ans. Si ces spécialistes indépendants sont arrivés à de telles conclusions, pourquoi Intek et l'EIA ont-ils pu se tromper ?
Comment expliquer de telles erreurs d'appréciation ?
Les chiffres sont particulièrement
importants en économie : c'est sur quoi repose tout raisonnement et tout
projet. Ainsi en surévaluant très largement ces anticipations de
réserves, les Etats-Unis ont pu temporairement faire croire à une
reprise durable dans le pays et ainsi soutenir la solidité du dollar
face aux diverses attaques récentes dénonçant l'usage de la « planche à
billets » électronique.
C'était aussi un parfait prétexte de lobby pour légitimer l'exploitation du site de Monterey. Il est en effet délicat de faire accepter la fracturation hydraulique aux riverains. Mais dans le cas de Monterey l'importance des réserves semblait largement compenser les dommages écologiques et économiques : endommagement des infrastructures locales, anomalies sur le marché du travail, pollution de nappes phréatiques, etc. Désormais, non seulement la réserve a « diminué » de 96%, mais de nouvelles recherches publiées le mois dernier ont démontré que les émissions de méthane (gaz dangereux pour l'environnement) étaient quant à elles sous-estimées de 100 à 1 000 fois.
En diminuant de 96% l'intérêt
supposé de ces sols schisteux et en multipliant ainsi le risque
environnemental, le site de Monterey n'a plus d'intérêt.
Les larmes de schiste de l'Ukraine
« Le Donbass est l’arène de confrontation entre une
Ukraine démocratique et une Russie dictatoriale ». Le martèlement de la
propagande des médias occidentaux a fait que ces derniers mois, non
seulement l’opinion européenne mais encore une partie des Ukrainiens ont
cru à ces inepties. L’Occident, ou plus exactement Washington, cherche à
dissimuler derrière ce « rideau hallucinogène » les raisons véritables
de son « souci » pour les Ukrainiens. Elles sont plus simples que les
soi-disant droits de l’homme et la démocratie.
Alors, qu’est-qui
intéresse réellement les hommes d’affaires dans le Sud-est de l’Ukraine?
La réponse est simple, c’est le gaz de schiste.
Le projet représente un important enjeu financier puisque l'Etat
ukrainien avait estimé début 2013 les investissements potentiels à plus
de dix milliards de dollars et la production potentielle entre 10 et 20
milliards de mètres cubes par an. Très symbolique, il représente aussi
l'un des multiples projets lancés ces dernières années par les autorités
ukrainiennes pour réduire la dépendance du pays au gaz russe.
La tactique
traditionnelle de Washington consiste à accuser l’adversaire de ses
propres intentions, car la Russie n'a nul besoin de gaz de schiste ukrainien.
«
La Russie dispose des plus grandes réserves mondiales de gaz naturel,
qui coûte beaucoup moins à produire que le gaz de schiste. La Russie
possède également des réserves de gaz de schiste que personne ne songe à
mettre en production. Par conséquent, l’idée de mettre la main sur le
gaz de schiste ukrainien dont on ignore la qualité et les réserves
récupérables, n’existe que dans la tête des politiciens. » a déclaré le responsable russe des énergies.
Les
pièces du puzzle ont collé entre elles quand les candidats au partage
du « gâteau schisteux » ont fait tomber les masques. Hunter Biden, fils
cadet du vice-président des États-Unis Joseph Biden, a été nommé membre
du Conseil d’administration de la compagnie gazière ukrainienne Burisma
Holdings. En effet, c’est après la visite de ce dernier en Ukraine que
le régime de Kiev a lancé une opération punitive contre Donbass. Dans le
portefeuille de cette société, il y a des autorisations pour la mise en
production des gisements de gaz de schiste dans les Carpates et les
bassins d’Azov-Kouban et de Dniepr-Donetsk, qui correspondent
curieusement à la région de Slaviansk et de Kramatorsk. Devon Archer, un
autre fonctionnaire américain haut placé et ami de la famille du
secrétaire d’État John Kerry, de même que l’ex-président de Pologne
Alexandre Kwasniewski, ont également reçu chacun leur part du gâteau.
Certes,
les motifs politiques jouent également leur rôle puisque le contrôle du
gaz de schiste ukrainien est un moyen de faire pression sur la Russie
sur le marché gazier international et surtout européen. Washington cherche à mettre la main
sur les gisements du Donbass pour « détacher » l’Europe du gaz russe,
affaiblir l’influence de Moscou sur Bruxelles et créer par la même
occasion un « trou » écologique aux frontières de la Russie.