« … Un
plein baril d’oreilles… Les oreilles indigènes valurent longtemps dix
francs la paire et leurs femmes, demeurèrent comme eux d’ailleurs, un
gibier
parfait… » (1). C’est en ces termes choisis qu’un général français racontait les
exploits de ses troupes pendant la guerre de conquête de l’Algérie (2).
«… Tout ce qui vivait fut voué à la mort… On ne fit aucune distinction d’âge, ni de sexe… En revenant de cette funeste expédition plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances… ».
«… Tout ce qui vivait fut voué à la mort… On ne fit aucune distinction d’âge, ni de sexe… En revenant de cette funeste expédition plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances… ».
« … J’ai laissé sur mon passage un vaste
incendie. Tous les villages, environ deux cents, ont été brûlés, tous les
jardins saccagés, les oliviers coupés… Il est impossible de se figurer à quelle
extrémité nous avons réduit ces malheureuses populations ; nous leur avons
enlevé pendant quatre mois, toutes leurs ressources en blé et en orge. Nous
leur avons pris leurs troupeaux, leurs tentes, leurs tapis, tous leurs objets
de ménage, en un mot toute leur fortune… ».
Orgueilleuse
satisfaction de la mission accomplie extraite d’une lettre, datée du 25 mai
1851 (4), écrite par un archétype de ces traîneurs de sabres, aussi
sanguinaires que mégalomanes, que produisent des armées à intervalles
réguliers, le Général de Saint Arnaud, lors d’une de ses campagnes en Algérie.
Extrait de la description, par Pellissier de Reynaud, du massacre de la
tribu des Ouffias par les troupes sous le commandement du Duc de Rovigo.
Toujours à la même époque et dans le même pays (3).
Ce sont des
extraits d’un "Maître Livre", écrit par un professeur d’Université, de
sciences politiques et de philosophie politique, Olivier Le
Cour Grandmaison : Coloniser – Exterminer, Sur la Guerre et l’Etat Colonial.
Il existe des livres récents sur la colonisation, plusieurs sont remarquables (5). Bien sûr, le système médiatique et les lobbies qu’il représente les occultent soigneusement : négationnisme oblige !... Pour ne pas changer, en cette "rentrée des livres", les médias nous asphyxient, à nouveau, dans les vapeurs et le nombrilisme des cocottes littéraires… Un véritable déluge tropical. L’art de noyer le poisson.
Il existe des livres récents sur la colonisation, plusieurs sont remarquables (5). Bien sûr, le système médiatique et les lobbies qu’il représente les occultent soigneusement : négationnisme oblige !... Pour ne pas changer, en cette "rentrée des livres", les médias nous asphyxient, à nouveau, dans les vapeurs et le nombrilisme des cocottes littéraires… Un véritable déluge tropical. L’art de noyer le poisson.
Mais, celui-ci
est un véritable "coup de poing". Lisez-le. Ses recherches et leurs
références, ses analyses, ses notes de bas de pages sont
d’une rigueur implacable. Sa traque de la faillite de
l’intelligence, et du naufrage des valeurs fondatrices de la Dignité
Humaine, inexorable.
Photos souvenirs d'Algérie (Armée française) |
On reste tétanisé, intellectuellement, émotionnellement, devant le récit de ces massacres, tortures, destructions et souffrances infligés à longueur de siècles. Immenses. Véritables génocides planifiés et exécutés par un colonisateur imbibé de racisme jusqu’à la moelle.
Dans ce livre dense, il s’agit de la France, au Maghreb, en Afrique, en Indochine et en Nouvelle - Calédonie. Jusqu’aux massacres de Madagascar. Jusqu’à ceux du Cameroun, auxquels Pierre Messmer, notre ancien premier ministre récemment disparu, a participé en tant que militaire.
D’autres,
encore, auraient pu être abordés, comme ceux commis par notre pays en
Syrie, avec les massacres de Damas tout spécialement, au cours
desquels l’armée française tirait au canon sur la population. La
synthèse qui est présentée donne, toutefois, un tragique et complet
aperçu des méthodes et moyens d’une guerre coloniale.
Les autres
colonisateurs européens, perpétrant des crimes contre l’humanité
similaires (6) sont aussi évoqués. En particulier, le génocide des
Hottentots par les allemands, en Namibie.
Comment a-t-on pu et peut-on perpétrer de pareilles abjections dans la bonne conscience ?...
Ce qui prend le
plus aux tripes, c’est de mesurer les ravages d’une idéologie fondée
sur le racisme. Combien elle imprégnait des intellectuels
qui la relayaient, la justifiaient, l’amplifiaient. Complices. Et,
fiers de l’être…
Des auteurs
qu’on aimait ou vénérait : Lamartine, Maupassant, Victor Hugo,
Tocqueville ou André Gide, et d’autres... Découvrir qu'ils
soutenaient de telles monstruosités, fondées sur la conception
d’une race supérieure, préfigurant l’idéologie raciste des nazis, un
siècle plus tard. Ou, celle des racistes occidentaux
actuels dont on peut contempler les œuvres quotidiennes, en
Palestine, en Irak ou ailleurs.
On retrouve la même rhétorique du "choc des civilisations", structurée par une mégalomanie de la suprématie de l’Européen, de l’Occidental, les mêmes termes, les mêmes idées, arguments, imaginaires, fantasmes et pulsions. Même paranoïa. Cent cinquante ans plus tard…
On retrouve la même rhétorique du "choc des civilisations", structurée par une mégalomanie de la suprématie de l’Européen, de l’Occidental, les mêmes termes, les mêmes idées, arguments, imaginaires, fantasmes et pulsions. Même paranoïa. Cent cinquante ans plus tard…
On souffre à la
lecture des propos de Victor Hugo dans un dîner, tenus en janvier 1841,
au général Bugeaud, le premier gouverneur général
d’Algérie, véritable brute psychopathe en uniforme (7) :
« … C’est la civilisation qui marche sur la barbarie. C’est un peuple éclairé qui va trouver un peuple dans la nuit… Nous sommes les
Grecs du monde ; c’est à nous d’illuminer le monde. Notre mission s’accomplit… ».
Ou encore,
Victor Hugo notant, au lendemain d’un dîner mondain, les atrocités de
l’Armée d’Afrique, comme s’il s’agissait d’une chasse aux
perdreaux :
« … Algérie, le général Flô me disait hier soir que, dans les razzias, il n’était pas rare de voir des soldats jeter à leurs camarades des enfants qu’ils recevaient sur la pointe de leurs baïonnettes… » (8).
« … Algérie, le général Flô me disait hier soir que, dans les razzias, il n’était pas rare de voir des soldats jeter à leurs camarades des enfants qu’ils recevaient sur la pointe de leurs baïonnettes… » (8).
Et, Tocqueville, longuement cité dans l’ouvrage de Le Cour Grandmaison, dont on ne célèbre, habituellement, que son œuvre La Démocratie en
Amérique. Mais, dont on tait tout le travail de parlementaire
"colonial" qu’il accomplissait à l’époque. Aussi glacial et méthodique
qu’un parlementaire "néocon" ou membre du
Likoud :
« … J’ai
souvent entendu en France des hommes que je respecte, mais que je
n’approuve pas, trouver mauvais qu’on brûlât les maisons,
qu’on vidât les silos et enfin qu’on s’emparât des hommes sans
armes, des femmes et des enfants. Ce sont-là, selon moi des nécessités
fâcheuses, mais auxquelles tout peuple qui voudra faire la
guerre aux Arabes sera obligé de se soumettre… » (9).
Des décennies,
des siècles de colonisation, et leur cortège d’abominations, ont
imprégné l’inconscient collectif. Surgit, alors, la vision
prémonitoire d’Aimé Césaire :
« … Au bout
de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes
ces expéditions punitives tolérées, de tous ces
prisonniers ficelés et "interrogés", de tous ces patriotes torturés,
au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette jactance étalée, il y
a le poison instillé dans les veines de l’Europe, et
le progrès lent, mais sûr, de l’ensauvagement du continent… » (10).
Pas étonnant que notre Président de la République soit allé ânonner, devant des universitaires, des cadres et la jeunesse de Dakar, des leçons de
"civilisation", de "modernité", de "rationalité"... En fait, des inepties, pétries, faisandées de racisme colonial… En 2007… A la louche, en plus. En veux-tu, en voilà… Avec une morgue à faire pâlir d’envie un hippopotame sortant des
eaux…
Raison ? Modernité ? Monde de Demain ?...
Logorrhée de l’arrogance, dissimulant la sclérose d’une "caste" française vivant encore à l’âge de pierre…
Ou, plutôt, à l’âge du tonneau…
Georges Stanechy
6 septembre 2007
http://stanechy.over-blog.com/article-12203963.html
(1) Le Cour Grandmaison, Olivier, Coloniser - Exterminer – Sur la guerre et l’Etat Colonial, Fayard, 2004, p. 158-159,
note 1.
(2) La
propagande coloniale, qui perdure, dissimule le fait historique que
l’Algérie était une province semi-autonome de l’Empire
Ottoman, extrêmement riche sur le plan agricole : blé, olivier et
élevage, en particulier. Ce fut le plus important fournisseur de blé de
la France, pendant les guerres napoléoniennes. La
France, de l’après Napoléon, refusait d’honorer les créances de
l’Algérie, ce qui provoqua une tension entre les deux pays. Ce fut un
motif déterminant dans la conquête. Rien à voir avec le coup
d’éventail du Dey à notre ambassadeur, et autres niaiseries sur un
pays que la France aurait trouvé vide de cultures et peuplé de
sauvages... Le deuxième objectif immédiat fut de s’emparer des
importantes réserves d’or de son gouvernement… Il faut espérer que
le cinéma algérien s’approprie, un jour, ce pan de l’histoire de son
pays. Il y a des films passionnants à
réaliser !…
(3) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 159.
(4) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 147.
(5) Lire, notamment :
=> Branche, Raphaëlle, La Torture et l’Armée pendant la guerre d’Algérie – 1954 -1962, Gallimard, 2001.
=> Manceron, Gilles, Marianne et les Colonies – Une introduction à l’histoire coloniale de la France, La Découverte -Poche, 2003.
=> Branche, Raphaëlle, La Torture et l’Armée pendant la guerre d’Algérie – 1954 -1962, Gallimard, 2001.
=> Manceron, Gilles, Marianne et les Colonies – Une introduction à l’histoire coloniale de la France, La Découverte -Poche, 2003.
=> Plumelle-Uribe, Rosa Amelia, La Férocité Blanche, Des Non-Blancs aux Non-Aryens, Génocides Occultés, de 1492 à nos jours,
Albin Michel, 2001.
(6) Une résolution de l’ONU, du 11 décembre 1946, déclare que "… le génocide bouleverse la conscience humaine…".
(7) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 98.
(8) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., note 1, p. 98.
(9) Tocqueville, Alexis (de), Travail sur l’Algérie, cité in Coloniser – Exterminer, Op. Cit.
(10) Césaire, Aimé, Discours sur le Colonialisme, cité dans Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 342.
VOIR AUSSI :
Décapitations : deux poids, deux mesures
Hervé Gourdel, décapitation... montée ?
Commentaire :
Nombre de victimes du terrorisme en 2014. France : 1; Irak : 12618
(6) Une résolution de l’ONU, du 11 décembre 1946, déclare que "… le génocide bouleverse la conscience humaine…".
(7) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 98.
(8) Coloniser – Exterminer, Op. Cit., note 1, p. 98.
(9) Tocqueville, Alexis (de), Travail sur l’Algérie, cité in Coloniser – Exterminer, Op. Cit.
(10) Césaire, Aimé, Discours sur le Colonialisme, cité dans Coloniser – Exterminer, Op. Cit., p. 342.
VOIR AUSSI :
Décapitations : deux poids, deux mesures
Hervé Gourdel, décapitation... montée ?
Commentaire :
Nombre de victimes du terrorisme en 2014. France : 1; Irak : 12618
Déclaration du Président Obama :Aujourd’hui, les peuples du monde sont horrifiés par un autre meurtre barbare –celui d’Hervé Gourdel– par des terroristes en Algérie. Nous soutenons le Président Hollande et le peuple français, non seulement au moment où ils pleurent cette terrible perte mais aussi alors qu’ils se montrent déterminés à lutter contre la terreur et à défendre la liberté.
Déclaration du Premier Ministre britannique Cameron :L’assassinat monstrueux du Français Hervé Gourdel est l’horreur la plus récente. Le Président et le peuple français ont toute notre sympathie.
Alors,
comme les médias n'en ont pas parlé - vu que ces morts n'ont pas grand
intérêt pour les Occidentaux -, voici une statistique édifiante extraite de la base des morts civiles de l'Irak Body Count depuis le 1er septembre:
Total des morts en septembre 2014 en IRAK : 1.956 civils tués dont
- 251 par les forces gouvernementales, soit 13%
- 1.705 par les hordes islamistes, soit 87 %.
Total des morts civiles en 2014 : 12.618, dont :
- 1.500 par les forces gouvernementales , soit 12%.
- 11.118 par les hordes islamistes soit : 88%
"Nous ne faisons pas de décompte des morts." [Général américain Tommy Franks, en charge de l'invasion de l'Irak, BBC]