dimanche 9 août 2015

Déchéance des Arabes du Glofe. Gloire et Honneur aux Irakiens, Syriens et Yéménites




Tandis que l’Arabie saoudite s’efforce de supplanter Israël en fait de crimes, de terreur et de barbarie, poussant un pays tout entier au bord du gouffre dans l’indifférence générale, le plus pauvre des pays arabes donne une leçon de courage, de dignité et de lucidité au monde entier, à l’exemple du peuple palestinien. Hier les Algériens, aujourd'hui les Syriens, les Irakiens et les Yéménites sauvent le peu d'honneur et de dignité qui restent aux Arabes. La déchéance des autres "Arabes" est totale : c'est la honte.

Chevènement au Figaro : «Le monde arabe est dans un état de décomposition profond»

Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre français et actuel président de l'association France-Algérie (AFA), pose un regard lucide sur ce qui se passe dans les pays arabes depuis 2011. Pour lui, «le monde arabe est dans un état de décomposition profond». Il l’a dit dans une interview accordée au quotidien français Le Figaro. Son jugement est à prendre au sérieux, émanant d’un homme politique, fin observateur, qui connaît aussi bien le monde arabe que la religion, l’islam, qui y prédomine très largement. Un rapide examen de la carte de la région suffit pour lui donner raison. Dans presque tous les pays arabes, la situation est instable, sur fond de menaces réelles d’éclatement, à des degrés différents illustrés, pour ne citer que les cas flagrants, par les exemples de la Libye, en plein chaos, l’Irak, embourbé depuis une vingtaine d’années dans une vague d’actes terroristes sans fin, la Syrie, qui continue, certes, de résister à l’agression caractérisée orchestrée par les puissances occidentales et menée sur le terrain par une horde de mercenaires venus d’une centaine de pays, ou le Yémen, qui subit, lui aussi, une agression militaire ouverte da la part d’une coalition animée par les pétromonarchies du Golfe et dirigée par l’Arabie Saoudite. Certains spécialistes prévoient même, à terme, parmi les perspectives possibles, un impact dévastateur sur ces pétromonarchies du Golfe, à commencer par l’Arabie Saoudite. En attirant l’attention sur la décomposition du monde arabe, Jean-Pierre Chevènement veut sans doute adresser d’abord une mise en garde à l’Occident et à son pays, la France, qui en fait partie. Il explique pourquoi l’Occident doit revoir sa politique dans cette région: «le Moyen-Orient reste un baril de poudre qui demande une vigilance particulière du point de vue de la sécurité de la France, car il concentre la moitié des réserves de pétrole et de gaz mondiales». Et il y a surtout le terrorisme ; Jean-Pierre Chevènement fait constater que «la décomposition du monde arabe» a favorisé la montée des groupes terroristes. Or, l’idéologie qu’ils propagent, particulièrement depuis l’émergence de Daech, tend à mettre en place un contexte d’affrontement du monde musulman tout entier contre l'Occident. Là est, selon Jean-Pierre Chevènement, «le but des islamistes», autrement dit «le choc des civilisations», et il reproche à Manuel Valls, le Premier ministre français, de tomber dans ce piège. Car c’est un piège, dans la mesure où un tel contexte d’affrontement facilite le recrutement de terroristes dans les pays occidentaux. Il rappelle qu’«aujourd'hui un certain nombre de jeunes "paumés" peuvent être tentés par une démarche de radicalisation». Ces jeunes, pas seulement d’origine immigrée, mais également des «Français de souche» constituent «le terreau sur lequel le terrorisme djihadiste se développe».

Riyad: retour du bâton

Un retour de bâton douloureux, pour l'Arabie saoudite, qui a, longtemps, joué - et continue de jouer - avec le feu. Un boomerang, d'autant plus douloureux, que Riyadh n'était pas étrangère à l'avènement des groupes extrémistes, qui attisent la fitna, parmi les peuples, et les nations arabes. L'attentat de jeudi - immédiatement, revendiqué par DAECH, (État islamique/EI) - contre une mosquée, fréquentée par les militaires, (15 morts), induit une nouvelle donne, dans le Royaume wahhabite. De fait, l'EI promet d'autres attentats et s'engage à instaurer le chaos, dans le royaume des Saoud, comme en Syrie et en Irak. L'attentat de jeudi est le quatrième, en trois mois - en particulier, contre des mosquées chiites - et le deuxième ciblant des services de sécurité, faisant plus d'une quarantaine de morts. Dès lors, l'Arabie saoudite est, sans doute, un cas d'école, dans les événements, qui marquent, depuis quatre ans, le Moyen-Orient. Poids lourd des monarchies du Golfe, menant, en sous-main, une guerre de leadership contre l'Iran chiite, s'activant, dans un prosélytisme abusif, notamment, dans les pays arabes, africains et asiatiques, finançant des groupes islamistes de tout acabit, l'Arabie saoudite est, également, un allié stratégique des États-Unis, et est - avec Israël - le plus farouche adversaire du nucléaire iranien. Donc, l'Arabie saoudite, «bouge» et s'est découvert un destin de puissance régionale, pouvant, à l'occasion, suppléer le grand protecteur états-unien, dans de menus affaires de police. Ainsi, à la tête d'une coalition des monarchies du Golfe, l'Arabie saoudite mène, depuis le 26 mars, des frappes contre la rébellion houthie, (chiite), au Yémen. Dès lors, la carte géopolitique du Moyen-Orient, fortement, brouillée, par ailleurs, est devenue très complexe et le rôle du royaume - même s'il semble évident - n'apparaît pas, clairement, tant Riyadh joue jeu double, voire, triple. En fait, l'Arabie saoudite - la plus acharnée à vouloir la chute du Président syrien, Bachar al-Assad - soutient, de toutes les manières, les groupes rebelles et jihadistes, qui combattent le régime de Damas. Parmi ces groupes, outre le Front islamique [qui regroupe une dizaine de factions islamistes syriennes] et le Front Al-Nosra, [branche locale d'Al-Qaïda], il y a l'autoproclamé «État islamique», (DAECH/EI, Isis, en anglais), qui reçoit des aides substantielles (notamment, financières), de la part du Royaume wahhabite. Aussi, il apparaît singulier et contradictoire que Riyadh, qui contribua à l'essor régional et à l'international des groupes jihadistes, prenne part à la coalition internationale, menée par les États-Unis, contre DAECH, en Irak et en Syrie. En fait, c'est là une position tactique, [même si elle apparaît antinomique, dans les guerres, qui minent le Moyen-Orient], qui justifie, selon Riyadh, ses ambitions géopolitiques. De plus, Riyadh doit bien cela aux États-Unis, du fait des liens spécifiques qui les unissent. En effet, la coalition, menée par les États-Unis, et regroupant une vingtaine de pays occidentaux, avait mauvaise presse, dans le Monde arabe, et se présentait comme une nouvelle croisade occidentale. L'apport des monarchies du Golfe, outre de cautionner cette intervention étrangère, devait, ainsi, rassurer les «indigènes». En fait, les Saoud ne pouvaient refuser ce geste à leurs protecteurs états-uniens, qui veillent sur le trône légué par Abdelaziz Saoud. Ce qu'on peut ne pas comprendre, en revanche, est que l'Arabie saoudite se fasse hara-kiri, en participant au plan américano-israélien de refonte géopolitique du Moyen-Orient - dans lequel le royaume saoudien est inclus - par la déstructuration des nations arabes. DAECH/EI en est l'un des instruments, qui doit, à terme, induire la disparition des États-nations arabes, remplacées par des entités ethniques et confessionnelles, facilement, contrôlables. L'Irak et la Syrie en sont les prolégomènes. Il est, d'ailleurs, surprenant que ledit «État islamique» se soit renforcé, depuis le début des frappes de la coalition internationale, gagnant du terrain, en Syrie. Riyadh - conjointement, avec le Qatar - a, de fait, joué un rôle prépondérant, dans la tentative de renversement du régime syrien, par le recrutement et le financement de Jihadistes, qu'elle estimait pouvoir manipuler. Ce que les évènements ont démenti. Entre-temps a surgi «l'État islamique», qui avait d'autres missions et objectifs, sous-traitant, pour ses commanditaires, [les véritables maîtres d’œuvres], le démembrement du Moyen-Orient. Un dépècement, auquel le Royaume wahhabite n'échappera pas. En fait, géant aux pieds d'argile, l'Arabie saoudite - malgré ses prodigieuses dépenses en armement - incapable, militairement, de se prendre en charge, joue, dans ce poker menteur, un jeu dangereux, dont elle ne dispose pas de tous les atouts, qui, à terme, (déja?), se retournera contre elle. Les attentats et le chaos promis par DAECH n'en sont que les prémices.
Karim Mohsen

Déchéance des Arabes du Golfe

La guerre saoudo-américaine contre le Yémen dure maintenant depuis plus de 4 mois. Elle a causé plus de 4.000 morts, dont 3.000 causés directement par les bombardements terroristes de la coalition arabe contre le Yémen, on dénombre 20.000 blessés et près de 1,3 millions de déplacés,  6,5 millions de personnes immédiatement menacées par la famine, tandis que 13 millions – soit la moitié de la population – sont privés d’accès aux moyens de subsistance les plus basiques et réduit à une lutte permanente pour glaner leur pain quotidien.
Selon un récent rapport d’Oxfam :
Le Yémen est une cocotte-minute qui a atteint son point critique avant explosion. Attaqués depuis les airs et au sol, et assiégés par la terre, par la mer et par les airs, les Yéménites sont dans une situation de dénuement désespérée et n’ont nulle part où aller. […] Des milliers de personnes sont menacées de mort et de détresse en raison des effets secondaires de ce conflit comme la faim, la malnutrition et la maladie. Pour éviter que le Yémen bascule dans le gouffre, la communauté internationale doit de toute urgence lever les restrictions sur les importations et implémenter un cessez-le-feu permanent qui facilite le mouvement sécurisé des marchandises à travers le pays. […]  Même pour le Yémen, un pays où l’insécurité alimentaire est chronique, c’est le nombre le plus élevé jamais enregistré de personnes vivant dans la faim. Quatre mois de frappes aériennes intenses, de bombardements, de combats au sol et de restrictions sur les importations imposées par la coalition dirigée par l’Arabie saoudite ont mis le pays en ruines. Un manque cruel de nourriture affame le peuple et provoque une augmentation des niveaux de malnutrition, en particulier chez les femmes et les enfants, et met des centaines de milliers de vies en danger. […] Nuha Al Saïdi, vice-directrice du programme d’Oxfam et résidente de la capitale Sanaa, déclare : ‘Même si nous survivons aux bombes, nous sommes à court de nourriture.’ La violence, les restrictions sur les importations et le coût du carburant ont pour conséquence que les quelques provisions limitées que l’on peut encore trouver ne sont disponibles que de façon sporadique, et à des prix qui ont subi une inflation extraordinaire. Les hausses de prix ont rendu les biens alimentaires de première nécessité, le carburant et les médicaments hors de portée pour des familles à court d’argent, dont la plupart n’ont pas eu de revenus réguliers depuis des mois. Un manque de nourriture sur le marché, les prix élevés, les difficultés d’accès aux marchés, et un manque de revenus ont contribué à une augmentation rapide du nombre de yéménites souffrant de la faim. […]

Les familles fuyant la violence constituent une pression supplémentaire sur les communautés qui les accueillent à présent, car elles arrivent les mains vides et ces communautés partagent le peu qu’elles ont. […]

L’UNICEF annonce que le taux de malnutrition infantile a dépassé le stade critique. L’eau potable manque cruellement, et des maladies infectieuses curables se propagent et font des centaines de victimes faute de médicaments. Le manque de carburant, de gaz et d’électricité peut à lui seul déclencher à nouveau un véritable désastre. Faudra-t-il attendre qu’on commence vraiment à parler de génocide? La détresse du peuple yéménite dépasse tout ce que peuvent exprimer les mots et les égrenages de statistiques, et même les photos les plus déchirantes ne pourront qu’imparfaitement contribuer à en mieux représenter l’horreur.
Le rapport d’Oxfam a été relayé par la presse britannique et américaine, et ces images sont tellement insoutenables que malgré l’embargo médiatique occidental, elles ont pu se frayer un chemin jusqu’au Daily Mail, un quotidien britannique sensationnaliste et voyeuriste. Mais le public français a été épargné d’un tel spectacle, ce rapport n’ayant eu aucun écho dans nos médias qui gardent un silence pudique sur la crise humanitaire au Yémen. Il est vrai que l’agression saoudienne bénéficie d’un soutien total des États-Unis et de la Grande-Bretagne, et qu’elle se fait notamment avec des armes françaises, qui jouent actuellement un rôle majeur à Aden – celles-là mêmes qui, comme devait censément le montrer la saga des Mistral, ne seraient jamais livrées à des parties belliqueuses.

Bien que nombre de pays du Moyen-Orient soient déchirés par des conflits sanglants et sans précédent depuis des années, qui continuent à faire les titres de l’actualité, le Yémen se distingue déjà du fait de la grande vulnérabilité de sa société, qui comptait parmi les plus pauvres au monde et dépendait presque totalement de l’extérieur. De plus, sa situation géographique le met à la merci du blocus naval impitoyable qui lui est imposé, et empêche la population de rejoindre les millions de réfugiés qui ont fui la dévastation de leur pays par des hordes terroristes sanguinaires soutenues en sous-main par ceux-là même qui, dans leur rage et leur dépit, déchaînent aujourd’hui ouvertement leurs ressources colossales pour anéantir le plus faible des pays arabes, sans la moindre ligne rouge – même les trêves sont systématiquement violées par de nouvelles frappes aériennes dès leur implémentation. La coalition saoudo-américaine assiste également Daech et al-Qaïda au Yémen, collaborant étroitement avec eux. Et pourtant, malgré cette disparité extrême entre les forces en présence, le Yémen résiste héroïquement et s’annonce comme un nouveau Leningrad pour l’agresseur saoudien.

Depuis le début de la guerre, Abdel-Malik al-Houthi, le chef de la Résistance yéménite, dénonce avec la plus grande véhémence la Trinité du Mal, composée des États-Unis, d’Israël et de l’Arabie Saoudite, la corne de Satan qui s’est entièrement assujettie à leurs intérêts. Il la décrit comme leur bras armé dans la région, au service desquels elle a enfanté le monstre Daech, et insiste sur les crimes atroces qu’elle perpètre contre le peuple yéménite. Mais ce qui est le plus notable dans son dernier discours est la mention récurrente qu’il a fait de la Palestine, de la souffrance du peuple palestinien et de la lutte contre Israël, qui reste selon lui la cause centrale du peuple yéménite malgré la situation dramatique et sans précédent dans laquelle il se trouve.
En effet, le 10 juillet 2015, à l’occasion de la Journée internationale d’Al-Quds (Jérusalem), commémorée chaque dernier vendredi du mois de Ramadan en solidarité avec le peuple palestinien, des dizaines, voire des centaines de milliers de Yéménites ont pris part à ces manifestations pour exprimer leur attachement indéfectible à la cause palestinienne. Et ce malgré le fait que la trêve humanitaire, décrétée par les Nations Unies pour les dix derniers jours du mois sacré de Ramadan, et ce après plus de 100 jours d’une agression impitoyable et sans précédent contre le Yémen, était violée quotidiennement par l’Arabie saoudite. 
A l’occasion de son discours commémorant cette journée, Hassan Nasrallah, le Secrétaire général du Hezbollah, a évoqué les millions de personnes sorties massivement dans les rues du monde entier pour manifester leur soutien à la cause palestinienne (en Iran, en Irak, en Syrie, en Jordanie, en Arabie saoudite même, en Tunisie, en Mauritanie, au Soudan, en Palestine, en Turquie, au Pakistan, et plus modestement dans d’autres villes occidentales et européennes, jusqu’à la place du Trocadéro à Paris, où siège le gouvernement le plus pro-sioniste au monde), mais il a rendu tout particulièrement hommage au peuple yéménite en ces termes :
« Permettez-moi de m’arrêter tout particulièrement sur deux manifestations, deux commémorations : la première au Yémen, où ces chers et nobles (frères) sont sortis dans les rues de Sanaa, manifestant pour la Palestine et pour Al-Qods, et ce malgré la poursuite de l’agression saoudo-américaine contre leur pays, leurs villes et leurs villages, et absolument tout ce qu’ils possèdent en fait d’être vivants et de pierres (inanimées). Malgré les frappes continues jusque sur Sanaa même, contre l’intérieur de Sanaa et la banlieue de Sanaa, des dizaines de milliers de personnes – pour ne pas dire des centaines de milliers – sont sorties et ont manifesté pour Al-Qods, pour la Palestine, pour Gaza et pour le peuple palestinien.

Bien sûr, sur le plan psychologique, nous comprenons très bien cela. Le peuple yéménite a le sentiment que le monde entier l’a abandonné, car le monde arabe et le monde islamique l’ont abandonné. Le monde ne s’est pas divisé entre soutiens à la guerre et opposants à celle-ci, mais entre les soutiens à l’agression contre le Yémen et ceux qui se taisent à son sujet. Et peu nombreux sont ceux qui s’opposent à cette guerre.

Malgré cela, malgré cette réalité douloureuse, consternante et honteuse, le peuple yéménite n’a pas été amené à déclarer qu’il n’en avait rien à faire de la Palestine, d’Al-Qods, de Gaza ou du peuple palestinien. Cela mérite le respect et l’hommage, et, en vérité – je ne trouve pas de mots assez forts – la glorification et l’exaltation, l’admiration et la vénération face à la volonté du peuple yéménite, à son éveil et à sa résistance, ainsi qu’à la sincérité de ce peuple qui a confirmé aujourd’hui son attachement de principe, politique, combattant et moral à la cause de la Palestine.
 

Et le deuxième endroit que je tiens à évoquer est le Bahreïn. Car ce qui unit le Bahreïn et le Yémen, c’est l’abandon. L’abandon du monde arabe et islamique, et du monde entier.

Pour d’autres pays du monde, où on trouve des oppositions, des groupes armés, des révolutions populaires – appelez-les comme vous voulez – on trouve des pays extraordinaires, qui les soutiennent financièrement, en armes, médiatiquement, ils organisent pour eux des conférences internationales, des sessions au Conseil de sécurité, et des mouvements régionaux et internationaux considérables. Mais pour le Bahreïn et le Yémen, il en va tout autrement. Ces deux pays sont victimes d’une injustice et d’une oppression toutes particulières, et c’est pourquoi je les ai distingués tout particulièrement.»


Cet hommage rendu au Yémen par le Hezbollah libanais, qui, de 1982 à 2000, et à nouveau durant l’été 2006, s’est trouvé dans une situation de dévastation et d’abandon similaire – rappelons qu’en 1982, l’invasion du Liban par Israël avait été éclipsée dans l’actualité du monde arabe par la Coupe du monde de football, ce qu’a déjà maintes fois dénoncé Hassan Nasrallah –, et constitue le premier rang de la lutte contre Israël, souligne le caractère exceptionnel de l’engagement du peuple yéménite pour la cause palestinienne, et sa grande lucidité dans la lecture des événements qui se produisent dans la région. Hassan Nasrallah avait déjà souligné qu’en2011-2012, le Yémen avait massivement manifesté en solidarité avec la Syrie pour dénoncer la guerre terroriste internationale qui lui était livrée, alors que le monde arabe était encore plongé dans l’aveuglement et la torpeur. Et selon Abdel-Malik al-Houthi, cet acharnement américano-israélo-saoudien est bel et bien dû à cet éveil remarquable du peuple yéménite, et à sa volonté d’indépendance et de réalignement sur la cause des peuples arabes, à l’exemple de l’Iran et en opposition flagrante avec le projet d’inféodation et de collaborationnisme saoudien
«Prétendre (la réalité de cette influence iranienne) n’est qu’une tentative d’égarement : le régime saoudien essaie de tromper les peuples de la région. Celui qui manifeste de l’hostilité à Israël, ils le décrivent en disant que c’est un Iranien (hostile) ; celui qui apporte un soutien total à la Résistance palestinienne et libanaise dans leur lutte contre Israël, ils disent que c’est un Iranien. Ils essaient ainsi de duper et de museler tout le monde, et de créer de nouveaux équilibres dans les causes stratégiques de la région de sorte que la normalisation des relations avec Israël et la collaboration avec Israël deviennent le cœur de l’identité arabe, que cela devienne une défense de la sécurité nationale arabe. Ils veulent que la lutte contre Israël et contre la domination israélienne, et que la solidarité avec le peuple palestinien, le sentiment de responsabilité à l’égard de la mosquée d’Al-Aqsa (à Jérusalem) et des lieux saints en Palestine deviennent une cause iranienne, et estiment que quiconque construit sa politique dans cette direction doit être ciblé et accusé par tous comme étant sorti de l’arabisme. Est-ce que l’arabisme signifie le collaborationnisme, l’humiliation, la dégénérescence, la reddition, la soumission à Israël? L’assimilation aux régimes qui collaborent avec Israël? Cette distorsion ne vous profitera en rien, absolument rien, car votre collaboration avec Israël est révélée aux yeux de tous. Vous êtes clairement devenus (israéliens), vous le régime saoudien et les instruments takfiris (Daech et al-Qaïda), votre identité s’est révélée comme sioniste et votre serment d’allégeance est clairement pour Israël. […]

L’une des causes principales de ce rôle néfaste et ce ciblage de notre noble peuple yéménite est ce qui est connu de ce digne peuple, à savoir ses valeurs, son éthique, ses principes, et son engagement majeur et actif avec les peuples arabes en direction de la Palestine et de la cause palestinienne, ainsi que dans le sens d’une hostilité marquée pour Israël. Lorsqu’une prise de conscience croissante s’est révélée au sein de notre peuple yéménite, et lorsque son niveau d’engagement et de réactivité s’est grandement développé au sein des marches et des manifestations de solidarité, au point qu’en ce premier anniversaire de l’agression contre Gaza, nous pouvons nous souvenir des manifestations de très grande ampleur au Yémen tout au long de la guerre contre Gaza, à un point inégalé par tout autre pays arabe, des manifestations énormes, spectaculaires, avec une très grande réaction de notre peuple, au point qu’en vérité, des centaines de milliers d’entre notre peuple yéménite désirent, espèrent et aspirent à pouvoir être côte à côte avec la Résistance en Palestine et la Résistance au Liban pour combattre directement l’ennemi israélien. Tel est le peuple yéménite, au sujet duquel on peut dire avec certitude que c’est le peuple arabe le plus engagé pour la cause palestinienne, celui qui fait le preuve de plus de solidarité et de compassion avec elle, humainement et moralement, mais il est malheureusement très pauvre au niveau financier à cause de la politique d’appauvrissement et de ciblage dont ce peuple est victime depuis des décennies. De même, ce peuple a toujours été soumis à la guerre, à une guerre de très grande ampleur, et on assiste à l’intensification de la violence de l’agression et du ciblage contre lui, à un point qui a encore augmenté son éveil et sa conscience, ainsi que son engagement pour cette cause majeure.»

 
Suite aux événements qui ont secoué le monde arabe depuis son prétendu Printemps des peuples en 2011, le plus grand danger qui menace la cause palestinienne est bien que chaque gouvernement, chaque peuple, chaque pays arabe (et jusqu’à l’opinion publique internationale), pris dans leurs propres crises et luttes internes, mettent de côté la question d’Israël, de la Palestine et du projet de domination américano-israélien dans la région, dont Daech n’est que le dernier avatar. Sayed Ali Khamenei et Hassan Nasrallah n’ont eu de cesse de le rappeler, et Abdel-Malik al Houthi, et avec lui le peuple yéménite dans sa majorité, se sont clairement rangés à leurs vues. Bien plus, comme l’a souligné le chef de la Résistance yéménite, la barbarie saoudienne éclipse même les crimes israéliens à Gaza, ce qui constitue le comble de l’infamie et une trahison peut-être plus grande encore que celle de Sadate :

 «Ils n’ont aucune humanité en eux, aucun honneur, pas de morale, pas de valeurs. Ils n’ont aucune qualité (humaine). Ce sont des monstres à tous les sens du terme. Qui commet de tels crimes? Qui cible jusqu’aux marchés, jusqu’à la foule des gens dans les marchés dans toutes les provinces, ici et là, tant au nord qu’au sud? A travers tous ces crimes, ils révèlent leur monstruosité : ils n’ont aucune humanité, ni aucune des valeurs que les hommes respectent même durant les guerres. Ils n’ont aucune telle conception. Pour eux, celui qui a de l’argent peut faire tout ce qu’il veut, sans aucune limite, et il distribuera l’argent ici et là, tant pour le Conseil des droits de l’homme, tant pour les Nations Unies, pour tel et tel pays, et son agression sera couverte et légitimée, et il n’aura aucun problème. […] 

L’emprise israélienne démoniaque sur le régime saoudien est parvenue à entrainer cette folie furieuse saoudienne dans son agression contre le Yémen, cette terreur, cette barbarie dans la perpétration des crimes les plus atroces et les plus odieux contre le peuple yéménite digne, musulman et arabe. L’emprise israélienne démoniaque sur le régime saoudien est reflétée dans ce que perpètre ce régime en fait de crimes horribles et inqualifiables qui font affront à l’humanité elle-même, des crimes qui n’ont pas d’exemple dans la région. Et on peut même dire qu’Israël est parvenu à pousser le régime saoudien à faire pire encore que ce qu’il avait fait lui-même de sorte que ce régime apparait dans la conscience mondiale comme le pire de tous, le plus grand, le plus odieux et le plus atroce criminel, le plus tyrannique dans son agression. Israël a réussi à faire cela, de même qu’il a réussi à pousser tous les takfiris dans cette direction.»

Encore une fois, Sayed Ali Khamenei et Hassan Nasrallah ont également souligné cet exploit de l’Arabie Saoudite surpassant les massacres israéliens à Gaza, un fait exceptionnel étant donnée leur hostilité foncière et indépassable envers Israël, l’ennemi ultime. Mais ils ont prédit une défaite humiliante pour l’agresseur, voire même la chute du régime saoudien. En effet, aux slogans «Mort à Israël» et «Mort à l’Amérique»,traditionnels au sein de la rue yéménite, s’est en effet surajouté «Mort à la Maison des Saoud», un développement sans précédent qui se révèle comme le préliminaire indispensable, la condition nécessaire à la fin de l’hégémonie Usraélienne au Moyen-Orient, ce à quoi appelait déjà Nasser. Et c’est effectivement un horizon qui se dessine de plus en plus clairement aux yeux de tous.
Depuis l’implication directe du Hezbollah en Syrie aux côtés de l’Armée arabe syrienne, Hassan Nasrallah a souvent expliqué que selon la vision du Hezbollah – une vision confirmée par tous les développements récents –, la lutte contre Israël et pour la libération de la Palestine et d’Al-Qods passait nécessairement par la Syrie, «par le Qalamoun, par Zabadani, par Homs, par Alep, par Dera’a, par Sweida, par Al-Hassaka. Car si la Syrie tombe, la Palestine tombe aussi et Al-Qods sera perdue», comme il a pu le rappeler dans son discours du 10 juillet. Mais concernant le Yémen, il a également ajouté ceci : 
«La voie (de la libération) d’Al-Qods passe également par le Yémen. Il est impératif que cesse l’agression saoudo-américaine contre le Yémen, dont nous renouvelons notre condamnation et notre dénonciation véhémente. Et au Hezbollah, nous nous rapprochons de Dieu le Très-Haut à toute heure, à tout instant et à toute occasion en déclarant ouvertement, haut et clair, notre condamnation de cette agression barbare, inconséquente et inhumaine contre le Yémen et le peuple du Yémen de la part de l’Arabie saoudite et ceux qui la soutiennent. L’agression perdure depuis 107 jours. Quel en est le résultat? Échec sur échec. Je ne veux pas être long, je jeûne et vous aussi, mais vous connaissez le dossier et nous en avons déjà parlé par le passé : énoncez-moi donc les objectifs de l’opération Tempête décisive, mes chers, et montrez-moi ceux que vous avez accomplis. Et énoncez-moi donc les objectifs de l’opération Restauration de l’espoir, mes bien-aimés, et montrez-moi ceux que vous avez accomplis. Vous ne trouverez que l’échec s’ajoutant à l’échec. N’est-il pas temps pour l’Arabie Saoudite – pour le régime saoudien – de réaliser que sa guerre est sans espoir? Et qu’il est incapable de briser la volonté du peuple yéménite? Et que l’espoir qu’il fonde sur ses groupes armés à l’intérieur du Yémen n’a d’autre résultat que d’augmenter les tueries? Et que la poursuite de ses frappes aériennes ne brisera pas la volonté de ce peuple résolu à obtenir son indépendance, sa liberté et sa souveraineté, ainsi qu’une vie noble et digne? Voyez donc les manifestations de Sanaa aujourd’hui, vous les avez vues et vous avez entendu ses slogans. Après 107 jours de massacres ! Cent sept jours de bombardements qui n’ont absolument rien épargné : hôpitaux, villes – même pendant le mois de Ramadan – marchés… Ils voient bien que c’est un marché, ce n’est pas une erreur, ce n’est pas parce que quelqu’un a placé une Katioucha dans ce marché, ce n’est qu’un simple marché, au cœur du Yémen, d’où une roquette ne peut pas être lancée sur le territoire saoudien, ils viennent le bombarder, et des dizaines de martyrs tombent quotidiennement. Mais ce peuple est descendu dans la rue aujourd’hui, et il a annoncé sa position, il a révélé sa détermination.

Il apparaît, mes frères et sœurs, que la guerre saoudienne n’a plus d’objectifs. Elle n’a plus d’objectifs politiques et son seul objectif restant est la vengeance contre le Yémen et le peuple du Yémen. Ce qui se passe aujourd’hui au Yémen n’est pas une opération militaire, car où donc pourrait intervenir l’armée (de terre) saoudienne? Elle doit défendre ses postes-frontière. Je n’ai pas retenu tous leurs noms, mais on entend chaque jour que les Yéménites ont pris les poste-frontière, que les Saoudiens ont déserté leurs postes, puis que les Yéménites se sont retirés car ils ont besoin de défense anti-aérienne pour garder ces positions, et que les avions saoudiens viennent les bombarder, et donc c’est leur force aérienne qui doit intervenir. Mais de toute façon, n’importe quel pays qui possède des avions peut faire une telle chose, bombarder, détruire, perpétrer des massacres… Que votre armée soit d’abord capable de garder ses postes-frontière, et après, on verra si vous êtes capables ou pas d’entrer dans le territoire du Yémen. Ce n’est ni une opération militaire, ni une opération politique. Nous sommes face à une opération de vengeance : ‘Vous, le peuple yéménite, vous avez cessé d’obéir au maitre (car les Saoudiens se considèrent comme les maitres), vous avez cessé d’être les esclaves du Seigneur saoudien, vous voulez être les maitres de vous-mêmes, mais ce n’est pas autorisé dans cette région, il n’est pas permis que le peuple yéménite soit ainsi, donc très bien, payez le prix de votre choix.’ Quel est le prix? Les bombardements, les destructions, les massacres, l’écrasement, etc. Il n’y a pas d’autre voie. Voilà ce qui se passe.

Quoi qu’il en soit, l’Arabie saoudite doit cesser, et le monde doit l’aider à descendre de l’arbre (sur lequel elle s’est juchée), à descendre de son perchoir. L’agressé qui se défend, et qui a fait le choix de défendre sa dignité, sa famille, sa souveraineté et sa liberté n’a pas d’autre choix que de continuer à se défendre, aussi longtemps que puisse durer la guerre. Quant à l’agresseur, c’est à lui de revoir ses choix. Et j’estime l’Arabie Saoudite a commencé à revoir ses choix.»

Jour après jour, le peuple yéménite révèle sa détermination à défendre son indépendance et ses principes, et son rejet de toute reddition face à l’agression américano-saoudienne, quels que soient les sacrifices. Le Yémen semble clairement engagé dans la voie de la Résistance islamique libanaise, tant du point de vue de son attachement indéfectible à la cause palestinienne que par ses victoires historiques – passées et à venir. De même, l’opinion publique arabo-musulmane s’éveille de plus en plus à la réalité du projet takfiri dans la région et à la collusion des forces de l’impérialisme, et l’écran de fumée qui recouvrait l’identité véritable de l’Arabie saoudite, parée de son titre trompeur de berceau de l’islam et de garant de ses lieux saints, s’estompe irrémédiablement. L’aura saoudienne ne peut que diminuer à l’avenir, tandis que celle de l’Axe de la Résistance ne fait que croître.
 
Le Yémen offre aujourd’hui un exemple de courage et de lucidité au monde entier, et sa lutte héroïque et tragique pour son indépendance, malgré l’abandon honteux de l’ensemble du monde – à l’exception de l’Iran et du Hezbollah –, fait honneur au monde arabe par son exemple, à l’exemple de la lutte du peuple palestinien.
 Sayed Hasan