Le 13 août 2015, Paris-plages
devient, pour 12 heures, Tel-Aviv-sur-Seine. Une idée brillante, et,
n’en doutons pas, très courageuse de la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo.
Elle vient à point nommé pour commémorer le massacre israélien à Gaza
durant l’été 2014, dans lequel plus de 2200 Palestiniens ont péri, dont
551 enfants, et alors même que les cendres du bébé Palestinien Ali
Dawabcheh, brûlé vif par des colons israéliens, sont encore fumantes. Il
est vrai que cette fois-ci, ce n’était pas du phosphore blanc, mais de
simples cocktails Molotov, et qu’ils ont causé à peine deux victimes :
il faut décidément être aveugle pour ne pas voir qu’Israël est
réellement engagé dans une saine voie de modération de sa politique
palestinienne.
Selon les voix officielles, il ne s’agit nullement de
blanchir le régime israélien ou de s’en constituer un relais de
propagande, bien au contraire : Bruno Julliard, le glorieux maire-adjoint de Paris, met ainsi en garde contre « les
amalgames entre la politique de colonisation brutale du gouvernement
israélien et la ville de Tel-Aviv qui est une ville progressiste,
symbole de paix et de tolérance. » Car il s’agirait rien moins que
d’une initiative en faveur de la paix, mettant en valeur Tel-Aviv non
pas en tant que capitale internationalement reconnue d’Israël, et donc
symbole par excellence de sa politique, mais bien, selon les mots d’Anne Hidalgo, en tant que « ville ouverte à toutes les minorités, y compris sexuelles »
(certes, les Palestiniens qui ne sont pas abattus ou incinérés sont
expropriés quotidiennement, mais les homosexuels du monde entier
viennent y célébrer la Gay Pride, n’est-il pas ?...), et même rien moins
que « la première ville d’opposition en Israël... détestée à ce titre en Israël par tous les intolérants », une affirmation aussi gratuite que grotesque. Et il serait injuste, poursuit Mme Hidalgo, de « rendre
une ville ou une population comptable de la politique de son
gouvernement. Ce serait mépriser la démocratie locale et donc la
démocratie tout court » – ne parlons pas du fait que la population israélienne ait soutenu à plus de 90%
la dernière opération contre Gaza, ou, sur le plan strictement
rationnel, du principe même des sanctions internationales contre un
pays, prétendument démocratique de surcroît. Face à de telles
falsifications, une telle impudence, un tel contorsionnisme et une telle
abjection, les mots manquent et la nausée soulève le cœur. Et du côté des élus, on ne peut trouver de semblant de refuge que dans la déclaration de Danielle Simonnet, Conseillère de Paris (Parti de Gauche), qui a dénoncé « Le cynisme de l’organisation d’une telle journée [qui] atteint les sommets de l’indécence », appelant à son annulation ou à une modification radicale du programme.
En dehors de la consternante sphère politique, un tonnerre
de voix s’est élevé en France pour condamner cet événement, et les
réseaux sociaux se sont tellement déchaînés que cette journée s’annonce sous haute tension,
et permettra certainement d’apporter aux Parisiens une image un peu
plus fidèle de la réalité de la vie en Palestine Occupée que l’
« ambiance festive » initialement prévue. Car démocratie oblige, pas question
de modifier un programme visant à satisfaire les désidératas d’une
infime minorité de la population, au détriment de l’immense majorité des
Français qui se disent bien légitimement choqués par une telle
manifestation (plus de 90% selon un sondage en ligne RMC / BFMTV).
Tout ayant été dit par ailleurs quant aux tenants et aux
aboutissants de cette ignominieuse journée, on peut pour notre part se
demander ceci : la France se renie-t-elle en faisant arbitrairement de
sa capitale un auxiliaire au service de la propagande du régime sioniste
et terroriste d’Israël, afin de redorer son blason ensanglanté et d’y
favoriser un tourisme en berne ? Viole-t-elle ses traditions en
s’inféodant au tout-puissant lobby sioniste, voire au lobby gay, deux
cliques infinitésimales qui dictent aujourd’hui leurs quarante-quatre
volontés à la « mère des armes, des arts et des lois »
d’antan ? Certes non. Deux exemples éloquents indiquent assez que le
collaborationnisme est profondément ancré au sein d’une certaine élite
« républicaine » française, et qu’il y aurait tout à fait lieu de
parler, au-delà du fameux Syndrome de Stockholm, d’un véritable « Syndrome de Paris » pour désigner ce « fin’amor françois » historique pour les Occupants étrangers.
En 1870, après la débâcle de Sedan et la chute du Second Empire, la IIIe
République fut proclamée à Paris, à la grande frayeur des possédants.
Malgré l’état de guerre et la présence des troupes prussiennes sur le
sol national, l’élite politique et économique française ne redoutait pas
tant l’ennemi de l’extérieur que celui de l’intérieur, appréhendant
dans une terreur sacrée une victoire du peuple français en armes qui
pourrait entrainer un bouleversement des structures économiques et
sociales. Ainsi l’effort du « Gouvernement de défense nationale » qui
fut constitué par la confrérie des Jules – Favre, Simon, Ferry, coiffés
par Trochu et (Adolphe) Thiers – consista-t-il principalement à saboter
toutes les velléités de résistance populaire et à rechercher un
armistice avec Bismarck au plus vite et à tout prix. La perte de
l’Alsace et de la Lorraine paraissait bien négligeable au regard de la
« défense sociale », de la préservation des privilèges et de l’ordre
établi, et après la trahison de Bazaine et le simulacre du siège de
Paris, elle put enfin être imposée à la Nation. Il fut alors temps,
enfin, de retourner les canons français contre le véritable ennemi, à
savoir les faubourgs de Paris, sous l’œil approbateur de Bismarck.
L’historien Henri Guillemin a minutieusement démontré cela dans sa
trilogie sur Les Origines de la Commune (Cette curieuse guerre de 1870, L’Héroïque défense de Paris et La Capitulation), synthétisée dans sa série de conférences éponyme.
En 1940, il en est plus ou moins allé de même. Les élites
politiques et économiques françaises ont vu dans l’Allemagne nazie un
péril infiniment moins grand que le danger socialiste (à cette époque,
cette doctrine n’avait pas encore été dévoyée et portait des valeurs
authentiquement progressistes), et, plus encore, ont considéré
qu’un « désastre » militaire pourrait permettre à la France de renouer
avec ses traditions réactionnaires et d’abroger les nombreuses hérésies
introduites par le Front Populaire. Ce fut notamment tout l’effort de
Pétain, qui œuvra en ce sens au moins à partir de 1936. Et autour de
lui, nombreux sont ceux qui firent Le choix de la défaite, pour
reprendre le mot de l’historienne Annie Lacroix-Riz. Encore une fois,
Henri Guillemin a établi ces faits dans ses ouvrages Nationalistes et nationaux (1870 – 1940) et La vérité sur l’Affaire Pétain, condensés dans sa série de conférences correspondante.
Dans un cas comme dans l’autre, Paris fut occupée par
l’ennemi, la Prusse bismarckienne en 1871, l’Allemagne nazie en 1940. Il
est difficile de parler d’autre chose que de haute trahison de la part
des élites françaises, bien que la tradition politique et
historiographique continue à porter la plupart de ses protagonistes aux
nues – à l’exception de Pétain, que certains voudraient réhabiliter :
ils ont raison dans le sens où Pétain n’a fait que perpétuer une
tradition de collaborationnisme fermement ancrée dans la République,
mais en prenant pour cible le régime républicain lui-même et les Juifs,
et non plus le prolétariat français. Il ne peut en aller autrement, tant
nos élites restent engagées sur cette ignoble voie.
Mais s’il est établi que les élites françaises, corrompues
et apatrides, n’ont eu de cesse de bafouer les intérêts du peuple et de
la Nation au moins depuis la IIIe République, qu’en est-il du peuple
français ? Comment a-t-il accueilli l’Occupant étranger en 1871 et en
1940 ?
Henri Guillemin rapporte que « Les
Prussiens sont entrés à Paris le 1er mars [1871], et Paris s’est
comporté d’une manière très noble. Il faut se souvenir de ce qui s’était
passé lors de l’entrée des Alliés – et en particulier des Cosaques –
dans Paris en 1815. On avait assisté à des scènes hideuses. Lorsqu’ils
étaient entrés dans les quartiers populaires, ça n’avait pas bougé, mais
lorsqu’ils sont arrivés dans les quartiers riches, sur les grands
Boulevards, ça avait été des ovations. Les femmes du monde montaient en
croupe sur les chevaux des Cosaques, qui étaient les ‘libérateurs’,
ces étrangers qui venaient ramener le Roi. Le 1er mars 1871, on ne voit
rien de semblable, alors que cette fois-ci, les Allemands rentrent par
les beaux quartiers de Paris – ils entrent par Neuilly, par le 16e et
par le 8e arrondissements, par les Champs-Elysées. Tout le monde a fermé
les fenêtres, toutes les boutiques sont fermées : ils entrent dans un
silence de mort. » Puis, lorsque la mystification de la
pseudo-famine – qui aurait imposé l’armistice – et la haute trahison des
élites furent révélées au peuple de Paris, ce fut une explosion
générale d’indignation qui culmina avec la Commune, dans laquelle les
Parisiens de toutes les couches sociales s’engagèrent le 26 mars 1871 en
votant massivement pour les « rouges » : ceux-ci avaient été écrasés
aux élections de 1870, mais triomphaient à présent comme les seuls
défenseurs authentiques de la Patrie.
En 1940, alors que même un petit pays comme la Hollande,
vaincu et occupé par les Nazis, pouvait s’enorgueillir de la nomination
de l’Allemand Seyss-Inquart pour le diriger (la Reine Wilhelmine
proclama que « Le rouge de la honte nous serait monté au visage si l’envahisseur avait choisi pour ce poste quelqu’un de notre nationalité. Cette ignominie du moins nous aura été épargnée. »),
la France n’eut pas ce bonheur. Elle fut le seul pays à s’engager dans
la voie de la reddition la plus déshonorante, de la collaboration et
même du collaborationnisme forcené avec l’Occupant par le biais de son
plus haut représentant légal, maréchal de surcroît, auréolé d’une
(fausse) aura de héros de la Première guerre mondiale. Il fut suivi par
la grande majorité des Français, qui l’acclamèrent jusqu’au 26 avril
1944, lors de sa dernière visite à Paris, tandis que De Gaulle resta
longtemps une figure marginale. Seule une infime minorité de Français
s’engagea dans la lutte contre les nazis. Deux millions de Français
fuirent Paris avant l’arrivée des Allemands, mais le million restant
coexista paisiblement avec l'Occupant.
Si Paris est, comme le disait Louis Veuillot, « le cancer de la France et le scandale du monde »
du point de vue des « gens de bien » ou possédants (Veuillot exprimait
alors sa haine pour la Commune), il appartient aux Parisiens de
retourner ce titre contre leurs élites indignes et vénales qui bafouent
la démocratie et « montent en croupe » sur les chars sionistes,
ovationnant les massacres de l’Occupant israélien. Allons-nous suivre la
voie de De Gaulle, de Pétain ou de la majorité d’attentistes ? Il est
du devoir de chacun de dénoncer autant que possible cette nouvelle
Occupation de Paris par une entité sinon ennemie, du moins étrangère,
colonisatrice et terroriste, dont l’infanticide est le sceau le plus
caractéristique. La Résistance d’aujourd’hui ne s’exprimera certes pas
par les armes ou la violence comme en 1940, mais sinon par la
protestation et la désobéissance civile, du moins par le retrait. Il
faut pour le moins que les Parisiens, plutôt que de répondre à l’appel d’Anna Hidalgo-Collabo
« à venir nombreux », boycottent Paris-plages ce jour-là et répondent
par « un silence de mort » à cet outrage. Et quant à ceux en qui la
flamme de la Résistance et de la dignité brûle encore, puissent-ils s’y
infiltrer et perturber autant que possible cet événement,
individuellement ou en groupes, à toute heure, de tous côtés, par toute
manifestation pacifique, en faisant entendre la voix du peuple Français
et celle du peuple Palestinien – cris, slogans (Israël Terroriste !
Hidalgo Collabo ! Gaza, ghetto de Varsovie, enfants innocents face à la
barbarie ! …), tracts et photos,
drapeaux, banderoles, poupées calcinées en mémoire d’Ali Dawabcheh, des
enfants Bakr et des 547 autres enfants ayant péri à Gaza l’été dernier,
etc. Qu’ils fassent preuve d’inventivité : le peuple français, et Paris
en particulier, en a toujours eu à revendre. Cela a encore été démontré
durant l’été 2014, lorsque des dizaines de milliers de Parisiens ont
défié l'interdiction du Préfet de Police de Paris (la seule au monde !)
pour manifester en solidarité avec Gaza.
Bien sûr, en cette pseudo-démocratie-Charlie, un peu de
courage sera également requis, car il faut s’attendre à être interpellé
sans ménagements par les forces de l’ordre – voire passé à tabac par les
miliciens de la LDJ, considérée comme terroriste et interdite en Israël
et aux Etats-Unis, mais ayant pignon sur rue en France ; quiconque veut
rendre quelques coups pour l’honneur doit s’assurer de n’avoir pas
affaire à des agents de police en civil, ce qui n’est pas évident – et à
subir jusqu’à 48 heures de garde à vue. Celles-ci peuvent même être
agrémentées d’inculpations mensongères pour outrages, violences, etc.,
qui seront néanmoins solennellement attestées par des agents
assermenteurs – c’est l’expérience qui parle : je n’ai pas fait de
prison ni n’ai comparu devant un juge, car les mensonges étaient trop
gros, mais j’aurais pu ; il faut bien savoir que nous avons affaire à
des gens sans scrupules et sans honneur, mais pas à des lumières... Mais
Gaza mérite bien ça, et tel est le prix de la dignité. J’y serai, et
j’espère que nous serons nombreux à faire entendre notre voix.
Sayed Hasan
Anne Hidalgo porte plainte pour une caricature
Mme Anne Hidalgo n’est plus Charlie ?
Visiblement, la liberté d’expression dès l’instant que le sujet concerne
ses défenseurs zélés, est un leurre. Le dessinateur Ri7 est pris en
grippe par la maire de Paris après une caricature qu’elle n’a pas aimé.
La liberté d’expression a ses limites
pour certains lobbies et, ses défenseurs ont pour Charlie Hebdo un amour
immodéré qui frise le racisme. Du moins, ce journal est foncièrement
islamophobe. Toutes ses caricatures contre l’islam sont validées.
Il est donc étonnant de voir ceux qui
prétendent défendre les caricatures se retrouver à porter plainte pour
une..caricature. Accusée de lécher les bottes savates des sionistes, Anne Hidalgo porte donc plainte pour injure.
Postscriptum
L’espace d’une journée, Paris Plage s’est transformé en camp
retranché, avec CRS, check-point et contrôle au faciès à l’entrée. A
l’extérieur, les défenseurs des droits du Peuple Palestinien se sont
fait entendre, à l’intérieur la milice d’extrême droite qu’est la Ligue
de Défense Juive assurait le service d’ordre sous le regard complaisant
de la police nationale. Et pendant une semaine, l’occupation de la
Palestine, l’oppression du Peuple Palestinien ont occupé les colonnes
des journaux ; avec ceci d’intéressant que pour défendre "Tel-Aviv sur
Seine", ses promoteurs ont dû prendre leurs distances avec le
gouvernement israélien. « Il ne faut pas faire d’amalgame entre la
politique de colonisation brutale du gouvernement israélien et la ville
de Tel-Aviv qui est une ville progressiste, symbole de paix et de
tolérance » a ainsi dû concéder Bruno Julliard, 1er adjoint de Paris.
Sans doute l’actualité Palestinienne a-t-elle joué un rôle important dans cette médiatisation. Oui, il y avait de l’ « indécence »
jusque dans le timing : l’anniversaire de la guerre de Gaza, l’abandon
des poursuites contre les militaires israéliens qui ont tué 4 enfants
palestiniens sur une plage de Gaza, l’assassinat brûlés vif d’un bébé
palestinien et de son père par des colons…
Dans ce contexte, oui, il y avait du monde entre le Pont d’Arcole
et le Pont Notre-Dame ; et même une longue queue pour passer le contrôle
policier. Mais qui étaient-ce ? Après ce débat médiatique, dans ces
conditions de surveillance policière renforcée, ce n’étaient pas des
habitués de Paris-Plage qui seraient allé manger des fallafels à
Tel-Aviv sur Seine comme ils seraient allé boire un mojito à Rio de
Janeiro sur Seine C’étaient dans leur immense majorité des défenseurs de l’État Israélien, qui ne seraient peut-être d’ailleurs pas allé à
Paris-Plage sans cette polémique.
Alors
oui la mobilisation contre Tel-Aviv sur Seine fut un succès, et notre
objectif a été atteint : L’idée que Tel-Aviv ou Ibiza ce soit la même
chose : deux capitales de la fête et de l’insouciance sur les rives de
la Méditerranée, n’est pas passée. Je ne pense pas qu’on reprendra
Mme Hidalgo à faire quelque chose avec Israël sans parler de la
Palestine ni de la paix. L’idée que rien ne peut se faire avec Israël
sans prendre en considération le « conflit israélo-palestinien »
(l’occupation de la Palestine plus exactement), sans un engagement
affirmé pour la paix s’est imposée dans le débat.
C’est une petite mais intéressante victoire dans la campagne au long cours pour le boycott de l’état colonial israélien.
par (son site)
vendredi 14 août 2015