Le président
égyptien Abdel Fattah al-Sissi a exprimé, dans une interview à la télévision
publique portugaise RTP, son soutien pour l'armée syrienne, une position en
contradiction avec ses alliés du Golfe comme l'Arabie saoudite.
"Notre
priorité est de soutenir les armées nationales, par exemple en Libye pour
renforcer le contrôle de l'armée sur le territoire et traiter les éléments
extrémistes. Même chose en Syrie et en Irak", a-t-il dit dans l'interview
diffusée mardi soir 22 novembre en répondant à la question de savoir si l'Égypte
envisagerait un rôle de maintien de la paix en Syrie sous mandat de l'ONU.
Au journaliste
qui lui demandait s'il parlait de l'armée syrienne, il a répondu
"oui".
M. Sissi, qui
a destitué son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi en 2013, a mené une
répression sanglante contre les Frères musulmans et combat les jihadistes de l'État
islamique dans le Sinaï.
Les relations entre Riyad et Le Caire tendues en raison des divergences sur la Syrie
Le gouvernement
égyptien a reçu des milliards de dollars d'aide de l'Arabie saoudite, mais les
relations entre les deux pays se sont refroidies récemment en raison de la
position du Caire sur la Syrie.
Riyad finance
des opposants en guerre contre le régime syrien, épaulé par l'Iran. Et la
Russie, comme l'Iran, soutiennent le régime de Bachar el-Assad.
Preuve de ces
divergences, l'Égypte a soutenu à l'ONU en octobre une résolution russe sur la
Syrie farouchement décriée par l'Arabie saoudite.
Par
représailles, sans doute, Riyad a suspendu à partir du mois d'octobre ses
livraisons de produits pétroliers à l'Égypte, pourtant vitales.
Sissi pour une solution politique de la crise syrienne
Dans son
interview à RTP, Sissi a maintenu la position de l'Égypte sur le conflit
syrien, affirmant que la solution devait être "politique".
"Notre
position en Égypte est de respecter la volonté du peuple syrien, et qu'une
solution politique à la crise syrienne est la meilleure façon de
procéder", a-t-il dit.
Sissi a salué l'élection de Donald Trump
M. Sissi, qui
avait salué avec enthousiasme l'élection de Donald Trump aux États-Unis, a
également déclaré qu'un plan évoqué par le président élu américain d'un fichier
répertoriant les musulmans était compréhensible.
"Oui",
a-t-il répondu lorsqu'on lui a demandé si une telle proposition l'inquiétait.
"Mais chaque pays essaie d'apporter la sécurité et la stabilité à ses
citoyens, et nous comprenons ça".
Rappel de ma
newsletter du 29 septembre 2015 - au lendemain de l'intervention russe
Voilà ce qui
avait été écrit le 29 septembre 2015 :
Les
arabes, notamment les Égyptiens, savent que Moscou a besoin d'eux - Reste à
savoir s'ils se joindront aux Russes
Pourquoi
la Russie a-t-elle besoin de l'Égypte ?
L'Égypte
est le seul pays arabe, majoritairement sunnite, capable de pacifier un autre
pays arabe sans provoquer un soulèvement généralisé des populations sunnites.
C'est
tout au moins ce que les Russes peuvent espérer.
Tout
le monde se souvient que l'intervention russe en Afghanistan a été à l'origine
de l'islamisme sunnite armé, que l'invasion de l'Irak par l'armée américaine a
jeté dans les rangs d'al-Qaïda des dizaines de milliers d'Irakiens et abouti à
la création de l'État Islamique.
Vladimir
Poutine est parfaitement conscient qu'il ne pourra pacifier la Syrie par le
seul moyen d'un corps expéditionnaire russe sur place.
Pour
pacifier la Syrie et éliminer le danger jihadiste, il devra s'appuyer sur
:
-
une armée syrienne revigorée et réarmée
-
Un fort contingent égyptien - le seul acceptable par les puissances régionales
(Iran comme Arabie saoudite ou Turquie)
L'Égypte
devrait d'ailleurs disposer dans un avenir proche de ses propres moyens de
projection (les fameux Mistral).
C'est
d'ailleurs la raison pour laquelle les Russes ont dit qu'il n'y avait pas
nécessité de désarmer les bateaux de ses équipements russes si les Égyptiens en
étaient acquéreurs.
-
Un contingent russe à base d'aviateurs et d'infanterie de marine en appui de
l'armée syrienne et d'un éventuel contingent égyptien.
-
Et sans doute - on le verra plus tard - des contingents de pays d'Asie centrale
comme des Tadjiks, des Ouzbeks ou des Kazakhs pour lutter contre leurs propres
nationaux engagés dans les organisations jihadistes.
A quand des soldats égyptiens en Syrie ?
"L'Égypte
appuie l'armée libyenne qui cherche à reprendre le contrôle de l'ensemble du
territoire libyen, à combattre les extrémistes et à sécuriser le sol national.
Il en va de même de la Syrie. L'Égypte soutient l'armée syrienne ou encore
l'armée irakienne », a souligné M. Al Sissi, lors de son interview à la TV
portugaise.
Le président
égyptien n'a pas minimisé les susceptibilités que pourrait susciter l'envoi de
troupes égyptiennes en Syrie. Mais, précise-t-il, "il faut que les groupes
terroristes soient combattus avec sérieux. Il faut que ces groupes soient
désarmés totalement. Le principe du maintien de l'intégrité territoriale de la
Syrie est important et la reconstruction de la Syrie doit être mis à l'ordre du
jour ", a ajouté Sissi.
Nul doute que
la Russie va sauter sur l'occasion de cette bonne volonté du Caire pour voir de
quelle façon, elle pourrait faciliter le déploiement en Syrie d'un contingent
égyptien pour désarmer les milices sunnites.