Depuis la
malencontreuse naissance d’Israël au Moyen-Orient, les États-Unis ont tout fait
pour éviter à Tel-Aviv une implication directe dans les conflits qu’ils
déclenchent dans la région.
Les plans de paix Israël/Palestine n’ont jamais visé à
offrir la paix aux Palestiniens, mais à dépouiller ces derniers de ce qui
faisait leur force, leurs capacités à combattre militairement Israël.
Or, ce stratagème n’a
pas fonctionné au Liban où le Hezbollah a réussi en 2006 à abattre
militairement Israël. Mais les évolutions, telles qu’elles se produisent au
Moyen-Orient, vont-elles assurer la sécurité israélienne ? Le « chaos constructif » que prônait en
son temps l’ancienne secrétaire d’État, Hillary Clinton, au Moyen-Orient et qui
consistait à monter les pays de la région les uns contre les autres, a-t-il
réellement renforcé la sécurité du régime israélien ? Certes les six ans
de guerre totale menée contre Damas, ont laissé, ainsi que le souhaitait
l’Amérique, une Syrie en ruines, mais est-ce une vraie victoire pour
Israël ?
1 . La guerre en Syrie
a aidé à l’émergence de « forces paramilitaires »,
capables dans certains cas de servir de noyau à des « armées
régulières » dans leurs pays respectifs. Cette perspective est ce qui
terrorise le plus Israël, régime qui se nourrit du militarisme, mais refuse à
tout État le droit de se défendre.
2. Mais ce n’est
pas tout : les guerres parrainées par Washington au Moyen-Orient ont
fini par transférer à de multiples « corps
paramilitaires » la technologie de fabrication de missiles de
toute gamme : de moyenne portée, non balistique, et même balistique. Il
s’agit de dizaines de milliers de combattants, spécialisés dans les combats
asymétriques, qui seraient désormais aptes à manier ces engins.
3. Pis encore,
on assiste à la naissance d’une nouvelle génération de commandants, eux
aussi spécialistes des combats asymétriques et capables de commander des
troupes dans toute nouvelle confrontation militaire à venir.
4. En facilitant le
trafic de terroristes, en faisant tout pour qu’ils arrivent armés et équipés en
Syrie pour y combattre l’armée et la population, les États-Unis ont mis sur
place un véritable mécanisme. Washington a eu recours à ce transit pour grossir
les rangs de Daech de milliers de terroristes venus d’Asie centrale, d’Asie de
l’Est, de Turquie, d’Arabie saoudite et d’Europe. D’autres pays pourront
lui emboîter le pas cette fois, pour faire face à Israël.
5 . Ce mécanisme nous renvoie d’ailleurs à l’un des plus
récents discours du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a
affirmé qu’il se ferait aider dans « toute confrontation militaire à
venir avec Israël » par une armée composée de dizaines de milliers de
« résistants » palestiniens, irakiens, syriens ou yéménites.
6. Le « chaos
contrôlé » des Américains a certes mis en branle les fondements de
plusieurs États de la région, mais il n’empêche que ces États-là sont loin
d’être des proies faciles pour le Pentagone. Les forces paramilitaires nées sur
les ruines de l’Irak, de la Syrie, de l’Afghanistan et du Yémen sont prêtes à
en découdre avec Washington, d’où d’ailleurs la réticence désormais
très palpable de ce dernier à « occuper » des régions entières des
pays agressés. Qu’elle semble loin cette année 2003 où les troupes
américaines ont débarqué en Irak en forces « libératrices » pour ne
plus le quitter !
7. 14 ans après
l’invasion de l’Irak, et alors que 6 ans sont écoulés depuis le début
de la guerre en Syrie et que l’agression yéménite entre dans sa troisième
année et que la bataille de Mossoul a mis près d’un an à aboutir, le
Moyen-Orient est témoin de l’émergence de « forces » dotées
d’une grande capacité de combat. Ce sont des forces qui ont vaincu Daech et qui
n’hésiteront pas le moment venu à affronter leurs « mentors
américains et israéliens ». Ces soldats aguerris ont même fait face aux
Américains sur les frontières syro-irakiennes il n’y a pas plus de deux mois,
quand ils avançaient en plein désert de Syrie depuis le point de passage
d’al-Tanf sur les frontières avec l’Irak. Les chasseurs américains les ont
bombardés, mais ils ont poursuivi leur avancée comme si de rien était. Qu’ils
fassent partie des Hachd al-Chaabi d’Irak, des forces populaires syriennes, du
mouvement yéménite Ansarallah ou encore du Hezbollah libanais, ces guerriers
partagent une chose : la ferme conviction que la survie des populations du
Moyen-Orient passe par la résistance à l’agression des grandes puissances.
Dans ce contexte, la
prochaine guerre qu’Israël voudra lancer contre le Hezbollah, aura toute autre
allure : Israël est bien
conscient de la supériorité de l’axe de la Résistance en termes de combats au
sol, une supériorité qui s’imposera dans tout combat à venir et ce ne sera pas
les relations privilégiées de Tel-Aviv avec Moscou qui pourra empêcher la
Résistance de riposter à toute offensive israélienne. Le Moyen-Orient de 2017
n’est plus le Moyen-Orient des années 70 ni même le Moyen-Orient de 2006.
Toute volonté de nuire aux États de la région engendrera une riposte. Il est
grand temps donc que les États-Unis revisitent leur stratégie au
Moyen-Orient, sous peine de voir cette stratégie porter
« fatalement » atteinte à Israël.