Dans notre Grand jeu
énergético-eurasien, les mauvaises nouvelles affluent pour l'empire...
A l'ouest, nous étions
restés sur l'inénarrable psychodrame de Salisbury, dont l'un des buts avait
vraisemblablement à voir avec l'or bleu :
Mais il s'agit peut-être
et surtout de gaz. Alors que Gazprom vient de battre dix jours de suite son record d'exportation
quotidienne vers l'Europe, l'affaire tombe à point nommé afin de barrer la
route au Nord Stream II. Est-ce bien un hasard si mère Theresa de Londres a,
immédiatement et pour le plus grand bonheur de Washington DC, embrayé sur le "danger du gaz russe" (lol) et la
"nécessité de trouver des sources d'approvisionnement alternatives" ?
Le message n'est pas
tant à destination domestique - même si le Royaume-Uni manque cruellement de gaz et que le GNL russe commence à arriver sur le marché britannique, les
importations d'or bleu en provenance de Russie restent minimes - qu'extérieure.
Les atlantistes de Bruxelles, Varsovie ou Vilnius pourront éventuellement se
sentir encouragés dans leur opposition au gazoduc baltique face à Berlin et aux
réalités économiques lourdes. Il sera en tout cas intéressant de voir le
prochain round de discussions des euronouilles à propos du Nord Stream II...
Notons d'ailleurs que
cela n'a pas empêché Gazprom et le Trésor russe de lever des fonds sur la place financière londonienne (750
millions d'euros pour le premier, 4 Mds de dollars pour le second). Chose
intéressante, la clause prévoit la possibilité d'un remboursement en d'autres
monnaies :
Les observateurs
attentifs auront toutefois remarqué que des clauses pour le moins inhabituelles
ont été introduites dans les prospectus d’émission de ces deux obligations,
lesquels prévoient notamment « une possibilité de paiement en devises
alternatives » explique Oleg Kouzmin, analyste de la banque
d'investissement Renaissance Capital à Moscou.
La page 217 du
prospectus de l’obligation remboursable en 2047 stipule notamment que, "si
pour des raisons indépendantes de sa volonté, la Fédération de Russie se voit
incapable de rembourser le capital ou les intérêts en dollars américains, elle
fera en euros, en livres sterling ou en francs suisses".
« Il s’agit d’une clause
totalement inhabituelle et nouvelle dans le cadre de l’émission d’obligations
souveraines », précise Oleg Kouzmin. Dans le cas de l'obligation
remboursable 2029, Moscou aurait même la possibilité d'effectuer les
remboursements en roubles.
Il semblerait que ces
dispositions soient destinées à protéger les porteurs obligataires dans le cas
où les États-Unis, le Royaume-Uni ou d'autres pays décideraient de nouvelles
sanctions à l’égard de la Russie, lesquelles l’empêcheraient d’honorer ses
paiements en devises fortes.
A noter que ces
refinancements cadraient avec le plan d'emprunts à l’étranger prévu dans le
budget russe pour l’année en cours.
"Nous savons depuis
toujours que ces émissions n'ont d'autre but que d'alimenter le jeu
géo-politique", a expliqué, toujours au Financial Times, un gestionnaire
d'actifs basé à Londres.
"Les Russes veulent
simplement montrer que l'Occident ne peut pas les empêcher d'émettre de la
dette et que les sociétés financières occidentales sont toujours disposées à
financer la Russie ».
Dédollarisation, quand
tu nous tiens. Où l'on retrouve le désormais incontournable casse-tête du
système impérial : comment perpétuer la domination du dollar qui permet à
l'empire de vivre et guerroyer au-dessus de ses moyens tout en imposant toujours plus de
sanctions qui détournent un nombre croissant d'acteurs (pays, compagnies,
institutions financières) du billet vert ?
Mais revenons à notre
gaz... Les euronouilles ont, la main sur la couture du pantalon, parlé comme
d'un seul homme pour "condamner" Moscou mais se sont bien gardés de
discuter gaz et d'évoquer la moindre sanction. Et pour cause : les stocks
européens d'or bleu sont quasiment vides ! Frau Milka a beau lancer l'idée de "réduire la dépendance au gaz
russe" en projetant un terminal GNL, elle ne revient pas sur son
acceptation du Nord Stream
II, au grand dam de la MSN. Le commerce germano-russe est au beau fixe malgré les sanctions et il serait
suicidaire pour Berlin de renoncer à devenir le hub gazier de l'Europe.
Parallèlement, les
discussions se poursuivent avec l'Italie - rappelons que Rome n'est
jamais tombée dans l'hystérie russophobe ces dernières années et a toujours
veillé à conserver de bonnes relations avec Moscou - afin de lui livrer du gaz
via le Turk Stream
qui fait son bonhomme de chemin.
Un autre pipeline qui avance est le Sila
Sibirii, plus grand projet énergétique de la planète et ami intime des lecteurs de ce blog. Le tube est construit aux
trois-quarts et devrait entrer comme prévu en service l'année prochaine. Dans
la grande bataille pour le marché chinois, Gazprom est aux premières loges et développe en plus le gigantesque gisement de
Kovyktinskoye (2.700 Mds de m3) pour inonder l'empire du
Milieu. L'Altaï
ou Sila Sibirii II
deviendra mécaniquement une nécessité et nous avons vu que les négociations
avait repris.
Ca tombe bien, la relation
entre Pékin et Moscou est au beau fixe et les meilleurs alliés du monde - Poutine et Xi
- ont été reconduits au pouvoir. Vladimirovitch a été le premier
dirigeant à féliciter Xi tandis que ce dernier a encensé le "plus
haut historique" du couple sino-russe qui pourrait "poser la base
d'un nouveau type de relations internationales". Plus prosaïquement,
l'ours et le dragon accélèrent l'intégration énergétique de l'Eurasie en
éjectent l'empire maritime.
Laissons les à leurs intimidations . Les "chiens aboient la caravane passe "
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