mercredi 1 avril 2020

Trump et Poutine vont discuter de la fin du pétrole de schiste étatsunien


Trump, qui a sanctionné le gazoduc russo-allemand Nord-Stream II tout en demandant à l’Allemagne d’acheter du gaz de schiste américain, est maintenant dans une assez mauvaise position de négociation. La Russie n’a pas besoin d’un nouvel accord de l’OPEP en ce moment. Elle dispose de nombreuses réserves financières et peut vivre avec des prix du pétrole bas pendant beaucoup plus longtemps que les Saoudiens et les autres pays producteurs de pétrole. Trump devra faire une offre stratégique à laquelle la Russie ne pourra pas résister pour obtenir une certaine coopération sur les prix du pétrole.
Il y a trois semaines, lorsque la Russie et l’Arabie Saoudite ont entamé leur guerre contre le pétrole de schiste étatsunien, nous écrivions :
Au cours de la première semaine de janvier, le pétrole brut était à 69$/bl mais il est tombé depuis à 45$/bl, la crise du coronavirus ayant détruit la demande mondiale. Les Saoudiens ont essayé de conclure un accord avec la Russie, le deuxième exportateur après l'Arabie Saoudite, pour réduire ensemble la production de pétrole afin de maintenir le prix à un niveau élevé. Mais la Russie a rejeté toute nouvelle réduction de l'OPEP. Elle veut maintenir sa production à un niveau élevé et elle utilisera cette crise pour saper davantage la production américaine de pétrole. Comme le boom de cette production  est basé sur la fraude, cette initiative pourrait bien être couronnée de succès.
La Russie n'a pas de déficit budgétaire et est bien placée pour survivre sans trop de dommages à une baisse des prix du pétrole brut. Ce n’est pas le cas de l'Arabie Saoudite.
A peine une semaine plus tard, le pétrole était déjà à 30 dollars le baril et nous avions prédit qu’il allait descendre à 20 dollars le baril.
Lundi, l’indice américain WTI des prix du pétrole a atteint ce niveau. Les prix du pétrole dans d’autres endroits ont chuté encore plus :
Le pétrole brut canadien est devenu si bon marché que le coût de son transport vers les raffineries dépasse la valeur du pétrole lui-même, une situation qui pourrait entraîner la fermeture d'un nombre encore plus important de producteurs.
Le brut Western Canadian Select d’Alberta est tombé à un niveau record de 5,06 dollars le baril vendredi, selon des données Bloomberg qui remontent jusqu’à 2008 ...
La crise du virus corona a entraîné une baisse de la demande mondiale de quelque 20%. En temps normal, la production et la consommation mondiales étaient d’environ 100 millions de barils par jour. La consommation est maintenant inférieure à 80 millions de bl/j. Mais après l’échec de l’accord OPEP+, l’Arabie saoudite et la Russie ont toutes deux commencé à pomper autant qu’elles le pouvaient pour regagner des parts de marché. Ensemble, ils augmentent leur production de quelque 3 à 4 millions de barils par jour. Tout ce pétrole doit être vendu quelque part.
Trump a annoncé qu’il profiterait des prix bon marché pour remplir la réserve stratégique de pétrole américaine. Mais cette réserve ne peut stocker qu’environ 150 millions de barils. Comme elle ne peut être remplie qu’à raison de 2 millions de barils par jour, remplir cette réserve n’aura qu’un effet insignifiant sur le marché actuel.
Au début, les producteurs ont stocké leur pétrole dans des réservoirs pour le vendre plus tard. Une fois ces réservoirs remplis, ils ont loué des superpétroliers pour stocker le pétrole en mer. Mais les supertankers vides se font de plus en plus rares et leur prix augmente :
Le PDG du plus grand armateur de pétroliers au monde, Frontline Ltd, a déclaré vendredi qu'il n'avait jamais connu une telle demande de location de navires pour le stockage à long terme. Les négociants ont réservé des navires pour stocker 100 millions de barils en mer rien que cette semaine, a-t-il estimé, mais même cela pourrait représenter moins d'une semaine d'offre excédentaire.
La seule solution sera de fermer les champs de pétrole les plus coûteux. Le Canada et le Brésil le font déjà. Les producteurs de schiste américains qui perdent de l’argent devront maintenant suivre.
C’est clairement ce que veut la Russie :
Dès que le schiste américain quittera le marché, les prix remonteront et pourraient atteindre 60 dollars le baril, a récemment déclaré Igor Sechin de Rosneft. Alors que nombreux sont ceux qui considéraient jusqu'à récemment ce scénario impossible, beaucoup de producteurs de pétrole américains pourraient effectivement fermer.
Le seuil de rentabilité des bassins de schiste américains se situe entre 39 et 48 dollars le baril, selon les données compilées par Reuters. Alors que le West Texas Intermediate (WTI) se négocie en dessous de 25 dollars, et ce depuis plus d'une semaine maintenant.
L’administration Trump a demandé aux Saoudiens de produire moins de pétrole, mais comme l’industrie touristique saoudienne est également morte, le prince héritier saoudien a besoin de chaque dollar qu’il peut gratter. Les Saoudiens continueront à pomper et à vendre leur pétrole à n’importe quel prix.
La Maison Blanche craint maintenant de perdre complètement son industrie du schiste bien-aimée et tous les emplois qui y sont liés.
La Russie le sait bien et a fait une offre intéressante il y a quelques jours :
Un nouvel accord OPEP+ pour équilibrer les marchés du pétrole serait possible si d'autres pays se joignent à nous, a déclaré Kirill Dmitriev, responsable du fonds souverain russe, ajoutant que les pays devraient également coopérer pour amortir les retombées économiques du coronavirus. ...
"Des actions communes des pays sont nécessaires pour restaurer l'économie (mondiale)... Elles (les actions conjointes) sont également possibles dans le cadre de l'accord OPEP+", a déclaré M. Dmitriev, directeur du Fonds russe d'investissement direct (FIRD), lors d'un entretien téléphonique avec Reuters. ...
"Nous sommes en contact avec l'Arabie Saoudite et un certain nombre d'autres pays. Sur la base de ces contacts, nous constatons que si le nombre de membres de l'OPEP+ augmente et que d'autres pays y adhèrent, il est possible de conclure un accord commun pour équilibrer les marchés pétroliers".
Dmitriev a refusé de dire qui devrait, ou pourrait, être le membre du nouvel accord. Le président américain Donald Trump a déclaré la semaine dernière qu'il s'impliquerait dans la guerre des prix du pétrole entre l'Arabie Saoudite et la Russie au moment opportun.
Logiquement, un des nouveaux membres de ce cartel du pétrole serait l’un des plus grands producteurs mondiaux qui, jusqu’à présent, n’était pas membre de ce club – à savoir, les États-Unis d’Amérique.
Nous apprenons maintenant que Trump est prêt à parler de ce concept, et même d’autres choses :
Comme le rapporte Ria (en russe), les sujets des prochains appels téléphoniques [entre Poutine et Trump] seront le Covid-19, le commerce ( ???) et, vous l'avez deviné, les prix du pétrole.
Trump, qui a sanctionné le gazoduc russo-allemand Nord-Stream II tout en demandant à l’Allemagne d’acheter du gaz de schiste américain, est maintenant dans une assez mauvaise position de négociation. La Russie n’a pas besoin d’un nouvel accord de l’OPEP en ce moment. Elle dispose de nombreuses réserves financières et peut vivre avec des prix du pétrole bas pendant beaucoup plus longtemps que les Saoudiens et les autres pays producteurs de pétrole. Trump devra faire une offre stratégique à laquelle la Russie ne pourra pas résister pour obtenir une certaine coopération sur les prix du pétrole.
Mais quelle offre stratégique Trump pourrait-il faire qui pousserait Poutine à accepter un nouvel accord ?
L’Ukraine ? La Russie n’est pas intéressée par cette entité indisciplinée, en faillite et infestée de fascistes.
La Syrie ? Les milliardaires sionistes cesseraient leurs dons à Trump s’il renonçait à la détruire.
S’associer à un accord de l’OPEP++ et limiter la production de pétrole américain ? Ce serait une intervention anti-américaine allant contre la loi du libre marché et le Congrès ne l’acceptera jamais. [La levée des sanctions contre la Russie ? de même le Congrès ne l’acceptera jamais, NdT]
Et quelle raison la Russie aurait-elle de croire que Trump ou son successeur tiendrait parole ? Comme les États-Unis ne tiennent jamais parole, elle n’a aucune raison de le croire.
Il y a donc de grandes chances pour que cet appel téléphonique ne débouche sur aucun accord.
Le carnage sur les marchés du pétrole va continuer et va ravager les pays producteurs qui ont besoin de chaque centime alors que le virus corona s’attaque à leur population. Pendant ce temps, le marché américain du schiste fera faillite.
Par Moon of Alabama – Le 30 mars 2020


Washington refuse l'offre de l'alliance pétrolière saoudienne
La "vache à lait" vient d'être décapitée : le 25 mars les Etats-Unis ont nommé la pro-Rumsfeldiste Victoria Coates comme leur envoyé spécial pour l'énergie, l'envoyant à Riyad prendre le contrôle d'Aramco que Ben Salmane, dans son excès de cécité stratégique a privatisé à hauteur de 1.5 pourcent en décembre dernier. L'intéressée a pour mission d'achever le processus de privation du peuple saoudien et du trône, de leur unique source de revenu qu'est le pétrole et de s'emparer totalement d'Aramco.
La guerre pétrolière que Riyad a lancée contre la Russie et qu'il est en train de perdre fera le reste. Les USA viennent en effet de décliner l'offre d'alliance que Riyad a faite à leur adresse, arguant que le sujet ne se pose même pas en ces temps de tension avec la Russie. Il y a deux jours Trump s'est entretenu avec Poutine du pétrole et de la Covid-19 et on parie que la teneur des discussions ne plairait guère à Ben Salmane. 
En effet , selon la Maison Blanche, la formation d’une alliance pétrolière avec l'Arabie saoudite est peut-être envisageable mais la nécessité ne s'en pose pas pour l'heure puisqu'il faut d'abord gérer le marché mondial du pétrole ! La proposition a été donc présentée aux conseillers à la sécurité nationale de la Maison Blanche mais a été classée sans suite. L'idée d'une alternative américano-saoudienne à l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, (OPEP) dont l'Arabie saoudite est le chef de facto, "a été lancée sans être prise au sérieux, et ce, bien que Trump ait nourri les relations avec l'Arabie saoudite avec en toile de fond des centaines de milliards de dollars d'armes américaines vendues à Riyad qui a perfidement compensé les cargaisons de brut perdues de l'Iran, 2ème producteur de l'OPEP, et ce, dans la foulée des sanctions US de 2018.
Maintenant que le prix du baril de pétrole tombe à son plus bas niveau depuis 18 ans en raison d'un excès de l'offre mondiale pour une demande réduite du fait de la pandémie de coronavirus et du différend russo-saoudien, pourquoi alors faire dans la dentelle et ménager les Saoudiens? Les analystes tendent trop à accentuer la chute des cours affectant les producteurs du schiste américain dans cette histoire. Mais depuis deux ans déjà on savait que le pétrole du schiste US, c'est fini : Déplétion trop rapide des puits, rentabilité problématique, raréfaction des meilleurs gisements, besoin permanent de financements et une offre qui ne correspond pas forcément à la demande...
L'Arabie saoudite a annoncé le lundi 30 mars son intention de porter en mai, ses exportations pétrolières au niveau record de 10,6 millions de barils par jour (mbj). Le géant Saudi Aramco a même annoncé qu'il allait «fournir à ses clients 12,3 millions de barils par jour de brut en avril», faisant état d'une augmentation de la production. Cela représente 300.000 barils par jour de plus que la capacité maximale actuelle d'Aramco. L'ennui, c'est que les puissances asiatiques, principales clients du pétrole saoudien n'en veulent pas. Pire, alors que les responsables de l'administration Trump commencent à parler avec précaution de la relation avec Riyad, les législateurs américains ont adopté une approche bien significative, montrant les types de menaces législatives auxquelles le royaume est confronté s'il ne lâche pas Aramco. Un projet de loi présenté ce mois-ci par les sénateurs républicains Dan Sullivan et Kevin Cramer envisage le retrait des troupes américaines du royaume. L'avertissement est ainsi lancé au prince héritier, Ben Salmane : « Les États-Unis doivent sérieusement reconsidérer le niveau du soutien américain - y compris le soutien militaire - pour de tels partenariats qui eux ne nous supportent pas à leur tour », a déclaré Sullivan.

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