Prenez ‘Les Échos’ du 21 novembre 2024 par exemple, rien de plus chic et de mieux informé :
« Un tir de missile hypersonique a été lancé pour la première fois sur l'Ukraine par la Russie. Celle-ci l'a revendiqué, affirmant avoir prévenu les États-Unis 30 minutes avant le lancement. Washington a dénoncé une “escalade” du conflit. »
Je ne veux pas avoir l’air de donner des leçons à des gens si bien élevés et relevant avec fierté d’une subvention publique conséquente, mais non, le « première fois », ça ne passe pas ; comme une arête de poisson fichée dans la gorge, un bobard installé devant vos yeux et trop institutionnalisé pour qu’on puisse avoir l’audace de l’ignorer... Quoi qu’il en soit, et malgré que je ne puisse heureusement prétendre être une référence pour ces gens-là, ‘dedefensa.org’ écrivait dans un article du 22 mars 2022 ce qui suit :
« Pour la première fois, – si l’on met à part des rumeurs d’emploi opérationnel expérimental d’un exemplaire en Syrie en 2021, – des missiles hypersoniques Kh-47M2 ‘Kinzhal’ (ou ‘Kinjal’, comme employé par RT-France et les commentateurs-spotters français ?) ont été utilisés en Ukraine, sans doute à partir d’avions lanceurs MiG-31K opérant à partir de la Crimée. »
...Et il y en eut bien d’autres. Mais non, pour ces gens-là, type ‘Les Échos’, c’est la première fois. Je ne vais pas m’amuser à monter un procès couru d’avance, pour des gens comme “ces gens-là”, mais il se trouve qu’il faut comprendre pourquoi on parle avec tant de tintamarre d’un missile hypersonique russe, alors que bien d’autres ont été tirés, qui ont fait, eux aussi, des dégâts considérables. On l’a vu hier, je pense que le “coup” a été bien suivi et entretenu (je ne dis pas “provoqué”) par les Russes et Poutine une fois qu’ils aient senti qu’il y avait cette fois un effet public transnational considérable.
Cette fois, le Système n’accueillit plus la nouvelle par le silence. De nombreuses indications furent données, auxquelles Poutine en rajouta solennellement quelques couches. On en parla à trouille ouverte et l’Europe découvrit qu’elle était nue, – à part quelque dingue anglo-saxon, ici et là. Je dis bien “l’Europe” car on sait bien que ‘Orechnik’ est taillé aux petits oignons pour atteindre tous les coins et recoins de l’Europe. C’est simple, pour moi l’analogie avec le SS-20 et la trouille grandiose que ce missile mythique infligea au continent dans les années 1977-1987, s’imposa aussitôt : et l’engin, et la trouille... Ainsi retrouve-t-on les chemins du réel.
Pourquoi maintenant, pourquoi ‘Orechnik’ et pas ‘Kinzhal’ ? La censure, l’autocensure, la trouille et la bêtise sont une explication insuffisante. ‘Orechnik’ a percé une cuirasse, ouvert une brèche mortelle dans le mur de pierre, percé une voie d’eau épouvantable dans la coque du ‘Titanic’. Je ne veux pas d’explications techniques et politiques, car je suis sûr qu’on en trouverait autant dans d’autres circonstances, pour la mème sorte d’incident. Reste cette chose essentielle que le Simulacre, percé en un point comme s’il était percé de toutes parts, agonise en se vidant presque comme fait une obscénité. Je suis sûr d’avoir lu, sous la plume d’un commentateur anonyme, d’un texte ou un autre, cette ébauche de poème venu d’un poète inconnu, qui nous dit tout, – drôle d’idée mais belle idée d’introduire la poésie dans le débat ukrainien comme partie intégrante de la GrandeCrise :
« Sous
leurs yeux brutalement décillés,
Leur regard embrasse un
spectacle
Qu’ils pensaient relever
de l’imposture des sens,
Et qu’ils méprisaient en
le regardant sans le voir. »
Bien entendu, rien n’est fini et l’on dirait plus volontiers que tout commence. Tout le monde est désormais à découvert. L’on sait quel est l’enjeu, quelles sont les positions des uns et des autres, quels sont les risques jusqu’aux plus terribles. Les deux mois qui nous attendent sont comme une immense tempête que les dieux nous obligent à subir au large du Cap Horn, comme une initiation.
RT.com a fait appel au “progressive pundit”, expert “progressiste” mais superbement indépendant Jimmy Dore, pour nous résumer la situation :
« “Joe
Biden et les néoconservateurs de son administration n’ont cessé d’intensifier
la guerre… Ce qu’ils essaient de faire, c’est d’aggraver la guerre de façon à
ce que Donald Trump ne puisse pas l’arrêter”, a déclaré Dore,
avertissant que le résultat final de leurs actions pourrait être une nouvelle
guerre mondiale.
» “Le seul espoir
que nous avons est que Poutine fasse preuve de retenue, qu’il soit le seul
adulte dans la salle et qu’il puisse attendre d’une manière ou d’une autre
jusqu’à ce que Donald Trump devienne président”, a-t-il déclaré. Trump sera investi fin janvier et
s’est engagé à mettre rapidement fin au conflit ukrainien dès son entrée en
fonction.
» “C’est pourquoi
l’establishment déteste Trump… pourquoi ils l’ont accusé sans cesse d’être un
traître et de travailler avec Poutine – c’était la seule carte qu’ils avaient à
jouer, car il a été élu sur la promesse de mettre fin à nos guerres
interventionnistes de changement de régime à l’étranger”, a déclaré Dore. »
Entrée dans la dissuasion
Là-dessus, je vais me faire plus technique pour donner un argument à ceux qui espèrent qu’on évitera l’inévitable. C’est la terrible ‘Orechnik’ qui nous l’apporte, et il s’agit d’une confirmation des plus intéressantes car l’on voit alors les Russes occuper une place bien plus confortable dans la partie. Il s’agit du constat immanquable selon nous que l’hypersonique offre un degré de plus dans la dissuasion, entre la guerre conventionnelle du plus haut niveau et la guerre nucléaire. Il permet en effet de faire basculer la situation militaire et politique comme on voit faire dans les différentes étapes de la dissuasion. Jusqu’ici, il s’agissait d’une hypothèse opérationnelle que nous développons depuis le 22 mars 2022, lorsqu’il fut ainsi écrit :
« Ce que montrent les frappes de ‘Kinzhal’, c’est qu’avec des ogives conventionnelles et des objectifs bien précis, le missile hypersonique devient effectivement, comme l’observait Gouré, une nouvelle arme transformatrice du champ opérationnel conventionnel. De telles frappes peuvent porter des coups gravissimes sinon fatals à des bases militaires, des réserves stratégiques souterraines importantes, – et il n’en manque pas du côté US, avec leur myriade de bases autour de la Russie, en Europe et au Moyen-Orient. On espère que les services d’évaluation militaires occidentaux tireront les conclusions nécessaires de ces frappes, qui sont parfaitement contraires aux sottises de circonstance dont on a évoqué un exemple plus haut. Le missile hypersonique doit être considéré au moins autant comme une arme conventionnelle nouvelle d’une extrême puissance (et alors sa vitesse, avec son énergie cinétique, agit comme un multiplicateur considérable de la force de destruction à l’impact), que comme une arme nucléaire (à ogives nucléaires) très rapide et indétectable mais qui n’a que faire de l’énergie cinétique puisque l’arme nucléaire se déclenche elle-même hors de tout choc d’impact. »
Après plusieurs réflexions de nouveau sur cette capacité de l’hypersonique à s’inscrire dans la dissuasion, passant ainsi à volonté du tactique au stratégique, il y eut encore ceci, du 10 décembre 2022 :
« “‘Des capacités non nucléaires
développées par des concurrents pourraient infliger des dommages de niveau
stratégique aux Etats-Unis et à leurs alliés et partenaires’, note le
Pentagone, admettant en filigrane la suprématie des armes non nucléaires russes
(hypersoniques), et bientôt chinoises...”
» Cette remarque
rejoint ce que nous avons déjà noté à plusieurs reprises à propos des armes
hypersoniques dont la flexibilité extrême (autonomie, emport de charge, vols
avec manœuvres et altitudes différentes, extrême vitesse et incapacité
d’interception, énorme puissance à l’impact du fait de l’énergie cinétique
suscitée par la vitesse) leur donne des capacités de frappe stratégique
équivalentes à celle d’une arme nucléaire de décapitation et de destruction
ciblée. Notre analyse nous conduisait à considérer l’hypersonique dans
toutes ses capacités comme installant un nouvel échelon dans l’échelle de la
dissuasion, un échelon où le conventionnel devient aussi important que des
frappes nucléaires intermédiaires, y compris stratégiques. (Voir notamment le
22 mars 2022 et le
9 octobre 2022.)
» “...Cela implique la
possibilité, dans le cas d’une escalade, de la mise en place et de l’existence
d’un échelon intermédiaire entre la guerre conventionnelle de haut niveau et la
guerre nucléaire avec son enchaînement quasiment inéluctable du tactique au
stratégique (guerre totale d’anéantissement). Dans l’état actuel des forces,
cette novation serait au seul avantage des Russes, grâce à leurs missiles
hypersoniques qui, dans certaines conditions, pourraient frapper avec précision
une cible militaire aux USA (bases, centre de commandement, etc.) sans
provoquer les dégâts collatéraux catastrophiques d’une frappe nucléaire”. »
L’arrivée tonitruante d’‘Orechnik’ constitue une affirmation de la même tonalité de sa fonction royale dans l’univers de la dissuasion. Il faut dire qu’à Mach 10, la masse qui heurte rassemble 475 fois l’énergie cinétique d’un missile ‘Tomahawk’ volant à Mach 1. Si vous voulez, c’est comme un météorite de belle taille. Alors, une fois admis que cela est bien réel, il y a de quoi réduire à néant l’énorme Simulacre gonflé comme une bulle funeste et licencieuse dans lequel nous avons vécu ces deux dernières années.
23 novembre 2024 (18H00)
Source : https://www.dedefensa.org/article/les-surprises-dorechnik
Et à l'issue il faudra trois cents ânesses pour porter les neurones carbonisés des lithopédions de Moloch, le rôdeur des pissotières du "Dalmut" !
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RépondreSupprimerhttps://www.wearethemighty.com/articles/these-air-force-rods-from-god-could-hit-with-the-force-of-a-nuclear-weapon/
Ces "armes kinetiques spatiale" coûtent forcement moins cher aujourd'hui et surtout avec les lanceurs réutilisables de Musk...
RépondreSupprimerMais bon... rien de nouveau sous le soleil malheureusement...
Le "nucléaire" et ses retombées radioactives sont beaucoup trop "asbeen"... bienvenue dans la guerre des étoiles...