Le wahhabisme,
tel que pratiqué en Arabie saoudite, ce pays qui décapite à qui mieux
mieux, est toujours et continuera d’être, la matrice idéologique de toutes les
formes de salafisme djihadiste lâchées dans la nature au Moyen-Orient, au Maghreb et
au-delà. Daesh, qui fait ses choux gras des médias sociaux, en est
l’illustration éloquente.
À la grande
consternation du monde
civilisé, Daesh a pris Palmyre, la perle de la Route de
la Soie de jadis. L’Unesco est préoccupée.
La Maison-Blanche est inquiète.
Palmyre est un carrefour stratégique au centre de la Syrie, qui
permettra au faux califat de lancer des attaques dans toutes les directions et
de harceler les positions du gouvernement syrien dans l’axe vital Damas-Alep.
Il a déjà pris le poste-frontière crucial d’al-Walid, en territoire syrien.
L'Occident complice dans la chute de Palmyre
Selon
des sources bien informées à Beyrouth et à Damas, les Américains et les pays
membres de la «Coalition internationale» avaient été informés via des canaux
spéciaux de l'intention de l'organisation terroriste d'attaquer la ville
antique, située aux portes du désert syrien. Mais malgré ces informations, la
coalition n'a rien fait et «Daech» a pu acheminer des renforts de Deir Ezzor,
d'Al-Anbar (Irak) et de Raqqa dans des colonnes motorisées, qui ont
tranquillement traversé des centaines de kilomètres à découvert dans le désert,
sans qu'elles ne soient inquiétées le moins du monde par les avions des
États-Unis et de leurs alliés, qui ont la maitrise du ciel. Cela signifie
clairement que l'Occident est complice dans la prise de Palmyre par «Daech»,
afin de mettre à exécution le plan de partage des pays de la région en entités
confessionnelles»
.
En outre, plus du tiers des 200.000 habitants de Palmyre sont déjà devenus des réfugiés. Des centaines ont été pris en otages. Les décapitations macabres se poursuivent. Est-ce que l’Empire du Chaos qui, en théorie, est en guerre contre le faux califat, fait quoi que ce soit pour sauver les ruines romaines inestimables de Palmyre de leur destruction, probablement imminente, par des barbares plongés dans le wahhabisme ? Bien sûr que non !
La même question
se pose à Ramadi, capitale de la province d’al-Anbar, à environ 110 km à
l’ouest de Bagdad, que les USA n’ont pas
perdue parce qu’ils ne l’ont jamais possédée. Pendant que ISIS/EIIL/Daesh
se targuait de sa victoire par mégaphone interposé dans toutes les principales
mosquées, le Pentagone décrivait le tout comme un champ de bataille fluide et contesté, en
insistant sur son soutien
(aux Irakiens) au
moyen de la force aérienne.
Zoom sur les
convois de Toyotas étincelantes des brutes du califat tout sourire faisant
pétarader leurs kalachnikovs sur le champ
de bataille fluide et contesté qu’ils viennent de prendre. Le
Pentagone aura beau soutenir
tout ce qu’il veut au
moyen de la force aérienne, mais son bombardement ne nuira en rien
à la fluidité. Le Pentagone est à court de cibles. ISIS/EIIL/Daesh n’est pas
une cible facile. Il mène une guérilla asymétrique et n’a aucune peine à se
redéployer à la vitesse de l’éclair.
La prise de
Ramadi par ISIS/EIIL/Daesh est le fruit d’une bonne planification stratégique.
Elle est symboliquement d’une grande portée, car il s’agit d’une défaite
majeure non seulement pour Bagdad, mais aussi pour l’Empire du Chaos, qui dirige de l’arrière,
même si Barack Obama, qui ne sait rien de rien, insiste pour dire que nous ne perdons pas
la lutte contre le califat.
Le premier
ministre irakien Haïder Al-Abadi a fini par saisir la situation. Il a rencontré
les dirigeants des principales milices chiites, qui devront faire le gros du
travail en traversant l’Euphrate pour tenter de reprendre Ramadi avant que les
brutes du califat ne progressent vers la ville sainte de Kerbala, qui abrite le
tombeau de l’imam Hussein, le petit-fils martyr du prophète Mahomet. Il s’agit
d’une course contre la montre, car ISIS/EIIL/Daesh pourrait aussi tenter de
s’emparer des bases militaires et des dépôts d’armes irakiens se trouvant à
proximité.
Quant aux
cheikhs des tribus sunnites autour de Ramadi prêtes à combattre le califat, ils
ne décolèrent pas, car ils attendent toujours les armes promises par Bagdad. Du
reste, personne ne sait pourquoi l’armée irakienne sur place n’a pas reçu
d’appui aérien. Des hélicoptères de combat auraient pu pourtant réduire en
miettes bon nombre de brutes du califat.
Al-Abadi a
fini par agir en levant son interdiction faite aux milices chiites d’aller
combattre dans la province irréductiblement sunnite d’al-Anbar. Elles l’avaient
pourtant déjà fait en obéissant à un ordre de l’ayatollah Sistani, qu’elles
vénèrent.
Au même
moment, le chef de la Brigade Badr et commandant en chef des milices chiites,
Hadi Al-Amiri, est convaincu que reprendre Ramadi sera plus facile que faire
campagne au nord de Bagdad, dans la province de Salah ad-Din, où les milices,
de pair avec l’armée irakienne, ont repris Tikrit et Baïiji des mains de ISIS/EIIL/Daesh.
Dans les deux cas, le bombardement de l’Empire du Chaos a joué un rôle minime.
Al-Abadi a
également rencontré à Bagdad le ministre iranien de la Défense, le brigadier général
Hossein Dehqan. Il a souligné que l’Iran et l’Irak combattaient l’extrémisme
terroriste (sunnite), en ajoutant que (fait crucial) nous ne soutenons pas la guerre
au Yémen, ce qui place Bagdad en situation de conflit direct avec
Riyad.
Il y a encore
mieux. Al-Abadi s’est rendu à Moscou, où il espère recevoir un grand soutien,
ainsi que des armes. Après tout, ISIS/EIIL/Daesh compte une abondance de
Tchétchènes dans ses rangs. Moscou veut réduire le califat en poussière. Mais
comme ce dernier a le vent dans les voiles, la possibilité d’un renouveau
djihadiste en Tchétchénie n’en devient que plus menaçante.
La table est
donc mise pour la bataille de Ramadi, en version remixée.
- D’un côté nous avons
des milices chiites, des tribus sunnites, le conseiller occasionnel des USA et
l’aide discrète de l’Iran et de la Russie.
- De l’autre, nous avons les brutes du
califat, dont bon nombre sont des mercenaires, soutenus généreusement par
divers wahhabites fortunés de l’Arabie saoudite et d’autres pays du Golfe.
Pour
l’Empire du Chaos, la tactique du diviser
pour mieux régner demeure le nerf de la guerre.
Qu’est-ce qui se cache derrière le manque de soutien aérien étasunien aux
défenseurs de Ramadi ?
La seule explication qui tienne du soutien aérien
très, très limité que les Etats-Unis ont donné à l’Irak, c’est qu’ils ont pour
objectif de démembrer l’État irakien et de créer une nouvelle entité étatique
sunnite sous leur coupe. Le gouvernement irakien devrait enfin s’en rendre
compte et se décider à ignorer les conseils des États-Unis et à reprendre son
indépendance.
Pourquoi y a-t-il eu si peu d'attaques aériennes
étasuniennes contre les attaquants de l’État islamique quand ils ont pris
Ramadi ?
La première excuse qu’a donnée l’armée des États-Unis
a été « une tempête de sable a mangé mon lunch ». Cette excuse a été
avancée dans un article du New York Times :
"Les combattants de l’État islamiques ont profité d’une
tempête de sable pour faire une avancée militaire d’importance dans les
premières heures de l’attaque du groupe terroriste sur la capitale irakienne
provinciale de Ramadi, la semaine dernière, dans un assaut qui a forcé les
forces de sécurité irakiennes à s’enfuir, ont déclaré lundi des officiels
étasuniens encore en poste ou non."
Le sténographe qui a écrit l’article n’a pas pris la
peine d’interroger des témoins oculaires ni même de vérifier la météo. Le mythe
de la « tempête de sable » est donc né et a tourné en boucle. Mais
comme ceux qui regardaient les vidéos et les photos du combat ne voyaient qu’un
ciel bleu lumineux, l’armée, mais pas le NYT.
L’armée étasunienne a donc besoin d’une nouvelle
excuse pour expliquer pourquoi elle ne se donne pas vraiment la peine
d’attaquer les troupes de l’État islamique.
La prétendue crainte de tuer des civils est évidemment
bidon. Les quelques frappes aériennes étasuniennes lancées contre l’État islamique
ont déjà tué des centaines de civils, même s’ils ne l’ont pas reconnu.
L’absurdité de la raison invoquée pour ne pas venir en
aide aux défenseurs de Ramadi est aussi démontrée par le fait que les États-Unis ont eu de nombreuses occasions pour les attaquer dans des zones où
il n’y avait pas ou peu de civils, comme pendant la parade de l’État islamique avec ses Toyotas flambant neuves. Pourquoi les combattants de l’État islamique
sont-ils libres de circuler à découvert et en masse sur les routes qui relient
la Syrie à l’Irak ?
Ni l’excuse de la « tempête de sable » ni
celle de la « crainte » de tuer accidentellement des civils ne
semblent être la véritable explication de la décision de ne pas soutenir les
troupes irakiennes contre les attaques de l’État islamique. On en trouve une
bien meilleure explication dans un rapport de 2012 de la Defense IntelligenceAgency, récemment déclassifié, qui dit que les EU et les monarchies du Golfe
veulent un Etat islamique recouvrant l’est de la Syrie et l’ouest de l’Irak (Voir ICI.).
L’armée étasunienne au Moyen-Orient ne soutient pas
l’Etat irakien légitime contre l’État islamique illégitime. Elle remodèle le territoire avec comme objectif final « une principauté salafiste »
d’une taille donnée sur une partie de la Syrie et de l’Irak, des régions kurdes
indépendantes et un état croupion chiite en Irak. On revient toujours au plan américano-israélien de remodelage du Moyen-Orient.
Comment lutter contre ce « monstre de Frankenstein » Américain
Depuis l’année dernière, de nombreux responsables irakiens se
plaignent du parachutage étasunien d’armes à l’EI – délibéré ou
accidentel, la question n’est pas tranchée. Par contre, des sources
militaires ont clairement indiqué que la coalition menée par les
États-Unis ignore la plupart des demandes irakiennes de couverture
aérienne de ses opérations au sol.
Si les États-Unis ne veulent pas coopérer à la lutte existentielle de
l’Irak contre l’EI, alors pourquoi s’embêter avec les Américains ?
Le Premier ministre irakien Haider al-Abadi est considéré comme un
chef d’État « faible » – un fonctionnaire relativement pro-américain qui
s’efforce de maintenir l’équilibre entre les intérêts américains et
ceux du puissant voisin de l’Irak, l’Iran.
Mais après la chute désastreuse de Ramadi et d’autres mauvaises
nouvelles venant de Syrie, Abadi n’a guère d’autre choix que de limiter
les pertes, et vite. Le premier ministre a ordonné le déploiement de
milliers de miliciens de Hashd al-SHAABI (groupes paramilitaires chiites
communément appelés Forces de mobilisation populaire) dans la province
d’Anbar pour reprendre le contrôle de Ramadi. Ceci avec l’exceptionnelle
bénédiction des tribus sunnites d’Anbar qui ont voté massivement pour
demander le soutien militaire de Hashd.
Quelques milliers de combattants sunnites ont rejoint les miliciens
de Hashd, apportant leur sceau à cette décision politique. Si
l’opération de Ramadi réussit, cet effort conjoint entre sunnites et
chiites (qui a également été couronné de succès à Tikrit) pourrait
fournir à l’Irak un modèle à multiplier autant que possible.
Les pertes récentes en Syrie et en Irak ont galvanisé les opposants
de l’EI, du Liban à l’Iran en passant par la Russie, et les armes, les
hommes et les fonds affluent. Si Ramadi est repris, ce regroupement
continuera sans doute sa progression et tentera d’arriver à la frontière
syrienne à travers le territoire de l’EI. Il y a une bonne raison à
cela : les assaillants qui ont pris Ramadi sont passés à travers la
frontière syrienne – au vu et au su des appareils de reconnaissance
américains.
Un haut fonctionnaire d’un État de la résistance a déclaré plus tôt dans l’année : « Nous
ne laisserons pas se former une grande zone démographique et
géographique (extrémiste) entre la Syrie et l’Irak. Nous allons
travailler à repousser l’EI syrien en Syrie et l’EI irakien en Irak ».
À l’heure actuelle, le renforcement des capacités militaires
irakiennes est la clé qui permettra de repousser les Takfiris vers les
zones d’opérations syriennes de l’est et du nord-ouest de la Syrie. Et
la priorité absolue sera de détruire « la zone de tampon de l’EI » entre
les deux pays.
La solution
pour gagner la lutte devrait être élaborée dans la région, en particulier
au sein des États dont la sécurité est la plus compromise ou la plus
menacée : le Liban, la Syrie, l’Irak et l’Iran.
Ces quatre états seraient obligés d’augmenter leur
coopération militaire à mesure que la guerre s’intensifierait et qu’ils
seraient les seuls à mettre des « bottes sur le terrain ».
Et c’est ce qui va se passer. Mais la couverture aérienne est une
composante nécessaire à la réussite des opérations offensives, même dans
des situations de guerre non conventionnelle. Si les États-Unis et leur
piètre coalition ne peuvent pas ou ne veulent pas fournir le
renseignement et la couverture aérienne nécessaires, sous la direction
d’un commandement militaire central irakien, alors l’Irak devra chercher
de l’aide ailleurs.
On pense alors à l’Iran et à la Russie – et c’est peut-être ce qui arrivera.
L’Irak et la Syrie doivent fusionner leurs stratégies militaires plus
efficacement – encore une fois, c’est un domaine où les Iraniens et les
Russes peuvent fournir une expertise précieuse. Les deux états se sont
heurtés à un mur dangereux ces dernières semaines, et ils sont
certainement prêts à agir vite et fort.
Le groupe de résistance libanais, le Hezbollah, s’implique aussi de
plus en plus – son secrétaire général, Hassan Nasrallah, a récemment
assuré que le Hezbollah ne se limiterait plus géographiquement, et qu’il
irait là où c’est nécessaire pour contrecarrer l’ennemi Takfiri. Les
acteurs non étatiques qui constituent le noyau djihadiste et Takfiri ne
peuvent pas être battus par des armées conventionnelles, et c’est la
raison pour laquelle les milices locales habituées à la guerre
asymétrique sont les mieux adaptées pour ces batailles.
En manière de critique contre la réponse tout à fait inexistante des
États-Unis à la débâcle de Ramadi, Qassem Suleimani, le commandant
de la Force l’élite iranienne Qods, souligne : « Aujourd’hui, il n’y a
personne qui s’oppose à [l’EI] à l’exception de la République islamique
d’Iran et des pays voisins de l’Iran ou soutenus par l’Iran ». Les
Iraniens sont devenus des figures centrales dans la lutte contre le
terrorisme, et ils sont aux premières loges – contrairement à Washington
qui se trouve à quelque 10 000 km.
Si les États-Unis voulaient vraiment combattre le terrorisme, il leur
faudrait se concentrer sur des activités non-combattantes mais
essentielles pour saper l’extrémisme : 1) sécuriser les frontières
turques et jordaniennes pour empêcher l’infiltration de djihadistes en
Syrie et en Irak, 2 ) sanctionner les pays
et les individus qui financent et militarisent les Takfiris, et qui
sont pour la plupart de fidèles alliés des États-Unis, qui font
maintenant ironiquement partie de la « coalition » pour lutter contre
l’EI, et 3) échanger des renseignements cruciaux sur les mouvements
djihadistes avec les pays engagés dans la bataille.
Si la coalition dirigée par
les États-Unis ne veut pas opérer de frappes aériennes, sous le
commandement explicite des états souverains engagés à grand risque dans
cette lutte, il est temps de chasser de l’espace aérien
irakien et syrien les avions de guerre de la coalition, et d’ouvrir le ciel syro-irakien aux vrais partenaires sérieux.
Sissi, prêt à contrer Riyad, pour "sauver Assad" ?
Selon les sources diplomatiques, au Caire, les
différends égypto-saoudiens, dans le dossier syrien, continuent à
exister, et les experts n'écartent pas une confrontation à venir entre
Sissi et son allié saoudien! Le porte parole du ministère égyptien des
A.E avait fait état, auparavant, de la tenue d'une conférence des "
opposants syriens", au Caire, conférence destinée à "examiner la
prochaine étape de la transition politique, en Syrie, ainsi que de la
fin de la crise". Les médias libanais avaient, auparavant, confirmé les
coordinations, qui se font de plus en plus étroitement entre le Caire et
Moscou, pour maintenir au pouvoir Assad, tout en faisant entrer les
opposants à ce dernier, au sein de l'appreil du pouvoir. C'est sur cette
base que Le Caire serait tenté de dialoguer avec ceux des anti-Assad,
qui font preuve de plus de flexibilité, à l'encontre du régime syrien.
"Al-Akhbar", citant les sources égyptiennes, essaie de la sorte, de
faire pression sur les différentes parties impliquées dans la crise
syrienne, pour les faire reculer de leurs positions et aboutir à une
solution réaliste. Le ministère égyptien des A.E a, ainsi, multiplié les
contacts avec Damas, et les pourparlers secrets entre Damas et le Caire
seraient consacrés à la mise sur pied de ce qui devrait être dit et
décidé, dans le cadre d'un accord syro-syrien. Pour les analystes, le
fait que l’Égypte ait décidé de parrainer le dialogue syro-syrien marque
une entorse "made in Sissi", à l'oukase de Riyad. La conférence de l’Égypte chercherait, en effet, à succéder à cette pseudo opposition
anti-Assad, qui siège, depuis 4 ans, à Ankara, et qui est un cocktail
des affidés de Riyad, d'Ankara, avec un seul et même objectif, celui de
renverser Assad. Riyad ne fait nul secret de son intention de voir, au
plus vite, Assad être écarté du pouvoir. Cette exigence, qui est
récurrente, dans tous les plans saoudiens, est en contradiction avec
celle de l’Égypte. Le Caire se montre, aussi, peu coopératif, dans le dossier
yéménite.
Hannibal GENSERIC