Les médias occidentaux basés sur une rhétorique russophobe, ont été
pris au dépourvu par la décision de Poutine, essuyant un cuisant échec
quant à leurs prévisions de propagande liées à la Syrie. Ce n’est plus
un secret que la guerre en Syrie a été déclenchée par des mercenaires
islamistes provenant de l’extérieur, armés et payés par les Etats-Unis,
l’Arabie Saoudite, le Qatar, la Turquie et d’autres pays afin de
renverser Bachar Al-Assad. Habilement, par la Conférence sur la sécurité
à Munich, Sergei Lavrov ministre des Affaires étrangères de la Russie, a
forcé la main au secrétaire d’Etat américain John Kerry, pour obtenir
un arrêt des hostilités en Syrie qui est entré en vigueur le 27 Février
2015. Les termes de cet accord pouvaient laisser prévoir, du point de
vue américain, que les Russes resteraient encore en Syrie.
Les Russes ont montré qu’ils ont appris des expériences américaines
ratées en Irak et en Afghanistan. Ils ont compris qu’ils ne peuvent pas
miser que sur une réponse militaire, et qu’ils doivent apporter en Syrie
une réponse intelligente, en utilisant habilement la crème de la
diplomatie russe, reconnue comme la plus efficace dans le monde.
Vladimir Poutine est un leader dont les actions sont imprévisibles par
les adversaires, ayant plusieurs atouts dans sa manche avec lesquels il
peut surprendre tout le monde. Comme pour un jeu d’échecs, Poutine
intensifie le niveau du jeu par le retrait partiel du contingent russe
en Syrie, exposant à nouveau intentionnellement Bachar Al-Assad comme
appât pour dévoiler les intentions de la Maison Blanche et ses vassaux.
Dans ce contexte, Washington a deux options :
La première est de rallier inconditionnellement la position de la
Russie pour une solution pacifique en Syrie, négociée avec les parties
engagées dans le conflit, à l’exception des groupes terroristes.
Ensuite, suivrait la reconstruction de la Syrie. Les négociations
s’annoncent difficiles, parce que la Maison Blanche, par la voix de la
soi-disant «opposition syrienne» continue à vouloir écarter Assad du
pouvoir, avant de commencer une transition vers un nouveau format
politique en Syrie. Un autre obstacle à une solution pacifique en Syrie
est, en plus de ce qui précède, lié aux intentions contradictoires des
réseaux occidentaux, depuis les événements en Ukraine. La Russie accuse
les Etats-Unis de saboter toute tentative pour parvenir à la paix en
Syrie, après des discussions confidentielles entre les deux partis
aboutissant à des déclarations à la presse de responsables américains
qui, aussitôt après que les accords aient été approuvés par les
présidents Américain et Russe, s’empressent de le remettre en cause. Le
retrait a été ordonné par Poutine le 15 Mars, 2016, le jour même du
début des pourparlers de paix à Genève, comme un signal que ceux qui ne
suivent pas la voie proposée par la Russie pour que les négociations
aboutissent, se discréditeront aux yeux de l’opinion publique.
La deuxième option pour Washington serait catastrophique. Il
donnerait l’ordre aux groupes islamistes subordonnés de rompre la trêve
et de commencer une offensive à grande échelle contre l’armée arabe
syrienne. Jusqu’à l’arrivée du contingent russe en Syrie, le principal
avantage des groupes islamistes consistait en un labyrinthe de centaines
de kilomètres de galeries, de tunnels, d’abris et de bunkers, creusé
pendant cinq ans par les moyens souterrains livrés par les Occidentaux.
Ce labyrinthe ne pouvait pas être détecté et détruit par l’armée arabe
syrienne à partir de la surface. Ce réseau de tunnels a permis aux
islamistes de stocker des armes lourdes, de la nourriture, du carburant,
des munitions, des capacités de production de munitions et d’aller
derrière les troupes syriennes, les surprendre et causer d’innombrables
pertes.
En déployant des bombardiers russes en Syrie, le président Poutine
a montré que Moscou est un allié fiable, contrairement à Washington qui
a trahi d’anciens partenaires, comme Hosni Moubarak, président de
l’Egypte. Durant les cinq mois d’activité en Syrie, les capteurs des
satellites militaires et des avions de reconnaissance russes ont
localisé la quasi-totalité des réseaux de tunnels et de galeries, qui
ont été neutralisés par des avions de bombardiers russes. Les
bombardements russes ont également pris pour cibles le parc des
véhicules et les principaux centres de commandement et de communication
des rebelles dits «modérés» comme le Front Al Nusrat, ce qui a eu pour
résultat une incapacité à exécuter des manœuvres, d’organiser leur
approvisionnement, de se coordonner et communiquer entre eux [1].
Sur les 40 avions de combat, les deux
premiers jours, la Russie en a retiré 20 de la Syrie. Il est possible
qu’il ne reste en Syrie que 4 bombardiers Su-25 SM et 4 bombardiers
Su-24 M2. Entre temps, 21 bombardiers Su-24 MK de l’armée arabe syrienne
avaient été re-motorisés et portés à la norme des Su-24 M2 dans l’usine
d’avion N° 514 ARZ de Rzhev. Les avions syriens Su-24 M2 sont équipés
de systèmes intégrés de navigation et de guidage d’armes de précision
(PNS-M), comme ceux des Russes qui ont opéré à la base aérienne de
Hmeymim. En Syrie, au lieu d’avoir 30 bombardiers russes en action, il y
a désormais 29 bombardiers russes et syriens [2]. Si nécessaire, la
Russie a montré qu’elle peut lancer avec succès en Syrie des missiles de
croisière (portée 1500-2500 km) à partir de ses navires de la mer
Caspienne et de ses bombardiers à grand rayon d’action décollant des
aérodromes Russie.
Les groupes islamistes tels que le Front
Al-Nusra sont si faibles qu’ils sont en dessous du niveau à partir
duquel il serait encore possible de les remettre à flot pour poser de
sérieux problèmes à l’armée arabe syrienne. Ils représentent la variante
« ayant échoué » des plans américains visant au retrait du pouvoir de
Bachar Al-Assad. Peu importe la façon dont elle investira sur eux, la
Maison Blanche ne réussira qu’à prolonger les atrocités commises par ses
mercenaires islamistes, mais n’obtiendra jamais de victoire contre
l’armée arabe syrienne. Donc, pour les rebelles américains «modérés» le
chapitre semble fermé. Le seul groupe islamiste en Syrie, qui dispose
d’une infrastructure solide et peut être approvisionné avec des armes
modernes pour se battre d’égal à égal avec l’armée arabe syrienne, est
l’État islamique. La Maison Blanche pourrait ordonner au Pentagone
d’armer secrètement l’État islamique pour modifier l’équilibre des
forces au détriment de l’armée arabe syrienne.
Seulement, les États-Unis ont créé une coalition de 34 États contre
l’État islamique, qui bombardent avec 180 avions de combat depuis
presque deux ans les objectifs de ce groupe en Irak et en Syrie. Jusqu’à
aujourd’hui, nous n’avons pas encore de vision claire des lignes
directrices suivies par les États-Unis en Syrie, ni ne savons à quelle
stratégie obéissent ses actions et pour quels résultats. Mais la Russie a
conservé en Syrie un mécanisme de contrôle du respect de la trêve basé
sur le complexe C4I, les systèmes S-400, plusieurs dizaines d’avions de
reconnaissance sans pilote et une interface d’information fournie par le
réseau de satellites de surveillance russes. Ce mécanisme est capable
de détecter les livraisons d’armes à l’Etat islamique. Il reste à voir
quelle explication donneront les néocons de Washington (en particulier
la candidate à la présidentielle Hillary Clinton) quand le monde sera
convaincu que l’Etat islamique, est en réalité leur création, et qu’ils
les utilisent cyniquement pour satisfaire leurs propres intérêts, dans
un contexte où, le 14 Mars 2016, le Congrès a voté (392 pour et 3
contre) une résolution similaire à celle du Parlement européen, selon
laquelle l’État islamique est répertorié comme auteur de génocide en
Syrie et en Irak [3].
Valentin Vasilescu
Traduction: Avic – Réseau International
[1]. Le pari de Poutine en retirant les troupes russes de Syrie (http://reseauinternational.net/le-pari-de-poutine-en-retirant-les-troupes-russes-de-la-syrie/).
[2]. Syria’s recently upgraded Su-24s (http://spioenkop.blogspot.ro/2014/01/syria-and-her-recently-upgraded-su-24s-2.html ).
[3]. La Chambre US des représentants accuse Daesh de « génocide » ( http://www.voltairenet.org/article190764.html ).
La source originale de cet article est Mondialisation.ca
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