jeudi 15 septembre 2016

Libye : Le général Haftar cherche à imposer son jeu

Les gouvernements français, allemand, italien, espagnol, britannique et américain ont condamné les attaques menées dimanche et lundi par les troupes du général Haftar contre les terminaux pétroliers de Zoueitina, Ras Lanouf, Al Sedra et Brega.

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A l’heure qu’il est, Martin Kobler, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour la Libye, doit certainement s’arracher le peu de cheveux qui lui restent sur la tête. Il y a de quoi. En reprenant en début de semaine, lors d’opérations militaires éclair, le port de Zoueitina et les terminaux pétroliers d’Al Sedra et de Ras Lanouf — jusque-là contrôlés par le gouvernement d’union nationale —, l’impénitent général Haftar, véritable homme fort de l’Est libyen, a fait tomber à l’eau tous les efforts déployés ces dernières semaines par la communauté internationale pour rapprocher les points de vue entre Tobrouk et Tripoli.
Le général Khalifa Haftar
Le général Khalifa Haftar
A terme, ce coup de force risquerait même de faire voler en éclats l’accord politique fragile arraché par l’ONU aux différents belligérants libyens le 17 décembre 2015 après d’âpres négociations. C’est très certainement le but recherché par le général Haftar, chef proclamé de l’armée liée au gouvernement non reconnu basé à Al Baïda (est). Il n’a jamais caché son aversion à collaborer avec Fajr Libya, l’actuelle force de frappe du gouvernement El Sarraj. La raison ?
Pour lui autant d’ailleurs que pour les membres de l’ancien Parlement de Tobrouk, ce conglomérat de milices n’est pas digne de confiance car constitué en majorité d’islamistes. Pas question donc, pour eux, de travailler avec eux. C’est ce qui, officiellement, empêche d’ailleurs la Chambre des représentants de donner son quitus au gouvernement de Fayez El Sarraj. Pour s’impliquer dans le processus de réconciliation libyenne, l’Est ne demande rien moins que le contrôle de l’architecture sécuritaire de la Libye.
Rapports de forces
Et plutôt que de se voir obliger de composer avec ce qu’il considère comme ses «ennemis intimes», le général Haftar et son armée se sont donc employés à ce qui apparaît comme une volonté de changer les rapports de forces sur le terrain. Leur objectif est de parvenir à négocier en position de force pour imposer son armée et ses hommes comme les gardiens de la Libye post-El Gueddafi. Mais à ce jeu dangereux, il risquerait de n’avoir rien d’autre à offrir aux Libyens que la guerre civile, car le gouvernement El Sarraj et Fajr Libya ne resteront certainement pas les bras croisés.
Pour faire basculer le rapport de force sur le terrain en sa faveur, le général Haftar a compris qu’il fallait étouffer financièrement le gouvernement El Sarraj et ses alliés de Fajr Libya. Le gouvernement d’union tire l’essentiel de ses revenus de la vente du peu de pétrole produit à l’Est. C’est ce qui explique la décision de Khalifa Haftar de s’emparer des principaux terminaux pétroliers du pays.
Après tout, l’argent est le nerf de la guerre. Ainsi qu’il fallait s’y attendre, son offensive a été suivie de condamnations unanimes des principaux partenaires occidentaux de la Libye.
«Les gouvernements de France, d’Allemagne, d’Italie, d’Espagne, du Royaume-Uni et des Etats-Unis condamnent les attaques (…) contre les terminaux pétroliers de Zoueitina, Ras Lanouf, Al Sedra et Brega en Libye», indique un communiqué commun rendu public lundi par ces pays. «Nous appelons au retrait immédiat et sans conditions de toutes les forces armées qui se trouvent dans le croissant pétrolier», ont-ils ajouté, réitérant leur soutien au gouvernement d’union nationale et réclamant «un cessez-le-feu immédiat». Le général Haftar obtempérera-t-il ? Difficile à dire, mais cela est peu probable.
Il n’est pas certain aussi que les pays occidentaux et encore moins l’Egypte le forceront dans les faits à revenir sur ses positions initiales. C’est qu’en sous-main, ils comptent beaucoup sur lui pour «nettoyer» la Libye. Ils le soutiennent même. C’est ce qu’on appelle avoir deux fers au feu. Maintenant, il revient à Martin Kobler de démêler cet incroyable écheveau.
Source : El Watan

Un rapport parlementaire britannique accable Sarkozy et Cameron



Après la visite "triomphale de Sarkozy et de Cameron en Libye (Schrank -The Independent)
Après la visite "triomphale de Sarkozy et de Cameron
en Libye (Schrank -The Independent)


Cinq ans après l'intervention militaire qui a plongé la Libye dans le chaos, les parlementaires britanniques étrillent les principaux responsables de l'opération: David Cameron et Nicolas Sarkozy.
Quelles étaient les motivations de la France et du Royaume-Uni pour intervenir militairement en Libye? En 2011, il s'agit officiellement d'éviter que Benghazi, ville rebelle du nord du pays, ne subisse le martyre que lui réserve Mouammar Kadhafi, "implacable dictateur" qui règne sur la Libye depuis 41 ans. Pour les parlementaires britanniques qui ont enquêté sur la question, ni David Cameron, ni Nicolas Sarkozy n'ont agi par souci humanitaire.

Une méconnaissance totale du pays

Le premier à subir les foudres des parlementaires britanniques est David Cameron, Premier ministre au moment de l'intervention militaire. En creux, les membres de la commission d'enquête l'accusent d'avoir agi en amateur en Libye. Le rapport parlementaire dénonce ainsi "une compréhension très limitée des événements" et des responsables "qui ne se sont pas vraiment souciés de surveiller de près ce qu'il se passait".
Plus loin dans leur rapport, les parlementaires mettent en doutent la raison même pour laquelle la France et le Royaume-Uni sont intervenus en Libye: le possible massacre de Benghazi. Ville côtière, Benghazi est en mars 2011 aux mains des rebelles qui disputent le pouvoir au Colonel. Alors que la communauté internationale imagine déjà le bain de sang que vont y perpétrer les forces "du dictateur", Paris et Londres décident d'intervenir par voie aérienne, avec l'aval de l'ONU. Mais pour les auteurs du rapport, l'histoire de Kadhafi aurait pu pousser les dirigeants franco-britanniques à réfléchir autrement:
"Plusieurs exemples dans le passé auraient pu indiquer la manière dont Kadhafi allait se comporter. (...) En 1980, Kadhafi a passé six mois à pacifier les rapports entre les tribus de la Cyrénaïque. Il y a fort à parier que sa réponse (au soulèvement de Benghazi, Ndlr) aurait été très prudente... La peur d'un massacre de civils a été largement exagérée" note le rapport.

Les motivations françaises en question

Plus troublant encore, le rapport retranscrit une conversation avec un membre des services secrets américains, expliquant avoir discuté avec l'un de ses homologues français à propos de l'engagement français en Libye. Pour les Britanniques, la France n'est pas intervenue pour sauver Benghazi, mais pour cinq autres raisons, bien différentes:
- S'emparer d'une partie de la production de pétrole libyenne
- Augmenter l'influence française en Afrique du Nord
- Améliorer la popularité de Nicolas Sarkozy en France
- Replacer l'armée française au centre de l'échiquier stratégique mondial
- Répliquer à la volonté de Kadhafi de remplacer la France comme puissance dominante en Afrique fra
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Cinq ans plus tard, note le rapport, la Libye est au bord du gouffre. Reprenant un rapport d'Human Rights Watch, les parlementaires notent que plus de deux millions de personnes nécessitent une aide humanitaire, que 400.000 Libyens ont été déplacés de force, et que les forces militaires en présence continuent de se livrer à de multiples exactions contre les populations civiles et combattantes.
Source : BFMTV