Certes, la police est intervenue – avec gaz lacrymogène, grenades à
effet de souffle, canons à eau, balles en caoutchouc –, mais en général
contre… les agressés qui osaient se rebiffer. « Des Arabes en feu aujourd’hui, les cocktails Molotov sont déjà dans le coffre […] à mon avis, un Arabe meurt aujourd’hui », annonçait un post. Miraculeusement, personne n’a été tué. Mais les blessés se comptent par centaines.
Rien là d’incidents isolés, provoqués par des voyous anonymes. Ce pogrome à l’israélienne destiné à « restaurer la dignité juive »,
chacun sait, dans la ville sainte ainsi profanée, qui l’a perpétré :
quatre groupes qui, tous, se situent dans la mouvance de partis sur
lesquels s’appuie le Premier ministre israélien pour tenter de rester au
pouvoir.
Journaliste-vedette du quotidien Haaretz, Gideon Levy a reconnu « les phalanges de Lehava, les milices de La Familia et les voyous [colons] des collines ». S’y est joint, ajoute-t-il, « une nouvelle brute plus effrayante que tous les autres » : des ultra-orthodoxes. Et de préciser : « Les émeutiers au shtreimel [chapeau de fourrure hassidique]
pourraient faire basculer Israël dans un fascisme qu’il n’a jamais
connu auparavant, grâce à leur énorme potentiel électoral. Les
ultra-orthodoxes sont les réserves du mouvement néonazi qui se développe[1]. »
Ce déferlement de violence raciste à l’état brut ne constitue pas
seulement une provocation contre la grande fête musulmane. Elle
intervient surtout au lendemain d’élections marquées par l’alliance
nouée par Benyamin Netanyahou, outre les partis ultra-orthodoxes
ashkénazes (Judaïsme unifié de la Torah) et séfarade (Shass), avec le
nouveau Parti sioniste religieux, ultranationaliste, annexionniste et
transfériste. Ce dernier regroupe Noam de Bezalel Smotrich, un groupe en
outre homophobe, et Force juive, d’Itamar Ben Gvir, héritier du parti
de Meir Kahane – le Kach fut interdit pour « racisme » par la
Knesset en 1994, après le massacre de 29 musulmans au Caveau des
Patriarches de Hébron par le kahaniste Baruch Goldstein. [a]
Pour la première fois depuis ce bannissement, ces fascistes – « judéo-nazis »,
disait Yeshayahou Leibowitz – viennent de revenir à la Knesset, grâce à
la caution du chef du Likoud et à l’accord de répartition des restes
passé avec lui. De 0,42 % des suffrages exprimés et 0 député en mars
2020, les « sionistes religieux » sont passés un an plus tard à 5,11 %
et 6 députés…
Inutile d’aller chercher plus loin l’arrogance des jeunes hooligans de Jérusalem : les déclarations récentes des deux leaders d’extrême droite résonnaient comme un appel à la « ratonnade ».
Interrogé à la radio sur la déclaration du grand rabbin de Safed, Shmuel Eliyahu, selon laquelle « la terre [d’Israël] vomit les Arabes », le député palestinien Ahmad Tibi avait répondu : c’est une « ordure raciste, répondit-il.
Je le méprise. Un rabbin n’est pas censé parler comme ça. Et si un
cheikh parle comme ça des juifs, alors il devrait aussi être condamné. » À la Knesset, le 7 avril, prenant la défense dudit rabbin, Bezalel Smotrich rétorqua : «
Un vrai musulman doit savoir que la Terre d’Israël appartient au peuple
juif, et qu’avec le temps, les Arabes comme vous qui ne le
reconnaissent pas ne resteront pas ici. Le rabbin Shmuel et sa multitude
de disciples, dont nous faisons partie, y veilleront[2].
» Il y a quelques jours, le chef du Parti sioniste religieux est allé
plus loin : les Arabes sont citoyens d’Israël, s’écria-t-il, « pour le moment du moins[3] ».
Quant à Itamar Ben Gvir, en février, il qualifiait le guide spirituel
du parti, Meir Kahane, de « saint » et de « héros » [a]. Il ne s’en
différenciait, précisait-il, que sur l’expulsion de tous les Arabes
israéliens : lui se contenterait de chasser « ceux qui ne sont pas loyaux envers l’État[4] ». Neuf jours avant le scrutin, il gonflait le torse : « La sécurité doit être rétablie » dans les régions, massivement arabes, du nord et du sud du pays où règne, selon lui, « une anarchie totale ». Et d’ajouter : « C’est le Far West là-bas. Quelqu’un doit s’en occuper, et cette personne, c’est moi[5]. » Au lendemain des élections législatives, le 24 mars, le site de la Ligue de défense juive triomphait : « Notre frère Itamar Ben Gvir élu à la Knesset. » [On croirait Marine ou J.M. Le Pen].
Voilà plus d’un demi-siècle que je travaille, comme journaliste et
comme historien, sur le conflit israélo-palestinien. Je m’y suis rendu
quasiment chaque année. J’ai tenté d’analyser les guerres d’Israël, les
massacres qui les ont jalonnées, les expulsions de Palestiniens,
l’occupation et la colonisation de leur terre, tant et tant de crimes.
Depuis près d’un siècle, l’escalade de la violence n’a pas cessé, et les
Palestiniens furent et en restent les principales victimes. Mais je
n’avais jamais vécu une ratonnade de masse de près d’une semaine à
Jérusalem. [Cela me rappelle les ratonnades des années 50-60 à Paris contre les Maghrébins].
Avec le recul, on peut dire que le regretté Zeev Sternhell a écrit une tribune – hélas – prémonitoire dans Le Monde[6],
sous le titre : « Il pousse en Israël un racisme proche du nazisme à
ses débuts ». On savait Netanyahou prêt à déclencher un affrontement
avec l’Iran pour empêcher un accord Washington-Téhéran et sauver ainsi
son « trône ». Visiblement, il rêve peut-être aussi d’une Troisième
Intifada qui lui permettrait d’imposer le gouvernement d’urgence
nationale qu’il n’arrive pas à mettre en place.
C’est pourquoi j’ai posé, sur mon blog de Mediapart, ces questions à mes confrères journalistes : « Pourquoi les grands médias pour lesquels vous travaillez – à de rares et remarquables exceptions près – ne
traitent-ils pas, ou si peu, ces événements gravissimes en termes de
droits humains comme en raison des dangers qu’ils recèlent pour tout le
Proche-Orient ? Le fait d’être israélien autorise-t-il à perpétrer des
crimes impunis et “oubliés” par les grands moyens d’information ? »
Permettez-moi, pour conclure cet article, d’ajouter ceci : « À
votre avis, si les voyous fascistes de Jérusalem avaient crié ” Mort aux
juifs ! Jérusalem est à nous ! “, vos rédactions en chef respectives
auraient-elles donné – quand elles en ont donné – les mêmes consignes ?
Et auriez-vous réagi de la même manière ? »
Il y a pire : le communiqué du Quai d’Orsay condamne les tirs de
roquettes du Hamas, mais pas les voyous fascistes de Jérusalem et leurs
parrains : il préfère renvoyer dos à dos agresseurs et agressés. De
Gaulle doit se retourner dans sa tombe…
Je le répète : moi, j’ai honte. Comme français. Comme journaliste. Et comme juif.
https://reseauinternational.net/israel-a-perdu-la-main/
RépondreSupprimerje vous couvrirai d'une HONTE éternelle
RépondreSupprimerhttps://youtu.be/XiRBuhzBGQA
Envoyé spécial. Gaza, une jeunesse estropiée -
RépondreSupprimerhttps://youtu.be/ktKrbzIX7Pc
Il est bien triste de constater que certains juifs utilisent la méthode de la nuit de cristal en Allemagne. Le dôme de fer cette défense contre les missiles ne protège plus efficacement Israël, donc les villes de cet Etat sont en danger. Une mauvaise paix vaut mieux qu'une bonne guerre.
SupprimerNe vous inquiétez pas là fin d Israel est très proche les türk vont mettre fin à l entité sioniste 2027 n est pas loi.
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