mardi 17 février 2015

Yémen : Front israélo-sunnite contre les Houthis

Monarchies du Golfe et régime égyptien se préparent pour intervenir militairement dans la crise yéménite. Selon l’agence de presse américaine Associeted Press, le régime saoudien s’est mis à armer les tribus yéménites qui sont installées dans les régions frontalières avec le royaume. En même temps, l’Égypte est en train de préparer une unité militaire d’intervention.

Pourquoi le Yémen est-il d'une importance vitale, pour Israël ?

Un responsable américain a déclaré, le 20 septembre dernier, dans une interview avec la chaîne CNN, que "Bab el-Mandeb et la mer Rouge équivalent à la sécurité de transport du pétrole et à celle des Océans, et en cas de la présence des Houthis [1] , dans ce point, il faut reconnaître que le monde est en train de changer et d'évoluer, à travers le Yémen". Cette théorie prit de l'importance, à partir du moment où le premier Premier-ministre du régime sioniste, Ben Gourion, a annoncé, quelques mois après la proclamation de l'existence d'Israël, que le détroit de Bab el-Mandeb est d'une importance vitale pour Israël, car il est obligé de passer par la mer Rouge et Bab el-Mandeb, pour ses rapports avec le monde extérieur. C'est, exactement, cela qui a amené le régime sioniste à maintenir une présence militaire, près de ce détroit, en tissant des relations militaires avec Djibouti et l’Éthiopie. Abstraction faite de la situation géographique de Bab el-Mandeb, considéré comme un point de passage, pour l'énergie et les marchandises entre les régions d'origine, pour la production des marchandises et l'énergie, d'une part, et l’Égypte, d'autre part, ce détroit est un maillon de jonction d'Israël, (le port d'Eilat),  à l'Asie de l'Est et à l'Afrique. A un moment où la tension était à son apogée entre les Arabes et Israël, le commandant de la marine israélienne de l'époque avait annoncé que l'emprise de l’Égypte, sur le Canal de Suez, remettrait au Caire l'une des clés de la mer Rouge, tandis que l'autre clé, qui est plus importante et stratégique, est le détroit de Bab el-Mandeb, une clé, qui serait entre les mains d'Israël.  Et ce fut l'une des principales raisons de la guerre israélienne de 1967 contre l’Égypte. Certains analystes estiment que si la chute de Sanaa ne signifiait pas le Yémen, mais la conquête de Bab el-Mandeb, par le mouvement Ansarallah, signifierait l'emprise totale, par ce groupe, du pouvoir. 

 L'Arabie saoudite et l’Égypte aux côtés d'Al-Qaïda au Yémen

Des responsables yéménites ont déclaré dernièrement : «  alors que les combattants Houthis avancent pour prendre davantage de terrains, l’Arabie saoudite, le fort allié des États-Unis envoyait des armes et des fonds aux hommes du gouvernorat de Ma’reb au nord du Yémen pour les soutenir contre les Houthis ».
Ma’reb qui est une région riche en hydrocarbures à la frontière avec l’Arabie est le bastion des groupes salafistes et tribaux proches des Saoudiens de longue date, ainsi que d’un grand nombre de miliciens de la branche locale d’Al-Qaïda, l’ennemi juré des Houthis.
Du côté égyptien, l’agence rapporte  que le Caire est en train de préparer une unité d’intervention, au cas où les Houthis menacent les passages maritimes  stratégiques de la Mer Rouge. Cette force provient de la Troisième armée, laquelle est chargée de mener les opérations sécuritaires et de renseignements en Mer Rouge, à partir de son siège à Suez, à l’est du Caire.
Selon les responsables égyptiens, les Égyptiens et les Saoudiens préparent ensemble (sous l'oeil bienveillant de Washington et de Tel-Aviv) une intervention militaire conjointe contre les Houthis, au motif de défendre le libre accès à Bab al-Mandab.
On sait par ailleurs que des milliers de soldats égyptiens se trouvent aux côtés de leurs homologues saoudiens à la frontière du royaume avec l’Irak, dans le cadre d’une mesure préventive contre Daesh (État Islamique).
En effet, selon le Premier ministre égyptien, Ibrahim al-Mahlab,  son pays ne permettra en aucun cas que le mouvement Houthi contrôle le détroit de Bab al-Mandab et qu’elle ripostera de la manière qu’il jugera opportune. En cela, il rejoint exactement les déclarations israéliennes sur ce sujet.

Moscou empêche la transformation du Yémen en une nouvelle Libye


Pour la deuxième fois en deux jours, le véto russe au conseil de sécurité a avorté l’application des mesures coercitives immédiates contre les Houthis du Yémen sous le Chapitre 7 de la Charte de l'ONU. Ce chapitre permet d'exercer des pressions économiques et même militaires pour faire appliquer une décision du Conseil de sécurité.
La résolution mise au point par le Royaume-Uni et la Jordanie s’est contentée d’appeler les Houthis, à participer de bonne foi aux négociations " menées sous l'égide de l'ONU, "à retirer leurs forces des institutions de l'Etat" et à "céder le contrôle des institutions gouvernementales et de sécurité".
Les miliciens ont également été appelés à "libérer le président (Abd Rabbo Mansour) Hadi, son Premier ministre et les membres du cabinet" qui sont en résidence surveillée, selon le texte.
Pour leur part, les pays du Golfe, qui qualifient de coup d’état la prise du pouvoir par les Houthis, restent déterminés à inciter la communauté internationale à une intervention militaire au Yémen, à l’instar de la Libye.
En réaction, le porte-parole des Houthis, Mohamed Abdessalam, a réitéré que "le peuple yéménite ne cèdera devant aucune menace". Et d’affirmer que son mouvement a engagé le Yémen "dans un processus d'autodétermination, à l'abri de toute tutelle étrangère" .

L’Arabie saoudite et les Émirats offrent des Rafales à l’Égypte



Le président égyptien, Abdel Fattah Sissi, a signé cinq contrats d’achat d’armement avec la France portant sur :

- 24 Rafales de Dassault Aviation ;
- 1 frégate multi-missions Fremm, fabriquée par DCNS ;
- des missiles air-air Mica et de croisière Scalp produits par MBDA.
- des missiles air-sol 2ASM de la Sagem
- des systèmes de leurre pour les Rafales produits par Lacroix.



Le montant total des contrats est de 5,2 milliards d’euros alors que l’Égypte est en faillite et est déjà contrainte de solliciter de l’aide extérieure pour parvenir à nourrir sa population. La presse française s’étonne de la rapidité avec laquelle ces contrats ont été conclus. Elle salue la qualité exceptionnelle des Rafales pour mieux cacher les vraies raisons de ce marché.


En réalité, les États-Unis ont décidé de créer un Pacte militaire régional, sous l’autorité d’Israël, incluant les régimes pro sionistes musulmans (notamment la Jordanie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis), de manière à garantir la sécurité de la colonie juive de Palestine après le déplacement des troupes états-uniennes vers l’Extrême-Orient. Mais il est hors de question que le général Sissi, qui se déclare nassérien, y fasse adhérer l’Égypte. Washington a donc confié à Riyad le soin de stabiliser le pays du Nil de manière à l’empêcher de rejoindre son allié historique, la Syrie. La commande égyptienne sera donc intégralement payée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis et sa livraison s’étalera sur au moins deux ans. Le choix des Rafales s’explique par le fait que l’Égypte ne pouvait accepter de matériel états-unien et que la France est le seul membre de l’Otan à avoir conservé son industrie de défense aéronautique à haut niveau, tous les autres l’ayant abandonnée dans l’espoir de participer au F-35 états-unien, dont le développement est en train de battre des records de retards et de coûts.


Depuis 30 ans, les États-Unis ont dissuadés tous les acheteurs potentiels du Rafale de l’acquérir. La négociation d’un important contrat avec l’Inde a été interrompue après que la France a refusé de livrer à la Russie des Mistrals qu’elle avait commandés et payés. Les Russes ont convaincu les Indiens de renoncer aux Rafales pour des avions russes.


Jusqu’ici, la France considérait le général Sissi comme un dictateur qui réprime les Frères musulmans qu’elle soutient en Égypte,  en Tunisie, en Libye, en Syrie, en Turquie et ailleurs. Cependant, l’Arabie saoudite et les Émirats, qui ont aussi été menacés par des tentatives de coups d’État des Frères musulmans, se sont rapprochés de l’Égypte précisément pour les combattre.



[1]   Les Houthis, du nom de ses dirigeants, Hussein Badreddin al-Houthi et ses frères (également connus sous le nom de Jeunes Croyants), sont une organisation insurrectionnelle chiite et un mouvement sociopolitique de l'école théologique Zaydite du nord-ouest du Yémen. La branche armée du mouvement porte le nom de Ansar Allah (« les partisans d'Allah »).
Hannibal GENSERIC