Dans un
nouvel article
paru dans le New York Times, les auteurs Ronen Bergman et Mark Mazzetti
ont exposé un effort de longue date du gouvernement Netanyahou en Israël et de
ses alliés à Washington pour encourager une guerre contre l’Iran. L’article est
un rappel du fait qu’une telle guerre reste une possibilité réelle et que cela
devrait susciter un débat plus poussé sur le caractère désastreux d’un tel
conflit.
La politique
affichée de l’administration Trump à l’égard de l’Iran est celle d’une «
pression maximale », centrée sur les efforts visant à étrangler l’économie
iranienne par des sanctions économiques agressives. Mais les responsables de
l’administration, en particulier le secrétaire d’État Mike Pompeo et le
conseiller à la sécurité nationale John Bolton, ont
menacé d’engager une action militaire en réponse à toute attaque qui aurait
des répercussions sur les forces américaines, qu’elle soit menée par l’Iran ou
l’un de ses mandataires présumés dans la région – une menace fondée sur le
postulat erroné qui veut que l’Iran contrôle fermement toutes les actions
entreprises par des forces qu’il a aidées d’une manière ou d’une autre, des
milices chiites en Irak aux rebelles Houthi au Yémen. La position de Pompeo
fournit un large mandat qui pourrait facilement conduire les États-Unis à
entrer en guerre contre l’Iran, même en cas d’incident mineur.
Comme c’est
souvent le cas, le président Trump a été plus erratique dans ses déclarations
sur le sujet, qu’il s’agisse de menacer de recourir à la force ou d’appeler à
des négociations avec les dirigeants iraniens. La perception générale en est
que Trump est moins enthousiaste à l’idée d’attaquer l’Iran, en partie parce
qu’il ne veut pas être tenu responsable d’avoir déclenché une nouvelle guerre
au Moyen-Orient à l’approche des élections de 2020. Après tout, c’est la même
personne qui a fait campagne en affirmant que la guerre en Irak est un désastre et que les milliards de
dollars que les États-Unis ont dépensés pour leurs guerres après le 11
septembre auraient pu être mieux utilisés pour reconstruire les États-Unis.
Mais Trump
pourrait facilement passer en mode attaque, soit en réponse à l’insistance de
ses conseillers plus faucons que lui ou à une réaction excessive aux
développements dans la région.
La campagne
de pression maximale est déjà assez nocive – elle ne changera probablement pas
le comportement iranien, et elle fait monter des tensions qui pourraient
facilement devenir incontrôlables. Comme l’a
fait remarquer Suzanne Maloney, spécialiste de l’Iran à la Brookings
Institution, « les tactiques belliqueuses et va-t-en-guerre de
l’administration pour traiter avec l’Iran vont fondamentalement à l’encontre de
l’insistance du président à sortir les États-Unis de conflits militaires
coûteux et prolongés ».
Une
meilleure solution serait de revenir à l’accord nucléaire iranien et de
rechercher une détente qui diminuerait la probabilité de la poursuite du
conflit dans la région plutôt que de l’amplifier. Mais il se peut que cette
option doive attendre une nouvelle administration. En attendant, comme l’a
affirmé Ali Vaez de l’International Crisis Group, une guerre avec l’Iran « ferait
passer les conflits afghan et irakien pour une promenade de santé ».
Les conséquences stratégiques plus larges
d’un conflit avec l’Iran ont été bien détaillées ailleurs. Mais il convient de
noter qu’une nouvelle guerre aurait aussi d’immenses conséquences économiques
et humaines. Les administrations sous-estiment régulièrement le prix des
conflits, comme l’a démontré en détail le projet Costs of War de l’Université
Brown [Voir USA.
Le coût de la guerre planétaire "contre le terrorisme" ]. Leurs études sur les coûts des
guerres américaines de l’après-11 septembre ont révélé que les fonds dépensés
ou engagés pour ces conflits s’élèvent à 5,9 billions (mille milliards) de dollars, et ce
chiffre ne cesse de croître. Pourtant, avant l’invasion de l’Irak par les
États-Unis en 2003, les responsables de l’administration Bush prétendaient que
cela coûterait entre 50 et 100 milliards de dollars, et non les billions de
dollars qu’il a générés en coûts directs et indirects jusqu’ici. Nous pouvons
nous attendre à ce que des arguments tout aussi erronés soient présentés si
l’administration Trump décide de prendre des mesures militaires contre l’Iran.
Les analystes Neta Crawford, Linda Bilmes et Rosella Zeilinsks ont
laissé entendre qu’un conflit à grande échelle avec l’Iran pourrait coûter
des billions de dollars, un engagement énorme de fonds publics à un moment où
les déficits augmentent, où l’économie est en danger et où les investissements
publics nécessaires dans les infrastructures, les emplois verts, les soins de
santé et l’éducation sont en retard.
Les
partisans de la guerre avec l’Iran soutiendront sans aucun doute qu’une action
militaire contre l’Iran pourrait entraîner des frappes limitées plutôt qu’un
conflit coûteux et à grande échelle. Mais les risques d’escalade par des
bombardements ou d’autres attaques contre l’Iran seraient élevés. La guerre est
une entreprise incertaine, et l’idée qu’elle peut être facilement contenue une
fois qu’un conflit commence est au mieux naïve, et au pire insensée. Il existe
de bien meilleures façons de promouvoir la sécurité au Moyen-Orient qu’en
risquant un nouveau conflit – il est temps que l’administration Trump s’en
rende compte, sous la pression du Congrès et du public.
Source : Forbes, William Hartung, 05-09-2019
Traduit par
les lecteurs du site www.les-crises.fr.
Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
Source : Forbes, William Hartung, 05-09-2019
Je suis
analyste pour la défense et je m’occupe de l’économie budgétaire du Pentagone.
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Hannibal GENSÉRIC
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