Une plainte pour crimes de guerre a été déposée contre le président
Donald Trump, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et le
conseiller de Trump, Jared Kushner, auprès de la Cour pénale
internationale (CPI). Il appartient maintenant au bureau du procureur de
la CPI de décider si la plainte doit être instruite. Si le procureur
lance une enquête préliminaire et trouve des raisons de croire que des
crimes de guerre ont été commis, la Cour pourrait alors autoriser une
enquête approfondie.
La plainte, déposée le 30 juin par William Schabas, professeur de
droit à l’université de Middlesex, au nom de quatre Palestiniens qui
vivent en Cisjordanie, déclare « qu’il existe des preuves crédibles »
que Trump, Netanyahu et Kushner « sont complices d’actes qui peuvent
constituer des crimes de guerre liés au transfert de populations en
territoire occupé et à l’annexion du territoire souverain de l’État de
Palestine ». En vertu de l’article 15 du Statut de Rome de la CPI, tout
individu, groupe ou organisation peut déposer une plainte auprès du
Bureau du Procureur.
La plainte de Schabas fait suite à des mesures inhabituelles prises
le mois dernier par l’administration Trump, qui a déclaré une « urgence
nationale » en juin afin de protéger les fonctionnaires américains et
israéliens de leur obligation de rendre des comptes auprès de la CPI
concernant les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité.
Trump a publié un décret le 11 juin déclarant l’urgence nationale
car, dit-il, toute tentative de la CPI d’enquêter, d’arrêter, de détenir
ou de poursuivre tout personnel des États-Unis ou de ses alliés
(Israël) alors qu’il n’y a pas eu consentement à la juridiction de la
Cour « constitue une menace inhabituelle et extraordinaire pour la
sécurité nationale et la politique étrangère des États-Unis ».
L’ordonnance autorise le gel des avoirs et l’interdiction de voyager
pour les familles des fonctionnaires de la CPI et d’autres personnes qui
ont participé ou apporté leur aide aux enquêtes, arrestations,
détentions ou poursuites. Il n’est cependant pas nécessaire qu’une
personne soit impliquée dans une action de la CPI pour être soumise aux
nouvelles sanctions de Trump. Son ordonnance couvre tout employé ou
agent de la CPI dont le secrétaire d’État estime qu’il « porterait
préjudice aux intérêts des États-Unis ».
L’approbation de Trump à l’annexion est un crime de guerre présumé
La plainte de Schabas affirme que l’approbation par l’administration
Trump de l’annexion par Israël constitue un crime de guerre.
Le plan de Trump, « De la paix à la prospérité » approuve l’annexion
illégale par Israël de 30 % de la Cisjordanie qui, selon Schabas, « est
étroitement associée au crime de guerre consistant à altérer la
population d’un territoire occupé ». L’annexion, qui devait avoir lieu
le 1er juillet, a été retardée, probablement pour des raisons
politiques.
L’article 49 de la quatrième Convention de Genève prévoit qu’une
« puissance occupante ne pourra pas déporter ou transférer une partie de
sa propre population dans les territoires qu’elle occupe ».
Le Statut
de Rome stipule que le transfert direct ou indirect par une puissance
occupante « d’une partie de sa propre population civile dans le
territoire qu’elle occupe » est un crime de guerre.
Soixante-sept experts indépendants spéciaux nommés par le Conseil des
Droits Humains des Nations-Unies ont fait une déclaration stipulant que
l’annexion par Israël du territoire occupé « constitue une violation
grave de la Charte des Nations-Unies et des Conventions de Genève, et
s’avère contraire à la règle fondamentale maintes fois affirmée par le
Conseil de sécurité et l’Assemblée générale des Nations-Unies selon
laquelle la conquête de territoire par la guerre ou la force est
inadmissible ».
Trump affirme que cela ne relève pas de la compétence de la CPI
Dans son ordonnance du 11 juin, Trump déclare que « l’affirmation
illégitime de la compétence » de la CPI sur les ressortissants des
États-Unis et de ses alliés « menacerait de porter atteinte à la
souveraineté des États-Unis ». Trump note que les États-Unis ne sont pas
liés au Statut de Rome de la CPI et n’ont jamais consenti à la
juridiction de la Cour.
Bien que l’ancien président Bill Clinton ait signé le Statut de Rome
lorsqu’il a quitté ses fonctions, les États-Unis ne l’ont jamais
ratifié. Dans un geste sans précédent, le président George W. Bush a
retiré la signature des États-Unis du statut en 2002.
Même si les États-Unis ne sont pas liés au Statut de Rome, les
ressortissants américains peuvent toujours être tenus pour responsables
devant la CPI pour des crimes qui se sont produits sur le territoire
d’un pays qui en est signataire. Ainsi, bien que les États-Unis n’aient
pas ratifié le Statut de Rome, la CPI est néanmoins compétente pour les
crimes commis par des ressortissants américains sur le territoire de
l’Afghanistan, qui est signataire du Statut.
Le 5 mars, la Chambre d’appel de la CPI a accepté la recommandation
de la procureure Fatou Bensouda de procéder à une enquête sur les crimes
de guerre qui auraient été commis par l’armée américaine et les
responsables de la CIA en Afghanistan et sur les « sites noirs » de la
CIA.
Moins de trois mois auparavant, le 20 décembre 2019, Bensouda avait
trouvé une base raisonnable pour estimer que les forces israéliennes et
les Palestiniens avaient commis des crimes de guerre dans les
territoires palestiniens occupés. Elle a recommandé à la Chambre
préliminaire d’ouvrir une enquête si le tribunal décidait qu’il avait
compétence territoriale sur Gaza et la Cisjordanie, y compris
Jérusalem-Est.
Le jour même où la Chambre d’appel a annoncé son accord pour une
enquête sur les crimes de guerre américains en Afghanistan, le
secrétaire d’État Mike Pompeo a menacé de « prendre toutes les mesures
nécessaires pour protéger nos citoyens contre ce soi-disant tribunal
hors-la-loi ».
Avec sa nouvelle déclaration d’urgence nationale, Trump vise à
garantir qu’aucun Américain ou Israélien ne soit traduit devant la Cour
internationale pour répondre de crimes de guerre et de crimes contre
l’humanité. Il a cité la loi sur la protection des membres du service
américain, promulguée après que Bush ait retiré la signature des
États-Unis du Statut de Rome. Cette loi intègre la « clause d’invasion
de La Haye », qui autorise l’armée américaine à utiliser la force armée
pour extraire tout ressortissant américain ou allié détenu par la CPI.
Cette disposition n’a jamais été utilisée, mais ses ramifications sont
terrifiantes.
La pression américaine n’a pas fonctionné la première fois
En novembre 2017, lors de son examen préliminaire, Bensouda a
découvert des motifs raisonnables de croire que, conformément à la
politique américaine, des membres de l’armée américaine et de la CIA
avaient commis des crimes de guerre. Il s’agissait notamment de tortures
et de traitements cruels, ainsi que d’atteintes à la dignité de la
personne et de violences sexuelles à l’encontre de personnes détenues
sur le territoire d’états liés au Statut de Rome, dont l’Afghanistan, la
Roumanie, la Pologne et la Lituanie.
Les crimes présumés de la CIA et de l’armée américaine « n’étaient
pas les abus de quelques individus isolés », mais plutôt « une partie
des techniques d’interrogation approuvées dans une tentative d’obtenir
des détenus des renseignements exploitables », a indiqué Bensouda. Elle a
conclu qu’il y avait « des raisons de croire » que les crimes étaient
« commis dans le cadre d’une ou plusieurs politiques … qui
soutiendraient les objectifs des États-Unis dans le conflit en
Afghanistan ».
Bensouda a demandé que la Chambre préliminaire de la CPI approuve une
enquête sur ces allégations. L’administration Trump a menacé de refuser
des visas aux juges et aux procureurs de la CPI et a averti qu’elle
prendrait des sanctions si le tribunal ouvrait une enquête.
Le 5 avril 2019, le gouvernement américain a révoqué le visa de Madame Bensouda pour se rendre aux États-Unis.
Une semaine plus tard, le 12 avril 2019, la chambre préliminaire a
apparemment cédé aux pressions américaines et a refusé d’autoriser
l’enquête de Bensouda. Bien que convenant avec celle-ci qu’il y avait
des motifs raisonnables de penser que des membres de la CIA avaient
commis des crimes de guerre, la Chambre préliminaire a rejeté sa demande
d’enquête « dans l’intérêt de la justice ». Cette chambre a cité la
possibilité « extrêmement limitée » d’un processus judiciaire efficace
en raison du refus probable des autorités américaines et afghanes de
coopérer.
Mais dans une décision historique, le 5 mars 2020, la Chambre d’appel
a annulé la décision de la Chambre préliminaire et a autorisé Bensouda à
ouvrir une enquête.
Trump a déclaré son « urgence nationale » trois mois plus tard.
Bensouda a demandé l’ouverture d’une enquête
Le décret de Trump du 11 juin a également été conçu pour protéger les
fonctionnaires israéliens quant à leurs responsabilités devant la CPI
pour leurs crimes de guerre.
Le 20 décembre 2019, Bensouda a déclaré à la Chambre préliminaire
qu’il y avait une justification raisonnable pour ouvrir une enquête sur
« la situation en Palestine ». Elle avait de bonnes raisons de croire
que les forces israéliennes avaient commis des crimes de guerre, à
savoir homicide volontaire, blessures corporelles graves causées
intentionnellement ou atteintes à la santé, usage disproportionné de la
force, transfert de civils israéliens dans le territoire palestinien de
Cisjordanie et meurtre de plus de 200 Palestiniens lors de
manifestations à la bordure Israël-Gaza. Bensouda a également trouvé une
preuve raisonnable pour enquêter sur les crimes de guerre présumés
causés par les Palestiniens, y compris les attaques intentionnelles
contre des civils, l’utilisation de civils comme boucliers humains et le
recours à la torture et à l’assassinat délibéré.
Bensouda a écrit qu’elle était persuadée que « (1) des crimes de
guerre ont été ou sont actuellement commis en Cisjordanie, y compris à
Jérusalem-Est et dans la bande de Gaza … (2) les cas potentiels
découlant de la situation seraient recevables ; et (3) il n’y a pas de
raisons majeures de penser qu’une enquête ne servirait pas les intérêts
de la justice ».
Mais bien que Bensouda ait statué que la CPI a une compétence
territoriale sur la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et Gaza – elle
a demandé à la Chambre préliminaire de se prononcer quant à « l’étendue
de la compétence territoriale » de la CPI.
Israël n’est pas partie prenante en ce qui concerne le Statut de
Rome. Mais la CPI pourrait se déclarer compétente à l’égard des
Israéliens si leurs crimes étaient commis sur le territoire d’un état en
faisant partie. Israël soutient que la Palestine n’est pas un état et
qu’elle n’est donc pas sous la juridiction de la CPI.
En 2012, l’Assemblée générale des Nations-Unies a reconnu la
Palestine comme un état observateur non membre des Nations-Unies. La
Palestine a adhéré au Statut de Rome, devenant ainsi membre des états
parties de la Cour pénale internationale.
L’Association internationale des juristes démocrates (AIJD) a déposé
un mémoire d’amicus curiae le 16 mars 2020, exhortant la CPI à confirmer
sa compétence sur la Palestine [En droit, un amicus curiae est une
personnalité ou un organisme, non directement lié aux protagonistes
d’une affaire judiciaire, qui propose au tribunal de lui présenter des
informations ou des opinions ; NdT]. Richard Harvey, membre du bureau de
l’IADL, a écrit :
« Le pouvoir normatif et l’autorité juridique de la CPI seront
renforcés si sa compétence sur l’État de Palestine, y compris la
Cisjordanie, Jérusalem-Est et Gaza est confirmée, et si une enquête est
ouverte en ce qui concerne la situation palestinienne. Ainsi, l’égalité
des droits de tous les peuples à la justice pour les crimes
internationaux sera reconnue, affirmation ô combien nécessaire ».
« Soutien indéfectible » à la CPI
Soixante-sept pays membres de la CPI représentant des régions du
monde entier ont publié une déclaration commune exprimant leur « soutien
indéfectible à la Cour en tant qu’institution judiciaire indépendante
et impartiale ». Ils se sont engagés à ne pas être « découragés par des
mesures ou des menaces à l’encontre de la Cour, de ses fonctionnaires et
de ceux qui coopèrent avec elle ».
De même, 10 membres du Conseil de sécurité des Nations-Unies, qui en
compte 15, ont publié une déclaration pour « reconfirmer notre soutien
indéfectible à la Cour en tant qu’institution judiciaire indépendante et
impartiale » et « préserver son intégrité sans se laisser décourager
par des menaces contre la Cour, ses fonctionnaires et ceux qui coopèrent
avec elle ». Le groupe, qui comprenait deux membres permanents du
Conseil – la France et le Royaume-Uni – a renouvelé sa « détermination à
s’opposer à l’impunité, ce qui est au cœur même du Statut de Rome ».
L’action remarquable de la Chambre d’appel, qui a défié les menaces
et le chantage des États-Unis et approuvé une enquête sur les crimes de
guerre commis par des fonctionnaires américains, indique que la CPI
s’efforce de remplir son mandat, qui est de traduire en justice les
auteurs des crimes les plus graves.
Par Marjorie Cohn
Marjorie Cohn est professeure émérite à la Thomas Jefferson School of
Law, ancienne présidente de la National Lawyers Guild, secrétaire
générale adjointe de l’International Association of Democratic Lawyers
et membre du conseil consultatif de Veterans for Peace. Son dernier
livre s’intitule « Drones and Targeted Killing : Legal, Moral, and
Geopolitical Issues » [ Drones et assassinats ciblés : une
question légale, morale et géopolitique ; NdT].
Source : Consortium News, Marjorie Cohn
Via Les-Crises
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Hannibal GENSÉRIC
Ce n'est pas Trump qui a engagé les guerres de Clinton, Bush, Obama. Comme Président des Etat-Unis il protège son pays et ses citoyens. Mettre l'Amérique sur le banc des accusés n'est pas simple vu que cette nation a un Droit International. La politique ce n'est pas souvent un monde de braves gens!
RépondreSupprimerje demande a la divinite de punir trump, nitaniahou et son gendre koushner de prison a vie, mais aussi de poursuivre macron merkel, trudeau, boris erdogan.
RépondreSupprimerPlus grave : retour du confinement dès septembre.
RépondreSupprimerhttps://nicolasbonnal.wordpress.com/2020/07/24/cest-fait-daniel-estulin-auteur-du-best-seller-sur-les-bilderbergs-et-du-livre-sur-le-tavistock-institute-annonce-le-confinement-pour-debut-septembre-il-sera-definitif-celui-la-dautant-plus-q/
arriverons-nous un jour de mettre hors d'état de nuire tous ces bandits ? il faut y croire.
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