L’année 2011 a souligné la consécration des réseaux sociaux
et du rôle du Web comme outil de mobilisation et de transmission d’informations
dans les soulèvements populaires arabes. Les net-citoyens ont été, en 2011, au
cœur des changements politiques qui ont affecté le monde arabe, et ce, malgré
l’intrusion de cyber-collabos, travaillant essentiellement pour le compte de la
CIA. Les net-citoyens honnêtes envers leur pays et leur peuple ont tenté de
tenir le blackout en échec, de contourner la censure. En contrepartie, ils en ont
payé le prix fort.
L'expression
« Big Brother » est utilisée par les journaux pour qualifier toutes
les institutions ou pratiques portant atteinte aux libertés fondamentales et à
la vie privée des populations ou des individus. Il est aussi le grand
surveillant, omniprésent par les affiches et les « télécrans » des
domiciles privés, ce que rappelle la maxime officielle « Big Brother is
watching you » (le Grand Frère vous regarde). Le Big
Brother tunisien du Net a été appelé Ammar404, en référence au message Error
404, signalant l’interdiction d’accès à un site, imposée par les autorités de
censure.
Un an et demi après l’annonce de sa mort, à en croire le
ministre de tutelle du web, Mongi Marzouk, nous risquons son
retour proche si nous n’y prenions garde. Ce discret apparatchik d’Ennahdha vient
de l’annoncer, ce mardi 4 septembre 2012, date de l’ouverture d’un séminaire
national sur la régulation de l’Internet au Pôle technologique d’Al
Ghazala. Plusieurs commentateurs et cyber-activistes craignent, à juste titre,
une régression des libertés par rapport aux acquis payés au prix fort par la
jeunesse révolutionnaire sous l’ancien régime. Ces menaces sur l’Internet
participeraient de l’opération « ekbess », c'est-à-dire « serrez
la vis », lancée par les militants et les nervis islamistes pour renforcer
l’autorité d’un gouvernement en perte vertigineuse de popularité, un
gouvernement aux abois. Cet épisode est indissociable du processus déjà entamé
par ce gouvernement pour le contrôle de l’information et la limitation du champ
des libertés.
La censure est de retour
Depuis l’affaire des « guignols » de la chaîne
Attounisia (l’émission a été interdite et le patron de la chaîne incarcéré pour
corruption : « quand on veut noyer son chien, on l’accuse de la
rage », alors que les vrais corrompus sont connus de tous et s’affichent
sans vergogne), les prétextes se multiplient pour faire obstruction à toute
critique et à toute information contraire au discours officiel. En agissant
ainsi, le gouvernement provisoire, incapable de faire face aux défis
économiques, sociaux, culturels ; incapable de lutter contre les diverses
pollutions (saleté généralisée, bruits, etc.), incapable d’assurer la sécurité
des biens et des personnes, nous jette un nouvel os à ronger : contrôler
Internet, pour, dit-il, lutter contre les menaces de cyber délinquance et
celles pesant sur la sûreté nationale. Incrédule, une
partie de la blogosphère s’interroge: « Depuis quand Ennahdha lutte-t-elle contre le terrorisme,
alors qu’elle compte, y compris au sein de son état major, nombre de
terroristes ? ». Une façon de rappeler que si les
autorités étaient de bonne foi, elles commenceraient par s’atteler d’abord à la
lutte contre les groupes terroristes, bien réels ceux-là, qui recrutent, entraînent et arment
des jeunes Tunisiens pour les envoyer guerroyer en
Syrie et ailleurs, au nom
du sunnisme wahhabite, pour le compte de l’impérialisme et du sionisme, .
Les Arabes et Internet
Depuis que les statistiques concernant
Internet existent, l’Arabie Saoudite, suzerain et « maître
spirituel » des islamistes tunisiens, a toujours été la championne du monde de la
censure sur Internet. Actuellement,
l’Arabie Saoudite et Bahreïn sont, dans le classement de « Reporters sans
frontières », championnes du monde des
« ennemis d’Internet ».
Les pays de la censure |
Par ailleurs, « les arabophones »,
qui sont 300 millions, totalisent 13,5 millions d’accès Internet, c'est-à-dire
moins que les 24 millions de néerlandophones, qui en totalisent 14
Millions !!
Enfin, rappelons que ces bons
« arabo-musulmans », y compris ces « vertueux » islamistes,
sont aussi les champions du monde du voyeurisme, c'est-à-dire de la
fréquentation des sites pornographiques (Voir les statistiques sur www.alexa.com).
Alors que la moyenne mondiale situe le premier site X en nombre de visiteurs au
42eme rang, pour les arabo-musulmans, le premier site X en nombre de visiteurs
est en 14ème position (premier : Facebook, deuxième : Twitter, 3ème :
Googgle,…, 14ème : site X). Les Tunisiens, un peu plus
« voyeurs » que la moyenne arabe, le placent en 13ème position. Les
Irakiens, champions des champions, en 6ème position. Conscients de ce problème,
en supposant que ce gouvernement puisse être conscient de quelque chose, les
autorités ont peut être voulu censurer Internet pour cette raison, et non sous
le prétexte fallacieux de sécurité nationale. La sécurité nationale, ou plutôt l'insécurité nationale, tout le
monde le sait, n’est pas aux mains de ce gouvernement. Elle est aux mains d’autres
pays, les sponsors de l’islamisme. Par contre, ce gouvernement de la honte fait disparaître la pilule contraceptive des femmes des pharmacies, et la remplace par toutes sortes de "viagras", destinées aux vieux barbus islamistes, impuissants, pédophiles, nécrophiles et voyeurs.
Une inspection en profondeur.
Dans ce contexte de course entre la censure et les défenseurs de
la liberté, des sociétés de surveillance deviennent les nouveaux mercenaires
d’une véritable course à l’armement en ligne. Les hacktivistes apportent leur
expertise technique aux net-citoyens pris dans les tenailles des appareils
répressifs. Cette surveillance est possible grâce à des
technologies informatiques européennes et américaines, qui trouvent, chez les
Arabes, d’excellents « rats de laboratoires », des « cobayes »
décomplexés et des bancs d’essais grandeur nature pour tester et mettre au
point ces technologies. Les SpyFiles publiés par WikiLeaks sont une mine
d’informations sur le sujet. Ces entreprises bénéficient d’un marché très
lucratif. Pour n’en citer que quelques-unes, la firme américaine BlueCoat a été
épinglée pour ses activités en Syrie, la société française Amesys en Libye, et
des poursuites ont été engagées par l’ONG Arabic Network for Human Rights
Information (ANHRI) contre Vodafone en Egypte. L’entreprise italienne AreaSpa s’est finalement retirée de Syrie
après une campagne internationale de dénonciation. Il est à noter que la vente
des équipements de surveillance est peu réglementée. Ni les Etats-Unis ni
l’Union Européenne n’interdisaient l’exportation des technologies de
surveillance vers la Tunisie
et vers d’autres pays arabes totalitaires.
Ces technologies portent le doux nom de « Deep Packet
Inspection », c'est-à-dire « inspection en profondeur de paquets».
Lorsqu’on envoie un courriel (un email), des dizaines d’ordinateurs, connectés
à Internet, se relaient pour l’acheminer à destination. Chaque ordinateur joue
le rôle du facteur qui se contente de lire l’adresse de destination du message
(et ne regarde pas son contenu), le transmet à l’ordinateur suivant, et ainsi
de suite jusqu’à la destination finale. Si vous avez à faire à des facteurs
honnêtes, votre courrier arrivera intact à destination. Par contre, si dans la
chaîne des facteurs, il y a en un qui est malhonnête, alors il va lire votre
courrier, le stocker dans ses fichiers pour l’utiliser contre vous
ultérieurement, le modifier ou le détruire, en bref : les ennuis vont
commencer pour vous. C’est ce que faisait le Big Brother tunisien.
Les « services de sécurité » ne
demandent plus seulement à un prisonnier interrogé et torturé le nom de ses
complices, mais son mot de passe Facebook, Skype, VKontakte, etc. Ce scénario
s’est reproduit en Tunisie sous ZABA. Il est courant en Iran, en Arabie, au
Qatar, au Bahreïn, au Turkménistan et ailleurs. Les dissidents tentent de
trouver toutes sortes de parades. La parade de certains dissidents consiste à
créer de faux comptes ou à donner ses codes d’accès à un proche pour qu’il
prenne la main sur ses comptes en cas d’arrestation, et évite ainsi de mettre
en danger ses contacts.
Lors d’un départ en zone de guerre ou de
conflit, le gilet pare-balles ne suffit plus pour les journaliste. Il leur faut
maintenant se munir d’un “kit de survie numérique”, permettant le
chiffrement des données, l’anonymisation des communications et éventuellement
le contournement de la censure.
De plus en plus complexe, les outils destinés à contourner la
censure sont chaque jour plus nombreux et souvent plus difficiles à
choisir. Chiffrer (ou crypter) ses contenus est un art qui remonte
à l’antiquité. C’est une pratique indispensable pour échapper à la surveillance
et minimiser les risques de voir des opérations d’activisme déjouées. Tor
est l’un des outils de contournement de la censure et d’anonymisation les plus
connus au monde. Il n’est cependant pas forcément adapté à tous les usages, et
son principe technologique est complexe.
Les méthodes de contournement peuvent aller de simples canaux
sécurisés à des programmes informatiques complexes. Cependant, elles
fonctionnent à peu près toutes de la même manière : Elles indiquent à votre
navigateur web de faire un détour par un ordinateur intermédiaire, appelé
proxy, qui :
· est situé dans un lieu non soumis à la censure d’Internet.
· n’a pas été bloqué depuis l’endroit où vous vous trouvez.
· sait comment récupérer et renvoyer du contenu à des utilisateurs
tel que vous.
Du côté de la censure, ou « surveillance
technique », des tentatives de hameçonnage des identifiants d’utilisateurs
de réseaux sociaux ont été signalées, ainsi que l’utilisation de faux
certificats de sécurité. Priorité est également donnée à la neutralisation des
outils de chiffrement, d’anonymisation ou de contournement.
Capacité de Big Brother.
La capacité de surveillance de la Tunisie sous Zaba la
plaçait en tête de la course à « l’armement informatique » menée par
des régimes répressifs. L’ATI (Agence Tunisienne de l'Internet) avait une place centrale dans l’organisation de Big
Brother. Tout accès à l’internet et tout courriel passent par
l’agence, ce qui les rend plus faciles à surveiller. Dès que le système détecte un email "suspect", un réseau de
fibres optiques le transmet au centre de contrôle. Les outils disponibles
permettent d’écouter les communications téléphoniques, les SMS, et d’autres
données numériques. Tout est canalisé vers des centres de surveillance, situés soit au
Ministère de l’Intérieur, soit au palais du Carthage. Le système de
surveillance du courriel s’accompagnait aussi de tentatives de manipulation.
Des courriels étaient modifiés plus ou moins intelligemment : des
grossièretés, des images pornographiques ou compromettantes étaient rajoutés,
des menaces étaient distillées.
Responsables, non coupables.
A notre connaissance, aucune enquête sérieuse n’a été menée par
les nouvelles autorités tunisiennes pour démasquer les responsables de cette
censure au sein de l’ATI ou parmi la « cyber-police », ou encore les
entreprises tunisiennes et étrangères qui en étaient complices. Nous n’avons
aucune information concernant les informations stockées sur les internautes tunisiens.
Ou sont-elles ? à l’ATI ? Au Ministère de l’Intérieur ? Au palais
de Carthage ? Ce qui est certain, c’est qu’elles sont stockées quelque
part, attendant que les nouvelles « autorités » s’en occupent. Il
semble que le temps soit propice aujourd’hui.
En 2011, la partition du Web s’est renforcée. Les internautes
accèdent à des informations différentes en fonction de leur lieu de connexion.
La ségrégation digitale se répand. La solidarité entre défenseurs d’un Internet
libre et accessible à tous est plus que jamais vitale pour bâtir ou préserver
des passerelles entre les net-citoyens et faire en sorte que l’information
continue à circuler.
Plusieurs commentateurs et activistes craignent maintenant une régression des libertés par rapport aux acquis payés au prix fort par la jeunesse révolutionnaire sous l’ancien régime.
Plusieurs commentateurs et activistes craignent maintenant une régression des libertés par rapport aux acquis payés au prix fort par la jeunesse révolutionnaire sous l’ancien régime.
Hannibal Genseric