vendredi 17 mai 2013

Le terrorisme « high tech » des états voyous



Afghanistan, Pakistan, Gaza, Mali, Syrie, Yémen,... Les avions pilotés à distance, toujours plus nombreux, deviennent le fer de lance de la « guerre antiterroriste ». Une arme nouvelle qui pose une série de questions stratégiques, politiques, éthiques. 
Les habitants de Gaza les appellent "zanana", les Pachtouns du Waziristan, au Pakistan, des "bhungana" (littéralement le "bourdonnement des abeilles",)... Ce bruit agaçant est celui des drones, drôles d'engins gris aux formes étranges et menaçantes qui sillonnent leur ciel depuis plusieurs années. Pour observer et écouter, la plupart du temps, et pour tuer, de plus en plus souvent... 
Leur présence permanente prend des allures d'occupation militaire, car, au sol, les drones influencent tout, de la qualité de la réception satellitaire d'un match de foot à la télévision à la manière de s'habiller lorsque les habitants sortent faire leurs courses ou se rendent à un mariage, afin de ne pas être pris pour cible. Rien n'est plus stressant, car les drones sont souvent audibles, dans le ciel, mais ils sont trop petits, ou trop hauts, pour être vus. Au même moment, parfois à des milliers de kilomètres de là, un officier de l'armée américaine, britannique ou israélienne observe, confortablement assis dans une obscure salle de commandement. Il décidera de vous tuer quand il le voudra : vous n’aurez aucune parade.
Ces avions robots téléguidés, surveillant des étendues immenses pendant des heures, sont le nouveau visage du terrorisme étatique impérialiste-sioniste, appelé « lutte antiterroriste », alors que, très souvent, les drones viennent appuyer les attaques terroristes, comme en Libye et en Syrie.

C’est quoi, un drone ?

Un drone (« faux bourdon » en anglais) est un aéronef télécommandé qui emporte une charge utile, destinée à des missions de surveillance, de renseignement, de combat ou de transport. La taille et la masse (de quelques grammes à plusieurs tonnes) sont fonction des capacités opérationnelles recherchées. Le pilotage automatique ou à partir du sol permet d'envisager des vols de très longue durée, de l'ordre de plusieurs dizaines d'heures, à comparer aux deux heures typiques d'autonomie d'un chasseur. Moins chers et plus simples à mettre en œuvre qu'un avion, ils sont plus discrets et leur perte est moins grave que celle d'un avion et de son pilote. Grâce à leur faible coût de fabrication et d'utilisation, ils représentent une alternative intéressante pour les pays au budget limité, pour les terroristes, et pour les contrebandiers et autres trafiquants de stupéfiants. Un drone est souvent utilisé à la manière d'un ordinateur. Il faut y ajouter une connexion Internet ou un logiciel, afin de l'adapter à ses besoins. Cette technologie récente n'est pas toujours synonyme de frappes mortelles. Sur 51 pays possédant des drones, seuls 3 disposent de drones armés: les États-Unis, le Royaume-Uni et Israël.
Sur le plan militaire, le drone a raccourci la boucle de décision entre la détection de la cible et la frappe. Tandis que les appareils classiques ne font que passer, et ne sont guère discrets, le drone armé maraude très longtemps au-dessus du champ de bataille, le tir est déclenché en temps réel ou presque.  Les prochains drones promettront d’être encore plus performants en terme d’autonomie de vol et de commandes. Ils seront capables d’effectuer des vols supersoniques intercontinentaux et d’échapper à tout radar, capables d’engager « eux-mêmes » le combat et peuvent choisir leurs propres cibles, tout en ayant la capacité de « se » défendre seuls en cas d’attaques. Certaines machines commencent à être dotées d’un système automatique de reconnaissance au laser leur permettant de « choisir » leurs cibles et de faire feu, sans qu’un humain soit directement impliqué.
Face à cette montée de l’utilisation des « killer robots » dans le domaine militaire, un débat oppose les deux camps.
Les arguments des partisans de leur utilisation invoquent notamment que ces machines peuvent réduire les décès, sont plus promptes à réagir en cas d’extrême urgence. De même, n’ayant aucune émotion, elles n’ont peur de rien, ne sont pas assujetties à la colère et surtout, ne peuvent violer quiconque. Les atrocités commises en cas de conflits armés peuvent donc être évitées grâce à leur recours. De plus, il est possible que la machine, sans être soumise à une quelconque forme de nervosité, puisse s’approcher de cibles potentielles en tâchant de déterminer s’il s’agit d’un civil ou d’un combattant ennemi. Un humain dans les mêmes circonstances pourrait bien faire feu en ne voulant pas prendre de risques. Même si elle ne constitue pas une panacée, la contribution des drones aux capacités d’information, de surveillance et de renseignement a permis d’améliorer l’examen de la cible, ce qui a pu conduire à annuler des frappes, jugées importantes par les autorités militaires et politiques. Par ailleurs, les drones mettent fin au débat séculaire en philosophie politique entre souveraineté protectrice et souveraineté guerrière. L’État moderne est le résultat d’un contrat entre les citoyens qui lui délèguent le monopole de la violence légitime afin de leur assurer leur sécurité. Autrement dit, l’État doit rendre effectif le droit à la vie de ses citoyens, désormais incontournable dans les conventions portant sur la protection des droits de l’Homme. Cependant, ce droit rentrait en contradiction avec la nécessité existentielle  de l’État d’envoyer ses citoyens au combat, donc à la mort, en cas de guerre. Ce paradoxe atteindrait son paroxysme dans les États démocratiques modernes supposés attachés une haute valeur à la vie. Les drones permettent de résoudre ce qui apparaissait jusqu’alors comme une aporie: concilier la restriction libérale-sécuritaire des finalités de la souveraineté étatique avec le maintien de ses prérogatives guerrières.
Pire (ou mieux, selon le point de vue), en abaissant à la fois les coûts politiques (en évitant les pertes humaines nationales), économiques (le drone est moins cher qu’un bombardier ou un avion de chasse), les drones altèrent le seuil de la prise de décision guerrière. Nul besoin de demander l’autorisation du Parlement à l’instar de la participation américaine à l’intervention en Libye ou en Syrie.
Les partisans du drone comme arme privilégiée de “l’antiterrorisme” promettent certes une guerre sans perte ni défaite. Mais, ils omettent de préciser que ce sera aussi une guerre sans victoire, car pour se déclarer vainqueur, il faut conquérir le cœur des populations supposées souffrir des terroristes. Avec les drones, ce n’est jamais le cas : le drone terrorise plus la population civile que les terroristes. Utilisé en milieu urbain, là où il est censé être le plus efficace car le plus « chirurgical », il provoque des dégâts collatéraux immenses et souvent irréparables : le drone fait basculer la population bombardée du côté des terroristes.
Inversement, les opposants à l’utilisation des drones remarquent qu'un des problèmes majeurs relèverait de l'interprétation de cibles potentielles. Un enfant pointant un bout de bois vers le robot pourrait être pris comme cible, de même qu'un combattant ennemi qui dépose son arme en signe de soumission. Ils mentionnent aussi le risque que cette technologie tombe entre de mauvaises mains : terroristes, trafiquants de drogue, etc. En dépit des bouleversements militaires et politiques qu’il catalyse, le drone est loin d’être la perfection technique que ses promoteurs présentent. Il ne permet pas de voir avec une précision suffisante les formes qu’il vise pour éviter de tuer des femmes ou des enfants désarmés, comme plusieurs bavures l’ont déjà montré. Le drone Predator, par exemple, possède une kill zone de 15 mètres, ce qui signifie que tous ceux qui se trouvent dans un rayon de 15 mètres autour du point d’impact, même s’ils ne sont pas la cible désignée, mourront avec elle. En comparaison, le rayon létal d’une grenade est de 3 mètres.
En outre, les frappes de personnes inscrites sur une « kill list »  sont des « frappes de signatures ».  « Signatures » doit être pris ici au sens de traces, d’indices ou de caractéristiques définitionnelles. Ce sont des individus dont l’identité demeure inconnue, mais dont le comportement laisse supposer, signale ou signe une appartenance à une “organisation terroriste”. Tout le problème réside dans cette capacité revendiquée de convertir adéquatement une image construite par compilation d’indices probables en statut de cible légitime. Une frappe américaine décima ainsi, le 17 mars 2011, au Pakistan, un groupe d’hommes dont le regroupement « correspondait à la matrice prédéfinie pour un soupçon de comportement terroriste », alors qu’il s’agissait d’une assemblée traditionnelle, une jirga, convoquée pour résoudre un différend dans la communauté locale.

Acte de guerre ou exécution extrajudiciaire?

Le drone devient donc l’emblème de la « chasse à l’homme préventive », Celle-ci consiste à surveiller de façon permanente la cible visée. Les capteurs du drone permettent de saisir en temps réel, 24 heures sur 24, la vie de l’individu traqué. L’ensemble des données recueillies permettront de dresser des "schémas de mode de vie" participant à l’identification de la personne comme terroriste. Ce travail de recherche précède l’usage de la force létale. Cette forme de violence  débouche, à mi-chemin entre guerre et police, sur des campagnes d’exécutions extrajudiciaires menées à l’échelle globale, une sorte de terrorisme high-tech.
À l’heure où le drone est devenu l’un des emblèmes de la présidence Obama, « l’instrument de sa doctrine antiterroriste officieuse », consistant à « tuer plutôt que capturer », en prétendant remplacer la « torture et Guantanamo » par « l’assassinat ciblé par le drone », cette arme prolonge et radicalise les procédés déjà existants de guerre à distance.
Cette mutation des lois de la guerre par le choix des armes transforme le monde entier en terrain de chasse, parce que les impératifs de la traque permettent une globalisation du rayon de la violence armée. Personne n'est à l'abri : avec votre téléphone, votre ordinateur, vos comptes bancaires, Facebook ou Twitter, vos mails, vos recherches Google, votre voiture, vos amis, vos lieux de travail ou de résidence, etc. Tout ce qui vous concerne est enregistré, trié, organisé, "googlisé". Vous êtes suivis à la trace, traqués en temps réel. Même déguisé, on vous reconnaîtra. Pour le citoyen lambda, ceci ne semble guère important. Pour un homme politique ou un terroriste, ceci est une souricière implacable : le jour où il déplaira au Grand Chef, le Super Calife des "infidèles juifs ou chrétiens", il sera fait comme un rat.

Cette chasse à l’homme dronisée représente le triomphe de l’antiterrorisme sur la contre-insurrection. Dans cette logique, le décompte des morts, la liste des trophées de chasse se substitue à l’évaluation stratégique des effets politiques de la violence armée. Les succès se font statistiques. Leur évaluation se déconnecte de leurs effets réels sur le terrain. 


Le bilan des centaines d'attaques de drones contre des membres présumés d'al-Qaida au Pakistan, au Yémen et dans d'autres pays est un secret d'Etat bien gardé, le gouvernement américain refusant d'évoquer publiquement les détails de ce programme. Mais le sénateur républicain Lindsey Graham, ardent défenseur de ce type d'actions militaires, a publiquement -et peut-être involontairement - donné un chiffre : "Nous en avons tué 4.700", a-t-il dit, "Parfois on frappe des personnes innocentes, ce que je déteste, mais nous sommes en guerre, et nous avons tué plusieurs hauts responsables d'al-Qaida", a-t-il ajouté.


Conclusion

Ce qui se dessine, c’est un pouvoir invasif se fondant moins sur une notion de droit de conquête que de droit de poursuite. Ceci nous rappelle « la Common Law » anglaise : elle autorisait autrefois, dans les campagnes, à « mener la chasse aux bêtes de proie nuisible, tels les renards et les putois, jusque sur la propriété d’autrui ; parce que détruire de telles créatures était réputé d’intérêt public ». C’est ce genre de droit que voudraient aujourd’hui s’arroger les États-Unis et Israël, pour des proies humaines, à l’échelle du monde. 

Au fil du temps, on assiste à des assassinats ciblés, de type maffieux, c'est-à-dire n’obéissant à aucune loi de la guerre, aucune règle : la liquidation ne dépend que de la décision d’un chef. En épousant cette nouvelle pratique de la guerre, la Maison-Blanche comme les militaires israéliens disent répondre aux conflits "asymétriques" d'aujourd'hui. Face aux insurgés et aux kamikazes, prêts à mourir pour défendre leur cause, les armées régulières de ces pays déploient des avions pilotés à distance, et mettent à l'abri leurs soldats. A l'insécurité permanente créée par les kamikazes répond la présence de drones, en mesure de renseigner et de frapper à tout moment. Jusqu’à récemment, la guerre a toujours été massive et collective. Résultat: la frontière s'estompe entre l'acte de guerre et l'exécution extrajudiciaire.
Cela n’empêche pourtant pas ses partisans de la proclamer être l’arme la plus éthique que l’humanité ait jamais connue. Opérer cette conversion morale, cette transmutation des valeurs est la tâche à laquelle s’attellent aujourd’hui des philosophes américains et israéliens qui œuvrent dans le petit champ de l’éthique militarisée. Leur travail discursif est essentiel pour assurer l’acceptabilité sociale et politique de cette arme.
MQ-9 reaper by trans-parere 
Ainsi, la guerre dégénère en chasse, voire en sport ou en jeu, comme le montre l’écusson du drone « MQ 9 Reaper » qui figure la faucheuse, rictus inquiétant et perles de sang sur sa lame, surmontant sa devise : « que les autres meurent. »  C’est ce qui sépare un combat d’une mise à mort, et expliquerait aussi la différence entre un toréador et un boucher. 

Le drone met en cause le principe même de citoyenneté. En faisant le choix du drone, dont certains projets envisagent déjà le déploiement pour surveiller les frontières, voire les populations, certains États (USA, Israël, GB) prônent un outil qui porte en lui une pure violence, alors que le pouvoir d’État, même dans les régimes les plus autoritaires, doit être, malgré tout, pouvoir et non pure violence, si l’on suit la pensée d’Hannah Arendt qui écrivait, longtemps avant l'existence des drones : « seule la constitution d’une armée de robots qui éliminerait complètement (…) le facteur humain et permettrait à un homme de détruire quiconque en pressant simplement sur un bouton pourrait permettre de modifier cette prééminence fondamentale du pouvoir sur la violence ».


Mais qu’arrive-t-il si on n’envoie que des robots pour guerroyer ? 

Barak Husseïn Obama, ce Dajjâl (Imposteur), cet Antéchrist, cet ennemi de l'Islam de son père, ce prix Nobel de la paix (??), a répondu : Rien. Il peut tuer autant qu'il veut, où il veut, quand cela lui chante, sans en référer à quiconque. Il est le seul à approuver, oralement, la « kill list ». Idem pour les chefs du gouvernement israélien ou britannique. Ces chefs d'états voyous se sont transformés, subrepticement, en chefs terroristes, en semeurs de morts, sans foi ni loi, alors que, du haut de leur tribune, ils taxent  d'autres Etats de terroristes, comme la Palestine, la Syrie, l'Iran ou la Corée du Nord, et naguère, l'Irak et la Libye. 

Seule la haute technologie les distingue d’un Ben Laden ou d’un Hassen Es-Sabbah. Ils finiront, comme eux, dans les poubelles de l’histoire.
 Hannibal Genséric