Le principal souci de William Isaac Thomas, sociologue
américain (1863- 1947.) est d'étudier les phénomènes et les individus dans la
totalité de leur contexte social. Rejetant le déterminisme économique ou
technologique considéré comme seul facteur du changement social, Thomas voit
dans les valeurs et attitudes humaines des éléments importants dans la
transformation des sociétés. Il a contribué ainsi à la création d'une
discipline psychosociologique autonome. C’est en 1923 qu’il présente dans The
Unadjusted Girl, sa notion de définition de la situation. La définition de la
situation c’est le moment préalable à l’action, au cours duquel l’individu
examine la situation à laquelle il fait face et réfléchit à ce qu’il souhaite
faire. Contrairement au modèle behavioriste, il affirme ainsi que l’action
n’est pas la réponse automatique à un stimulus, mais qu’elle résulte d’un point
de vue particulier sur une situation donnée. Thomas considère notamment que les
individus tendent à définir la situation de façon hédoniste, tandis que la
société leur enjoint de la définir de façon utilitaire, notamment en plaçant la
sécurité au premier plan.
Le théorème de Thomas s’énonce comme suit :
«Si les hommes définissent des
situations comme réelles, alors elles sont réelles dans leurs conséquences».
Puisque la définition de la situation qu'un individu produit constitue un
préalable à son action, alors pour saisir les comportements individuels il ne
faut pas se référer à la réalité mais à la façon dont les individus la
perçoivent. Cette proposition exprime l'importance qui doit être accordée dans
l'explication sociologique des représentations pseudo-religieuses,
souvent fausses, qui prennent, dans le monde actuel, une plus grande importance
que la réalité objective.
Exemple 1. Le discours islamiste
Sur un plan collectif, le discours politique islamiste est, le plus
souvent, manipulatoire (lorsqu'il n'est pas carrément mensonger). Il a pour
objectif d'ancrer des croyances voulues dans l'esprit des gens. Ainsi, en
Tunisie, Rached Ghannouchi, président et gourou du parti islamiste Ennahdha,
déclare-t-il, à tout propos, que son parti politique est le dépositaire de
l’islam, et donc l’attaquer ou le critiquer, revient à attaquer ou critiquer
l’islam, et dans ce cas, c’est l’apostasie, punie, selon la charia, par la
mort. C’est cette approche qui a été utilisée lors des élections tunisiennes
d’octobre 2011, après le pseudo « printemps arabe » : si vous
votez pour Ennahdha, vous votez "pour Allah et son Prophète", et vous
irez automatiquement au paradis. Bien que ces affirmations soient manifestement
fausses et manipulatoires, beaucoup de Tunisiens, surtout les analphabètes et
les plus démunis, y ont cru. Le sous-prolétariat a donc voté en masse pour le
parti "de Dieu et de son Prophète", surtout que les promesses de
paradis ont été accompagnées d’encouragements sonnants et trébuchants, grâce à
l’amicale cagnotte qatarie, qui arrose les banlieues en mal de djihad, qu’elles
soient en France, en Tunisie ou ailleurs. Le résultat des élections tunisiennes
a confirmé la justesse du théorème de Thomas. La Tunisie se retrouve donc avec
« une majorité relative » : 20% de la population a voté
islamiste. En conséquence, le parti Ennahdha « truste » tous les
leviers du pouvoir et de l’argent, au détriment de l’écrasante majorité (80%)
de la population qui n’a pas voté pour lui.
Et plus les citoyens y croiront, plus il sera aisé de
manipuler la situation, en
faisant en sorte, par exemple, de générer de l'insécurité dans tel ou tel
secteur du pays, ce qui est facile à faire, grâce à un procédé fort
ancien et utilisé par tous les mouvements fascistes : le terrorisme.
Ainsi, une fois cette croyance du danger terroriste bien acquise, il devient
plus facile de mentir aux citoyens, et de limiter leurs droits fondamentaux. Le
Gouvernement amène « les honnêtes gens » à réclamer plus de sécurité,
plus de contrôles, fussent-ils dangereux pour les droits et les libertés, afin
de les « protéger » des terroristes. Aussi, l’état d’urgence est-il
prorogé tous les trois mois, et ce régime provisoire tunisien, qui devait durer
au maximum une année, en est à sa troisième année. Les islamistes ont déjà
annoncé qu’ils resteraient au pouvoir au moins 20 ans. Les Tunisiens boiront le
calice jusqu’à la lie.
Exemple-2 : le choc des civilisations
La thèse de Samuel Huntington énoncée dans « Le Choc des
Civilisations » ne possède a priori aucun fondement scientifique
solide : pourtant, l'idée a fait son chemin après le 11 septembre 2001, car
elle avait déjà fait parler d'elle autour du président américain, qui en a fait
une ligne directrice. Et cette fameuse phrase, contraire à l'idée même de
pensée, de se répandre : "si vous n'êtes pas avec nous, vous êtes
contre nous". C'est seulement à partir de là que le choc a des chances
de se produire réellement en tant que tel, regroupant les hommes sur des bases
qui, jusque là, avaient été parfaitement transgressées : la "civilisation
chrétienne" d’un côté, la civilisation « arabo-islamique » de
l’autre, et lorsqu'il s'agit de la Russie, cette autre civilisation ennemie est
l'orthodoxie. C’est aussi un concept irrationnel, puisqu’il se réfère aux
croyances.
De plus, le mot « civilisation » n'a jamais été défini de manière
aussi floue que chez Huntington. Les islamistes, et plus généralement les
musulmans de tout bord, vont néanmoins tomber dans le panneau. Depuis, ils
s’entre-tuent allègrement s’accusant mutuellement d’être l’agent du sionisme et
de l’impérialisme, les valets de « l’autre civilisation ». Les USA et
Israël jubilent.
Exemple 3 : Le discours sioniste
Les thèmes du Peuple élu et de la Terre
promise sont mythiques, fruits imaginaires d'une réalité historique à
retrouver. Plus concrètement, ces mythes sont une surcompensation imaginaire
cultivée par une population qui aurait été réduite en esclavage du temps des
pharaons (bien qu’aucun texte hiéroglyphique égyptien ne confirme cette fable). Si les juifs pensent appartenir au Peuple élu,
cette croyance irrationnelle va engendrer des effets réels, au plan individuel
comme au plan collectif. Illustration parmi d'autres du théorème de Thomas.
Penser qu'ils ont des droits sur un territoire qui leur aurait été donné par
Dieu lui-même, donne aux Juifs sionistes, un sentiment très fort de légitimité
lorsqu'ils spolient, tuent et chassent les Palestiniens qui y vivaient depuis
toujours. Étant le seul peuple élu de Dieu, ils ont donc tous les droits, y compris
le droit d’interdire aux "peuples inférieurs" de se défendre, et de
prétendre au développement économique ou social. Ils s’arrogent, en
particulier, le monopole de posséder seuls les armes de destruction massive
dans la région.
Exemple-4 : Quelle est la nation qui a le plus contribué à la défaite nazie
en 1945 ?
Un sondage mené par l’Ifop en mai 1945, sur
l’ensemble du territoire français désormais libéré, a montré que les
interviewés apparaissent bien conscients du rapport de force et du rôle des
alliés dans la guerre, et ce malgré la censure et la difficulté sous
l’occupation à accéder à une information fiable. Ainsi, une très
nette majorité (57 %) considèrent que l’URSS est la nation qui a le plus
contribué à la défaite allemande alors que les États-Unis et l’Angleterre,
pourtant libérateurs du territoire national, ne recueillent respectivement que
20 % et 12 %. Mais ce qui est proprement sidérant est que cette vision de
l’opinion publique s’est inversée de manière très spectaculaire avec le
temps et les mensonges déversés à propos des Russes et des communistes en
général, comme l’ont montré deux sondages réalisés en 1994 et en 2004 :
C’est tout de même formidable : en 1945, les Français qui ont vécu sous la censure ont bien compris qui a vraiment battu l’Allemagne, mais 70 ans plus tard, c’est une Histoire totalement différente qui est dans leurs esprits ! Le lavage de cerveau a bien fonctionné.
Petit rappel :
Et mieux encore, le sondage de 2004 fournit des informations surprenantes quand on regarde en détail :
Les plus désinformés sont les Cadres et les Ouvriers – ceux qui ont fait le
plus et le moins d’études ! Comme quoi, le lavage de cerveau est aussi efficace
dans les deux cas : il ne dépend pas du niveau universitaire de la victime.
De plus, l’orientation politique n’a pas une énorme influence…cela veut
dire qu'en France, les partis politiques de gauche sont ou défaillants ou
complices quant à la formation de leurs militants. On en voit les résultats
tous les jours....
“La manipulation des
élites est encore plus facile que celle des masses.”
[Jean Yanne]
[Jean Yanne]
Exemple-5 : Le Théorème de
Néfertiti
L’Institut du Monde Arabe, à Paris, accueille une exposition intitulée Le
Théorème de Néfertiti. Qu’est-ce en fait que le théorème de Néfertiti
selon les concepteurs de cette exposition ?... Eh bien, ce serait, tout
d’abord, l’ensemble des mécanismes, ou des circonstances, qui fait qu’un objet
d’art, voire un simple objet, lorsqu’il est offert aux regards et, donc, placé
en situation d’être vu, contemplé, admiré – dans un musée, dans une galerie ,
au sein d’une collection –, voit conséquemment son statut changer, advient à
celui d’œuvre d’art, voire d’icône…La magie de l’ostentation, le simple fait
d’être montré et d’être vu, d’être mis en valeur et observé, change la
nature de l’objet exposé. Les conditions dans lesquelles cet objet est
montré ou celles dans lesquelles il est contemplé, modifient, elles
aussi, la façon dont il est perçu. On pense à Marcel Duchamp s’emparant d’un
urinoir et lui conférant, par là-même, le statut d’œuvre d’art. Le théorème
de Néfertiti prend la mesure de ces changements : c’est un corollaire du
Théorème de Thomas.
Exemple-6 : en France,
l'immigration "est un problème"
« A force de marteler
que l’immigration est un problème, l’immigration devient un problème, y compris
pour des gens qui n’ont jamais vu un immigré de leur vie » (François Gemenne).
Depuis les années 80 où le Front national a posé le traitement de
l’immigration comme étant un problème, le thème de l’immigration devient dès
lors un thème voire LE thème de toute campagne électorale. Selon François
Gemenne , chercheur enseignant à Sciences Po, "Le débat politique français sur l’immigration repose
quasiment entièrement sur de l’émotionnel, de l’idéologique, du fantasme et de
la peur ". Cas typique du Théorème de Thomas.
Alors, l'immigration est-elle un problème ?
Quelques faits…
En 1931, 6,6 % de la population française était déjà composée de
personnes immigrées. Après 1973 et la crise pétrolière, leur part cesse de
croitre. Elle repartira à la hausse dans les années 2000. En 2011, les immigrés
représentent 9% de la population française alors qu’en Allemagne ou encore aux
États-Unis ils représentent 13 %. Qui sont-ils ? Sans surprise, les
immigrés en France viennent principalement des pays anciennement colonisés
ainsi que des voisins européens.
Les idées reçues :
Première idée reçue : alors que les Français évaluent à 25 % la
population immigrée, elle n’est en réalité que de 8,2 % en 2013. La
France est aujourd’hui un des pays les moins ouverts à l’immigration.
Deuxième idée reçue : les immigrés prennent les emplois des Français et
font baisser les salaires (propagande du Front National aidant !). Or,
toutes les études économiques internationales concluent le contraire. Et
rappellent que l’immigration présente un impact positif sur le marché du
travail à long et moyen termes. Les immigrés produisent et consomment des
biens et des services avec un effet positif sur la croissance.
Troisième idée reçue : l’immigration serait un fardeau pour les finances
publiques. Et, depuis la crise, cette idée devient une conviction bien ancrée
chez beaucoup de Français ! Pourtant, l’immigration rapporte 12 Milliards
d’euros au budget de l’état ! Soit 2.250 euros par personne immigrée,
contre 1.500 euros pour les natifs. L'immigration n’est pas un problème,
mais une chance pour le pays d'accueil. Les milliers d'immigrés qui viennent en
France sont généralement dans la force de l'âge (entre 20 et 30 ans pour
l'immense majorité d'entre eux), et que pour atteindre cet âge, il auront coûté
à leur pays d'origine plus de 100.000 Euros, et que la France a donc
économisé cette somme. Parmi les immigrés il y a des milliers
d'ingénieurs, de médecins, et d'autres cadres. Ce sont donc les pays émetteurs d'immigrés qui aident
les pays récepteurs !
Conclusion
Une société est composée d'individus: leur état d'être en est pour une part
le reflet. Et l'on peut étendre ce schéma à tout ce qui concerne l'humain, ses
peurs et ses croyances. Car, dans ce théorème de Thomas, se trouve exprimée toute la question du levier
essentiel de pouvoir sur soi et sur les autres : la peur et l'espérance. Et sans une solide confiance en soi, sans une solide
cohérence intérieure, c'est la porte ouverte à tous les errements et autres
dérives.
Les exemples ci-dessus montrent que la manipulation des masses est tout
aussi efficace dans les pays développés et démocratiques que dans les autres
pays. L'efficacité du
lavage de cerveau ne dépend pas non plus du niveau intellectuel ou
universitaire de la victime. Nous sommes tous logés à la même enseigne : à chacun
de veiller sur sa propre intégrité mentale.
Hannibal Genséric