Après
avoir été persécutés et torturés, voila que les membres du célèbre parti
islamiste tunisien Ennahdha accèdent au pouvoir suite à la révolution
tunisienne de 2011. La plupart disent qu’ils n’y sont parvenus que grâce et
uniquement grâce aux urnes et à la volonté du peuple, tandis que d’autres
croient dur comme fer que leur accession au pouvoir n’est pas due au hasard
mais à leur soumission au pouvoir sioniste international et à ce que certains
appellent, la communauté américano-sioniste organisée.
Nous
n’allons pas débattre ici de cette question, mais nous allons plutôt exposer
quelques relations qu’ont les membres du parti Ennahdha avec des organisations Israël-friendly.
1- Les relations avec l’ambassade américaine en Tunisie
Notre
exposé débute par une affaire qui s’est passé en 2006 et qui est resté discrète
depuis : La rencontre entre l’ambassade américaine en Tunisie avec des
dirigeants d’Ennahdha et un islamiste « de gauche ». C’est un câble Wikileaks,
identifié par 06TUNIS2155 (classé confidentiel) et daté du 21 aout 2006 qui
révèle l’affaire. Sous le titre « Des islamistes modéré cherchent le dialogue
avec les USA en vue de réformes démocratiques », l’ambassade américaine y
informe sa hiérarchie aux États-Unis de la tenue d’une rencontre entre des
personnes « qui se qualifient eux mêmes d’islamistes modérés » et l’ambassade.
Ces personnes ne sont autres que Slaheddine Jourchi, Saïda El Akremi (épouse de
Noureddine Bhiri) et Zied Daoulatli. La rencontre a été organisée par Radwan
Masmoudi, un tuniso-américain qui travaille au CSID (Center for the Study of
Islam and Democracy), l’ambassade le décrit comme étant « un contact de longue
date de l’ambassade et qu’il bénéficie de l’aide du MEPI ». Ce groupe
d’islamistes modérés ont donc demandé aux États-Unis ce qui suit :
•
Supporter les défenseurs des droits de l’homme en Tunisie
• Œuvrer
pour la libération des prisonniers politiques
• Œuvrer
pour donner la liberté de déplacement de leaders islamistes modérés qui sont
privés de passeport
• Inclure
les islamistes modérés dans les listes d’invités de l’ambassade américaine pour
visiter les États-Unis
• Visiter
un des islamistes modérés qui se trouve à Sousse
Vous
l’aurez compris, l’islamiste modéré qui se trouve à Sousse n’est autre que
Hamadi Jebali, le n°2 d’Ennahdha dans l’absolu et le n°1 des Nahdhaouis de
l’intérieur. La rencontre a effectivement eu lieu en date du 30 aout 2006 où
une délégation de l’ambassade s’est rendue au domicile de Hamadi Jebali. Dans
un câble titré « Le leader d’Ennahdha Jebali : Les islamistes modérés sont le
futur », et identifié par 06TUNIS2298 (classé confidentiel également)
l’ambassade résume la réunion avec Jebali. Ce dernier leur a, par exemple,
expliqué que selon lui il y a une rupture entre les « anciens islamistes » et
les « jeunes islamistes ». Les anciens étant plus modérés et raisonnables
allant même jusqu’à communiquer et blaguer avec leurs geôliers tandis que les «
jeunes islamistes », plus radicaux, refusent tout échange avec la dictature. Il
rapporte ainsi qu’en date du 23 juillet 2006, neufs membres du parti Ennahdha
ont adressé une lettre au président Ben Ali lui affirmant que le groupe est
prêt à tourner la page et qu’ils souhaitent dialoguer en vue de réintégrer la
vie politique. Ils n’ont évidemment pas reçu de réponse.
Plus
important que Ben Ali, Hamadi Jebali explique à la délégation de l’ambassade
que les États-Unis ont soutenus les régimes arabes dictateurs pendant très
longtemps, et qu’il est temps de penser à une alternative. Il invite ainsi les États-Unis
à renouer avec les islamistes modérés car selon lui, le peuple musulman tend à
se radicaliser et qu’il faut leur présenter des leaders modérés pour les
désamorcer.
Nous
n’avons malheureusement pas d’informations concernant d’éventuelles rencontres
à Londres entre les leaders du mouvement et l’ambassade américaine en Grande
Bretagne (*). Nous aurions surement appris plus de choses. Si vous avez des
informations n’hésitez pas à nous les communiquer.
Nous
avons par contre des informations d’après-révolution, et elles sont
croustillantes !
2- Relations avec des organisations internationales
Depuis la
révolution, les allez-retours des leaders d’Ennahdha, surtout ceux de Rached
Ghannouchi, n’ont fait que se multiplier. En vrac, Rached Ghannouchi a visité
sans gêne aucun : Le WINEP (source), Saban Center for Middle East Policy
(source), CFR (source), Chatham House (source), Foreign Policy (source), sans
oublier son classement par TIME dans les 100 personnes les plus influentes au
monde en 2012 (source).
Commençons
par le Washington Institute for Near East Policy (WINEP).
Rached Ghannouchi y a
participé à une table ronde privée le 30 novembre 2011 soit un mois après les
élections du 23 octobre 2011, une semaine après la première séance de l’ANC et
22 jours avant la composition du gouvernement de Hamadi Jebali. Pour revenir à
l’institut, le WINEP est un think-tank américain fondé par Martin Indyk en
1985. Martin Indyk est également le fondateur de l’institut de recherche au
sein de l’AIPAC (American Israël Public Affaire Committee), le lobby israélien
le plus puissant et le plus influent aux États-Unis. Mais en raison de sa forte
connotation israélienne et sioniste il n’a pas été prit au sérieux. C’est la
cause pour laquelle Martin Indyk a crée, avec le soutien financier de $100.000
de la part de l’AIPAC, le WINEP qu’il a voulu pro-israélien mais menant des
recherches crédibles au sujet du moyen orient. Le but du think-tank est
d’éduquer les politiciens américains sur les questions du moyen orient pour les
influencer et les orienter vers une politique et des décisions pro-israéliennes
(source). Martin Indyk, juif de confession, a servi comme ambassadeur des États-Unis
en Israël, avant de rejoindre plus tard Brookings Institution au poste de vice-président.
Viens
ensuite le Saban Center for Middle East Policy.
Ce centre de recherche se
focalise sur l’implication des États-Unis dans les affaires des pays du Moyen
Orient. Crée par le Brookings Institution, le centre emprunte son nom de Haïm
Saban, un israélo-américain figurant parmi les hommes les plus riches du monde.
Producteur médiatique et musicien, il a fait un don d’une valeur de 13 millions
de dollars pour la création de ce centre de recherche (source). Rached
Ghannouchi s’y est rendu le 31 mai 2013 pour parler du futur de la démocratie
tunisienne, il a été introduit lors de la conférence par Martin Indyk en
personne qui a, 4 minutes durant, remercié, complimenté, flatté l’égo de notre
cher « islamiste » (à ce stade de l’article, nous pensons qu’il devient évident
de mettre des guillemets au terme islamiste en parlant de Ghannouchi ou du
parti Ennahdha).
Nous
enchainons avec les deux frères séparés par l’océan atlantique, le CFR
américain ou Council on Foreign Relations et son homologue britannique Chatham
House de son vrai nom Royal Institute of International Affairs.
Ces deux
organisations, créées à un an d’intervalle, sont les deux organisations
mondialistes par excellence ! Chatam House est donc un think-tank ayant comme
objectif d’influencer les décisions mondiales concernant les affaires
internationales actuelles. Chatam House est l’organisation la plus influente au
monde après Brookings Institution (source) ! Le 26 novembre 2012, Rached
Ghannouchi s’est donc vu attribuer le prix de Chatham house aux côtés de Moncef
Marzouki.
Le petit
frère, de Chatham House, et non moins influent CFR, est fondé et dirigé par les
grands noms du mondialisme (Paul Warburg, les Rockefeller, Edward House, Gerald
Ford, Bill Clinton, George Bush, etc.). Le CFR a pour mission d’influencer les
politiques mais aussi les médias, les enseignants, les journalistes, les
dirigeants d’entreprises, les étudiants, les leaders religieux, et les citoyens
en général sur les décisions que doit entreprendre les USA au niveau de sa politique
étrangère. Le CFR joue un rôle conséquent sur l’ensemble des sphères de pouvoir
notamment l’économie et la finance, l’un des premiers dirigeants du CFR fut
Paul Warburg aussi connu pour avoir été le premier gouverneur de la Réserve Fédérale
Américaine (la FED). L’objectif du CFR est de permettre aux élites américaines
de gouverner le monde à travers un nouvel ordre mondial (rien que ça !). Leur
programme officiel « International Institutions and Global Governance: World
Order in the 21st Century » détermine les pas à entreprendre pour arriver à un
tel but, voici les plus importants (source PDF):
•
Combattre le terrorisme salafiste (notez que c’est le premier point dans le
programme)
•
Combattre la prolifération des armes de destruction massives (seuls les USA et
leurs alliés doivent les détenir)
•
Accroitre la sécurité nationale des États-Unis notamment au niveau
technologique (le programme PRISM est donc assez cohérent remis dans ce
contexte)
• Gérer
l’économie mondiale, entre autres à travers la création de monnaies uniques
régionales, et à travers le contrôle des échanges commerciaux et des
investissements internationaux
RachedGhannouchi a donc rejoint le CFR le 30 mai 2013 pour y parler de la situation
en Tunisie après les élections, des tensions qui existent dans le pays, et des
challenges d’Ennahdha en cette période. Notez que Ghannouchi n’y est pas allé
seul, il était accompagné de Oussama Sghaier, nahdhaoui et membre de l’ANC,
ainsi que de … Radwan Masmoudi, et oui, encore lui !
Deux
jours avant sa participation à la table ronde organisée par le Washington
Institute, soit le 28 novembre 2011, Rached Ghannouchi a assisté à la cérémonie
organisée par le magazine bisannuel, Foreign Policy, au cours de laquelle il a
reçu sa distinction : figurer parmi les 100 plus grands intellectuels de
l’année 2011. Rached Ghannouchi a donc l’honneur de figurer sur cette liste aux
côtés, entre autres, de Barak Obama, Dick Cheney, Ben Shalom Bernanke (FED,
quoi qu’on ne le présente plus), Condaleezza Rice, Mohamed El Baradei,
Christine Lagarde, Recep Erdogan, Bill Clinton, Hillary Clinton, Nicolas
Sarkozy, Bernard-Henry Levy, Angela Merkel, David Cameron, Andrew Sullivan
(pour avoir défendu le droit des homosexuels), John McCain (l’ami, apparemment
intime, de Hamadi Jebali), Meir Dagan (militaire israélien et chef du Mossad),
et Teodoro Petkoff (le principal opposant de Hugo Chavez, inutile de mentionner
qu’il est libéral). En effet, un immense honneur de figurer parmi cette liste …
3- Qu’est-ce que tout cela veut dire ?
Comme
mentionné plus haut, certains pensent qu’Ennahdha a gagné les élections haut la
main car le peuple les a soutenus, tandis que d’autres prennent ces faits en
preuve du contraire. Si les États-Unis et les organisations pro-sionistes
n’avaient pas misé sur Ennahdha, les islamistes ne se seraient même pas présentés aux
élections.
Nous
n’allons pas faire de conclusions ici, mais nous croyons qu’il est désormais
impensable de qualifier Ennahdha comme un parti révolutionnaire et
indépendantiste. Le parti de Rached Ghannouchi n’a pas manqué une occasion pour
renouveler son allégeance à l’Empire.
Plusieurs
autres faits ont eu lieu mais que nous n’avons pas cité ici, comme la chaude
accolade entre Hamadi Jebali et John McCain, le fait de ne pas mentionner dans
la constitution l’interdiction à l’état tunisien de reconnaitre et de
normaliser les relations diplomatiques et commerciales avec Israël, ou encore
le fait de prendre Israël comme exemple de pays démocratique par Hamadi Jebali....
Un
scénario à l’égyptienne est peu probable en Tunisie compte-tenu de ce qui a été
évoqué jusque là (quoi que), mais une chose est sûre, Ennahdha a perdu la
confiance d’une grande partie de ses électeurs de 2011. Peut être est-ce pour
cela qu’ils ne sont pas aussi sévères avec les RCD que ne le voudrait leur base
populaire …
(*) Mais nous savons que, selon une revue américaine sérieuse, Ghannouchi travaille aussi pour les services secrets de Sa Gracieuse Majesté, le MI6.
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