Le Bulletin des scientifiques atomiques a publié une étude, le 1er mars 2017, qui commence ainsi :
« Le programme de modernisation des forces nucléaires des
États-Unis a été présenté au public, comme un effort pour assurer la
fiabilité et la sécurité des têtes nucléaires de l’arsenal nucléaire
américain, plutôt que pour améliorer leurs capacités techniques. En
réalité, ce programme va utiliser de nouvelles technologies
révolutionnaires, qui augmenteront considérablement la capacité de
ciblage de l’arsenal américain de missiles balistiques. Cette
augmentation de capacité est étonnante. Elle augmente d’un facteur
d’environ trois, le pouvoir global de destruction des forces existantes
des missiles balistiques américains et cela crée exactement ce à quoi
l’on s’attend, si un État possédant le nucléaire prévoyait d’avoir la
capacité de combattre et de gagner une guerre nucléaire, en désarmant
les ennemis grâce à une première frappe surprise.
L’étude continue ainsi :
« Parce que les innovations dans les super-fuze apparaissent
aux yeux des non-techniciens comme mineures, les décideurs politiques
hors du gouvernement des États-Unis (et probablement à l’intérieur du
gouvernement) ont complètement négligé leur impact révolutionnaire sur
les capacités militaires et leurs importantes implications pour la
sécurité mondiale. »
Cette étude a été coécrite par trois grands scientifiques américains
spécialisés dans l’analyse des armes et surtout dans l’équilibre
géostratégique entre les pays : Hans Kristensen, Matthew McKinzie et
Theodore Postol [Le même chercheur qui a démonté le rapport officiel étasunien sur l’attaque au sarin à Khan Shaykhun, NdT]. Leur rapport se poursuit ainsi :
« Cette vaste augmentation de la capacité de ciblage nucléaire aux
États-Unis, largement dissimulée au grand public, a de sérieuses
implications pour la stabilité stratégique et pour la perception par les
adversaires de la stratégie et des intentions nucléaires américaines.
Les planificateurs russes considéreront presque certainement cette
avancée de la capacité de ciblage, comme augmentant le risque d’une
frappe nucléaire préventive de la part des États-Unis – un risque qui
obligerait la Russie à préparer des contre-mesures, qui accroîtraient
encore le niveau d’alerte, déjà dangereusement élevé, des forces
nucléaires russes. Les postures nucléaires tendues, basées sur des
hypothèses de planification déjà les plus défavorables, entraînent la
possibilité d’une réponse nucléaire à un faux signal d’attaque. La
nouvelle capacité de destruction engendrée par le super-fuze augmente
la tension et le risque que les forces nucléaires américaines ou russes
soient utilisées en réponse à l’alerte précoce d’une attaque, même si
l’attaque ne s’est pas réellement produite. »
Les auteurs expliquent ensuite pourquoi le départ accidentel de la
troisième guerre mondiale, c’est-à-dire un anéantissement mondial,
serait plus probable de la part de la Russie que des États-Unis :
« La Russie ne dispose pas d’un système d’alerte précoce satellite
fonctionnel, mais repose principalement sur des radars d’alerte précoce,
posés au sol pour détecter une attaque de missiles américains. Comme
ces radars ne peuvent pas voir plus loin que l’horizon, la Russie
dispose de deux fois moins de temps d’alerte précoce que les États-Unis.
(Les États-Unis disposent environ de 30 minutes, la Russie 15 minutes
ou moins).
En d’autres termes : alors que Trump disposerait d’environ 30 minutes
pour déterminer si Poutine a lancé une frappe préventive, Poutine
aurait moins de 15 minutes pour déterminer si Trump l’a fait. Et si, au
bout de cette période, de chaque côté, il n’y a aucune certitude
qu’aucune attaque nucléaire préventive n’a été lancée par l’autre, alors
cette personne serait obligée de riposter contre l’autre, en supposant
que ne pas le faire aurait non seulement pour résultat une planète
toxique condamnée à un hiver nucléaire et une famine universelle, mais
aussi une humiliante et scandaleuse absence de représailles contre
l’auteur d’un tel acte. Ce qui serait une humiliation en plus d’un
anéantissement, et donc un partage de la faute avec le vrai criminel,
qui résultera, quelque soit le temps d’existence qui pourrait rester à
le vivre, en une honte insupportable et se traduira rapidement en
suicide, si les compatriotes survivants de ce pays ne l’exécutent pas
avant que lui ne se tue.
Inévitablement, la moralité personnelle et l’image de soi du
dirigeant de la nation, dans ce type de situation, sont des facteurs
différents des conséquences mondiales très publiques qui détermineront
la décision de la personne. Mais, avec seulement (au plus) 15 minutes
pour décider du côté russe, et 30 minutes pour décider du côté
américain, il y a une chance fortement élevée maintenant, qu’une guerre
nucléaire mette fin à la vie de tous ceux qui existent actuellement et
qui ne mourront pas rapidement de causes ordinaires avant le drame. Même
les projections les plus désastreuses des dangers dus au réchauffement
climatique sont loin du danger nucléaire.
La question, maintenant, est : comment le monde en est-il arrivé à ce
niveau extraordinairement sinistre ? Les co-auteurs se réfèrent à
plusieurs reprises au secret, gardé par le gouvernement américain comme
une source essentielle, telle que « … qui a été largement dissimulé au public en général… » et « …
que les décideurs politiques en dehors du gouvernement américain (et
probablement à l’intérieur du gouvernement ont complètement négligé… ». Ces
passages se réfèrent à un phénomène ordinaire dans les conspirations au
sommet de grandes opérations criminelles comme la criminalité du monde
des affaires, où seul un très petit cercle d’individus, communément une
demi-douzaine ou même moins, sont conscients de l’objectif stratégique
principal de l’opération et des principaux moyens tactiques qui sont mis
en place afin d’exécuter le plan. Dans ce cas particulier, il
n’inclurait pas le chef de chaque cabinet ministériel, ni rien de si
large que cela. Mais il est clair que puisque la décision clé, la mise
en œuvre des « super-fuze » sur « toutes les ogives placées dans les sous-marins balistiques américains » a
été prise par Obama, il est la principale personne responsable de cette
situation. Cependant, Trump, en tant que personne qui a hérité cette
situation de son prédécesseur, n’a toujours pas montré de signe comme
quoi il désirait abandonner l’objectif stratégique américain actuel de
conquête de la Russie. Plus le temps passe sans que Trump annonce au
public qu’il a hérité de cette opération moralement répugnante de son
prédécesseur et qu’il retire tous les super-fuzes, plus cela
indique que Trump a décidé de poursuivre le plan d’Obama.
Habituellement, dans une telle situation, le dirigeant qui a hérité d’un
tel plan serait assassiné, s’il donnait une indication claire de son
intention de changer de plan ou de l’annuler (les initiés clés sont
généralement obsédés par le « succès », en particulier à une
étape aussi tardive ). Et donc, si Trump essayait de le faire, il
tenterait presque certainement de cacher ce fait, jusqu’à ce que le plan
hérité soit déjà désactivé et ne soit plus une menace.
Le point tournant clé qui a mené à la crise actuelle a été
l’acceptation progressive et croissante, du côté américain, de la
possibilité d’utiliser l’arme nucléaire pour conquérir, plutôt que
seulement pour la dissuasion – le système antérieur, celui de la
dissuasion, ayant été appelé « MAD » [fou, NdT], acronyme de Mutually Assured Destruction(destruction
mutuelle assurée), exprimant l’idée que si les deux superpuissances
nucléaires se déclaraient la guerre, le monde entier serait détruit de
manière catastrophique et rendrait l’idée d’un « gagnant » et d’un « perdant » du
conflit une distorsion grotesque de la réalité. La seule réalité étant
l’anéantissement mutuel et une planète invivable. Un événement
historique, dans le processus de re-conceptualisation qu’une telle
guerre peut être considérée comme étant « gagnable », a été la publication, en 2006, de deux articles dans les deux revues les plus prestigieuses de relations internationales, Foreign Affairs et International Security, introduisant officiellement le concept de « Primauté nucléaire », c’est-à-dire la
(prétendue) opportunité pour les États-Unis de planifier une conquête
nucléaire de la Russie. Jusqu’à ces deux articles (tous deux co-écrits
par les deux mêmes auteurs), une telle idée était considérée comme
farfelue, mais depuis lors, elle est devenue populaire. Comme l’explique
le dernier lien ci-dessus (l’article en lien précédent), l’origine,
avant même George W. Bush, remonte au 24 février 1990 lorsque son père,
alors également président américain, a secrètement lancé une opération
dont le but final est de conquérir la Russie. Dans cet article, se
trouvent les liens aux documents-sources sur les origines d’un plan qui
nous mènera à une guerre nucléaire de fin du monde. Remonter aux causes
originelles de la progression régulière, après le 24 février 1990, dans
la direction d’une conquête de la Russie par les États-Unis (assisté de
ses alliés) peut maintenant être fait par les historiens, même si ce
n’est que maintenant que l’information est finalement révélée au public,
27 ans après la très fatale décision de George Herbert Walker Bush, qui
a déjà coûté aux contribuables américains des milliards de dollars, un
vrai gaspillage, et dont le résultat risque d’être un anéantissement
total.
Cet article est soumis gratuitement à tous les médias, pour publication,
dans l’espoir que le président actuel des États-Unis va le commenter
publiquement, même si c’est pour s’en moquer afin d’éviter d’être
assassiné pour y avoir fait référence. Nous sommes à un moment
extrêmement dangereux dans l’Histoire, et Donald Trump est maintenant
sur un siège très chaud, ce que toute personne intelligente et bien
informée reconnaît être le cas. Si jamais le monde avait besoin d’un
grand dirigeant courageux, c’est maintenant ; parce que, sans cela, nous
pourrions entrer bientôt en enfer. L’éviter, 27 ans après que le
gouvernement américain s’est lancé sur cette pente savonneuse, sera
extrêmement difficile, mais pas encore totalement impossible. C’est là
que nous en sommes à l’heure actuelle et, depuis le coup d’État en
Ukraine en 2014, les achats de bunkers « à l’épreuve du nucléaire » ont augmenté de façon conséquente.
Ce danger extrême est la nouvelle réalité mondiale. Si l’élimination
de la menace ne vient pas de la Maison Blanche, l’apothéose de la menace
viendra, qui que ce soit qui frappera le premier. La décision – soit
d’envahir la Russie, soit d’annuler et de condamner la préparation des
États-Unis à le faire depuis plus d’une décennie – ne peut être prise
que par le président américain. S’il reste silencieux sur la question,
Poutine peut raisonnablement continuer à supposer qu’il devra être le
premier à frapper. Il ne s’est pas placé lui-même dans cette position ;
le régime étasunien l’aura forcé. Espérons que les États-Unis vont
diminuer la menace, dès maintenant.
Eric Zuesse
Traduit par Wayan, relu par Michèle pour le Saker Francophone
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