Nous l'avons évoqué
à plusieurs reprises récemment, la rupture est consommée entre Manille
et Washington. En visite officielle en Chine, le président philippin
Duterte l'a officiellement annoncé, recourant presque romantiquement au lexique matrimonial :
Diantre, voilà qui est assez clair ; on ne peut pas dire que le divorce se fasse par consentement mutuel... Notons d'ailleurs que l'ami Rodrigo n'a pas de minces chevilles, oubliant au passage une kyrielle de pays résistant farouchement aux menées américaines (Iran, Venezuela, Syrie, Bolivie...) ou se tenant à distance/s'éloignant d'une manière ou d'une autre de l'empire (Turquie sultanesque, Pakistan, Inde, Israël, les -stan d'Asie centrale, Vietnam, Égypte, Afrique du Sud, Irak...) L'aigle perd son plumage à mesure que le club non-impérial grossit, presque de jour en jour.
Or la plume philippine est d'importance, nous l'avons expliqué plusieurs fois : dans l'encerclement de l'Eurasie par les Etats-Unis, elle est la clé du sud-est.
Elle fait même partie d'un réseau de containment mis en place par les Etats-Unis dans les années 50 : l'Island chain strategy ou, en bon français, stratégie des chaînes d'îles. Si ce fait est très peu connu en Europe et n'est jamais évoqué dans les médias, même les moins mauvais, il occupe pourtant les pensées des amiraux chinois et américains ainsi que les états-majors de tous les pays de la région ou les publications spécialisées (tag spécial dans The Diplomat, revue japonaise par ailleurs très favorable à l'empire).
Petite parenthèse historique : la réflexion stratégique autour des îles du Pacifique-ouest commença dès le début du XXème siècle, quand les Etats-Unis mirent la main sur les anciennes colonies espagnoles de Guam et... des Philippines (1898), tandis que l'Allemagne occupait les îles Marianne et Palau, et que la marine japonaise prenait son essor en dépossédant la Chine de Taïwan (1895). C'est à Haushofer, attaché militaire allemand au Japon de 1908 à 1910, que l'on doit les premières analyses sérieuses, où apparaissent déjà des considérations bien actuelles (rideau de protection, nœuds stratégiques etc.)
Pour Haushofer, cependant, ces chaînes d'îles constituaient pour les Etats continentaux comme la Chine ou l'Inde un rempart face aux menées des puissances maritimes. Les vicissitudes du XXème siècle et l'inexorable extension de l'empire US ont retourné la donne : ces arcs insulaires étaient désormais un rideau de fer contenant l'Eurasie (le bloc sino-soviétique durant la Guerre froide) et "protégeant" le Pacifique américanisé.
Ce qui nous amène au Grand jeu actuel. Que le domino philippin tombe et c'est la première chaîne qui est sérieusement ébréchée. La deuxième ligne étant plus virtuelle (car uniquement maritime, sans armature terrestre véritable), c'est le Pacifique, donc les côtes américaines, qui s'ouvrent partiellement à la Chine :
On imagine les gouttes perler sur le front soucieux des stratèges de Washington et Langley qui doivent se prendre la tête à deux mains. Avec son "pivot vers l'Asie", Barack à frites était sensé consolider le mur autour de la Chine, non le détruire...
"Devant
tout le monde ici, j'annonce ma séparation d'avec les Etats-Unis (...)
Dans le domaine militaire, économique aussi, l'Amérique a perdu. Je me
réaligne sur votre courant et j'irai peut-être aussi en Russie pour
parler à Poutine et lui dire que nous sommes désormais trois contre le
monde : Chine, Philippines et Russie."
Diantre, voilà qui est assez clair ; on ne peut pas dire que le divorce se fasse par consentement mutuel... Notons d'ailleurs que l'ami Rodrigo n'a pas de minces chevilles, oubliant au passage une kyrielle de pays résistant farouchement aux menées américaines (Iran, Venezuela, Syrie, Bolivie...) ou se tenant à distance/s'éloignant d'une manière ou d'une autre de l'empire (Turquie sultanesque, Pakistan, Inde, Israël, les -stan d'Asie centrale, Vietnam, Égypte, Afrique du Sud, Irak...) L'aigle perd son plumage à mesure que le club non-impérial grossit, presque de jour en jour.
Or la plume philippine est d'importance, nous l'avons expliqué plusieurs fois : dans l'encerclement de l'Eurasie par les Etats-Unis, elle est la clé du sud-est.
Elle fait même partie d'un réseau de containment mis en place par les Etats-Unis dans les années 50 : l'Island chain strategy ou, en bon français, stratégie des chaînes d'îles. Si ce fait est très peu connu en Europe et n'est jamais évoqué dans les médias, même les moins mauvais, il occupe pourtant les pensées des amiraux chinois et américains ainsi que les états-majors de tous les pays de la région ou les publications spécialisées (tag spécial dans The Diplomat, revue japonaise par ailleurs très favorable à l'empire).
Petite parenthèse historique : la réflexion stratégique autour des îles du Pacifique-ouest commença dès le début du XXème siècle, quand les Etats-Unis mirent la main sur les anciennes colonies espagnoles de Guam et... des Philippines (1898), tandis que l'Allemagne occupait les îles Marianne et Palau, et que la marine japonaise prenait son essor en dépossédant la Chine de Taïwan (1895). C'est à Haushofer, attaché militaire allemand au Japon de 1908 à 1910, que l'on doit les premières analyses sérieuses, où apparaissent déjà des considérations bien actuelles (rideau de protection, nœuds stratégiques etc.)
Pour Haushofer, cependant, ces chaînes d'îles constituaient pour les Etats continentaux comme la Chine ou l'Inde un rempart face aux menées des puissances maritimes. Les vicissitudes du XXème siècle et l'inexorable extension de l'empire US ont retourné la donne : ces arcs insulaires étaient désormais un rideau de fer contenant l'Eurasie (le bloc sino-soviétique durant la Guerre froide) et "protégeant" le Pacifique américanisé.
Ce qui nous amène au Grand jeu actuel. Que le domino philippin tombe et c'est la première chaîne qui est sérieusement ébréchée. La deuxième ligne étant plus virtuelle (car uniquement maritime, sans armature terrestre véritable), c'est le Pacifique, donc les côtes américaines, qui s'ouvrent partiellement à la Chine :
On imagine les gouttes perler sur le front soucieux des stratèges de Washington et Langley qui doivent se prendre la tête à deux mains. Avec son "pivot vers l'Asie", Barack à frites était sensé consolider le mur autour de la Chine, non le détruire...
21 Octobre 2016
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Rédigé par Observatus geopoliticus