lundi 27 octobre 2025

Les États-Unis instrumentalisent la géopolitique énergétique pour tenter de briser les BRICS

Cela pourrait réussir en termes d’optique, mais cela ne fera aucune différence substantielle dans la réalité.

Les dernières sanctions américaines contre la Russie, les premières sous la seconde administration Trump, visent moins à attaquer l'économie russe qu'à instrumentaliser la géopolitique énergétique pour tenter de disloquer les BRICS, et plus particulièrement leur noyau dur Russie, Inde, Chine (RIC). Cette analyse se fonde sur les liens commerciaux étroits entre l'Inde et la Chine avec les États-Unis, malgré leurs droits de douane respectifs de 50 % et 55 %, sur leur rivalité persistante malgré leur rapprochement naissant , et sur leur triangulation avec la Russie.


Dans l'ordre de leur répartition, les échanges commerciaux de l'Inde et de la Chine avec les États-Unis sont bien plus importants que leurs échanges avec la Russie, mais cette dernière fournit une part importante de leur énergie. Si ni l'un ni l'autre ne souhaite payer plus cher son pétrole, le coût global d'une augmentation des droits de douane américains les frappant en guise de sanction pour avoir défié les dernières sanctions, ainsi que les sanctions secondaires qui pourraient être imposées à leurs institutions financières qui facilitent ces échanges, pourrait être encore plus élevé. Cela pourrait sans doute les contraindre à reconsidérer leur position.

Quant au deuxième point, être mieux perçus par les États-Unis que par l'autre sert leurs intérêts mutuels, car aucun des deux ne veut risquer que son rival s'allie aux États-Unis contre lui, ce qui pourrait avoir des implications stratégiques. Ils pourraient donc calculer qu'ils ont plus à perdre en défiant les États-Unis pour obtenir une baisse des prix du pétrole et en maintenant des liens plus étroits avec la Russie si l'autre ne le fait pas aussi, et qu'il vaut donc mieux obtempérer. Cela revient à instrumentaliser le dilemme du prisonnier.

Dans le prolongement de ce qui précède, le dernier point est que chacun a peut-être calculé que son rival n'obtiendrait pas de meilleures relations avec la Russie à ses dépens tant qu'ils se conformeraient tous deux, de manière informelle et partielle (condition clé), aux dernières sanctions américaines, ce que chacun pourrait faire malgré leurs critiques publiques . Il s'avère qu'ils avaient déjà réduit leurs achats de pétrole russe avant même les sanctions, l'Inde ayant chuté de 14 % d'août à septembre et la Chine de 8,1 % au cours des neuf premiers mois de l'année.

Aussi convaincants que puissent paraître ces arguments, il ne faut pas présumer que l'Inde et/ou la Chine cesseront totalement d'importer de l'énergie russe, et encore moins immédiatement. L'offre sur le marché est actuellement insuffisante pour qu'elles le fassent. Même si d'autres augmentent leur production, ces deux pays pourraient ne se désintéresser que progressivement de l'énergie russe, qui serait alors probablement vendue à un prix encore plus bas pour les inciter à conserver certains de leurs achats. Tout s'équilibrera donc probablement.

Néanmoins, les États-Unis pourraient toujours mettre en avant la réduction des importations de l'Inde et de la Chine sous la contrainte (la première étant confirmée par son principal acheteur, la seconde étant seulement rapportée ) afin de déconstruire le mythe selon lequel les BRICS (et en particulier le RIC) œuvreraient tous en harmonie contre les États-Unis, mythe dont Trump s'est déjà plaint . Peu importe qu'une telle guerre de l'information n'ait aucun effet tangible sur les processus mondiaux, puisque seul importe à Trump la perception que les États-Unis ont brisé l'unité des BRICS (et surtout du RIC).

À ce propos, l'opération spéciale russe ne serait pas entravée, même dans le fantasme politique d'un abandon définitif de l'Inde et de la Chine de leur achat d’énergie russe prochainement, puisque le Kremlin dispose d'un fonds de guerre suffisamment important pour continuer à financer sa partie du conflit pendant au moins les prochaines années, même si cela pourrait engendrer des coûts supplémentaires. En conclusion, les États-Unis instrumentalisent bel et bien la géopolitique énergétique pour tenter de disloquer les BRICS, ce qui pourrait réussir en apparence, mais cela ne changera pas grand-chose en réalité.

ANDRÉ KORYBKO

27 OCTOBRE 2025

1 commentaire:

  1. Les USA ont déjà détaché l' INDE de fait! En échange de droit de douanes plus DOUX.....ils vont s'efforcer de détacher AUSSI le Brésil.....: La RSA est dans un marasme complet, suppliant les USA de ne pas les priver de SUBVENTIONS....: Les EAU ont leurs postérieurs protégés par Israel et l'Otan....Sont ils fiables? L’Égypte.....sans commentaires!!!
    Il ne reste que LA CHINE+RUSSIE+IRAN de FIABLES de ces briques en plâtre.....

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