Les
multiples actes de banditisme, d’insubordination et de rébellion qui se
sont succédé, depuis le soulèvement du 14 janvier 2014, dans tout le
pays, doivent en principe interpeller, sérieusement, sociologues,
anthropologues, politicologues et autres intellectuels. L’objectif est
de réfléchir, plus que jamais, sur la qualité de la nature humaine
tunisienne et, surtout, à expliquer la tendance comportementale de
beaucoup de Tunisiens à préférer évoluer dans le non-droit, à créer le
désordre et à détruire l’Etat.
......Il ferait mieux de regarder les vidéos de Daesh et d'Ennahdha |
Est-ce vraiment utile de rappeler ici que si les électeurs tunisiens
avaient tu leurs idéaux et véritables aspirations en votant utile, pour
Nidaa Tounès et Caïd Béji Essebsi, c’est tout juste pour restaurer un
SMIG de sécurité et d’ordre, et leur corolaire, le respect de la loi.
Malheureusement, ce qu’on constate aujourd’hui c’est tout à fait le
contraire, c’est-à-dire la prolifération d’un banditisme multiforme.
En voici les plus visibles.
Une kyrielle de banditismes
Le plus dangereux de ces banditismes est manifestement le
gangstérisme des contrebandiers. Ils viennent de s’illustrer, ces
derniers jours, de manière musclée au poste frontalier de Ras Jedir
(gouvernorat de Médenine). Une centaine de camions de contrebandiers
tunisiens ont forcé le passage frontalier de Ras Jedir.
Les contrebandiers, qui transportaient des marchandises en provenance
de la Libye, avaient refusé de se conformer aux consignes des agents de
la douane et traversé de force les portes sans payer les droits de la
douane, sans que les camions ne soient fouillés, ce qui constitue une
sérieuse menace pour la sécurité nationale.
Ce qui est encore plus scandaleux dans cette affaire, c’est le fait
que ces scélérats soient parvenus à rentrer chez eux dans l’impunité la
plus totale sans être inquiétés par les forces de l’ordre (armée,
police, gendarmerie, douane) qui étaient pourtant en très grand nombre
dans cette zone.
Un tel acte de grand banditisme donne raison à l’actuel ministre
libyen de l’Information et de la Culture, Amor Gouiri, quand il avait
évoqué, dans une interview accordée au quotidien tunisien Assabah, la
préparation d’une «offensive terroriste» contre la Tunisie à partir de
la Libye. Selon lui, la Tunisie doit s’attendre au pire, c’est-à-dire de
voir «des engins militaires équipés de canons 14.5 et 23 envahir la
Tunisie».
En plus clair encore, si aujourd’hui des camions ont forcé le passage douanier, demain ce sera au tour d’engins blindés.
L’autre banditisme est d’ordre corporatiste. Tous les Tunisiens ont
encore à l’esprit l’expédition des marins-pêcheurs du port Mellita (Iles
Kerkennah). Ces derniers, pour libérer un des leurs pris en flagrant
délit de braconnage et de pêche illicite dans le Golfe de Gabès, avaient
décidé, dans un acte de folie, de forcer la libération de leur collègue
en prenant tout simplement en otage 15 pauvres marins-pêcheurs de Gabès
et en incendiant, à leur retour, à Mellita, le poste des garde-côtes de
Sidi Youssef et un véhicule de la garde nationale. De très lourdes
charges dont il faudrait assumer la responsabilité devant la loi.
Le banditisme clanique et tribal s’est beaucoup développé après le 14
janvier 2011. C’est le cas de ces éternels sit-inneurs et coupeurs de
routes et de voies ferrées de Gafsa qui se sont autoproclamés
«propriétaires» du bassin minier de la région.
En bloquant la production du phosphate, ces “indignés“ font certes
perdre au pays de précieux milliards de dinars en devises, mais ils
risquent d’avoir, un jour ou l’autre, le reste du pays sur le dos et de
voir leur bassin minier déclaré “zone militaire“ en plus de l’émergence
d’autres bassins miniers concurrents au Kef (Sra ouertane), à Kasserine
(Jedliane), à Sidi Bouzid (gisement de Meknassy), et à Tozeur-Nefta…
L’heure est désormais à la sagesse. Les députés de cette région doivent assumer leur responsabilité à ce sujet.
Le banditisme policier est aussi à l’ordre du jour. Adossés à leurs
puissants syndicats, les policiers qui transgressent la loi en agressant
journalistes, militants des droits de l’Homme, de simples citoyens
pacifiques, veulent jouir de l’impunité et font généralement des
pressions sur la justice et l’administration pour acquitter leurs
collègues incriminés. C’est tout simplement inadmissible.
Vient ensuite le banditisme syndical avec le déclenchement de grèves
sauvage sans préavis. La dernière grève des agents de la Société des
transports de Tunis (Transtu) a choqué plus d’un. Plus de 2 millions de
personnes se trouvant privées de moyens de transport.
Idem pour les grèves des municipaux, des postiers et autres professions.
Le banditisme des marchands de légumes des marchés de gros et des
marchés centraux s’est manifesté de manière scandaleuse ces quatre
dernières années au point d’empoisonner le quotidien des Tunisiens par
l’effet de la spéculation et de la cherté de vie.
Tout le monde se rappelle du refus des marchands de légumes du marché
central de Tunis de se soumettre au contrôle économique et de braver
les services de contrôle pourtant accompagnés par les forces de l’ordre.
Last and not least, le banditisme est pratiqué également par les
industriels, lesquels ont profité du désordre généré par le soulèvement
du 14 janvier 2011 pour augmenter, de manière illégale, leurs produits.
Le cas du prix du concentré de tomate qui est passé du simple au double
en est une parfaite illustration. Même chose pour les boissons
alcoolisées et à des degrés divers pour les autres produits.
Finalement, au regard de ces quelques banditismes dont la liste est
loin d’être finie, personne ne respecte la loi en Tunisie. Ni
l’administration qui n’a pas le droit de le faire ni les bandits de tout
bord qui sont logiquement dans une zone de non-droit.
Pour le moment, ces actes de banditisme font peur dans la mesure où
ils viennent prouver, par la témérité et la détermination de leurs
fauteurs, le peu de cas qu’on fait, aujourd’hui, de la loi.
Ces banditismes font peur. Attention!
De même, ces actes font peur en ce sens où les personnes impliquées
ont pour point commun la volonté de se faire justice, tous seuls, autre signe
révélateur du degré de confiance que nourrit cette catégorie de
Tunisiens à l’endroit de la justice.
La solution est proposée par le philosophe Alain qui disait: «L’acte
juridique essentiel consiste en ceci que l’on renonce solennellement à
soutenir son droit par la force», et que: «Résistance et obéissance,
voilà les deux vertus du citoyen. Par l’obéissance il assure l’ordre;
par la résistance, il assure la liberté».
Mais là, nous sommes à un autre niveau de pensée, dans la société de non-droit dans laquelle nous évoluons, hélas.
Abou SARRA
Source : http://directinfo.webmanagercenter.com/2015/03/03/tunisie-le-pays-de-tous-les-banditismes/Commentaire :
La frontière libyenne est un haut lieu de trafics en tous genres,
notamment de carburant, de produits manufacturés et alimentaires. Et le
chaos dans lequel est plongé la Libye depuis le conflit qui a conduit à
la chute du régime de Kadhafi, a également favorisé la contrebande
d'armes le long de la poreuse frontière avec la Tunisie et l'Algérie.
Le
conflit entre milices libyennes et l'émergence du groupe jihadiste Daech cette année en Libye inquiètent les autorités tunisiennes qui
craignent de voir le conflit s'étendre.
"Le
terrorisme se nourrit de la contrebande et la contrebande cohabite avec
le terrorisme", a martelé cette semaine le ministre de l'Intérieur Naja
Gharsalli, "cela doit prendre fin".