Menaces, chantages, listes
de victimes démesurément gonflées, escroqueries, arnaques et détournements de
fonds en tout genre : la « Saga des
réparations » telle que nous la relate Anne Kling est riche en
rebondissements.
Repentance ad
aeternam
En effet, depuis 1951 et de traités en accords
toujours plus léonins, l’État hébreu et la diaspora, surtout américaine – donc
assez peu frappée par ce qu’il est convenu d’appeler les crimes contre
l’humanité – n’ont cessé de pressurer l’Allemagne qui, tout récemment encore,
le 6 mars, a consenti par voie législative à verser près d’un
demi-milliard de dollars de retraites à environ 40.000 survivants de
l’Holocauste employés comme ouvriers (rétribués, fût-ce chichement) dans les
ghettos des pays occupés. Cela alors que l’accord de 1975 avait théoriquement
clôturé les réparations acceptées en châtiment des « crimes imprescriptibles ».
Pendant les années qui suivirent la guerre, Israël
avait repoussé avec horreur toute idée de négociations directes avec la
République fédérale ayant succédé au IIIe Reich. C’est donc le
Congrès juif mondial (CJM) qui s’y colla, sous l’impulsion de son président
longtemps indéboulonnable (1948-1977) Nahum Goldmann le bien nommé puisque tout
ce qu’il touchera se transformera en marks. Ce Judéo-Lituanien titulaire de
sept passeports différents n’avait, de son propre aveu formulé dans son Autobiographie,
subi de la part du régime hitlérien « que la perte de ses meubles et de sa
bibliothèque ». Avertissant Konrad Adenauer que la résurrection
industrielle et économique de l’Allemagne dépendait de sa repentance et de sa
générosité, il obtint du vieux chancelier un discours solennel en forme de mea
culpa et le versement à Tel Aviv de 1,5 milliard de dollars censés couvrir
« les frais d’installation et de réintégration des 500.000 réfugiés juifs
[…] accueillis sur la terre promise ». En fait, l’addition ne cessera de
monter au fil des décennies pour atteindre le total – officiel, mais sans doute
dépassé – de 95 milliards de dollars.
Pour atteindre ce sommet qualifié par Goldmann
lui-même d’« astronomique », menaces et chantages avaient alterné,
soutenus par les parlementaires états-uniens eux-mêmes aiguillonnés par le très
puissant AIPAC, le lobby israélien au Capitole, comme Anne Kling en fournit
moult exemples. Un nouvel élan fut donné avec la chute du Mur de Berlin et la
disparition de la RDA. Si celle-ci s’était toujours refusée à toute réparation
de même que les autres satellites soviétiques, la RFA réunifiée dut reprendre à
son compte la dette, avec les intérêts y afférents.
On ne change pas une méthode qui marche et celle
utilisée à l’encontre de l’Allemagne allait être reprise à partir de 1995 avec
le même succès contre la Confédération helvétique, accusée d’avoir abrité des
comptes de nazis et une partie de l’or spolié par eux, mais, surtout, de
n’avoir pas montré grande célérité à rechercher, après la guerre, les
détenteurs juifs de comptes ou leurs ayants droit. En 1962, des recherches
avaient pourtant été entreprises et l’origine de 10 millions de francs suisses
identifiés. « Pour près de 7 millions, écrit l’auteur, les héritiers
furent retrouvés et quant au reste, soit environ 3 millions, les deux tiers
furent remis à la communauté juive suisse et le reliquat à des organisations
caritatives ».
Cela ne suffisait pas au successeur de Goldmann (qui
s’était mis sa communauté à dos en tenant dans ses Mémoires des propos
peu politiquement corrects du style « La vie juive est composée de deux
éléments : ramasser de l’argent et protester ») à la tête du CJM, le Canadien
Edgar Bronfman, dont la famille avait fait fortune au temps de la
Prohibition : patron du trust de spiritueux Seagram, le milliardaire
exigea carrément 10 milliards de dollars. Epouvantée par les mesures de
rétorsion brandies, Berne créa en 1997 un Fonds spécial pour les victimes de
l’Holocauste doté de 298 millions de francs suisses et l’année suivante,
menacées de devoir fermer tous leurs établissements outre-Atlantique, les
banques helvétiques acceptèrent de verser « 1,25 milliard de dollars sur
trois ans pour solde de tout compte »… En principe du moins.
Avant la guerre, « la fortune juive s’élevait à
12,1 milliards de dollars de l’époque. Sur cette somme, souligne Anne Kling,
25% étaient susceptibles d’avoir été transférés ou placés dans un endroit sûr.
Parmi ces endroits sûrs figurait la Suisse […] mais elle a surtout servi
d’intermédiaire vers des destinations bien plus privilégiées comme les
Etats-Unis […]. Mais le sujet est resté dans l’ombre et les organisations
juives se sont bien gardées de l’approfondir. Voilà une question trop explosive
qui se pose [aussi] à l’égard de l’Etat d’Israël, qui n’a jamais permis à une
commission de procéder à ce type d’investigations. Pourtant, beaucoup de
victimes juives avaient placé leurs avoirs dans l’Etat hébreu en vue d’une
future immigration.»
Machine à faire du fric
Les besoins (militaires notamment) de Tel Aviv n’ayant
cessé d’augmenter et les pressions des vigilants de la Mémoire s’exacerbant à
mesure qu’avec Internet les révisionnistes marquaient des points, le CJM fut
épaulé et relayé à partir de 1998 par l’ « International Commission
on Holocaust Era Insurance Claims » – en français CIDIEC mais dite Claims
– et ses myriades d’avocats. Le racket se poursuivit, le magazine juif
américain Moment se félicitant par exemple en
septembre-octobre 2012 d’un « règlement de 5 milliards de
dollars conclu avec l’Allemagne à propos du travail forcé et d’autres
questions, y compris les assurances ». La Claims elle-même admet
d’ailleurs que « les compagnies participantes (y compris la française AXA,
Paris ayant en outre versé 60 millions de dollars en compensation de la
contribution de la SNCF à la déportation vers l’Est) ont contribué pour un
total de 550 millions de dollars au remboursement de requêtes qui ne
portaient pas de noms ou de requêtes humanitaires (?), en plus des requêtes
bien identifiées qui relevaient de leur évidente responsabilité ».
Dans tous les cas, le nombre réel des bénéficiaires se
révélant, une fois la facture acquittée, très inférieur aux estimations, le
« reliquat » de ces sommes colossales est affecté aux desservants de
« la religion de la Shoah » épinglée par Anne Kling : Mémorial
de Yad Vashem, musées de l’Holocauste, innombrables Fondations, etc.
Ambassadeur chargé depuis 2001 du « suivi des actions engagées par la
France pour l’indemnisation de la Shoah », mais oui, S. E. Francis Lott
reconnaissait ainsi à Buenos Aires le 21 avril 2004 que
« l’argent qui n’a pas pu être restitué [aux survivants ou à leurs
descendants] sert à faire revivre et subsister la Mémoire de la Shoah : au
total, une somme de 2,578 milliards de francs a été mise à la disposition d’une
Fondation pour la Mémoire de la Shoah provenant de l’Etat (1,4 milliard),
de la Caisse des dépôts (300 millions), de la Banque de France, de La
Poste, des banques (655 millions), des assurances ». Les nombreux
Français d’Algérie qui n’ont jamais été indemnisés pour les pertes et les
deuils subis du fait du FLN, alors que l’administration et l’armée françaises
étaient encore en place après les Accords d’Evian (19 mars 1962)
apprécieront…
Les chiffres que relève Mme Kling sont accablants, de
même que ses récits des divers détournements de fonds (l’un, à la Claims, porta
sur 50 millions de dollars) et escroqueries ayant jalonné cette « Saga »,
sans parler du train de vie et des émoluments extravagants des dirigeants des
bidules organisant le racket. En Suisse, la Commission Bergier chargée
d’enquêter sur les supposées spoliations coûta ainsi aux Helvètes
800 millions de francs suisses et Lawrence Eagleburger, ancien président
de la Claims, palpait 396.000 dollars par an, plus frais de représentation.
On n’arrête pas la machine à faire du fric : en 2011,
signale Anne Kling, des rescapés ont réclamé 21 milliards de dollars à
l’Autriche (qui a déjà beaucoup payé) « en réparation des spoliations
commises pendant la guerre ». Quant à Tsipras, il persiste à exiger son
quintal de chair bien qu’en plein conflit mondial, malgré la guerre des
partisans et le blocus exercé par les Britanniques, le IIIe Reich
ait envoyé à la Grèce d’importantes quantités d’or pour y juguler une inflation
catastrophique (stabilisant ainsi, non sans succès, la monnaie grecque), ainsi
que des produits alimentaires pour y combattre la famine menaçante, alors même
que le peuple allemand souffrait déjà de la pénurie.
Camille
Galic
Anne Kling, Shoah / La Saga des réparations,
éditions Mithra, février 2015, 256 pages.
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Allons-nous, enfin, pouvoir évoquer la vérité ?
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