Rahm Emanuel, jusqu’à récemment le maire
de Chicago et avant cela un haut conseiller des Présidents Bill Clinton
et Barack Obama, et plus tôt encore un volontaire dans l’armée
israélienne, a tenu un jour ce propos célèbre : « une bonne crise
constitue une opportunité qu’il ne faut jamais manquer de saisir ». Il
voulait dire, bien sûr, qu’une crise peut être exploitée pour couvrir
d’autres manigances politiciennes. C’était une observation qui était
particulièrement vraie quand on travaillait pour un prédateur sexuel
comme Bill, qui a détruit une usine pharmaceutique « terroriste » au
Soudan pour détourner l’attention du scandale Monica Lewinski.
Certes, le gouvernement des États-Unis
concentre son attention sur le coronavirus, tout en utilisant également
la couverture offerte pour intensifier la pression sur les « ennemis »
de près et de loin. Alors que le coronavirus continue de se propager, la
Maison Blanche, Trump et le secrétaire d’État Mike Pompeo ont accru la
férocité de leurs propos belliqueux, apparemment en partie pour
dissuader la Russie, la Chine, l’Iran et le Venezuela. Ironiquement,
bien sûr, aucun des pays intimidés ne menace les États-Unis de quelque
manière que ce soit, mais nous, les Américains, avons appris depuis
longtemps que les perceptions sont plus importantes que les faits en ce
qui concerne l’occupant actuel du bureau ovale et ses deux
prédécesseurs.
I have instructed the United States Navy to shoot down and destroy any and all Iranian gunboats if they harass our ships at sea.
Le dernier exemple de falsification sortant de la Maison Blanche était un tweet présidentiel ciblant le punching bag
habituel, l’Iran. Sur la base d’un incident survenu il y a deux
semaines, Trump a menacé : « J’ai demandé à la marine américaine
d’abattre et de détruire toutes les vedettes iraniennes si elles
harcelaient nos navires en mer. » Les vedettes volantes de l’Iran sont
clairement une force formidable [« shooting down » ne peut s’employer
que pour des aéronefs], mais il est certainement rassurant de noter que
des tirs navals antiaériens y feront face. On peut également observer
que les navires de la marine américaine en question se trouvent dans une
zone maritime généralement appelée golfe Persique, où ils effectuent
des manœuvres au large des côtes iraniennes. Pendant ce temps, des
vedettes volantes iraniennes n’ont pas encore été observées au large du
New Jersey, mais elles attendent probablement d’être transportées sur la
côte Est par ces énormes planeurs transocéaniques qui étaient autrefois construits par Saddam Hussein, du moins à en croire la propagande américaine.
Compte tenu de la couverture fournie par
le virus, cela ne devrait surprendre personne qu’Israël joue également
le même jeu. L’État juif poursuit ses bombardements meurtriers contre la
Syrie, sans presque aucune ligne à ce sujet dans les médias
internationaux. Lors d’une récente attaque au missile, neuf personnes
ont été tuées près de la ville historique de Palmyre.
Trois des morts étaient des Syriens tandis que six autres étaient
présumés être des Libanais chiites soutenant le gouvernement de Damas
[ces sources pro-occidentales sont peu crédibles : si des membres du
Hezbollah avaient été touchés, la riposte aurait été immédiate]. Israël
considère de facto tout chiite comme un « iranien » ou un « agent
iranien » et donc un « terroriste » susceptible d’être tué à vue.
Mais la plus grande histoire liée au
coronavirus concerne la politique intérieure d’Israël. Benjamin
Netanyahou et son principal adversaire Benny Gantz sont parvenus à un
accord pour former un gouvernement national, apparemment pour faire face
à la crise sanitaire. Le rusé Netanyahou, qui continuera à être Premier
ministre dans le cadre de l’accord, a ainsi conservé son pouvoir sur le
gouvernement, tout en mettant un terme aux tentatives du pouvoir
judiciaire de le juger et condamner pour corruption. Dans le cadre de
l’accord avec Gantz, Netanyahou aura un droit de veto sur la nomination
du nouveau ministre de la justice et du nouveau procureur général,
garantissant la nomination de personnes qui rejetteront les accusations.
Et d’autres choses viendront, avec
l’assentiment de Washington. Les élections américaines doivent se tenir
dans un peu plus de six mois et Donald Trump croit clairement qu’il a
besoin du soutien politique de Netanyahou pour dynamiser ses partisans
qui sont des chrétiens sionistes fanatiques, et pour obtenir le soutien
financier des oligarques juifs Sheldon Adelson, Bernard Marcus et Paul
Singer. Il est donc temps d’établir une contrepartie, qui sera
l’influence du gouvernement israélien en coulisses auprès des Juifs
américains puissants et riches pour qu’ils agissent en faveur de Trump,
tandis que la Maison Blanche fermera les yeux lorsque Israël annexera ce
qui reste de la Cisjordanie palestinienne. Pompeo a accueilli
favorablement le nouveau gouvernement israélien et a confirmé
que l’annexion de la terre palestinienne sera « en dernière instance la
décision d’Israël », ce qui revient à un feu vert pour Netanyahou.
Un vote sur l’annexion de la Cisjordanie
se tiendra à la Knesset au début du mois de juillet, suivi immédiatement
de mesures pour incorporer les colonies juives à Israël proprement
dit. Selon le journal libéral israélien Haaretz, l’annexion prévue a soulevé certaines inquiétudes
parmi quelques organisations juives libérales américaines, car elle
convaincra de nombreux progressistes aux États-Unis qu’Israël est
vraiment devenu un État d’Apartheid. J Street a averti que l’annexion «
mettrait gravement en péril l’avenir d’Israël en tant que patrie
démocratique pour le peuple juif, ainsi que l’avenir de la relation
américano-israélienne » et a même suggéré de mettre fin à l’aide
américaine si cette mesure était effectivement prise. La plupart des
autres groupes ostensiblement libéraux ont adopté l’habituel processus
sioniste en deux étapes, c’est-à-dire condamner la décision mais ne
préconiser aucune mesure efficace pour l’empêcher. Et il convient
également de noter que les organisations juives les plus importantes et
les plus puissantes comme l’American Israel Public Affairs Committee
(AIPAC) et l’Organisation sioniste d’Amérique (ZOA) n’ont soulevé aucune
objection.
Les Juifs libéraux individuels non affiliés, y compris ceux qui se considèrent comme sionistes, sont généralement préoccupés par cette décision, bien que leur argument soit assez hypocrite, basé sur leur conviction que l’annexion détruirait pari passu
toute possibilité de solution à deux États, portant atteinte aux droits
des Palestiniens et à la « Démocratie juive ». Certains ont même salué
le changement, notant qu’il créerait de facto un seul État qui
devrait finalement évoluer vers une démocratie moderne avec des droits
égaux pour tous. Une telle pensée est cependant absurde. Israël, que ce
soit sous Netanyahou ou sous n’importe quel avatar fasciste qui lui
succèdera finalement, se considèrera toujours comme un État juif et fera
tout ce qu’il faut pour maintenir cela, quitte à déposséder les Arabes
restants de leurs terres et de leurs biens, à les priver de leur statut
juridique et à les forcer à partir en tant que réfugiés. C’est quelque
chose que l’on pourrait appeler un nettoyage ethnique, voire un
génocide.
Quant aux Américains dotés de conscience
qui espèrent un changement si l’individu nommé Joe Biden bat Trump, ils
peuvent également oublier cette option. Biden a déclaré au New York Times :
« Je crois qu’une solution à deux États reste le seul moyen d’assurer la sécurité à long terme d’Israël tout en maintenant son identité juive et démocratique. C’est aussi le seul moyen de garantir la dignité des Palestiniens et leur intérêt légitime à l’autodétermination nationale. Et c’est une condition nécessaire pour profiter pleinement de l’ouverture qui existe pour une plus grande coopération entre Israël et ses voisins arabes. Pour toutes ces raisons, encourager une solution à deux États reste dans l’intérêt vital des États-Unis. »
Malheureusement, quelqu’un devrait
informer Joe que ce train a déjà quitté la gare sans retour possible en
raison de l’expansion des colonies de l’État juif. Belles paroles de la
part de l’homme aspirant à la présidence, Biden étant aussi étroitement
lié que possible au lobby israélien pour son soutien politique et
l’argent qu’il lui fournit : il se pliera docilement devant l’AIPAC et
ses épigones, aussi facilement qu’un costume bon marché. Il a fameusement déclaré :
« Il n’est pas nécessaire d’être juif pour être sioniste : je suis
sioniste »,
ou encore « Je m’appelle Joe Biden et tout le monde sait que
j’aime Israël ».
Son débat avec Sarah Palin pour la vice-présidence en
2008 est devenu embarrassant lorsque lui et Palin se sont tous deux
engagés dans de longs soliloques où ils ont rivalisé de déclarations
d’amour passionné pour Israël. C’est bien la vérité. Chaque politicien
aux dents longues aime Israël.
*********
Par Philip M. Giraldi , ancien spécialiste de la lutte contre le
terrorisme et officier du renseignement militaire de la CIA qui a servi
dix-neuf ans à l’étranger en Turquie, en Italie, en Allemagne et en
Espagne. Il a été chef de la base de la
CIA pour les Jeux olympiques de Barcelone en 1992 et a été l’un des
premiers Américains à entrer en Afghanistan en décembre 2001. Philip est
directeur exécutif du Council for the National Interest, un groupe de
défense basé à Washington qui cherche à encourager et à promouvoir une politique étrangère américaine au Moyen-Orient conforme aux valeurs et aux intérêts américains.
C'est vraiment écoeurant !!
RépondreSupprimer