Ne quittez pas l’Ukraine des yeux : c’est toujours le pays le plus susceptible de déclencher la Troisième Guerre mondiale

Cet article de l'invité de Jim Rickards est parfait dans son analyse de la guerre russo-ukrainienne et de son potentiel d’explosion en quelque chose de beaucoup plus grand. Il expose les mensonges inhérents à la position occidentale à l’égard de la Russie et pourquoi la poursuite de ce faux récit ne peut pas avoir de bons résultats. Soit quelqu’un avec une bonne logique intervient, soit nous gravissons l’échelle d’escalade jusqu’à un point de non-retour, et cela entraînera des conséquences catastrophiques pour les peuples occidentaux – vous et moi.

Par Jim Rickards, au The Daily Reckoning

Beaucoup de gens semblent avoir oublié la guerre en Ukraine. C'est une erreur.

La Russie est en train de vaincre lentement mais sûrement l’Ukraine, ce qui devient de plus en plus évident pour tout le monde, sauf pour les plus purs et durs anti-russes.

Cela conduit au désespoir des cercles d’élite occidentaux déterminés à arrêter la Russie d’une manière ou d’une autre. Dans leur esprit, ils ne peuvent tout simplement pas laisser Poutine gagner. Ils pensent que si Poutine gagne en Ukraine, il ira ensuite dans les pays baltes, en Pologne et ailleurs.

Vous savez que l’Occident devient désespéré suite aux récentes menaces du Français Emmanuel Macron d’envoyer des troupes en Ukraine.

Le vice-président de la Douma russe, Piotr Tolstoï (descendant du grand écrivain russe Léon Tolstoï), a prévenu que les troupes françaises seraient des cibles prioritaires pour les forces russes si elles entraient en Ukraine.

Même si la France envoit des troupes indépendantes de l’OTAN, cela nous mettrait sur une voie très dangereuse qui mènerait finalement à un conflit direct entre l’OTAN et la Russie. Et cette voie aboutit finalement à une guerre nucléaire.

Tolstoï a ajouté qu’il ne faudrait « que deux minutes pour neutraliser Paris » [1]. Il n’est pas difficile d’imaginer la rapidité avec laquelle les choses pourraient dégénérer si la France décidait d’envoyer des troupes en Ukraine.

Plus d'escalade

Pendant ce temps, l'OTAN se prépare à envoyer des F-16 en Ukraine. Les aérodromes ukrainiens sont très vulnérables aux attaques russes, d’autant plus que les défenses aériennes ukrainiennes sont actuellement fortement épuisées et que l’armée de l’air russe devient de plus en plus active en Ukraine.

Mais si l’OTAN permet aux F-16 d’être basés sur ses propres bases aériennes, Poutine a prévenu que ces aérodromes deviendraient une « cible légitime » si des frappes contre les forces russes étaient lancées depuis ces aérodromes.

Soit dit en passant, la Russie possède des missiles hypersoniques que l’OTAN n’a pas la capacité pratique d’abattre, donc ces attaques seraient probablement couronnées de succès. Bien entendu, l’OTAN devrait riposter de la même manière. Vous pouvez imaginer où tout cela pourrait mener.

Nous sommes déjà bien avancés sur l’échelle d’escalade. Et plus vous montez, plus vous risquez de perdre la face si vous reculez. J’en avais prévenu dès le début de la guerre.

Mais l’idée selon laquelle la Russie représente une menace existentielle pour l’OTAN ou l’Europe est absurde.

Poutine n’a rien à gagner et tout à perdre

Tout d’abord, la théorie selon laquelle Poutine envahirait d’autres pays s’il gagne en Ukraine est absurde. L’armée russe manque d’hommes et de matériel pour occuper l’Ukraine tout en envahissant d’autres pays.

Nous ne sommes pas ici l’Union soviétique avec ses énormes armées de chars prêtes à envahir l’Europe occidentale. Et le communisme soviétique est mort depuis longtemps, il n’y a donc aucune base idéologique pour que la Russie envahisse l’Europe. La Russie est aujourd’hui une nation chrétienne orthodoxe et conservatrice.

Mais plus important encore, Poutine n’a absolument aucune raison d’envahir l’un de ces pays, qui sont membres de l’OTAN. Qu'est-ce qu'ils ont que la Russie n’a pas ?

Cela ne ferait que déclencher l’article 5 de la Charte de l’OTAN, qui stipule qu’une attaque contre un membre est une attaque contre tous, invitant ainsi une réponse massive de l’OTAN. À ce stade, vous êtes sur la voie rapide vers la guerre nucléaire.

Poutine en est pleinement conscient.

Les alarmistes aiment rappeler ce que Poutine a dit un jour dans un discours : « Celui qui ne regrette pas l’Union soviétique n’a pas de cœur. »

Ils considèrent cela comme la preuve qu’il veut recréer l’Union soviétique. Mais ils omettent commodément ce qu’il dit ensuite :

"Celui qui veut la retrouver ou la reconstituer n'a pas de cerveau."

Quoi que vous pensiez de Poutine, il a définitivement un cerveau. Il n’a pas l’intention de restaurer l’Union Soviétique.

Ce n'est pas seulement une question d'intentions

Mais comme toute grande puissance, la Russie a des intérêts, et l’Ukraine a toujours représenté un intérêt stratégique vital pour la Russie.

Et la Russie ne tolérera pas que l’Ukraine rejoigne une alliance de l’OTAN hostile à la Russie. Les critiques affirment que l’Ukraine est une nation libre et indépendante qui peut rejoindre l’OTAN si elle le souhaite. La Russie n’a pas son mot à dire, même si l’Ukraine est frontalière avec la Russie.

Eh bien, je suppose qu'ils n'ont jamais entendu parler de la doctrine Monroe. Les États-Unis ont essentiellement déclaré que l’hémisphère occidental tout entier était leur domaine privé. Mais une grande puissance comme la Russie ne peut pas avoir son mot à dire dans son propre jardin ?

Les critiques disent également que l’idée d’une invasion de la Russie par l’OTAN est ridicule. C’est juste de la paranoïa russe. Et c’est vrai, l’OTAN ne va pas réellement envahir la Russie. Mais dans le monde géopolitique, il n’y a pas que les intentions qui comptent. Il y a  aussi des capacités.

Comme Bismarck l’a noté un jour : « Ce qui compte en politique, c’est la capacité à agir ; les intentions changent, les capacités demeurent. »

Étant donné la longue histoire des invasions subies par la Russie, il n’est pas difficile d’imaginer pourquoi elle peut sembler un peu paranoïaque face aux menaces extérieures.

Si vous regardez une carte, certaines parties de l’Ukraine se trouvent en réalité à l’est de Moscou.

Les États-Unis continueront-ils la guerre ?

Bien entendu, l’Ukraine ne peut pas continuer le combat sans l’aide américaine. Biden souhaite donner 60 milliards de dollars d’argent frais à l’Ukraine pour mener la guerre. Cela s’ajoute aux plusieurs centaines de milliards déjà fournis.

Cette proposition a été proposée l'été dernier, mais elle est depuis bloquée au Sénat et à la Chambre des représentants. La Chambre a adopté un projet de loi distinct visant à aider Israël l’automne dernier, mais le Sénat a refusé de l’adopter parce qu’il souhaite lier cette aide à des fonds destinés à l’Ukraine.

Le Sénat a adopté un projet de loi qui fournirait une aide à l’Ukraine, à Israël et à Taiwan en un même paquet, combinée à de l’argent pour une fausse sécurité des frontières.

Ce projet de loi était si impopulaire qu’il n’a même pas pu être adopté par le Sénat. La Chambre a ensuite insisté pour que des crédits soient votés régulièrement avant d’examiner l’Ukraine.

Ce processus s'est achevé le 23 mars, mais le Congrès est désormais en vacances de Pâques de deux semaines, donc rien d'autre ne se passera avant la mi-avril. Personne n’a même répondu à la question la plus importante : que ferait l’Ukraine avec cet argent.

Ils ne peuvent pas acheter les obus d’artillerie de 155 mm dont ils ont cruellement besoin parce que les arsenaux occidentaux sont vides et que les usines ne sont pas équipées pour en fabriquer plus d’une poignée. Il faudra des années pour accroître cette capacité de fabrication.

Vous pouvez entrer dans un magasin avec un portefeuille rempli de billets de 100 $, mais si les étagères sont vides, cela ne vous sert à rien. Les produits ne sont tout simplement pas là.

Pendant ce temps, les armes miracles occidentales telles que les chars, les missiles de croisière, les véhicules blindés de transport de troupes, l’artillerie à guidage de précision HIMARS et les batteries antimissiles ont toutes été détruites, neutralisées ou abattues par la Russie.

La guerre en Ukraine n’a pas été une bonne publicité pour les armes occidentales.

La chute

Pour répéter ce que j’ai dit plus tôt, l’Ukraine est en train de perdre piteusement la guerre. La Russie avance sur les fronts sud et est de l’Ukraine.

Pourtant, la pression sur le président de la Chambre, Mike Johnson, pour qu’il fasse quelque chose demeure. Les bellicistes républicains au Sénat, comme Lindsey Graham et Joni Ernst, ne lâcheront rien. De nombreux républicains à la Chambre, comme Chip Roy et Marjorie Taylor Greene, s'opposent à Johnson sur ce point.

Incroyablement, Johnson pourrait répondre à la pression avec une solution pire qu’une appropriation pure et simple. Il pourrait soutenir les efforts visant à voler 300 milliards de dollars d’actifs de la banque centrale russe détenus sous la forme de titres du Trésor américain.

Cela détruirait la confiance dans le dollar américain, dans les titres du Trésor américain et dans l’État de droit américain. La Russie récupérerait rapidement cette perte en saisissant 300 milliards de dollars ou plus d’actifs occidentaux encore en Russie. Personne au Congrès ne semble comprendre tout cela.

S’ils donnent suite, les conséquences économiques seraient déjà assez graves. Mais si cette guerre ne s’arrête pas bientôt, nous pourrions, à terme, être confrontés à des retombées nucléaires.

Leohohmann.com – 4 avril 2024

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NOTES de H. Genséric

[1] Le temps qu’il faudrait à un missile Sarmat (vitesse 7 Km/s) pour atteindre les grandes capitales européennes s’il était tiré depuis Kaliningrad : 106 secondes soit un peu moins de deux minutes pour atteindre Berlin. 200 secondes soit un peu plus de 3 minutes pour toucher Paris et Londres.

"Rapides, fiables et vraiment déplaisants"

Jeudi 28 mars, la Maire de Paris, Anne Hidalgo,  a visité le centre d’entraînement de l’équipe olympique ukrainienne. Elle a confirmé son soutien "aux athlètes et à l’ensemble du peuple ukrainien", tout en affirmant "aux athlètes russes et biélorusses qu’ils ne sont pas les bienvenus à Paris". Une séquence qui est restée en travers de la gorge de Vladimir Soloviev. Véritable voix du Kremlin et star de la chaîne de télévision d’État, Russiya-1, l’animateur a envoyé un message à la France en ce week-end de Pâques :

"À l’époque comme aujourd’hui, on s’en fiche que vous soyez ou non contents de nous voir […] Comme l'a dit notre collègue, le député de la Douma Tolstoï, vous les Européens, vous ne comprenez rien et n’avez rien appris. Comme 1945 l’a montré, vous avez été incapables d’effectuer la dénazification. […] Comme d’habitude, tous vos préparatifs à la guerre ne vous aideront pas. Alors, Paris ne veut pas accueillir nos athlètes ? Accueillez donc nos missiles hypersoniques ! Rapides, fiables et vraiment déplaisants".

Hannibal Genséric