vendredi 19 décembre 2025

Le changement de nom de l'Asie centrale en Turkestan dans les programmes scolaires turcs est la dernière démonstration de puissance douce de la Turquie

La Russie doit se préparer à une accélération des processus d'intégration globale menés par la Turquie le long de son front sud et aux graves conséquences que cela pourrait avoir pour sa sécurité.

Famille altaïque

Pays d'Asie Centrale | Comprendre aujourd'hui, retenir pour demain

Le ministre turc de l'Éducation a annoncé fin novembre que les programmes scolaires de son pays remplaceraient l'Asie centrale par le Turkestan, dans le cadre de son plan d'unité panturque. Cette annonce coïncide avec l'invitation faite par les cinq républiques d'Asie centrale à l'Azerbaïdjan de participer à leur réunion consultative annuelle des chefs d'État, qui prend ensuite le nom de « Communauté d'Asie centrale » (CAC), suite à la présentation début août de la « Route Trump pour la paix et la prospérité internationales » ( TRIPP ). Tout cela augure mal des intérêts russes.

Il a été expliqué précédemment comment « l'Occident pose de nouveaux défis à la Russie sur toute sa périphérie sud » en faisant de la Turquie le fer de lance de l'influence occidentale dans le Caucase du Sud et en Asie centrale via l'Accord sur les ADPIC. De plus, « les accords miniers américains en Asie centrale pourraient accentuer la pression sur la Russie et l'Afghanistan », renforçant ainsi l'encerclement de la Russie par la Turquie. La Russie doit désormais faire face à un possible changement d'identité (et de loyauté) de ses membres vis-à-vis du Turkestan.

Le Tadjikistan fait exception, étant le seul membre non turcophone et ne participant pas à l'« Organisation des États turcophones » (OET), dirigée par la Turquie, contrairement aux autres (les autres membres en sont dotés, tandis que le Turkménistan a le statut d'observateur). Quoi qu'il en soit, le dernier défi qui se pose sur le front sud de la Russie est la transformation de leurs identités post-soviétiques de républiques d'Asie centrale (ou de l'Azerbaïdjan, simplement d'Azerbaïdjan) en une appellation de « Turkistan », proposée par Turkiye, nom donné autrefois à l'Asie centrale.

Néanmoins, bien que ce « retour à l’histoire » s’inscrive dans la tendance multipolaire du civilisationnalisme, selon laquelle les États civilisationnels (comme la Turquie, qui a durablement marqué la culture et la société au fil des siècles) restaurent leurs « sphères d’influence », cet exemple précis a de graves conséquences pour la Russie. L’OTS, initialement une organisation socioculturelle, assume désormais des fonctions économiques, voire sécuritaires, et le CCA, récemment formé avec l’Azerbaïdjan, fonctionne essentiellement comme un sous-groupe de l’OTS.

L'Accord sur les ADPIC jouant un rôle de catalyseur, cette conjonction de facteurs devrait accélérer considérablement les processus d'intégration globale menés par la Turquie dans ce vaste espace géographique s'étendant de l'Anatolie au Caucase du Sud et jusqu'au cœur de l'Asie centrale eurasienne, remettant ainsi en question l'influence russe dans cette région. L'intensification, potentiellement imminente et peut-être inévitable à terme, de la coopération en matière de sécurité entre les partenaires traditionnels de la Russie en Asie centrale et la Turquie, membre de l'OTAN, pourrait engendrer un dilemme sécuritaire.

Il convient de préciser que l'intégration socioculturelle et l'expression d'une fierté civilisationnelle partagée ne sont en rien problématiques, puisque la Russie encourage précisément cela au sein de ce qu'elle appelle le « Monde russe », dont certaines parties recoupent le sous-groupe de facto du CCA au sein de l'OTS. Le risque réside toutefois dans le fait que l'érosion de l'influence russe parmi ces derniers, facilitée par la transformation progressive de leur identité, passant de républiques post-soviétiques distinctes d'Asie centrale à une entité faisant partie du Turkestan, puisse inciter des acteurs mal intentionnés à tenter une prise de pouvoir.

Cela pourrait conduire des élites corrompues se réclamant de la culture turco-soviétique à substituer à l'influence économique russe, historique et mutuellement avantageuse, celle de la Turquie en Asie centrale, tout en cherchant à moderniser leurs forces armées selon les normes de l'OTAN, à l'instar de l'Azerbaïdjan qui y est récemment parvenu . Plus ces élites et leurs populations s'identifieront au Turkestan turc, par opposition à leurs États-nations post-soviétiques respectifs (ce que la dernière initiative de la Turquie vise précisément à encourager), plus ce scénario risque de se confirmer.

19 DÉCEMBRE 2025                       Source

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Pourquoi le nom de certains pays d'Asie finit par "stan" ?

En Asie centrale, sept pays ont un nom qui finit par -stan.

Le suffixe -stan signifie en effet pays, nation ou lieu en perse. Il serait issu de l'indo-européen steh, qui signifie se tenir et qui, selon l'hypothèse, aurait donné stand (se tenir) en anglais, Stadt (ville) en allemand ou encore stan (appartement) dans certaines langues slaves.

Dans le monde, sept pays, tous en Asie centrale, possèdent un nom se terminant en -stan et correspondent aux zones où les anciens indo-iraniens se sont établis. Cinq d'entre eux (le Kazakhstan, le Kirghizistan, l'Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Turkménistan) faisaient partie de l'URSS, créés de toute pièce dans les années 1920. "

Ainsi, le nom Afghanistan signifie pays ou lieu des Afghans, Ouzbékistan le pays des Ouzbeks, le Turkménistan pays des Turkmènes... Exception faite pour le Pakistan, contraction de pak (pur, saint) et de istan. Pakistan le pays des purs.

Ailleurs, plusieurs régions possèdent aussi le suffixe -stan, comme le Kurdistan, le Rajastan indien ou la république russe du Tatarstan.

H. Genséric


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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