l'Union européenne (UE) a été choquée
et étourdie lorsque le Sénat américain a révélé hier que la vérité derrière le
mème [1] de l’" Hystérie
anti Russe " qui balayait l'Amérique depuis des mois, était artificiellement
provoqué par les entreprises énergétiques géantes des États-Unis, qui cherchent
à détruire les approvisionnements de l’Europe en gaz russe, afin de capturer ce
business de plusieurs centaines de milliards $, et ce, en violation de toutes
les lois internationales. De la même manière, la nouvelle " hystérie anti
Qatar" et l'ancienne "hystérie anti iranienne" accusant ces deux pays d’être les premiers suppôts
du terrorisme dans le monde, vise le même objectif : éliminer deux
concurrents tout aussi sérieux que la Russie des marchés mondiaux du gaz. L’outil
aux mains américaines est toujours le même : des sanctions économiques
imposées à la Russie, à l’Iran et au Qatar.
En effet, le Sénat des États-Unis vient d’adopter, par un vote de
98-2, un «projet
de loi de sanction russe». Les
sénateurs, aussi menteurs que leurs médias, prétendent que ce projet de loi est
en réaction à l'ingérence russe, qui n’a jamais été prouvée, dans l'élection
présidentielle américaine de 2016. Mais le véritable but de ce projet de loi
viole le droit international, affecte les entreprises européennes, et a pour objectif réel de
bénéficier aux secteurs pétrolier et gazier américains, ont déclaré, en colère, Berlin
et Vienne.
N'ayant rien à voir avec l'intervention supposée de la Russie aux
élections américaines, ce «projet de loi de sanction russe» du
Sénat américain n'est rien d’autre qu'un «instrument
de guerre économique» destiné à détruire la sécurité énergétique
existante de l'Union européenne avec la Russie. Il a pour but de remplacer le
gaz russe par celui des compagnies de gaz américaines. Parlant pour l'ensemble de l'UE, l'Allemagne
et l'Autriche ont vertement
répliqué en déclarant :
«L'approvisionnement de
l’Europe en énergie ne concerne que l’Europe, et non pas les États-Unis!
Nous ne pouvons pas
accepter le fait de menacer les entreprises européennes, qui contribuent au
développement du système européen d'approvisionnement en énergie, par des
sanctions extraterritoriales qui violent le droit international.
Les sanctions en tant
qu'instrument politique ne devraient pas être liées à des intérêts économiques
qui menacent les entreprises allemandes, autrichiennes et les autres
entreprises européennes qui participent aux projets d'approvisionnement en gaz
tels que Nord Stream II avec la Russie ou qui les financent. Ces menaces
avec des pénalités sur le marché américain ajoutent un aspect absolument
nouveau et très négatif dans les relations entre les États-Unis et l'Europe.
La déclaration précise en
outre que l'intention de Washington d'imposer de nouvelles sanctions à la
Russie n'est guidée ni par des raisons politiques ni humanitaires, mais par un
intérêt économique.
"Ce problème concerne
en réalité les ventes de gaz condensé des États-Unis [vers l’Europe] afin de
chasser les sociétés russes d'approvisionnement en énergie du marché européen.
L'objectif réel [de ces sanctions] est de fournir des emplois à l'industrie
gazière et pétrolière américaine ".
Le représentant commercial de la Russie aux États-Unis, Aleksander Stadnik, indique que
ces sanctions du Sénat des États-Unis créent des obstacles pour compagnies d'énergie
de Russie, d'Iran, du Qatar et d'autres, tout en facilitant l’accès
aux marchés étrangers pour les entreprises américaines. Il a ajouté: "Pour
l’Amérique, cela
est devenu une pression manifeste pour son industrie du pétrole et du gaz avec l'utilisation d'instruments non
commerciaux et de méthodes interdites".
Poutine à Medvedev , à propos des nouvelles sanctions américaines contre la Russie : "ça m'en touche l'une sans faire bouger l'autre !" |
Pourquoi le GNL américain pose-t-il un problème ?
- D'abord, parce que les volumes à
venir sont colossaux : les cinq usines de liquéfaction actuellement en
construction outre-Atlantique vont représenter une production de
65 millions de tonnes par an d'ici à fin 2018. « C'est l'équivalent d'un nouveau Qatar !
», note un industriel. A titre de comparaison, en 2015, la production
mondiale de gaz naturel liquéfié (GNL) a atteint, selon Wood Mackenzie,
250 millions de tonnes.
- Ensuite, les exportations
américaines sont basées sur un modèle totalement différent de ce qui se
faisait jusqu'à présent. Alors que les opérateurs des usines du Qatar ou
d'Australie ont pré-vendu la quasi-totalité de leur production sur le
long terme (20 ans par exemple), à des utilisateurs finaux et à des prix
indexés sur le cours du pétrole, les exploitants américains comme
Cheniere n'ont prévendu qu'une partie de leur production, sans que
l'acheteur soit engagé sur la destination finale, et à des prix indexés,
eux, sur le prix du gaz aux États-Unis. « Plus flexibles, les contrats permettent de diriger le GNL américain vers les marchés les plus rémunérateurs
». Un changement majeur, alors que les
marchés du gaz sont aujourd'hui très cloisonnés dans trois zones, les États-Unis, l'Europe, et l'Asie, avec des prix très différents.
Or, les
exportations russes de gaz vers l’Europe ont atteint un niveau record en janvier 2017.
En
décembre 2016, le négociant de matières premières Glencore et le Qatar
Investment Authority, le fonds souverain du pays, ont acquis une
participation de 19,5 % dans Rosneft, la compagnie pétrolière d’État russe, pour un montant de 11 milliards de dollars.
Résultat :
le Qatar a obtenu un accès plus facile au marché européen et est devenu un partenaire de poids de la Russie.
Alors que
l'Union européenne reçoit 34% de ses approvisionnements en gaz naturel en
provenance de Russie via des pipelines, le «schéma»
américain, comme en témoignent ces sanctions du Sénat américain, consisterait à
remplacer le gaz naturel russe bon marché par le «Gaz Naturel Liquéfié, GNL», qui
serait expédié par grands navires-citernes vers le marché européen.
La seule société américaine qui exporte actuellement du GNL sur le
marché européen, est le géant de
l'énergie de Houston, au Texas, Cheniere Energy,
qui a l’habitude de verser des « pots
de vin » faramineux aux sénateurs et autres législateurs américains (ces
"pots-de-vin" sont appelés des donations [Link and
Link]). Elle
a expédié, la semaine dernière, le
premier navire-citerne de GNL américain vers la
Pologne, ennemi traditionnel de la Russie. Depuis l'ouverture de son terminal
d'exportation au début de l'année dernière, Cheniere a expédié 44 pour cent de
ses exportations en Amérique latine et 28 pour cent en Asie. En plus de
l'expédition inaugurale de la semaine dernière en Pologne, la société a
effectué des livraisons dans d'autres pays européens comme le Portugal,
l'Espagne et les Pays-Bas.
Cheniere Energy est, pour le moment, la seule
entreprise des États-Unis qui exploite un terminal d'exportation de GNL. Mais
la Commission
fédérale de réglementation de l'énergie des États-Unis, signale qu'une demi-douzaine d'autres
terminaux d'exportation de GNL (qui coûtent
des milliards de dollars) est en construction.
Bien que certains experts du Kremlin croient que la Chambre des représentants des
États-Unis ne passera jamais ce «projet de loi de sanction russe» du
Sénat, le président Poutine a néanmoins ordonné
des manœuvres massives de toutes les forces de missiles nucléaires de la
Fédération, car il considère que la mise en œuvre cette loi équivaudrait à "un acte de guerre". Naturellement les
grands médias de propagande ne soufflent mot de ces manœuvres gazières, qui sont
derrière toutes les sanctions américaines.
Iran, Russie et Qatar en tête
Selon BP, les plus importantes réserves de gaz naturel se trouvent en Russie et au Moyen-Orient. Le classement des plus grandes réserves est le suivant :- L’Iran, avec 34 020 milliards de m3 de réserves, un niveau en augmentation constante depuis 1995 (le pays disposait alors d’un peu plus de 19 000 milliards de m3 de gaz naturel).
- La Russie, avec 32 640 milliards de m3 de réserves, un niveau globalement stable depuis 1992.
- Le Qatar, avec 24 530 milliards de m3 de réserves, un niveau en très légère baisse depuis 2001 – après une forte augmentation, faisant passer les réserves qataries de 8 500 milliards de m3 en 1995, à 25 780 milliards de m3 en 2001 !
- Le Turkménistan, avec 17 480 milliards de m3 de réserves de gaz naturel.
- Les États-Unis, avec 9 770 milliards de m3 de réserves
Avec le quartet gazier Algérie / Russie / Iran / Qatar en train de se
constituer en une sorte d'OPEP du gaz, les Américains ne savent plus comment briser cette concurrence sérieuse, d'autant plus que leur gaz est non seulement beaucoup plus cher, mais ses procédés d'extraction (fracturation hydraulique) sont infiniment plus polluants que tous les autres. Alors ils veulent faire payer aux autres pays, surtout européens, des "sanctions" contre les concurrents, tout en obligeant ces Européens à acheter le gaz américain au prix fort. C'est aussi cela, le rôle de vassal des Américains que joue l'UE depuis des lustres.
NOTE
[1] Un mème internet est un élément ou un
phénomène repris et décliné en masse sur internet. C'est
un anglicisme venant
d'« Internet meme ». Il peut être prononcé de
plusieurs façons : « mème » ou encore « meem ».
C'est
une acception récente du terme mème, qui
définit ce phénomène dans sa globalité. D'après l’Oxford English Dictionary, un
« mème » est un élément d'une culture ou d'un
ensemble de comportements qui se transmet d'un individu à l'autre par imitation
ou par un quelconque autre moyen non-génétique.
Hannibal GENSERIC