Nous avons droit à des entretiens à bâtons
rompus entre un homme qui connaît son métier, Oliver Stone, qui s’intéresse
plus à la personnalité de son interlocuteur qu’à sa stratégie politique ou ses
ressorts psychologiques et Vladimir Poutine qui se présente comme un Russe de
Saint-Petersbourg qui a trouvé sa voie grâce au judo.
Voilà un homme maître de lui et de ses sentiments. Sa parole est riche mais
jamais débridée, débitée sans hâte, toujours adagio et altruiste, rarement le
président emploie le pronom « je » auquel il préfère le
« on ». Il ne porte jamais de jugement sur ses homologues, s’abstient
de toute attaque personnelle et parle de son pays, son histoire et sa grandeur
sans pathos, en toute lucidité.
Nous avons droit à des entretiens à bâtons
rompus entre un homme qui connaît son métier, Oliver Stone, qui s’intéresse
plus à la personnalité de son interlocuteur qu’à sa stratégie politique ou ses
ressorts psychologiques et Vladimir Poutine qui se présente comme un Russe de
Saint-Petersbourg qui a trouvé sa voie grâce au judo.
Voilà un homme maître de lui et de ses sentiments. Sa parole est riche mais jamais débridée, débitée sans hâte, toujours adagio et altruiste, rarement le président emploie le pronom « je » auquel il préfère le « on ». Il ne porte jamais de jugement sur ses homologues, s’abstient de toute attaque personnelle et parle de son pays, son histoire et sa grandeur sans pathos, en toute lucidité.
Voilà un homme maître de lui et de ses sentiments. Sa parole est riche mais jamais débridée, débitée sans hâte, toujours adagio et altruiste, rarement le président emploie le pronom « je » auquel il préfère le « on ». Il ne porte jamais de jugement sur ses homologues, s’abstient de toute attaque personnelle et parle de son pays, son histoire et sa grandeur sans pathos, en toute lucidité.
Ce don d’analyse objective du
réel est ce qui caractérise le mieux Poutine. En bon adepte des arts mariaux
il sait que gagner commence par jauger l’adversaire de manière correcte et
cohérente, sans se départir d’objectivité. Poutine n’est pas un idéologue, chez
lui pas de gros mots vides comme : démocratie, égalité, fraternité etc. Il
est pragmatique comme un Anglais de la City.
Il a compris,
une fois l’idéologie marxiste en morceaux, qu’il fallait renouer avec la
tradition et la foi pour que son pays retrouve ses racines.
Il sait que
son pays est riche et regorge de matières premières qui font saliver des
groupes apatrides qui en matière d’impérialisme donnent des consignes très
strictes aux politiques qu’ils comblent de leurs cadeaux s’ils sont sages. Par
conséquent, le président de toutes les Russie réalise que le danger est réel de
voir ces derniers tout faire, y compris la guéguerre, pour mettre le grappin
sur le pactole.
Ainsi, sur
l’Otan, il s’interroge : pourquoi encore ce traité de défense conçu à
l’époque pour contrer les visées soviétiques ? Pourquoi aujourd’hui
entourer son pays de missiles balistiques de longue portée ? Pourquoi
influer sans vergogne sur les politiques intérieures d’État indépendants comme
l’Ukraine, la Géorgie, la Moldavie etc. ? Pourquoi prendre
systématiquement la défense d’oligarques mafieux qui ont pillé le pays quand
l’Union Soviétique s’est effondrée ?
Et la
réponse est simple et limpide : parce que les États-Unis ne veulent pas de
concurrent qui lui soit comparable.
Et que
l’Europe est vassale des États-Unis.
Sur l’islam,
même constat clinique : la Russie qui comptera trente pour cent de
musulmans à la fin du siècle, est sereine car les musulmans russes sont tous
des Russes de souche.
Et sur la
guerre, Poutine, est tout aussi ferme : s’il faut la faire, il la fera,
comme il a mis fin aux rêves expansionnistes des Géorgiens ou au rapt de la
Crimée par les Ukrainiens.
Il y aurait
bien des choses à ajouter, le mieux est de vous conseiller de voir et revoir
ces entretiens qui vous présentent un homme d’État d’une stature que seuls ceux
qui ont connu, jadis, De Gaulle ou Churchill, peuvent réaliser.
Rien à voir
avec nos produits marketing issus de grandes écoles, de cercles fermés ou
d’idéologie aussi stériles qu’imaginaires, petits êtres qui font deux tours et
puis s’en vont. Ou un seul comme notre précédent …
Vladimir
Poutine est un homme, un de ceux que Diogène, en vain, recherchait sur l’Agora.
On sait ce
qu’il advint d’Athènes …
Source : https://skanderbergblog.wordpress.com/
Merci pour cette conversation, M. Poutine
Oliver Stone
étant citoyen des USA, ces entretiens filmés entre juin 2015 et février 2017
portent pour l’essentiel sur les tensions géopolitiques entre Moscou et
Washington. Lorsque le cinéaste lui demande, en février 2017, si l’élection d’un nouveau
président américain est susceptible de changer quelque chose, Vladimir Poutine
répond : “presque rien”. C’est “la bureaucratie”, explique-t-il, qui
exerce le pouvoir à Washington, et cette bureaucratie est inamovible. En effet.
A peine élu, Donald Trump est devenu l’otage de
“l’Etat profond”.
L’intérêt de ces
entretiens est qu’ils mettent en perspective la pesanteur du “deep State”, sa dimension structurelle. Les Russes ont le sens de l’histoire,
et c’est pourquoi M. Poutine, pour comprendre le monde actuel, évoque
l’usage de l’arme atomique contre Hiroshima et Nagasaki (août 1945). Privé de
toute justification militaire, ce crime de masse a plongé l’humanité dans l’ère
nucléaire. Pour Moscou, c’est le moment-clé de l’histoire contemporaine, celui
où tout bascule. En faisant peser la menace d’une destruction totale,
Washington a pris une responsabilité gravissime.
La course aux
armements n’est pas une invention moscovite. Dans les années 1980, une URSS
fossilisée s’était laissée piéger par cette compétition mortifère, précipitant
sa chute. Dans les années 2000, c’est encore Washington qui suspend les
discussions sur les armes anti-missiles et s’empresse d’élargir l’OTAN
jusqu’aux frontières de la Russie. Que dirait-on à Washington si la Russie
nouait une alliance militaire avec le Mexique et le Canada ? Quand Oliver
Stone évoque l’affaire – aujourd’hui oubliée – du destroyer US qui s’était
dangereusement approché de la Crimée, M. Poutine demande ce que ce navire
pouvait bien faire dans les parages. Mais la propagande a l’art d’inverser les
rôles, et elle parla de provocation russe.
Passionnante
mise en perspective, aussi, à propos de la lutte contre le terrorisme. La seconde guerre de Tchétchénie
(1999-2009) fut déclenchée par l’agression djihadiste contre le Daghestan
russe. Or les USA y ont joué un rôle particulièrement trouble.
“Les Américains nous soutiennent
en paroles contre le terrorisme, mais en réalité ils l’utilisent pour
fragiliser notre situation intérieure”, dit le président russe.
En 1980,
Brzezinski tenait déjà les combattants du djihad antisoviétique pour des
“Freedom Fighters”. Dans
le Caucase, en Syrie, en Libye, la CIA a armé, financé et manipulé les
desperados de l’islamisme radical. La Russie soviétique, puis
post-soviétique, les a toujours combattus.
Chaque fois que
son interlocuteur (qui n’est pas dupe) mentionne la rhétorique occidentale sur
la menace russe, M. Poutine demeure le plus souvent impassible, esquissant
parfois un sourire narquois. A Moscou, on l’a compris depuis longtemps : les Américains font le contraire de
ce qu’ils disent et ils vous accusent de faire ce qu’ils font eux-mêmes.
L’accusation d’ingérence russe dans l’élection présidentielle américaine (2016)
est un véritable cas d’école. Lorsque la présidente du conseil national
démocrate démissionna à la suite de la publication d’emails compromettants,
Julian Assange a nié que sa source fût russe. Mais l’establishment a quand même
pointé un doigt vengeur vers Moscou.
Car il fallait
un coupable, et il ne pouvait être que moscovite. “Dans cette affaire,
souligne M. Poutine, les Américains prétextent une intervention extérieure
pour régler leur problèmes intérieurs”. Pour les USA, la Russie est à
la fois un repoussoir et un bouc-émissaire. Un repoussoir, quand on brandit la
prétendue “menace russe” pour contraindre les Européens à faire
bloc derrière les USA. Un bouc-émissaire, quand on attribue à Moscou la
responsabilité de sa propre incurie. Tout se passe comme si l’affrontement
idéologique hérité de la “Guerre froide” avait fourni un prêt-à-penser
inusable. Le manichéisme américain peint le monde en noir et blanc, et Moscou
sera toujours la source du mal.
L’accusation
d’ingérence russe dans la démocratie américaine est d’autant plus ahurissante
que les dirigeants US, eux, interviennent ouvertement en Russie. Lors de la
campagne présidentielle russe de 2012, Victoria Nuland (qui a déclaré :
« j’encule l’UE »), secrétaire d’État adjoint US, a déclaré : “Nous travaillons à l’intérieur et à
l’extérieur de la Russie avec les militants russes qui souhaitent renforcer
l’état de droit et la liberté de la presse, avec les LGBT”. Que
dirait-on si le gouvernement russe “travaillait” aux USA avec des militants
américains qui combattent le gouvernement des États-Unis ? Mais cette
hypothèse est invraisemblable, car comme le dit M. Poutine, “nous ne nous mêlons pas des affaires intérieures des autres
pays”.
Respect de la souveraineté des
États et refus de l’ingérence étrangère, ces deux principes (qui en réalité
n’en font qu’un) définissent l’approche russe des relations internationales.
Si Moscou intervient en Syrie, c’est à la demande d’un gouvernement légitime en
proie à l’invasion étrangère et au terrorisme de masse. Si la Russie a
accueilli la Crimée, c’est parce que le peuple de Crimée l’a voulu
expressément, au terme d’un référendum organisé par le Parlement de Crimée. Et
cette sécession de la péninsule n’eût peut-être pas vu le jour si un putsch des
nationalistes ukrainiens, soutenu par la CIA, en février 2014, n’avait renversé
le pouvoir légalement issu des urnes à Kiev.
Mais il est vrai que la Russie,
elle, ne fomente pas de coup d’État avec l’aide de néo-nazis. Elle ne finance
pas d’ONG pour déstabiliser les autres pays au nom des droits de l’homme, elle
n’envoie pas ses troupes pour y instaurer la “démocratie”, et elle ne bombarde
pas les populations pour “punir” les dirigeants qui lui déplaisent. Elle
ne provoque pas la guerre civile pour s’approprier les ressources des autres
pays, elle ne finance, n’arme ou ne manipule aucune organisation terroriste.
Que l’on sache, la Russie n’a jamais utilisé l’arme atomique, ses services
secrets n’ont jamais créé de “centres de torture” à l’étranger,
et elle n’envoie pas ses drones tueurs dans une douzaine de pays. Elle ne
couvre pas les océans de ses porte-avions, elle a
5 bases militaires à l’étranger quand les USA en ont 725, et son
budget militaire représente 8% de celui du Pentagone. La Russie telle qu’elle
est, gagne à être connue.
Merci, M. Poutine, pour cette
conversation.
Bruno
GUIGUE, 1/7/2017
COMMENTAIRE :
Les
médias mainstream américains ont assumé le rôle de protéger les Américains de
points de vue alternatifs, ce qui explique pourquoi les longues interviews
d’Oliver Stone avec Vladimir Poutine inquiètent tant.
Il y a eu un
temps où je pensais qu’il était de la responsabilité d’un journaliste américain
d’entendre toutes les parties d’une dispute et ensuite d’expliquer le problème
aussi justement que possible aux Américains, ainsi ils seraient armés d’assez
de faits pour établir leurs propres jugements et agir comme véritables
souverains dans une démocratie.
Je réalise à
quel point cela semble naïf aujourd’hui, alors que le journalisme américain a
glissé vers un nouveau paradigme dans lequel les principaux médias croient
devoir soutenir la version de l’establishment, quelle que soit, et écarter ou
discréditer tous faits gênants ou analyses alternatives.
Aujourd’hui le New
York Times, le Washington Post et le reste des médias mainstream
n’autorisent qu’au compte-gouttes l’expression de quelques vues alternatives,
et se contentent sinon d’accumuler les dernières trouvailles de la pensée
unique.
C’est pourquoi
la série de quatre interviews du metteur en scène Oliver Stone avec le
Président russe Vladimir Poutine sur « Showtime » ne manquera pas de
provoquer l’indignation et la moquerie de la quasi-totalité des grands médias
américains. Comment peut-on oser laisser Poutine expliquer sa vision des défis
auxquels le monde fait face ? Pourquoi diable un américain sain d’esprit
traiterait le leader russe avec politesse et – mon Dieu ! – respect ?
En ce qui
concerne Poutine, le nouveau paradigme des médias américains requiert soit le
tombereau d’injures frontales soit le caviardage systématique de ses
explications, en particulier si elles s’appuient sur des informations qui
présentent le gouvernement américain sous un mauvais jour. C’est qu’il faut
protéger les Américains de « la propagande et la désinformation
russes ».
En d’autres
termes, puisque les « gardiens de la vérité » mainstream enjoignent
les Américains de ne pas regarder « The Putin Interviews » de Stone,
la série touchera probablement une audience relativement réduite et la
diabolisation de Poutine et de la Russie continuera tambour battant.
Le public
américain peut ainsi être préservé de quelques révélations historiques
dérangeantes et du déconcertant vertige qui vient des informations qui
perturbent « ce que tout le monde sait être vrai ».
Source : Robert Parry, Consortium News, 13-06-2017