« Il appartient au gouvernement israélien de prendre
toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces ». C’est
par ces mots que le président socialiste François Hollande annonce son
soutien au gouvernement israélien trois jours après le début de
l’attaque militaire contre Gaza qui a déjà fait alors des milliers de morts...
Hollande obséquieux devant Netanyahou : C'est l'image de la France devant Israël |
Beaucoup ont été à juste titre scandalisés, d’autres également nombreux ont été naïvement surpris. Une simple lecture de l’histoire du socialisme français suffit pourtant à saisir que la continuité idéologique du parti socialiste est sans faille sur cette question : le soutien au sionisme aujourd’hui plonge ses racines dans le colonialisme qui a marqué toute l’histoire du socialisme français. Pour illustrer ce propos, analysons l’approche du colonialisme des trois principales figures théoriques du socialisme français (2).
Sur les fonts baptismaux jaurésiens
Le parti socialiste a choisi l’année 2005 pour fêter son centenaire
c’est-à-dire qu’il prend comme point de départ de son histoire le
congrès de fondation de la SFIO de 1905. Ce faisant, il occulte la
partie antérieure de l’histoire du socialisme français. La Section
Française de l’Internationale Ouvrière est en effet créée par la fusion
du Parti Socialiste Français dirigé par Jean Jaurès et du Parti
Socialiste de France dirigé par Jules Guesde. Les deux leaders
s’opposent pendant de longues années sur la question coloniale. En
prenant 1905 comme date de référence, c’est Jaurès, le partisan d’une
colonisation « éclairée », qui est plébiscité et Guesde,
l’anticolonialiste (3), qui est rejeté.
A la différence de Jaurès, Jules Guesde condamne en effet la
colonisation comme système global de domination : « la colonisation
c’est le vol, c’est le pillage, c’est le meurtre, ce sont les crimes
commis contre de paisibles populations, pour les profits d’une poignée
de capitalistes, avides de gains (4). »
Jaurès pour sa part ne dénonce pas la colonisation comme système.
« Ces peuples sont des enfants » même s’ils sont « loin d’être sots »,
dit-il en 1884, à propos de peuples colonisés auxquels il convient
d’apporter « quelques notions très simples de langue et d’histoire
française, de commerce, de christianisme » pour que réussisse « l’œuvre
difficile de conquête morale et d’assimilation (5) ».
Dix ans plus tard, lors du conflit franco-anglais de Fachoda en 1898,
Jaurès défend « le droit certain de la France à s’ouvrir un débouché,
de l’Afrique centrale vers le Nil (6) ».
De même, en 1903, il défend la thèse selon laquelle « l’occupation
morale du Maroc par la France sera un prolongement de la généreuse
politique arabe qu’il faut développer en Algérie (7) ». Trois ans avant
sa mort en 1911, il continue à défendre l’idée d’un accord sur le
projet colonial articulé à un désaccord sur la méthode : « La
civilisation européenne se répand et doit se répandre sur le continent
noir. Je n’ai jamais contesté pour ma part la nécessité, l’idéal, la
beauté de cette pénétration. Nous n’avons différé et nous ne différons,
au Maroc ou ailleurs, que sur les méthodes, mais je ne jette pas un
regard de dédain sur l’œuvre commencée. Je ne l’enveloppe pas d’un
anathème sans nuance (8). »
Les thèses de Jaurès l’emportent définitivement au sein de la SFIO à
partir de 1908. Les socialistes ne bougeront plus de cette position : la
défense d’une colonisation « humanisée ». La même thèse coloniale reste
un leitmotiv dans ce qu’ils appellent le « conflit
israélo-palestinien ».
Le colonialisme culturaliste de Léon Blum
Léon Blum ne rompt pas avec l’idée de mission civilisatrice que
défend Jaurès. En pleine guerre du Rif, alors que les troupes françaises
sont en action contre le peuple marocain, il réaffirme à la chambre des
députés la nécessité de « l’expansion de la pensée, de la civilisation
française » et « le droit et même le devoir de ce qu’on appelle les
races supérieures, revendiquant quelquefois pour elles un privilège
quelque peu indu, d’attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au
même degré de culture (9) ».
Comme Jules Ferry en 1885 (10), Léon Blum professe l’inégalité entre
les peuples. Il ne s’agit certes pas pour lui d’une inégalité biologique
mais d’une inégalité culturelle et de civilisation. La colonisation
devient dans cette logique une œuvre d’émancipation en permettant le
déclenchement de la très longue période de rattrapage du retard culturel
et civilisationnel.
Dans l’approche blumiste, il n’existe aucune universalité du droit.
Les droits des indigènes doivent pour lui dépendre de leur degré de
civilisation. Ce qui n’est pas sans rappeler certains discours
contemporains sur l’intégration des Français issus de l’immigration, sur
l’incompatibilité supposée de l’Islam avec la civilisation française et
sa laïcité, sur l’intégration impossible des Roms en raison de leur
culture, etc.
La notion « d’indigène évolué » est logiquement le centre de
l’approche de Blum. Au pouvoir lors du Front Populaire, il initie en
1937 un projet de loi dit « Blum-Viollette » accordant à 21 000
indigènes sur six millions la citoyenneté française. Devant la pression
des colons, il n’est même pas discuté au parlement.
Mais la contrepartie de la sollicitude envers les « indigènes
évolués » est la « fermeté » vis-à-vis de ceux qui refusent la
« civilisation française » et qui s’évertuent à réclamer l’indépendance.
Alors qu’elle a participé aux combats contre les ligues fascistes, l’Étoile Nord-Africaine, organisation nationaliste algérienne, est
dissoute en janvier 1937 (11) et son leader Messali Hadj est emprisonné.
En mars, c’est au tour du comité d’action marocaine d’être dissous.
Dans les mois qui suivent, c’est la répression sanglante contre les
révoltes populaires au Maroc et en Tunisie (12).
Ici aussi, la distinction binaire entre des « bons » et des
« mauvais » n’est pas sans rappeler les propos actuels des socialistes
sur le « Hamas » comme étant la cause de ce qu’ils appellent
« l’interruption du processus de paix ».
Le colonialisme stratégique de Guy Mollet
La SFIO revient au pouvoir en 1956 avec la présidence de Guy Mollet.
Il reste dans l’histoire celui qui demande les pouvoirs spéciaux en
Algérie et les obtient par 455 voix, c’est-à-dire la quasi-unanimité, y
compris les voix des députés communistes. Ces pouvoirs déclenchent ce
qu’André Philip a dénommé le « crime de pacification (13) » c’est-à-dire
la légalisation de la répression, de la torture et d’une guerre à
grande échelle contre les civils au prétexte de lutter contre les
« terroristes ».
Alain Savary, qui considère Guy Mollet comme un « camarade en
République », explique comme suit le raisonnement du président du
conseil : « (Il) était avant tout obsédé par une idée très en honneur
dans le parti (…) qu’il fallait commencer par libérer les individus
avant de libérer le pays. Des hommes et des femmes ont été marqués par
cet argument : ne pas libérer le pays trop tôt de crainte de les livrer
aux féodaux. (14) »
En 1956, nous en sommes encore à la vieille thèse de la mission
civilisatrice. Le colonisé, l’indigène, l’arabe, le musulman, etc., est
perçu comme porteur de féodalité et de barbarie et il revient au
colonisateur de l’éduquer et d’évaluer sa capacité à vivre libre.
Mais, à cette première causalité culturaliste commune à Jaurès et
Blum, s’en ajoute désormais une seconde de nature stratégique. Dans le
monde de l’après seconde guerre mondiale, Guy Mollet est hanté par la
peur de la perte de l’empire colonial auquel il rattache la « grandeur
française ».
Cet empire est fragilisé par le nouveau rapport de forces issu de la
seconde guerre mondiale, par la victoire vietnamienne à Dien Bien Phu,
par Bandung mais aussi par les velléités des États-Unis d’imposer leurs
intérêts dans les possessions coloniales de leurs alliés.
L’anticommunisme s’articulera à l’argument culturaliste pour justifier
une défense « socialiste » de l’empire : les indigènes immatures pour
l’indépendance sont de surcroît manipulables par les communistes de
Moscou.
C’est la même image de l’indépendantiste comme ne pouvant être que
« fanatique » qui conduit à considérer que « Nasser est le nouvel
Hitler, Israël sa Tchécoslovaquie (15) ».
Ici aussi, comment ne pas penser aux discours socialistes
sur « Israël, seule démocratie de la région », « sur l’obscurantisme du
Hamas » ou encore sur « le danger iranien en Palestine ».
Nous ne pouvons pas clore ce chapitre sans rappeler ce que disait à
l’époque François Mitterrand, autre figure idéologique du parti
socialiste français. Alors ministre de l’intérieur, il déclara coup sur
coup :
« En Algérie, la seule négociation, c’est la guerre » (5 novembre) ;
« L’Algérie, c’est la France et la France ne reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne » (7 novembre) (16).
Le sionisme culturaliste de Blum
La matrice idéologique du parti socialiste est ancrée dans un
imaginaire colonialiste qui ne pouvait que l’orienter vers le soutien au
mouvement sioniste. Ni en 1896, lorsque Théodor Herzl publie à Leipzig
le texte fondateur du sionisme (17) officiel, pas plus qu’en 1897
lorsqu’il organise le congrès sioniste mondial ou en 1905, année durant
laquelle le choix de la Palestine est définitivement arrêté au VIIème
congrès, le sionisme ne rencontre en France plus qu’une curiosité
marginale. En conséquence, on ne trouve pas chez Jaurès de point de vue
sur le sionisme, à notre connaissance du moins.
Avec Léon Blum les choses sont bien différentes. Décrivant sa
rencontre avec le sionisme, Léon Blum précise « dès le lendemain de la
première guerre mondiale, il [Weizmann (18)] m’enrôla au service de ses
desseins en s’aidant parfois de mes avis (19) ».
Dès 1919, Léon Blum joue un rôle actif dans la défense du projet
sioniste en intervenant pour obtenir la levée de l’opposition française
au mandat anglais sur la Palestine :
« C’est un grand orgueil et une grande satisfaction pour moi de
penser que j’ai pu l’aider dans la difficile négociation dont dépendait
la création du Home National juif, et qui consistait à obtenir la levée
simultanée de l’opposition française contre l’attribution du mandat
palestinien à la Grande-Bretagne et de l’opposition américaine contre
l’attribution du mandat syrien à la France (20). »
Il participe dès sa création en 1928 au « Comité socialiste pour la
Palestine ouvrière » et est désigné l’année suivante au comité élargi de
« l’agence juive pour la Palestine » (21). Dans son texte, les juifs
devant le problème allemand, Léon Blum s’émerveille devant les kibboutz
qu’il présente comme la solution à la question juive. « Comparez les
jeunes pionniers avec leurs grands-parents du ghetto et jugez à quel
point on peut transformer une race humaine ! (22) » s’exclame le leader
socialiste.
L’admiration est sincère et s’inscrit en continuité avec sa vision
des « indigènes » et de la colonisation. Si les Palestiniens font écho
dans la pensée de Blum aux indigènes arriérés, les militants sionistes
construisant les kibboutz font également écho aux civilisateurs
coloniaux. De même que la colonisation visait à civiliser les Africains,
le sionisme visait à « transformer l’Orient en Occident (23) » pour
reprendre la formule éclairante d’Edward Saïd.
Tout comme la colonisation visait à régénérer des peuples
retardataires et féodaux, le sionisme a pour idée centrale « que
l’Orient est dégénéré, qu’il a besoin d’être reconstruit conformément
aux notions politiques de l’Occident éclairé (24) » complète Saïd.
Pour reprendre une formule de Léon Blum, Israël apparaît dans cette
logique comme « le rêve transposé au niveau de la réalité historique
(25) ». Une colonisation idéale en quelque sorte.
Le soutien socialiste au sionisme n’est, on le voit, le
résultat d’aucun grand complot international. Il est tout simplement la
continuité idéologique du colonialisme socialiste. C’est d’ailleurs la
même raison qui conduit les socialistes au culturalisme intégrationniste
en ce qui concerne les immigrés et leurs enfants français. Pour eux
aussi, l’approche n’est pas celle du traitement égalitaire mais celle de
l’intégration et de la civilisation.
Le sionisme stratégique de Guy Mollet
Le sionisme de Guy Mollet ajoute la donne stratégique à
l’argumentaire culturaliste. Le soutien à Israël s’inscrit comme défense
de « l’Occident » face à ses ennemis : les communistes et les luttes de
libérations nationales hier, l’islam, « l’intégrisme », l’Iran, etc.,
aujourd’hui.
C’est cette approche stratégique qui le conduit à l’agression contre l'Égypte lors de la nationalisation du canal de Suez en 1956. Pour Guy
Mollet, faire la guerre à Nasser c’était mener le même combat que celui
pour le maintien du colonialisme par la guerre d’Algérie. Les Israéliens
ne s’y trompent pas, comme en témoigne cette phrase cynique de Shimon
Perez de retour d’une rencontre avec Guy Mollet à Matignon en vue de
préparer l’agression contre l’Égypte :
« Nos liens avec la France se poursuivront aussi longtemps que
seront tués des Français en Algérie et des Égyptiens sur les frontières
d’Israël. » Ce sionisme stratégique n’est pas sans rappeler la
décolonisation stratégique de l’empire français : « Lâcher l’Asie pour
garder l’Afrique », puis « lâcher l’Afrique subsaharienne pour garder le
Maghreb », puis « lâcher la Tunisie et le Maroc » pour garder
l’Algérie » et enfin « lâcher l’Algérie et garder le Sahara » (26).
Le camouflet reçu à Suez ne change pas la préoccupation stratégique
centrale de Guy Mollet. Au contraire, elle le conduit pour « assurer la
défense d’Israël » non seulement à lui livrer massivement des armes mais
aussi à lui donner accès à la technologie permettant de produire
l’arme nucléaire. La technologie française permettant la production de
l’arme nucléaire n’est pas encore totalement au point mais la France
sait désormais produire des réacteurs. Guy Mollet va aider Israël en
septembre 1956 à la construction dans le désert du Néguev d’un
« réacteur de « recherche », le « EL-102 », connu sous le nom de Dimona
et destiné à produire du plutonium (27) », rappelle le chercheur Ben
Kramer.
Plus de dix ans après Suez, au moment de la guerre dite « des six
jours », le discours et l’analyse de Guy Mollet sont les mêmes et ce
dernier continue à « dénoncer Nasser [qui] a employé les mêmes procédés
qu’Hitler (28) ». On le retrouve logiquement dans le conseil de
parrainage du « Comité pour le droit d’Israël à l’existence » au côté
MM. Gaston Monnerville, Gaston Deferre, François Mitterrand.
En 1956 comme en 1967 et comme aujourd’hui, le sionisme
stratégique socialiste justifie l’idée d’une guerre préventive basée sur
le droit de légitime défense d’Israël.
Il est vrai que Guy Mollet connaît bien la logique de « légitime
défense » au nom de laquelle 60 résistants algériens furent guillotinés
alors qu’il était président du conseil.
La construction d’un amalgame entre antisémitisme et antisionisme
L’héritage sioniste du parti socialiste n’est pas une réalité inerte
et atemporelle. Il évolue et s’adapte aux besoins idéologiques d’Israël.
Or l’État sioniste est confronté à une réalité nouvelle : celle du
développement de la solidarité avec le peuple palestinien. En
particulier depuis les intifada, cette solidarité s’est massifiée lors
des agressions militaires israéliennes.
Même si le mouvement de solidarité ne prend cette forme massive que
de manière épisodique, elle est perçue comme dangereuse par l’état
israélien et ses soutiens occidentaux. De même, le mouvement BDS Boycott-Désinvestissement-Sanctions
est une forme d’action qui n’est pas sans inquiéter par les
conséquences économiques qu’il peut entraîner si son développement
devenait massif.
Ces nouvelles réalités suscitent l’émergence de nouvelles thèses
idéologiques dont la principale depuis une décennie est la construction
médiatique et politique d’un amalgame entre l’antisémitisme et
l’antisionisme.
Le parti socialiste est aux premières lignes de la construction de
cet amalgame. En témoigne par exemple le communiqué du Conseil
Représentatif des Institutions Juives de France daté du 30 janvier 2012
relatant la rencontre avec François Hollande du 25 janvier dans lequel
« le candidat socialiste a assuré le CRIF de son engagement de fermeté
contre les actes antisémites et antisionistes (29) ».
De même, Manuel Valls dénonce un « nouvel antisémitisme qui se cache
derrière un antisionisme de façade. Un antisionisme qui n’est d’ailleurs
pas moins contestable (30) ».
On ne compte plus non plus les élus socialistes condamnant les
« slogans antisémites » dans les manifestations en désignant ainsi les
slogans antisionistes.
Il convient ici de rappeler quelques fondamentaux sur la manière dont
Théodor Herzl, fondateur du sionisme officiel, aborde la question de
l’antisémitisme. Le projet sioniste s’argumente dans son analyse comme
une réponse à l’antisémitisme européen.
Pour Herzl, le sionisme est la seule réponse solide à
l’antisémitisme. Dans son journal intime, il considère même
l’antisémitisme comme un allié objectif du sionisme : « les antisémites
deviendront nos amis les plus loyaux et les nations antisémites nos
alliées (31). »
Le raisonnement est logique. L’antisémitisme par sa violence pousse
les citoyens de confession juive à chercher dans un ailleurs la solution
à leurs difficultés. De même qu’il existe des sionistes antisémites, il
existe des antisionistes qui ne sont pas antisémites. L’existence
d’antisémites sionistes n’est pas nouvelle.
La figure d’Edouard Drumont nous le rappelle. L’auteur de la France
Juive propose tout simplement de « les renvoyer tous en Palestine
(32) ». Ayant pris connaissance de la naissance du mouvement sioniste,
il précise sa pensée : « Le Juif qui aspire à se constituer une patrie
est digne d’estime ... Le Juif qui veut avoir un drapeau est un brave
Juif ... Avoir une patrie, n’est-ce pas le plus impérieux de tous les
devoirs ? La France aux Français ! La Palestine aux Juifs (33). »
La diffusion de l’amalgame entre antisionisme et antisémitisme se
réalise au début de la décennie 2000 par la publication du livre de
Pierre-André-Taguieff, La nouvelle judéophobie. Selon lui « l’emploi
euphémisé d’ « antisionisme » implique la substitution de cette
expression à cette autre qui, trop explicite ou « directe », serait
disqualifiante : antisémitisme (34) ».
La dénonciation des crimes israéliens ne serait rien d’autre que la
réactivation des vieux mythes antisémites : « Dans la propagande
« antisioniste », le peuple palestinien est transfiguré en peuple de
« héros » et de « martyrs », jusqu’à être christifié en peuple d’enfants
martyrs ce qui réactive le vieil imaginaire antijuif du meurtre
rituel.(35) »
Toute critique d’Israël est dans cette analyse inévitablement
antisémite.
De surcroît, cette nouvelle judéophobie serait le fait des musulmans. D’où une conclusion limpide et sans ambiguïté politique : « Le pro palestinisme est assurément le principal vecteur de la nouvelle haine des Juifs à laquelle on donne souvent le nom d’« antisionisme (36) ». »
De surcroît, cette nouvelle judéophobie serait le fait des musulmans. D’où une conclusion limpide et sans ambiguïté politique : « Le pro palestinisme est assurément le principal vecteur de la nouvelle haine des Juifs à laquelle on donne souvent le nom d’« antisionisme (36) ». »
C’est à cette source que le parti socialiste emprunte son amalgame
entre l’antisémitisme et l’antisionisme. La ficelle est bien grosse
puisqu’elle consiste à amalgamer le soi-disant « antisionisme » d’un
Alain Soral (qui préfère se dénommer lui-même judéophobe ou
judéocritique) ayant pour but d’instrumentaliser à ses propres fins
commerciales et politiques la colère contre les crimes d’Israël, et le
mouvement antisioniste analysant l’état d’Israël comme un état colonial
et la lutte du peuple palestinien comme une lutte anticoloniale. Comme le parti socialiste, Alain Soral amalgame antisionisme et antisémitisme.
L’héritage sioniste n’est pas seulement ancien mais aussi
ancré dans l’identité colonialiste du socialisme français, elle-même
issue de la conviction d’une supériorité culturelle des civilisations
européennes sur les autres. Cela ne signifie pas que tous les membres ou
électeurs du parti socialiste soient automatiquement sionistes. En
revanche, sous-estimer que l’appareil du parti socialiste fonctionne
comme un système sélectionnant son élite à partir d’une série de
constantes idéologiques, parmi lesquelles se trouve le soutien au
sionisme, revient à faire preuve d’une grande naïveté.
Said Bouamama
sociologue et militant associatif.
L'exemple tunisien de la connivence entre "socialisme" et islamisme
Khelil ZAOUIA, au centre sur la photo, entouré de deux individus
porteurs d’écharpe, au milieu des miliciens d’Ennahdha, parti islamiste
tunisien, sous le fanion noir et blanc des islamo-fascistes de tous
pays, cofondateur et membre du bureau politique du Forum démocratique
pour le travail et les libertés, plus connu sous le nom d’Ettakatol,
parti membre permanent de plein droit (il a le droit à la parole et le
droit de vote ) de l'Internationale Socialiste , depuis août 2012 (et
dont le Secrétaire général, Mustapha Ben Jaafar, est l’un des Présidents
honoraires) , Khelil ZAOUIA, membre des deux gouvernements islamistes,
connus sous le nom de Troïka 1 et Troïka 2, dirigés par Ennahdha, estime
qu’aucune femme n’est capable d’être la Présidente de la République
tunisienne*.
Notes :
1) Communiqué de presse de l’Elysée du 10 juillet 2014.
2) Nous choisissons volontairement de na pas faire référence aux socialistes « de droite » qui n’ont cessés de développer des positions ultracolonialistes et racistes sans jamais être exclus du parti.
3) Jules Guesde condamne les expéditions du Tonkin, de Madagascar et du Soudan. Il faut cependant l’abandon de ces positions anticolonialistes conséquentes à partir de 1912, date à laquelle, il soutient la proposition du député Lucien Deslinières de concessions pour une « colonisation socialiste » du Maroc.
4) Cité dans Démocratie Nouvelle, n° Spécial, l’Afrique noire vous parle, 1958, p. 78.
5) Jean Jaurès, conférence pour l’Alliance française à Albi, 1884, Œuvres de Jean Jaurès, tome 1, Fayard, Paris, 2009, p. 443.
6) Jean Jaurès, Fachoda et la paix du monde, Œuvres de Jean Jaurès, tome 7, volume 2, Fayard, Paris, 2011, p. 140.
7) Jean Jaurès, La France et le Maroc, Œuvres de Jean Jaurès, volume 2, Rieder, Paris, 1931, p. 47.
8) Jean Jaurès, Jean Jaurès, Discours à la chambre des députés du 6 avril 1911, Œuvres de Jean Jaurès, tome 17, Fayard, Paris, 2014.
9) Léon Blum, débat sur le budget des colonies à la chambre du 9 juillet 1925, Débats parlementaires, Assemblée, Session Ordinaire (30 juin-12 juillet 1925), paru J.O. p. 848.
10) Gilles Manceron, Le tournant colonial de la République, Jules Ferry contre Georges Clémenceau et autres affrontements parlementaires sur la conquête coloniale, La Découverte, Paris, 2007, p. 60.
11) Conf : Daniel Guérin, Ci-git le colonialisme, Mouton, Paris, 1973.
12) Léon Blum n’est plus alors président du conseil mais reste néanmoins vice-président.
13) André Philip, Le socialisme trahi, Plon, Paris, 1957, p. 165.
14) Alain Savary, Un camarade en République, Presses Universitaires de Lille, 1987, pp. 523.
15) Guy Mollet, Interview à la télévision française sur la crise de Suez, 12 novembre 1956, archives INA, http://fresques.ina.fr/jalons/fiche...
16) André Mandouze, Un chrétien dans son siècle, de résistance en résistances, Karthala, Paris, 2007,p. 120
17) Théodor Herzl, L’Etat des juifs, essai d’une solution moderne de la question juive, La Découverte, Paris, 2008.
18) Chaim Weizmann est un des fondateurs du mouvement sioniste au côté de Herzl. Il devient le premier président de la république de l’Etat d’Israël.
19) Léon Blum, Hommage à Weizmann, L’œuvres, tome 7, Albin Michel, Paris, 1963, p. 442.
20) Ibid, p. 442.
21) Michel Dreyfus, L’antisémitisme à gauche, Histoire d’un paradoxe de 1830 à nos jours, La Découverte, Paris, 2009.
22) Léon Blum, Les juifs devant le problème allemand, L’œuvres, tome 7, op.cit., p. 311.
23) Edward Saïd, La question de Palestine, Sindbad, Paris, 2010, p. 133.
24) Ibid, p. 133.
25) Léon Blum, Hommage à Weizmann, op.cit., p. 442.
26) Shimon Perez, cité dans Bar Zohar M,Michael Bar-Zohar, Shimon Peres et l’histoire secrète d’Israël, Odile Jacob, Paris, 2007,p. 109.
27) Voir sur cet aspect mon livre, Figures de la révolution Africaine, de Kenyatta à Sankara, La Découverte, Paris, 2014.
28) Ben Kramer, Le nucléaire dans tous ses états, Les enjeux nucléaires de la mondialisation, Alias, paris, 2002, p. 42.
29) Le Monde, 1er juillet 1967.
30) Communiqué du CRIF du 30 janvier 2012, consultable sur le site du CRIF, http://www.crif.org/fr/lecrifenacti....
31) Entretien à Information Juive, octobre 2012, consultable sur le site du consistoire de Paris Ile-de-France, http://www.consistoire.org/communiq...
32) Théodor Herzl, Journal intime cité par Orden Medick, responsable du bloc de la paix, quelle stratégie contre l’antisémitisme ?, dans le Nouvel Observateur du 2-8 septembre 2004.
33) Edouard Drumont, Le testament d’un antisémite, Dentu, Paris, 1891, p. 45.
34) Edouard Drumont, Le peuple juif, Librairie antisémite, Paris, 1900, p. 37 et 43.
35) Pierre André Taguieff, La nouvelle judéophobie, Milles et une nuit, Paris, 2002, p. 42.
36) Pierre André Taguieff, La Judéophobie des Modernes : des lumières au jihad mondial, Odile Jacob, Paris, 2008, p. 295.
37) Pierre André Taguieff, Réflexion sur la judéophobie contemporaine-Antisionisme, propalestinisme et endoctrinement islamiste, Études du CRIF, Hors-série anniversaire des 70 ans du CRIF.