Discrètement et sans guère de détails “inutiles”, des sources militaires russes ont informé l’agence Novosti (voir Sputnik.News le
9 décembre 2014)
que “plusieurs drones ukrainiens” avaient
été abattus au-dessus de la Crimée, qui a été rattachée à la Russie en
mars dernier et dont Kiev annonce régulièrement et pompeusement la
reconquête prochaine.
Les sources ne précisent ni le nombre de drones,
ni la chronologie précise où ces diverses interventions ont eu lieu
sinon que ces interceptions et ces destructions ont été réalisées “le
mois dernier”, ni les circonstances sinon les observations classiques
sur les procédures utilisées à cet égard (interception au
franchissement de la frontière, communication pour recommander un
changement de
vol, destruction en cas de poursuite de la mission). Une précision
technique est donnée : ce sont des affûts mobiles Pantsir,
avec équipement mixte canons (2) de 30mm/missiles à courte portée, qui ont été utilisés.
La discrétion des Russes, leur stricte observation du secret dans des
cas sensibles et des matières militaires (opérationnelles et autres)
rendent d’autant plus significatives ces révélations. Les sources étant
officielles, il est tout à fait probable qu’elles ont donné leurs
informations avec l’accord des autorités politiques, et dans un but
politique autant qu’opérationnel. Plusieurs conclusions de type
politique/opérationnel peuvent être tirées dans le cadre d’une
hypothèse interprétative.
• D’une façon générale, ces interventions signifient aux observateurs
et aux directions politiques que la Crimée est bien un territoire
russe, que ce territoire est équipé pour sa défense comme tout
territoire russe et qu’aucune violation de souveraineté ne sera tolérée.
La
Crimée n’est pas une sorte de Pakistan ou de Yémen où les drones
étrangers se baladent en toute impunité.
• Ces interventions, données au compte-goutte mais avec précision,
tendent à mettre en évidence l’efficacité de la défense aérienne russe
installée en Crimée. Si l’autre côté voulait être informé à cet égard
par ses incursions, il l’est désormais, – et nous aussi, preuve que
nous sommes aussi bien dans la guerre de communication que dans
l’“opérationnel covert”.
• La précision concernant le système qui et intervenu pour ces
destructions peut également être interprétée comme une indication selon
laquelle la défense aérienne installée en Crimée est sérieuse, dans le
sens où elle dispose d’une panoplie pour toutes les sortes
d’intervention nécessaire. (On sait par ailleurs qu’un escadron de
Soukhoi Su-30 d’interception a été détaché de son escadre-mère d’une
base
russe plus au Nord pour être déployé en Crimée, pour les tâches plus
classiques de “police de l’espace aérien”.)
• Enfin la précision selon laquelle ces destructions ont eu lieu “le
mois dernier”, sans préciser ce qui s’est passé avant, laisse à penser
que les Russes voudraient qu’on en conclut qu’eux-mêmes ont conclu,
sinon qu’ils ont la certitude que ces drones sont d’origine étrangère à
l’Ukraine. Les drones ne sont nullement un équipement courant des
forces ukrainiennes, et les tentatives ukrainiennes officielles de s’en
équiper faites auprès des Israéliens n’ont jusqu’ici pas donné
grand chose .
Ces
révélations nous inviteraient donc à conclure que les Russes estiment
ou savent que les drones ont été déployés et sont utilisés par des
non-Ukrainiens, – c’est-à-dire, poursuivons l’hypothèse, par exemple
par la CIA qui en est si coutumière, – Who else?
Élargissons maintenant le propos.
Cette impression de
professionnalisme, de discrétion et d’efficacité qui émane de ces
informations
rencontre les appréhensions du bloc BAO, surtout des USA, concernant
les capacités russes, notamment, à partir de l'information sur la
destruction des drones “ukrainiens”, dans le domaine des missiles
sol-air. A cet égard, des informations nouvelles plus générales ont
filtré du côté du bloc BAO.
Des sources militaires et du renseignement US ont commenté ces
dernières jours que la livraison prévue de S-400 à la Chine, après
signature
d’un contrat de vente, constituait un acte militaire très préoccupant pour
les forces US. Ces sources confirment que les USA et le bloc BAO
n’ont “rien d’équivalent” au S-400 et aucun moyen de contre-mesures
sérieux contre ces engins, ce qui constitue une énorme hypothèque pour
l’emploi de l’aviation offensive en cas de conflit. La seule
incertitude qui plane, selon ces sources, est de savoir si les Russes
livreront
aux Chinois les S-400 au standard maximal qui équipent leurs propres
forces. L’hypothèse classique serait qu’ils ne le feraient pas, les
Russes étant extraordinairement prudents pour ce qui est des livraisons
d’armement sophistiqués et de transfert de technologies. Mais les
nouveaux liens stratégiques entre la Russie et la Chine “brouillent
toutes les données disponibles jusqu’ici”, selon ces sources, et les
hypothèses classiques pourraient s’avérer d’ores et déjà obsolètes, –
et les S-400 à livrer au standard russe lui-même...
Dans le même domaine de la missilerie russe (mais aussi chinoise, voire
iranienne), ces mêmes sources précisent que la principale menace, à
côté de la puissance des capacités sol-air de la Russie, concerne le
domaine des missiles anti navires (sol-mer, mer-mer, air-mer). Les
sources militaires du bloc BAO (US) sont extrêmement impressionnées par
le développement de missiles anti navires, surtout russes et chinois,
extrêmement rapides (dans l’hypersonique vars Mach 4/Mach 5),
électroniquement très protégés, – rendant l’interception incroyablement
complexe, pour ne pas dire impossible, – à grande portée et à charge
explosive très lourde. Ces missiles sont destinés à frapper les
porte-avions US, et à les frapper très durement, “à la manière dont les
Japonais frappèrent les cuirassés de la Flotte du Pacifique à Pearl
Harbor”...
C’est dire le peu d’enthousiasme de l’US Navy pour les
politiques bellicistes anti russe et anti chinoise pratiquées par la
direction politique à Washington .
Ce type d’arme a presque un caractère d’“arme navale absolue”, en
fonction des capacités et des structures opérationnelles de la puissance
de l’US Navy. S’il s’avère qu’un missile ou des missiles
anti-porte-avions existent, c’est un risque de paralysie de l’US Navy à
cause de la
psychose qui naîtrait : le nombre très réduit de grands porte-avions
d’attaque qui rassemblent l’essentiel de la puissance navale US ,
– 10 actuellement, dont 5-6 en déploiement offensif par rotation, avec
les nécessités d’entretien, de carénages, etc., – inciterait à des
mesures de prudence telles que cette flotte, offensive par essence, en
deviendrait presque défensive par repli stratégique et priverait la
Navy de ses capacités de contrôle global des mers. Cela, sans parler de
la catastrophe que constituerait la perte d’un ou de plusieurs
porte-avions, qui serait perçue comme une sorte de 9/11 (à nouveau
l’image de Pearl Harbor) pour la puissance militaire US, – mais un 9/11
sans puissance militaire derrière pour organiser une riposte, puisque
c’est cette puissance militaire elle-même qui serait atteinte et
affreusement handicapée.
Dans le même ordre d’idée, et alors que les négociations avec l’Iran
sur le nucléaire tournent à l’échec, ces sources précisent encore que
l’US Navy considère le Golfe Persique comme “un piège mortel”, d’où
elle retirerait le plus vite possible l’un ou l’autre porte-avions s’il
s’y trouvait, en cas de risque de conflit. La côte iranienne est
absolument hérissée et truffée de postes de tir de missiles dont au
moins
la moitié sont dissimulés et non identifiés, et donc ne pouvant être
détruits par des attaques préventives...
Ainsi la situation de tension générale et les véritables conditions de la possibilité de conflit existant depuis le début
de la crise ukrainienne poussent les stratèges militaires US (les sérieux, pas les stratèges neocons des think tanks)
à
considérer les réalités de la situation stratégique générale. Le
résultat n’est pas aussi exaltant qu’on croit. La puissance US est
considérable, certes, mais elle est sur-projetée et elle est en plus
sur-concentrée dans des points de force (comme les porte-avions) qui
doivent être nécessairement invulnérables. Une soudaine modification de
circonstances ou de capacités techniques, ou les deux, pourrait
brusquement faire basculer l’hégémonie de cette puissance en la rendant
brusquement vulnérable et en la forçant à se replier sur une
défensive qui serait en totale contradiction avec la
politique expansionniste des USA (du bloc BAO). Dans ces circonstances
où la Russie (et la Chine, et quelques autres) tendent à progresser
vers une mise sur pied de guerre de leurs capacités, les USA se
découvrent des faiblesses potentiellement fondées sur des
déséquilibres, des adéquations ou des contradictions structurelles qui
impliquent
des possibilités d'effondrement menant à des changements dramatiques de
fortune politique.
Ainsi se définit toute la puissance (la militaire et les autres) du
bloc BAO (des USA) et de notre contre-civilisation : considérable,
énorme, écrasante dirait-on, mais aussi de plus en plus en déséquilibre
constant et de plus en plus instable, avec des possibilités
d'effondrement grandissantes, sans étapes intermédiaires permettant un
repli, un redressement, une contre-attaque. La situation est toujours
plus celle du “tout ou rien” tandis que le “tout” ne cesse de vaciller
de plus en plus.
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