samedi 30 décembre 2017

Ce qu’il faut attendre de 2018



À présent que Donald Trump a effectivement dépouillé les États-Unis de tout rôle significatif comme médiateurs dans le conflit siono-palestinien, nous pouvons nous attendre à… absolument rien de la part de Washington D.C.
En plus de quoi nous arrivent les détériorations habituelles : Nikki Haley, la plus célèbre WOG [« whole of government » = également « gueule » au sens péjoratif, ndt] d’Amérique, a eu la témérité de menacer certains pays de la ruine financière pour avoir voté contre les USA à l’Assemblée Générale de l’ONU. Il est évident qu’elle s’attendait à ce que son veto de la résolution turco-yéménite au Conseil de Sécurité mette fin au brouhaha causé par le déplacement de l’ambassade US de Tel Aviv à Jérusalem. Cela n’a pas été le cas. La question a été soumise à un vote de l’Assemblée Générale des Nations Unies et l’administration Trump s’est vu infliger un camouflet humiliant.
Ce que Haley n’arrive pas à loger dans son petit cerveau inexercé [1] est que la plupart des pays de l’Union Européenne ont voté pour la résolution condamnant la démarche unilatérale des USA.
L’Allemagne, la France, l’Italie, la Grande Bretagne, la Grèce, Chypre : tous les bastions de la platitude pro-US ont sauté du navire. Avec les États-Unis à ce point enlisés dans l’isolement et l’ostracisme universel, il est difficile de croire que l’administration Trump pourra encore faire grand-chose sur la scène du monde, sinon souffler de l’air chaud sur la Corée du Nord et l’Iran.
Et voilà que les Russes ont impoliment demandé aux USA de se tirer de Syrie. En droit international, les USA n’ont rien à faire en Syrie sans la permission d’un gouvernement qui détient un siège aux Nations Unies, occupé par le très patient Dr. Bachar al-Ja’afari. Maintenant que les USA viennent d’être fermement rabroués par la communauté internationale, le Dr. al-Ja’afari s’engagera-t-il sur les traces de la résolution turco-yéménite et portera-t-il l’affaire devant l’Assemblée Générale ? « Les États-Unis ne devraient-ils pas être condamnés pour l’occupation d’un pays quand le gouvernement de ce pays leur a demandé de partir ? »
Tandis que l’ISIS évolue vers le statut d’organisation défunte et que la plupart de ses membres affluent vers d’autres frontières pour tenter de se relocaliser dans de meilleurs champs d’action, il n’y a plus aucune raison pour que les États-Unis s’attardent en Syrie. Mais les USA ne sont pas disposés à partir. Préparez-vous à une insurrection d’inspiration iranienne en Syrie, dirigée contre les troupes américaines et ce qu’on appelle leurs « alliés ». Les alliés savent ce que sera le résultat. La loyauté envers les Américains au Moyen Orient est aussi glissante que de l’huile. Personne ne pariera sur une ténacité trumpienne. Quand les housses mortuaires commenceront à s’empiler sur les pistes d’atterrissage des bases aériennes, les USA partiront (cette année) et les anciens alliés demanderont l’amnistie.
Simultanément, il nous faut penser à Idlib. La Ghouta orientale est sur le point de s’effondrer et on s’attend à ce que les forces syriennes la nettoient dans les deux mois qui viennent. Mais Idlib, pour des raisons liées aux précédents accords, est une fourmilière aux coutures prêtes à craquer, pleine de terroristes qui ne peuvent pour la plupart se souffrir les uns les autres. Avec la Turquie peu disposée à planter une épingle dans le ballon, les terroristes coincés à Idlib n’auront qu’une seule porte de sortie : la mer. Et s’ils s’échappent par la mer, l’Europe sera bientôt inondée de criminels très entraînés, à la manière de l’exode des Mariels organisé en son temps par le regretté Fidel Castro.
Que peut-on faire avec des terroristes très entraînés ? Angela Merkel a perdu sa majorité au gouvernement à cause de son accueil malavisé de milliers de réfugiés fuyant le conflit syrien. Elle ne refera pas cette erreur. Une seule atrocité de plus en Allemagne et son gouvernement tombera. Au vu de tout cela, attendez-vous à ce que l’Europe révise ses relations avec le Dr Assad, le seul homme en Syrie qui soit capable de se débrouiller pour trouver une solution au problème des terroristes déchaînés. Inutile de dire qu’il ne permettra pas la réinsertion de ces sociopathes dans la société syrienne juste pour les empêcher d’aller se nicher en Europe. Pourtant, étant donné l’importance des enjeux, l’Europe va devoir cracher beaucoup de capitaux, indispensables à la fois pour restaurer la santé économique de la Syrie et pour faire face au problème terroriste partiellement créé par le Royaume Uni, l’Allemagne et la France. Attendez-vous donc à une coopération accrue. Attendez-vous, par exemple, à des efforts pour rouvrir les ambassades qui avaient été fermées afin de bien marquer l’isolement du Dr Assad aux premiers stades du conflit. Ces pays de la vieille Europe vont devoir ravaler leur fierté et s’atteler à la tâche de défendre leurs frontières.
Les Européens, eux, ne seront pas d’accord sur le principe qu’un bon terroriste est un terroriste mort. Ils ne seront d’accord avec aucun plan basé sur l’extermination pure et simple des rongeurs. En revanche, ils pourraient être d’accord sur un programme de ré-orientation destiné à détacher les ex-terroristes d’une vision de violence planétaire, quitte à fermer les yeux sur la liquidation des quelques incorrigibles qui y résisteraient. La Syrie a prouvé que son plan d’amnistie a fonctionné dans 85% des cas, et ce genre d’approche pourrait mettre fin à l’interminable guerre avec les cloportes wahhabites.
Je prévois des avancées marquantes de la Russie et de la Chine au Moyen Orient. Trump a tellement irrité la rue arabe que les gouvernements les plus traditionnellement amicaux, comme ceux de Jordanie et d’Égypte, ne seront pas en mesure de poursuivre dans le sens habituel « pas de problème, les affaires continuent ». Ceci pourrait vouloir dire (même si Chris ne serait pas d’accord) mettre fin à toute poursuite des travaux sur cette énorme base souterraine au nord de la Jordanie dont il me parle opiniâtrement. L’Égypte a déjà resserré ses liens avec Moscou et l’Irak n’est qu’à un angström de demander aux Américains de partir. La Turquie pourrait bien quitter l’OTAN et dire adieu à toutes ses prétentions européennes. Ses efforts pour entrer dans l’U.E. ont été aussi vains que ceux des Palestiniens pour négocier avec le régime sioniste de Tel Aviv.
L’Iran aussi se prépare à une année exceptionnelle. Avec les intellectuels iraniens jusqu’à présent sceptiques se rapprochant de la vision qu’ont des États-Unis les mollahs purs et durs, vous devriez voir moins de conflits internes, tandis que Téhéran élargit son arc d’influence tout le long du Croissant fertile, jusqu’en Égypte. Et regardez bien le Hezbollah en recueillir les bénéfices.
Les Européens sont estomaqués par Trump. Ils n’ont tout simplement pas de méthode pour traiter avec le tordu de la Maison Blanche. Pensez ce que vous voulez de George W. Bush, un autre cinglé qui devrait être pendu pour les crimes de guerres commis en Afghanistan et en Irak, mais qui était un réaliste avec les pieds sur terre quand il s’agissait de coordonner des efforts internationaux. Même Obama, malgré sa soif de sang, avait une diplomatie prévisible, quoi qu’il fût lui aussi un criminel de guerre. Les Allemands et les Anglais ne savent pas quoi faire avec une Maison Blanche qui a pété les plombs. Les Allemands ont fait allusion à une plus grande auto-suffisance en matière de sécurité. Les Britishs se sont résignés à un monde où ils n’ont plus une relation spéciale avec les USA. Les Français, dont l’admiration pour les États-Unis est notoire, doivent maintenant se tourner vers leurs ennemis héréditaires, l’Allemagne et le Royaume Uni, pour retrouver ce sentiment de confort… auquel il ne faudrait cependant pas permettre de s’installer trop profondément.
Le Dr Assad a époustouflé le monde par son insistance obstinée à respecter le droit. Il a gagné. Même ce gredin fauteur de guerre de Robert Ford, qui, avec Bandar bin Sultan, s’est donné tant de mal pour manigancer la révolte contre l’autorité centrale syrienne, a dû reconnaître la totalité de la victoire d’Assad. Il l’a dit à la soi-disant « opposition » de halls d’hôtels. Ford a disparu dans le néant de l’insignifiance. Comme tous les personnages de cette horrible tragédie, le Capitaine Kangourou (George Sabra), Riyaadh Hijaab, Ghassaan Hitto, Ahmad Mu’aadh Al-Khateeb et le reste de cette bande de dégénérés se cramponnent à l’ancre d’un navire en train de sombrer et descendent avec lui dans un oubli glacé. Salut les mecs. Et Joyeux Noël !
La popularité du Dr Assad va être garante de ses succès futurs, et pendant très longtemps. Les Syriens, même ceux qui pourraient l’avoir méprisé à cause de son appartenance religieuse ont fini par voir à quel point il a insisté sur l’intégrité territoriale de son pays et à quel point aussi a été absolu son respect du droit. Ils savent combien les minorités, en Syrie, on consenti de sacrifices pour maintenir leur pays laïc et libre.
Vladimir Poutine a accompli toutes ses tâches de main de maître. Il est arrivé aujourd’hui à la conclusion que le gouvernement syrien a suffisamment d’atouts militaires, en personnel et en armement, pour pouvoir terminer le travail. Tout militaire intelligent se doit d’avoir une stratégie de sortie et un calendrier qui coïncide avec les faits sur le terrain. Poutine a estimé que son rôle en Syrie était arrivé à son terme et que le gouvernement de Damas doit achever la besogne. Bien sûr, des troupes russes restent à Humaymeem et à Tartous. Mais ces troupes font partie d’une stratégie globale plus vaste, qui concerne la projection de la puissance russe dans le monde. Comment cela va-t-il se jouer avec le concurrent américain, dont l’influence diminue de jour en jour, relève de la conjecture. Une chose, cependant, est sûre : depuis la chute de l’Union Soviétique et les événements sordides qui l’ont suivie, la Russie est de retour en grand style !
Tandis que nous entrons dans un nouveau chapitre de l’histoire de ce conflit, je veux remercier tous mes lecteurs pour leur loyauté et leur sagacité. Je veux même remercier les trolls qui ont rendu mon site plus populaire. Et je veux même remercier l’« opposition » de halls d’hôtels pour leurs interventions risibles, qui m’ont permis de garder le sourire au travers de ces événements déchirants.
À tous mes lecteurs : Joyeux Noël et Heureuse Année ! L’an prochain à Jérusalem. Ziad.
Ziad Fadel – 25 décembre 2017
Ziad Fadel est avocat depuis 35 ans, traducteur-juré et interprète (arabe-anglais) pour la Cour Suprême des États-Unis. Il est le rédacteur en chef de Syrian Perspective
Traduit par Les Grosses Orchades

[1] Jérusalem. Nikki Haley, seule au monde… Dur d’être à la fois agent israélien et ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU


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