samedi 9 décembre 2017

« L’Action de Grâce », la célébration US d’un génocide



“L’Action de Grâce au Royal Angkor Café” » puis je lire sur un tract. Puis, « 23 novembre, joignez-vous à nous pour la traditionnelle célébration de Thanksgiving ». Il s’agit d’un des hôtels internationaux de Siem Reap, une cité cambodgienne proche des trésors architecturaux d’Angkor Vat et de l’ancienne capitale Khmer, Angkor Thom

Le même jour je reçois un E-mail qui m’est adressé des USA par mes amis et compatriotes américains, avec un lien vers un essai publié par « NPM News », et intitulé « Thanksgiving Guide : Ou comment célébrer une histoire sordide ».

Cela commence par ce résumé :
" Alors que des Américains se préparent à une semaine de vacances spirituelles, débutant par Thanksgiving, (Les Actions de Grâce – NdT),combien sont-ils prêts à la regarder à travers une vision bien plus critique ? Alors que de nombreux Américains considèrent comme un devoir de mémoire de se rappeler de remercier (Le Seigneur – NdT), ce jour est considéré comme un jour de deuil par un grand nombre d’autres. La vérité est que ce jour-là des émigrants européens ont brutalement assassiné des indigènes autochtones, ont volé leurs terres, et continuent de le faire aujourd’hui" .

Ce jour est devenu jour de fête officiel en 1637, afin de célébrer le massacre de plus de 700 indigènes autochtones de la Tribu des Pequots.


Dans un restaurant j’interpellais un très civil hôtelier français et lui demandait s’il était conscient de ce que ce jour représentait et pourquoi il était célébré dans un de ses restaurants.
“Oh ! Je sais, je sais », me répondit-il en riant. « C’est un sujet un peu controversé, n’est-ce pas » ?
« Un peu controversé », me suis-je étonné. « Il semble pourtant que ça consiste à inviter des gens à célébrer un génocide, un holocauste, en compagnie de flots de vins et d’une dinde géante ».
“Je tente de le voir positivement », ajouta-t-il à mon adresse. Il résuma : « Donc je ne pourrai pas compter sur votre participation ce soir. Quel dommage… ».
“Quelle pitié,’insistai-je, quelle pitié”. Je ne désire pas déguster cette fameuse dinde rôtie et ces « American Pies » et, si vous désirez savoir pourquoi, c’est juste parce que je ne me sens pas disposé à célébrer les massacres et les vols de terres perpétrés par l’Empire.
Le gérant ne put s’empêcher de me demander : “Mais d’où sortez-vous ?”
Je savais ce qu’il voulait dire. Aucun Européen n’aurait posé ce genre de questions.
« Je suis Russe » ais-je répondu.
“Oh, je vois ». Me dit-il, « Je comprends ».
« Russo-Américain » ais-je ajouté.
Je suis convaincu que le Français avait été sincèrement compréhensif du sujet dont je lui parlais. Il était même supposé être sincère. Il y a, après tout, « nos génocides », et les « génocides des autres ». “Nos génocides”, ceux que nous avons orchestrés ou commis, n’ont pas à être discutés. Ou plus précisément, il est extrêmement malpoli d’y faire allusion.
La plupart des gens ne savent rien à leur sujet, y compris de nombreuses victimes de ceux-ci. D’un autre côté, les génocides commis par les autres, particulièrement par les adversaires des Occidentaux, sont largement discutés, publiés, analysés ; et aussi bien souvent largement inventés.
Le Cambodge est le cas d’école de ces derniers. Ici, plusieurs décennies après les faits, les USA et leurs alliés ont au début supporté le gouvernement corrompu et brutal de Phnom Penh, alors qu’ils avaient engagé la monstrueuse campagne de bombardements en tapis de l’ensemble des zones rurales du Cambodge, bien loin au-delà de la frontière du Vietnam.
C’était soi-disant afin de prévenir la main mise « communiste » sur le pays, ou au moins le prévenir de devenir un pays dans le « style communiste » de Ho-Chi-Min. Des centaines de milliers de villageois furent assassinés dans les bombardements. Des millions furent forcés de prendre la route abandonnant leurs fermes, et le pays fut transformé en un champ de mines géant, tapissé de munitions non explosées.
Plusieurs centaines de milliers moururent de famine et d’épidémies. Furieux, fous de souffrance, le Peuple du Cambodge se dressa contre les collaborateurs de l’Occident à Phnom Penh. Pol Pot et ses Khmers rouges prirent la capitale pratiquement sans aucune opposition. Récemment, au fond de la jungle, j’ai pu parler personnellement avec un ancien garde personnel de Pol Pot. Je lui demandai à brûle-pourpoint s’il savait quelque chose au sujet du Communisme. « Rien du tout à ce sujet », fut sa réponse. Les USA avaient assassiné nos familles sans aucune raison. Les élites corrompues nous avaient vendus à l’Occident. Nous étions outragés, et prêts pour la vengeance. Malgré ceci l’Occident a, à ce jour, réussi à faire passer ces événements pour un « Génocide communiste ».
Le Rwanda est aussi un autre cas de “récit inventé et tordu”. J’ai réalisé un documentaire sur le sujet – « Le Gambit rwandais ». Dans ce cas l’Occident a retourné complètement l’histoire, en réduisant entièrement cette tragédie à une narrative primitive facile à digérer sur les « mauvais » Hutus, assassinant les « bons » Tutsis »
Pourtant l’ancien ambassadeur des Etats-Unis, Robert Flattent m’a déclaré que son pays avait couvert, armé, et soutenu le morbide RPF, devenu l’armée Tutsi, qui avait avant 1994 pillé le pays rwandais depuis les campagnes ougandaises, incendiant les villages et assassinant les civils. De même un ancien législateur australien, Michael Hourrigan, enquêteur de l’ONU, m’a fourni des informations sur la destruction à l’atterrissage en 1994 de l’avion du président rwandai Juvenal Habaryarimana, ainsi que de son homologue ougandais Cyprien Ntaryamira, alors qu’il arrivaient à l’aéroport de Kigali. Les ordres d’abattre l’aéronef émanaient du leader du RPF Paul Kagamé, qui a depuis été adoubé par l’Occident.
Cet événement entraîna le terrible bain de sang de 1994. L’année d’après, en 1995, l’Armée du Rwanda envahissait la République Démocratique du Congo, (RDC), et participait à l’assassinat d’au moins 9 millions de personnes, la plupart des civils, aux côtés des Gouvernements occidentaux et des compagnies multinationales lors du plus grave crime contre l’Humanité de l’histoire contemporaine.
En fait, pratiquement tous les génocides majeurs commis par l’Occident ou par ses allies dans l’Histoire moderne, ont été passés sous silence, y compris ceux commis en Irak, en Syrie, en Iran, en Papouasie occidentale, dans le Timor occidental, en DRC, en Indonésie, en Afghanistan, et dans des douzaines d’autres endroits aussi malchanceux tout autour du monde.
Ces génocides révoltants commis par l’Occident tout autour du Monde au cours des derniers 2000 ans, [1] mais surtout au cours des 500 dernières années, ne sont jamais définis comme « génocides ». A travers l’Histoire, les contrées européennes ont détruit systématiquement la plupart des cultures de tous les continents de la Planète, mettant virtuellement en esclavage toutes les nations non-blanches, pressurant et exploitant les colonies, (Lisez : Toutes les nations non blanches du Monde), tout en exterminant des centaines de millions d’hommes, de femmes, et d’enfants. Le rapport létal augmente, s’accumule, tendant vers le milliard, selon les témoignages et analyses d’un de mes amis, un statiticien chevronné de l’ONU.
Revenons rapidement sur mon “Histoire cambodgienne” et aux pages de ce magazine. Et je veux revenir encore et encore, sur les génocides commis par l’Europe et les Etats-Unis d’Amérique, pratiquement de partout. Sans une Histoire comprise et connue le Monde n’a pas de futur, et il ne peut y avoir de solutions à ces problèmes dramatiques sans que notre Humanité ne s’y affronte.
Mais pour le moment, laissez-moi conclure ce bref essai en déclarant que je n’ai pas participé à la consommation ni de la dinde en question, ni des « American Pies » lors du jour de Thanksgiving dans la ville cambodgienne de Seam Reap.
Mon sentiment est inspiré par ces 700 personnes de la Tribu des Pequots qui résistèrent fièrement et moururent pour leur liberté il y a 400 ans. Ils furent parmi les premiers combattants contre l’Impérialisme occidental [Les Carthaginois, il y 2200 ans ont été les premiers à résister à l'impérialisme occidental [1]] . Ils furent les « Américains » que j’admire, cette « Amérique » qui a été terriblement endommagée mais pas totalement détruite. Aucuns mots sirupeux, sentimentaux et pleins de vide ne pourront pleinement faire ressortir leur esprit, seulement le plein silence des masques de souffrance de ceux qui moururent assassinés aux mains des envahisseurs européens au cours des conquêtes de ce qui a été cyniquement baptisé comme le « Nouveau monde ».
Andre Vltchek
Andre Vltchek est un nouvelliste, producteur, et journaliste d’investigation.
La source originale de cet article est Mondialisation.ca
Copyright © Andre Vltchek, Mondialisation.ca, 2017
Article original en anglais :
Traduit par Geb. pour Le Grand Soir

NOTES

[1]  Les premiers promoteurs historiques du Génocide



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