Les
relations entre la Turquie et ses alliés de l’OTAN ont empiré cette semaine
après que le président Erdogan ait conseillé au parlement de reconsidérer
l’adhésion d’Ankara à l’alliance. Yunus Soner, vice-président du parti Vatan en
Turquie, a déclaré à Spoutnik que le retrait de son pays de l’alliance
occidentale est pratiquement inévitable.
Les
retombées des scandaleuses manœuvres de l’OTAN en Norvège la semaine dernière,
où le président turc Recep Tayyip Erdogan et le père fondateur de la Turquie
moderne, Mustafa
Atatürk, ont été
dessinés sur une « carte des ennemis ». Lundi, Yalcin
Topcu, un conseiller clé du président, a
exhorté les législateurs à reconsidérer l’adhésion de la Turquie au bloc
militaire.
S’adressant
à Spoutnik
Turquie, Yunus Soner, vice-président du parti nationaliste et kémaliste
Vatan (parti patriotique), a déclaré que la question de la sortie de son pays
de l’OTAN était attendue depuis longtemps et que « la Turquie a déjà
entamé le processus ».
« Un
exemple de ce fait est qu’Ankara s’est opposée au référendum organisé au
Kurdistan irakien non pas dans le cadre de l’OTAN, mais en coordination
générale avec la Russie, l’Iran et l’Irak, a expliqué le politicien. Un autre exemple du
retrait de la Turquie de l’OTAN est sa politique syrienne, qui ne correspond
pas à la stratégie de l’OTAN, mais qui est définie dans le processus de
négociation avec la Russie, l’Iran et indirectement la Syrie. »
Un autre
exemple, selon Soner, est le fait qu’au plus fort de la crise qatari, Ankara a
rejeté les propositions américaines sur la formation d’une OTAN musulmane
sunnite. En outre, a-t-il ajouté, la Turquie dispose déjà d’alternatives
claires dans le domaine de la coopération en matière de défense, en
particulier avec la Russie et la Chine.
« En
résumé, malgré l’interaction continue entre la Turquie et l’OTAN dans les
domaines militaire et technologique, la politique étrangère de la Turquie n’est
plus déterminée par son appartenance à l’alliance, a souligné M. Soner. Par
conséquent, la question de savoir si la Turquie peut se retirer de l’OTAN n’est
plus tabou », a-t-il ajouté.
Selon le
politicien, « le moment le plus important et le plus remarquable de ce
processus de distanciation de l’OTAN est non seulement la poursuite d’une
politique étrangère indépendante par Ankara, mais aussi son élimination des
éléments de l’OTAN au sein des forces armées turques, quelque chose que les
responsables américains ont reconnu à plusieurs reprises et avec beaucoup
d’inquiétude ».
Quant à
l’explication des responsables de l’OTAN selon laquelle l’objet du scandale pendant
les exercices norvégiens étaient l’œuvre d’un mercenaire indépendant, et non
d’un employé de l’OTAN, Soner a déclaré que cette question ne pouvait pas être
simplement considérée comme une erreur technique. Au contraire, a-t-il suggéré,
cela ressemble plus à une provocation directe de l’OTAN et des États-Unis, et
un indicateur de l’écart croissant dans les relations entre Ankara et
l’alliance. Le politicien a noté que dans la Turquie d’aujourd’hui peu de voix
de soutien peuvent être entendues en faveur de l’adhésion du pays à l’alliance,
et ceux qui le font ne peuvent pas fournir d’arguments de fond pour expliquer
leur position. « Le climat politique en Turquie est aujourd’hui opposé
à l’idée de coopération avec l’OTAN et les États-Unis », a-t-il
déclaré.
En fin de
compte, le politicien du Parti patriotique a souligné qu’une éventuelle sortie
de la Turquie de l’OTAN pourrait conduire à l’effondrement de l’alliance. « La
Turquie a déjà d’importantes alternatives, telles que l’adhésion à
l’Organisation de coopération de Shanghai, a-t-il déclaré. Son adhésion
à cette organisation apporterait des avantages majeurs aux deux parties et, en
se retirant de l’Alliance atlantique et en rejoignant les structures
eurasiennes, la Turquie pourrait aider l’Eurasie à atteindre un nouveau
niveau. »
En second
lieu, Soner a noté que « le retrait de la Turquie de l’OTAN a révélé
une scission au sein de l’alliance : après tout, non seulement la Turquie,
mais un nombre important de pays européens se distancient également de ce bloc
de défense ».
« Le
récent accord sur la création d’un pacte de défense conjoint entre États
européens ne fait que confirmer ce processus centrifuge entre les États membres
de l’OTAN, a expliqué
le politicien. Certains membres de l’OTAN sont préoccupés par les activités
de l’alliance en Ukraine, et le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France sont
extrêmement préoccupés par la position de Washington sur l’Iran. En fin de
compte, les États-Unis resteront seuls dans l’alliance qu’ils ont créée, et
l’orientation changeante de la Turquie ouvrira la voie à des changements
fondamentaux. »
Pour sa
part, Cahit Armagan Dilek, directeur du 21st Century Turkey Institute basé à
Ankara, a déclaré que, s’il était prématuré de parler d’un retrait turc de
l’OTAN, Ankara pourrait et devrait concentrer ses énergies sur la suspension
des opérations de l’alliance sur le territoire turc.
« Il
est nécessaire d’agir étape par étape, a souligné Dilek. Premièrement : geler les
activités des États-Unis et de l’OTAN sur les bases militaires turques.
Deuxièmement, conformément à la réaction de l’autre partie, il sera peut-être
possible de révoquer l’autorisation du déploiement de contingents militaires
étrangers sur les bases turques. Et si ces étapes n’ont pas l’effet désiré, la base d’Incirlik
pourrait être complètement fermée à son utilisation par les États-Unis. »
D’autres
mesures, selon l’analyste, pourraient inclure la suspension de la mission navale
de l’OTAN contre les migrations illégales dans la mer Égée et les demandes
d’Ankara que les navires turcs quittent ses eaux territoriales [?? plutôt
non turcs, NdT]. « Pour ce qui est de la question syrienne, des
opérations pourraient être menées ici pour intercepter les armes et les
munitions fournies aux détachements des YPG kurdes [par les États-Unis]. La
Turquie peut mener une opération pour frapper les entrepôts d’armes et les
bases des YPG à l’Est de l’Euphrate. Les États-Unis envoient régulièrement des
armes et participent à la formation de soldats dans le but de former une armée
kurde régulière. »
Note du Saker Francophone
Les revirements multiples de la politique Turque
peuvent laisser penser que tout est possible, mais l'OTAN n'a plus de leadership
assez fort pour imposer une discipline de fer pour permettre un retour au calme
et sauver ce qui peut encore l'être de son point de vue. Trop d'intérêts
contradictoires s'y affrontent, poussant la Turquie et sa puissante armée dans
les bras eurasiatiques. Les arguments avancés par l'article font mal, très mal
pour le "camp du Bien".
Le 22
novembre 2017 – Source sputniknews.com
Traduit par
Hervé, vérifié par Wayan, relu par Cat pour le
Saker Francophone
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires hors sujet, ou comportant des attaques personnelles ou des insultes seront supprimés. Les auteurs des écrits publiés en sont les seuls responsables. Leur contenu n'engage pas la responsabilité de ce blog ou de Hannibal Genséric.