Ici,
nous développons quelques remarques et reprenons un texte de la
vraiment-excellentissime Caitlin
Johnstone pour signaler combien une dynamique antiguerre est en train
de se développer aux USA. Ce phénomène devrait éventuellement s’aligner,
compléter ou donner tout son sens à la candidature aux présidentielles USA-2020
de Tulsi Gabbard.
Nous en
parlions hier, nous poursuivons et complétons aujourd’hui.
(Ce sont
en quelque sorte les “enfants naturels” et les soutiens bipartisans
fondamentaux du Donald J. Trump de la campagne électorale USA-2016, qui semble
désormais les exaspérer dans les contradictions grossières et
l'incapacité intellectuelle du président de comprendre ce qu’il a à faire pour
sauver une part essentielle du courant populiste qui a permis son élection.
Après Tulsi
Gabbard, c’est Ann
Coulter qui, dans un autre domaine, prend brutalement ses distances
d’avec Trump après le marché de dupes [à ses dépens] qu’il a passé avec les
démocrates sur “le Mur” mexicain, en instituant un état d’“urgence nationale”
complètement cousu de fil blanc : « La seule urgence nationale est que
notre président est un idiot » [« The only
national emergency is that our president is an idiot »],
tweete Coulter.)
Johnstone
signale, dans un nouveau texte du
16 février, un très important phénomène en gestation qui pourrait
bouleverser le paysage politique de “D.C.-la-folle” et qu’on peut résumer par
une interprétation de son titre : “la haine des neocons est redevenue populaire et c’est
une très bonne chose” (« Hating
Neocons Is Becoming Mainstream Again, And It Is Excellent »).
Ce que Johnstone signale, c’est l’apparition publique et affichée d’une convergence entre le
progressisme de gauche antiguerre et le populisme de droite antiguerre
justement sur cette question cruciale qui porte la candidature de Gabbard de
l’opposition à la politiqueSystème antiguerre.
Ce phénomène, qui isole Trump de son électorat par rapport à ses promesses de
campagne USA-2016, devrait le rendre complètement obsolète et lui faire perdre
toute sa puissance de communication s’il ne comprend pas qu’il faut
complètement renverser la vapeur, – et cela pouvant bien
lui coûter sa réélection en 2020 tant il devient
extrêmement possible que le thème de l’opposition à la guerre devienne le centre du débat des
présidentielles USA-2020.
L’aspect
le plus intéressant du texte de Johnstone, c’est sans aucun doute
l’intervention d’un député démocrate de la Chambre des Représentants commentant
très favorablement le
livre qui vient de paraître du présentateur de Fox.News, Tucker
Carlson, “Why Are These Professional War Peddlers Still
Around?”, une virulente attaque contre la position et
la politique des neocons, à
partir du statut et de l’influence de deux des plus célèbres d’entre eux, Max
Boot et Bill Kristoll. Il s’agit du député de la Chambre
des Représentants d’origine indienne Ro Khanna (son Wiki beaucoup
plus détaillé d’un point de vue politique dans sa version anglaise), qui est
un démocrate de l’aile gauche progressiste et antiguerre de ce parti.
Khanna
écrit que Carlson « offre une critique dévastatrice de
l’interventionnisme et montre dans quelle mesure considérable l’establishment
de politique étrangère a trompé le peuple américain. Il
existe une coalition droite-gauche émergente de bon sens commun en faveur d’une
politique étrangère de retenue. » Effectivement,
Khanna est d’une gauche progressiste affirmée, Carlson d’une droite
populiste non moins identifiable. Ce que juge Johnstone, c’est l’importance de
cette association publique et non dissimulée, et par conséquent l’extension
à la communication courante (“mainstream”) d’une
critique radicale, d’origine consensuelle-dissidente gauche-droite, de la
politique constamment usurpée par les neocons depuis
un quart de siècle.
Une
combinaison droite-gauche de type “dissident” dans l’antiguerre, qui fut en
partie et brièvement recherchée et réalisée pendant deux ou trois ans autour de
l’intervention en Irak de 2003, fut dissipée et totalement perdue avec
l’arrivée d’Obama faisant basculer le camp démocrate dans la politiqueSystème
et le bellicisme tandis que l’essentiel de la droite y restait. Ce fut l’alliance
des neocons et
des R2P qui se renforça sur les enjeux sociétaux et l’antirussisme. L’arrivée
de Trump secoua cet arrangement comme l’on fait d’un
prunier avant de laisser voir qu’il n’avait certainement
pas assez de pensée conceptuelle pour faire une véritable politique dans ce
sens ; quoi qu’il en soit, Trump a accompli sa tâche
historique de rupture avec divers dégâts et il n’est plus
maintenant d’une très grande utilité constructive mais certainement très
utile en
entretenant un désordre empêchant un regroupement efficace des neocons qui s’avèrent bien
poussifs pour lancer une opération contre le Venezuela.
Ce même
désordre, qui a complètement pénétré les rangs de “D.C.-la-folle”, ouvre
effectivement une opportunité pour un renouveau de ce rassemblement “dissident”
antiguerre, avec diverses personnalités atypiques qui peuvent
continuer à agir sans être pulvérisées grâce à ce désordre. On pense à Gabbard,
bien entendu, en remarquant sa proximité sinon directement ethnique, du moins
indirectement par la religion (et les rumeurs qui vont avec), avec le député Khanna ;
et aussi, les liens de Khanna avec certains poids lourds de Silicon
Valley, notamment par le biais de cadres de haut niveau d’origine
indienne également (tribut rendu aux capacités inhérentes aux Indiens dans le
domaine de l’informatique).
Désordre,
plus que jamais comme on ne cesse de le voir, sinon chaos si de cela se dégage
une ligne qui prend peu à peu forme dans un sens antiSystème fondamental... Il
faut noter, pour comprendre la puissance de l’enjeu, la
présence de la haine comme aliment de la bataille. L’on hait les neocons aux USA comme l’on hait Macron en
France, notamment dans les rangs des Gilets-Jaunes :
plutôt que le diagnostic d’une anomalie catastrophique du caractère qui
permet aux sujets de la haine d’éviter les questions gênantes,
nous verrions dans cette haine qui n’a pas fait une seule victime en vingt ans
ni supprimé un seul privilège des personnes visées une tension nécessaire pour
affronter les serviteurs du Système, – ceux-là immergés dans un tel ensemble
institué par “le Mal pur” qu’est le Système, qu’il
faut effectivement cette tension-là pour les déstabiliser. Lire
sous la plume d’un Castaner la dénonciation de “la haine pure” qu’est
l’antisémitisme selon une technique dialectique purement diabolique au regard
de tout ce que cet employé du Système représente invite à
des interprétations hors du champ des jugements rationnels
habituels et des représentations convenues de la morale selon le sapiens pour comprendre
le climat de tension nécessaire dans les affrontements actuels.
(Avant
de poursuivre par le texte de Johnstone, on signalera un fait historique qui
renforce la thèse exposée, un vote de la Chambre des Représentants que
Johnstone n’a pu prendre en compte à cause de la chronologie, et qui a été
marqué par un événement tragique dans le chef du destin d’un parlementaire peu
connu qui, depuis des années, poursuit une bataille antiguerre, et qui
patronnait ce vote. Il s’agit du républicain de la Californie Walter Jones,
connu pour ses sentiments religieux [il était évangéliste converti au
catholicisme] qui ont constitué l’essentiel de l’argument de son combat contre
la politique belliciste des neocons. Georges D. O’Neill Jr.
écrit notamment le 15
février 2019 dans The American Conservative :
« La
Chambre des Représentants des États-Unis a voté mercredi [le
13 février 2019] la proposition de loi H.J.Res. 37 réaffirmant
la loi sur les pouvoirs de déclarer la guerre [“War
Powers”] du Congrès à propos de la guerre en cours au
Yémen. Il s’agit d’un acte important et historique pour le Congrès à de
nombreux égards. La résolution a été adoptée par 248 voix contre 177. Le vote
d’un républicain favorable au projet était manifestement et tristement
manquant: celui du regretté Représentant de la Californie Walter Jones, décédé
le 10 février.
» Le
projet de loi représente la première fois dans son histoire où la
Chambre des Représentants a voté pour invoquer la résolution sur les pouvoirs
de guerre afin d'obliger
le pouvoir exécutif à mettre fin aux engagements militaires non autorisés dans
une guerre étrangère. Malheureusement, le représentant Jones n'était pas
là pour assister au point culminant de son travail le plus important à la
Chambre : ses efforts inlassables pour
démontrer l’impact catastrophique de la politique belliciste des USA. »)
Source : dedefensa.org
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Le Néoconservatisme : Un mouvement juif
"Petit
peuple" révolutionnaire, appelé non pas à se substituer au vrai peuple
mais à le diriger et, le cas échéant, à le détruire en agrégeant autour de
cette minorité d'autres minorités, instaurant ainsi la dictature de tout ce qui
est antinational sur tout ce qui est national."
(Augustin Cochin cité
par Philippe Baillet dans son excellente préface au livre de MacDonald)
"Le
néoconservatisme, un mouvement juif" est une très bonne
étude sur un mouvement néoconservateur assez méconnu en France et pourtant ô
combien influent sur la politique étrangère américaine depuis plusieurs
décennies.
MacDonald démontre que
l'influence d'un Leo Strauss est en fait limitée et qu'elle ne résume
que très partiellement l'esprit du mouvement.
Il décrit le
néoconservatisme comme "un réseau professionnel et familial, imbriqué
et complexe, qui s'articule autour d'organisateurs et de journalistes juifs et
qui se déploie avec souplesse pour attirer les sympathies à la fois des Juifs
et des non-Juifs, dans le but de mettre la richesse et la puissance des
Etats-Unis au service d'Israël."
C'est donc un mouvement
sans réel leader ni doctrine mais avec un but bien précis.
D'abord réunis sous la
bannière de la gauche, de nombreux Juifs ont quitté celle-ci après qu'elle soit
devenue antisioniste.
Irving Kristol est un des premiers à
"changer de camp" en devenant républicain, il soutint Richard Nixon
en 1972.
Petit à petit, les
néoconservateurs vont infiltrer le mouvement conservateur américain (que l'on
désigne aussi sous l'appellation de "paléoconservateurs") "en
chassant ou en évinçant les conservateurs traditionnels, et en modifiant les
positions et la philosophie de ces institutions dans un sens
néoconservateur."
MacDonald souligne que les
néoconservateurs ont été en première ligne pour soutenir l'immigration massive
de non-Européens aux États-Unis, l'objectif étant de détruire "cette
idée de civilisation chrétienne".
"La
déseuropéanisation de l'Amérique est une nouvelle encourageante, d'une qualité
quasi-transcendante" écrivait en 1984 le
néoconservateur Ben Wattenberg dans son ouvrage "The Good News is the
Bad News is Wrong".
Ce genre de volonté
n'est pas sans rappeler celle de certains "intellectuels" juifs en
France qui ne voient aucune contradiction à vouloir ouvrir bien grandes les
vannes de l'immigration pour la France tout en défendant farouchement un état
d'Israël pourtant très peu porté sur l'accueil des "migrants".
Bref...
Kevin MacDonald retrace succinctement
le parcours de nombreux néoconservateurs depuis leur soutien à Henry Jackson
(Perle et Wolfowitz) à leur arrivée en masse dans l'administration Reagan.
Plusieurs officines
néoconservatrices sont aussi citées, l'AIPAC évidemment mais aussi l'American
Enterprise Institute, le Center for Security Policy, le Jewish Institute
for National Security Affairs, Middle East Forum, Social Democrats/USA, PNAC,
WINEP, ZOA, etc.
Si un document émane d'une de ces boutiques, vous
savez à quoi vous en tenir...
Un petit ouvrage très
pertinent et documenté qu'on aurait aimé plus épais mais qui a le mérite
d'aller à l'essentiel et de bien dessiner les contours de la nébuleuse
néoconservatrice.
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« C’est quoi un
néoconservateur, Papa ? »
« C’est
quoi un néoconservateur ? » demanda George W. Bush à son
père un jour de 2003 (après trois ans à la Maison-Blanche et une guerre d’Irak
sur le feu).
« Tu veux des noms, ou une description ?
répondit Bush père.
Description.
Eh bien, je te la donne en un mot : Israël [1]. »
Description.
Eh bien, je te la donne en un mot : Israël [1]. »
L’essentiel est dit : les néoconservateurs sont des
crypto-sionistes, dans la mesure où leur
loyauté va exclusivement – et non seulement partiellement – à Israël. Dans leur cas, Israël doit être
entendu au sens donné par leur mentor Leo Strauss, c’est-à-dire comme
incluant la puissante diaspora américaine. Dans sa conférence de 1962 intitulée
« Pourquoi nous restons juifs », Strauss cite comme étant « l’affirmation
la plus profonde et la plus radicale sur l’assimilation que j’ai lue »,
l’aphorisme 205 de L’Aurore de Nietzsche, où le philosophe allemand
écrit sur le « peuple d’Israël » « Il ne leur reste
plus qu’à devenir les maîtres de l’Europe ou à perdre l’Europe. […] Un jour,
l’Europe pourrait tomber comme un fruit mûr dans leur main qui n’aurait qu’à se
tendre. En attendant, il leur faut, pour cela, se distinguer dans tous les
domaines […] jusqu’à ce qu’ils en arrivent eux-mêmes à déterminer ce qui
distingue [2]. » Remplacez « Europe » par « Occident »
et vous avez le meilleur résumé possible de ce que signifie réellement la
stratégie d’assimilation pour les néoconservateurs straussiens.
Notes
[1] Andrew Cockburn, Caligula au Pentagone :
Rumsfeld, les néoconservateurs et le désastre irakien, Xenia, 2007. Cockburn
prétend tenir cette anecdote d’ « amis de la famille ».
[2] Leo Strauss, « Why we Remain
Jews », cité dans Shadia Drury, Leo Strauss and the American Right, St.
Martin’s Press, 1999, p. 31-43.
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Du trotskisme au néo-conservatisme
Wikipedia identifie les premiers penseurs
néo-conservateurs comme étant d'anciens trotskistes
juifs:
Le
premier grand néo-conservateur à avoir adopté ce mot et qui
est considéré comme le fondateur de cette idéologie
est Irving
Kristol, un Américain
juif né dans une famille juive
orthodoxe et père de William
Kristol, fondateur du think-tank néo-conservateur Project for the New American Century. Irving
Kristol a été un militant trotskyste
actif pendant sa jeunesse et a exposé ses vues
néoconservatrices en 1979 dans l'article "Confessions of a True,
Self-Confessed 'Neoconservative.'" Les idées de Kristol sont
influentes depuis les années 50 quand il a cofondé et édité le magazine Encounter.
Un autre idéologue de ce mouvement était Norman
Podhoretz, éditeur au magazine Commentary de 1960
à 1995.
(...)
Les
journaux néo-conservateurs prééminents sont Commentary et The Weekly Standard. Il
existe aussi des think-tanks néo-conservateurs sur la politique étrangère dont
notamment American Enterprise Institute (AEI), Project for the New American Century (PNAC), The Heritage Foundation et le Jewish Institute for National Security Affairs
(JINSA).(...)
Le
néo-conservatisme apparaît véritablement dans les années
1980, quoique l'on puisse trouver des éléments précoces de ce qui
peut apparaître comme une école de pensée politique dans les années
1960, autour de personnalités comme Irving
Kristol, Norman Podhoretz, Wilmoore Kendall, John M. Olin, James
Burnham, Francis Fukuyama, ou Charles Krauthammer.
(...) Ses
adeptes sont souvent d'anciens démocrates, voire
d'anciens trotskistes, déçus
par l'évolution culturelle et intellectuelle depuis les années
1960. C'est le cas d'Irving
Kristol, ou de Martin Diamond, spécialiste de la Constitution américaine. (...) Si de
nombreux néoconservateurs sont de confession juive et
catholique (Gerson, Mark: 1987 : 285), il serait faux de réduire cette vision
politique à une approche communautaire. Il est plus juste de dire que les
néoconservateurs sont le plus souvent des pro-israéliens
proches du Likoud, la droite israélienne (...)
VOIR AUSSI :
Hannibal GENSÉRIC
Et oui ! Les néo-conservateurs sont ce qui fût autrefois le parti bolchevique américain !
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