Dans "Mad Dog" Mattis : la deuxième erreur de Trump", nous écrivions: "Le
militaire en chef de Trump, le général Mattis est en train de prouver
que son sobriquet de “chien fou” est bien mérité. Il vient juste de
déclarer que “l’Iran est le seul plus gros sponsor du terrorisme dans le monde”, alors que tout le monde sait que ce "plus gros sponsor" est le protectorat américain appelé communément "Arabie Saoudite".
Les Russes commencent à s’agiter dans l’affaire de la “drôle de
crise” iranienne, qui semblerait nous ramener dix ans en arrière, comme
si rien ne s’était passé entretemps, sous le prétexte absurde et
absolument sans le moindre fondement que l’Iran est le “plus gros
producteur de terrorisme” islamiste.
Quand on a sous la main d’aussi
excellents amis que l’Arabie, le Qatar & Cie, sans compter la CIA,
comme l’ont les présidents et les parlementaires US successifs, l’actuelle “crise“ déclenchée par les seuls USA apparaît absolument irréelle et surréaliste. Il faudra d’ailleurs s’habituer à cette espèce d’irréalité et cette sorte de surréalisme également trumpistes,
dans nombre d’actions du président Trump ; lequel fait ainsi payer ses
actes fondamentalement antiSystème qu’il pose par ailleurs de la façon
la plus éclatante.
(Tous les commentateurs antiSystème sont et seront obligés à la pratique de cette gymnastique entre l’approbation extrême et la critique très ferme, comme nous-mêmes d’ailleurs [voir le 7 février et le même 7 février], sans qu’il y faille voir en aucun cas un changement de l’opinion sinon de l'humeur, ou une incertitude du jugement : il suffit d’aligner et de comparer les deux chroniques successives de Justin Raimondi, du 6 février 2017 [applaudissements enthousiastes] et du 8 février 2017 [appréciation très critique].)
Pour l’Iran, donc, les Russes montrent directement et avec des actes
qu’il est très loin le temps où les USA parviendront à éloigner la
Russie et de l’Iran. Il s’agit non seulement de mots et d’actes
concrets, dans le domaine le plus sensible : d’une part, la possible
livraison de chasseurs Soukhoi Su-27 à l’Iran, d’autre part, — et là,
beaucoup plus important, – l’évocation précise de la possibilité de l’utilisation d’une base aérienne iranienne par les forces aériennes russes. C’est en revenir à la formule étrennée en août 2016 (voir les 16 et 18 août 2016),
avec le déploiement temporaire de bombardiers stratégiques Tu-22 russes
sur la base d’Hamadan. Ce stationnement avait d’abord été annoncé comme
permanent, puis réduit à un simple déploiement de quelques jours, le
temps d’une mission stratégique sur la Syrie.
Le pouvoir civil iranien avait du reculer sous la pression des
militaires et de ses propres extrêmes, au nom de la protection de la
sécurité nationale, et avait abandonné la formule initiale du
stationnement permanent. Aujourd’hui que le danger US réapparaît, cet
argument n’a plus guère de poids puisqu’un stationnement
d’avions russes à Hamadan ou ailleurs en Iran représente une formidable
garantie pour l’Iran, du fait que la moindre agression US contre l’Iran
toucherait directement la Russie et impliquerait cette puissance dans le
conflit. L’excellent businessman qu’est The-Donald
va devoir apprendre qu’il a en face de lui de rudes joueurs d’échec, et
qu’il faut en tenir compte s’il les veut à ses côtés. (Ci-dessous,
extraits du texte d’Alexander Mercouris sur ce sujet, le 9 février dans TheDuran.com.)
Levan
Dzhagaryan, ambassadeur de la Russie en Iran, a soudainement laissé courir la possibilité que l'armée de l'air russe
utilise de nouveau la base aérienne de Shahid Nojed près d'Hamadan en Iran.
« La
force aérienne russe a brièvement utilisé
cette base aérienne pour lancer des frappes contre ISIS dans l'est de la
Syrie en août. A
la suite de plaintes déposées au Parlement iranien, les Russes se
sont brusquement retirés, soit parce qu'ils ont choisi d'aller, soit parce
que les Iraniens leur ont demandé de le faire. Dzhagaryan
semble maintenant évoquer la possibilité que l'aviation russe y retourne et
même que la Russie vende des avions de combat avancés SU27 à l’Iran. Voici
comment l'agence de presse officielle russe TASS rapporte ses commentaires
« Si les dirigeants des deux pays estiment
nécessaire d'utiliser l'infrastructure militaire iranienne pour combattre le
terrorisme en Syrie ou ailleurs, de telles mesures seront prises. L'année
dernière, la Russie a terminé complètement l'exécution de ses obligations pour
la livraison des systèmes de défense aérienne S-300 à l'Iran. La
coopération entre la Russie et l'Iran se déroule dans de nombreux domaines, y
compris dans le domaine militaire et technique. Les
ministères de la défense des deux pays sont actuellement en pourparlers à
différents niveaux sur de nombreux projets intéressant l'Iran. Il
est de notoriété publique que l'équipe de démonstration aérienne russe
Chevaliers Russes (volant sur des jets Sukhoi-27 ) a participé à l'Iran
Airshow-2016 sur l'île de Kish en novembre dernier. Hossein
Dehghan (ministre iranien de la Défense - AM) a également visité une exposition
de chasseurs Sukhoi-27 ».
Il
est difficile de voir ces commentaires comme autre chose qu'un avertissement
voilé par les Russes à la nouvelle administration Trump que la Russie
supportera l'Iran dans toute nouvelle confrontation avec les États-Unis. L'intervention
de l'armée de l'air russe revenant en Iran pour y mener des opérations semble
davantage destinée à dissuader les attaques que les États-Unis pourraient
envisager contre l'Iran plutôt que de combattre ISIS ... »
DeDefensa.org.
Mis en ligne le 9 février 2017
Mis en ligne le 9 février 2017
Syrie : le nœud coulant autour d'Al Bab se resserre
C'est
la dèche pour Daech, les petits hommes en noir al-babiens étant en
passe d'être coupés du reste de leur territoire. Mais la question à un
million concerne évidemment la "rencontre" entre l'armée loyaliste et le
duo ASL-Turcs, mortels ennemis d'hier. Certes, tout cela a forcément
été préparé en amont lors des discussions Poutine-Erdogan, mais il y a
un monde entre les corridors du pouvoir et la réalité du terrain, et les
haines tenaces ne s'effacent pas du jour au lendemain. Les généraux
syriens font d'ors et déjà monter la pression, se disant prêts à en découdre avec l'ASL et les Turcs si nécessaire. Ambiance, ambiance...
Des rapports faisaient d'ailleurs état de premières escarmouches entre l'armée syrienne et l'ASL hier, et l'escalade est maintenant en vue, ce qui semble indiquer qu'Erdogan et Poutine, pourtant en contact quasi journalier,
ne contrôlent pas entièrement leurs protégés. Attention, c'est parfois
de ces petits accrochages que sortent les grands conflits ; la poudrière
d'Al Bab n'a pas encore dit son dernier mot. Et c'est sans compter les
Kurdes, à 10 km à l'ouest et à l'est, qui observent, pour l'instant
sagement, ce maelstrom...Sur l'ensemble de la Syrie, les Russes ont globalement la main.
Le Donald change le fusil d'épaule de l'empire, les pétromonarchies et leurs laquais européens sont soudain inaudibles, le sultan a fortement rabaissé ses prétentions. Moscou se sent comme un poisson dans l'eau et vient de fournir à Damas la plus grosse quantité de missiles jamais livrée entre les deux pays, ce qui est un sûr indicateur de la confiance du Kremlin dans la victoire finale.
L'ambassadeur russe à Téhéran a indiqué que l'aviation russe utiliserait des bases iraniennes si nécessaire. Le fait qu'il l'affirme publiquement est d'autant plus surprenant que des problèmes de prestige et de face étaient apparus l'année dernière :
Toujours au Moyen-Orient, nous avions évoqué
l'utilisation de la base iranienne d'Hamadan par les bombardiers
mastodontes TU-22m3 et le fait que Téhéran ne s'opposait pas à l'emploi d'autres pistes d'envol. Depuis, quelques bisbilles
sont apparues, non pas sur le fond mais sur la forme ; des députés
iraniens ont blâmé le ministère russe de la Défense pour avoir divulgué
l'information, véritable coup de tonnerre
puisque aucun pays ne s'était jamais vu accorder ce privilège depuis la
Révolution khomeïniste de 1979. Le Perse est fier et, officiellement,
l'ours n'utilise plus cette base. Derrière ce sauvetage de face,
difficile d'imaginer toutefois que l'activité n'a pas repris depuis,
mais ça, on ne le saura pas...
Décidément, Moscou doit se
sentir drôlement en confiance désormais. Et ce ne sont pas les
déclarations d'Assad qui doucheront son optimisme. Lors d'une rencontre
avec une délégation de députés de la Douma, il a affirmé
que les Russes auraient la part belle dans la reconstruction
énergétique de l'après-guerre. Jusqu'ici, rien que de très normal, mais
l'argument avancé a dû fait sourire jaune à Téhéran et à Pékin, pourtant
eux aussi alliés de Damas : "Ni la Chine ni l'Iran n'ont de compagnies
ayant suffisamment d'expertise pour concurrencer les sociétés russes".