La réponse est qu’on a créé un être moderne et minable qu’on appelle le bourgeois, avec sa femme qui commande (les femmes savantes qui annoncent nos féministes), la bonne qui insulte, les gosses qui n’obéissent pas et toute une basse-cour de pique-assiettes. La réponse est dans Molière.
Un rappel de Fukuyama dans son anglais simple et universitaire :
« Hobbes and Locke, the founders of modern liberalism, sought to
eradicate thymos from political life altogether, and to replace it with a
combination of desire and reason... The bourgeois was an entirely deliberate
creation of early modern thought, an effort at social engineering that sought
to create social peace by changing human nature itself.”
Le Français moderne comme produit de l’ingénierie sociale anglo-saxonne : on est bien d’accord, et le Général le serait aussi. Relisez mon texte sur Athos et Fukuyama, inspiré par les réflexions de Philippe Grasset, texte que j’ai joint à mon Littérature et conspiration.
En effet à la même époque on crée le bourgeois en France aussi que l’on voit à l’œuvre chez Molière (il faudra se décider à le comprendre un jour celui-là). On a Tartufe, Orgon, Sganarelle, DJ, l’avare et on se rappelle que pour Guénon la distance entre le Français médiéval et le Français louis-quatorzien est abyssale.
Taine écrit dans ses magnifiques fables de
la Fontaine :
« Le
bourgeois est un être de formation récente, inconnu à l'antiquité, produit des
grandes monarchies bien administrées, et, parmi toutes les espèces d'hommes que
la société façonne, la moins capable d'exciter quelque intérêt. Car il est
exclu de toutes les idées et de toutes les passions qui sont grandes, en France
du moins où il a fleuri mieux qu'ailleurs. »
Sauf que le bourgeois est devenu plus cool et tolérant, tant qu’on ne touche pas au grisbi…
Donc dans sa grande peur de bien-pensants le Bernanos d’extrême-droite, comme on dit, de l’inaction française, comprend qu’on a changé d’humanité. On n’a pas entendu le grand remplacement ethnique pas plus qu’on attendu le transhumanisme. Ces choses sont plus subtiles et ont pris quelques siècles. Michelet le disait déjà (je l’ai noté) que le christianisme tout comme la féodalité auraient dû disparaître bien avant Bergoglio ou Sarkozy.
Drumont donc (extraits cités par
Bernanos) :
« L’homme
du passé avait de nobles motifs pour vivre, l’homme d’aujourd’hui a seulement
quelques prétextes plausibles pour ne pas se tuer et accomplir jusqu’au bout de
sa corvée. »
Haine du bourgeois increvable qui a pris le
pouvoir sur un roi fantoche (Taine encore, voyez aussi Apostolidès et son
roi-machine) à la révolution :
« La
bourgeoisie a fait passer sur la collectivité toutes les charges dont étaient
grevées autrefois les propriétés qu’elle avait acquises pour quelques chiffons
de papier… L’État les prenait sur lui, c’est-à-dire les mettait sur le dos de
tous les citoyens. »
Puis le plus grave : la création de
cette sous France et de cette humanité médiocre qu’on a dénoncé dans tout notre
cinéma ou notre littérature des derniers siècles :
« Le
régime moderne a créé un type d’être spécial qu’on serait tenté d’appeler le
contribuable ; car en réalité si on demandait à beaucoup d’hommes de ce
temps pourquoi ils sont sur la terre, ils finiraient par vous dire :
« Ma foi, pour faire notre service militaire, pour acquitter nos
contributions et pour payer notre terme. »
Drumont ajoute :
« Les
riches tiennent maintenant la place prépondérante dans cette église qui a été
fondée par les pauvres. »
L’être moderne sous des dehors anars est
veule et soumis. Drumont :
« Les
rois chevelus consultaient leurs leudes ; Charlemagne consultait ses
pairs…A force de marcher dans la voie du progrès, comme on dit, on a rétrogradé
au-delà des cafres : et, durant cinq mois, un aventurier génois envoya les
gens se faire casser les bras et les jambes pendant qu’il fumait son
cigare. »
Il laisse donc s’installer l’anarchie.
Drumont :
« L’anarchie
s’est installée dans ce pays comme la nuit s’installe sur la terre, sans qu’on
s’aperçoive du moment où il a cessé de faire jour… »
Il ajoute ailleurs (c’est moi qui cite, pas
Bernanos) :
« L’être
qui est là est un moderne, un nihiliste, il ne tient à rien. Il n’est guère
plus patriote que les trois cent mille étrangers, que l’aveuglement de nos
gouvernants a laissé s’entasser dans ce Paris dont ils seront les maîtres quand
ils voudront ; il ne se révoltera pas comme les aïeux sous l’empire de quelque
excitation passagère, sous une influence atmosphérique en quelque sorte qui
échauffe les têtes et fait surgir des barricades instantanément. »
On peut être mort et sembler vivant. C’est
l’hystérésis dont parle Baudrillard à son interlocuteur :
« Le
cadavre social continue à marcher sans qu’on s’aperçoive qu’il est cadavre,
jusqu’au jour où le plus léger heurt brise cette survivance factice et montre
de la cendre au lieu du sang. »
Comment contrôler ce cadavre ? Par les
attentats par exemple, comme au Bataclan. Bernanos ici, pas Drumont, donne sa
théorie de la conspiration-constatation :
« L’attentat
de Vaillant a été l’œuvre d’agents provocateurs… La république montra le loup
aux moutons en fureur. Instantanément, le silence se fit dans le
troupeau. »
À quoi servirent les attentats anarchistes
de ces années moins folles que molles ? Bernanos :
« Pour
rallier à son drapeau, c’est-à-dire au drapeau de la gendarmerie les diverses
fractions de la classe bourgeoise, cléricale ou non, de droite ou non… »
C’est p. 242 de l’édition du Livre de Poche. Je tiens à le préciser.
Bernanos dans un bel élan prévoit la mort
du catholicisme qu’on a sous nos yeux avec Bergoglio et son troupeau
je-m’en-foutiste et clairsemé :
« Les
puissantes démocraties capitalistes de demain, organisées pour l’exploitation
rationnelle de l’homme au profit de l’espèce, avec leur étatisme forcené,
l’inextricable réseau des institutions de prévoyance et d’assurances, finiront
par élever entre l’individu et l’Église une barrière administrative qu’aucun
Vincent de Paul n’essaiera même plus de franchir. Dès lors, il pourra bien
subsister quelque part un pape, une hiérarchie, ce qu’il faut enfin pour que la
parole donnée par Dieu soit gardée jusqu’à la fin, on pourra même y joindre, à
la rigueur, quelques fonctionnaires ecclésiastiques tolérés ou même entretenus
par l’État, au titre d’auxiliaires du médecin psychiatre, et qui
n’ambitionneront rien tant que d’être traités un jour de « cher maître » par
cet imposant confrère… Seulement, la chrétienté sera morte. Peut-être
n’est-elle plus déjà qu’un rêve ? »
On est proche ici de Tocqueville, de Charles Pearson et de Chesterton, auteurs que j’ai nûment étudiés à ce sujet.
Revenons à Drumont qui définit le Français
moderne : le mouton de maître Patelin ou de Rabelais (naissance du
bourgeois !) :
« Les
Français sont admirablement dressés à toute cette organisation fiscale ;
ils sont comme les méharis qui s’agenouillent pour qu’on puisse les charger
plus facilement ou comme les chevaux de renfort d’omnibus qui, leur besogne
faite, vont tout seuls rejoindre leur place en bas dans la montée et attendent
là qu’on les attelle de nouveau. »
De rage Drumont se lance comme beaucoup
d’autres à cette époque, dans une explication convenue, la raciale :
« Lorsque
les conquérants germains et francs qui, unis aux purs Gaulois et aux Celtes,
constituèrent véritablement la France, eurent perdu leur vigueur, l’élément
gallo-romain l’emporta, la race latine prit le dessus ; or cette race est
faite pour la tyrannie puisqu’elle n’a aucun ressort de conscience ; elle
adore une idole imbécile, une idole de marbre ou de plâtre qu’on appelle la
loi, et au nom de cette loi, elle subit tout… Il n’y a qu’en France qu’un
gouvernement ait pu s’appeler, comme par une désignation
constitutionnelle : la Terreur. »
Nietzsche fait de même à la même
époque :
« La
même observation s’applique à presque toute l’Europe : en fait, la race
soumise a fini par y reprendre la prépondérance, avec sa couleur, la forme
raccourcie du crâne et peut-être même les instincts intellectuels et
sociaux : — qui nous garantit que la démocratie moderne, l’anarchisme
encore plus moderne et surtout cette tendance à la Commune, à la forme
sociale la plus primitive, chère aujourd’hui à tous les socialistes d’Europe,
ne soient pas, dans l’essence, un monstrueux effet d’atavisme — et
que la race des conquérants et des maîtres, celle des aryens, ne soit
pas en train de succomber même physiologiquement ?… »
Et Madison Grant, prophète pessimiste de la mort de la " grande race ", partagera la même vision, comme son ami Vacher de Lapouge.
On laisse conclure Drumont – toujours cité
par Bernanos :
« Mon
erreur fondamentale a été de croire qu’il existait encore une vielle France, un
ensemble de braves gens, gentilshommes, bourgeois, petits propriétaires,
fidèles aux traditions de leur race et qui, égarés, affolés, par les
turlutaines qu’on leur débite depuis cent ans, reprendraient conscience
d’eux-mêmes si on leur montrait la situation telle qu’elle est, se réuniraient
pour sauver leur pays. »
par Nicolas BONNAL Octobre 2018
Source : https://www.revuemethode.org/m101828.html
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Léo Taxil : L'antisémitisme est-il pire que la pornographie et le blasphème talmudique ?
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