La Russie continue de signaler à l’OTAN ses « lignes rouges » en matière de sécurité, tandis que les États-Unis annoncent qu’ils sont prêts à négocier avec la Russie au sujet des préoccupations de cette dernière. Mais tout retour en arrière par rapport à la politique actuelle s’apparente à une hérésie pour les États-Unis.
Les négociations de lundi entre les États-Unis et la Russie sur les demandes de sécurité de la Russie ont été, comme prévu, un échec.
La principale demande de la Russie, à savoir mettre fin à la poussée de l’OTAN vers ses frontières en excluant l’adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie, a été rejetée. Un article du NYT, pour une fois réaliste, n’a même pas essayé de cacher le désastre .
« Tout le monde comprend parfaitement, l’heure de vérité arrive dans les relations entre la Russie et l’OTAN. Vous ne pouvez pas constamment frapper les points faibles de la Russie… La conversation doit être sérieuse… sinon, l’alternative est une réponse militaro-technique et militaire de la Russie », a déclaré lundi le chef de la délégation russe aux négociations sur le contrôle des armements à Vienne.
Il faisait référence à deux documents publiés par la Russie le 17 décembre [1]. Ces deux documents décrivent en détail ce que Washington doit faire pour éviter le conflit inévitable et imminent lié à l’expansion de l’OTAN vers l’est, jusqu’aux frontières de la Russie. Pour l’essentiel, ils exigent que les forces de l’OTAN se retirent là où elles se trouvaient en 1997 (c’est-à-dire à l’intérieur des frontières de l’Allemagne). Les documents abordent également d’autres aspects de la désescalade, tels que le retrait de toutes les armes nucléaires américaines du territoire étranger et le confinement des forces américaines dans des eaux et un espace aérien à partir desquels elles ne peuvent menacer le territoire de la Russie.
Il ne s’agit pas ici d’un remaniement et d’un réajustement mineurs des déploiements de forces. Il s’agit d’un cadre pour une révolution géopolitique, rien de moins. En substance, la demande porte sur l’« annulation » de l’ordre mondial américain fondé sur des règles (façonné autour des intérêts et des valeurs des États-Unis).
La Russie dit à l’Amérique que le Conseil de sécurité des Nations unies est, et doit désormais être, la seule source de lois internationales. La Russie exige non seulement le recul stratégique des États-Unis en Europe, mais aussi que tous les futurs accords de sécurité soient rédigés sous forme de traités juridiquement contraignants – et que Washington cesse ses programmes unilatéraux de changement de régime et de révolution de couleurs.
Bien qu’elle soit formulée dans le langage obscur d’un projet de traité, l’idée maîtresse est plus proche de celle d’un ultimatum. Ce n’est absolument pas conçu comme un document de discussion abstrait à étudier dans les années à venir. C’est un appel à une réaction immédiate des États-Unis.
D’une certaine manière, il semblerait que le projet de traité ait été lancé dans l’arène publique, non pas tant dans l’espoir de recevoir rapidement une réponse substantielle de Washington, mais plutôt pour souligner que la Russie brûle délibérément les ponts, afin d’attirer l’attention sur la gravité de la situation : « Nous l’avons dit une fois : ça n’a pas été entendu ». Nous le disons donc dans un format qui indique clairement que Moscou ne reculera pas une nouvelle fois devant cette exigence stratégique. Le sous-entendu est « Êtes-vous attentifs ? » Car si ce n’est pas le cas, nous passerons au vocabulaire des options militaires et militaro-techniques.
Cela est apparu clairement lorsque le vice-ministre des Affaires étrangères, Sergei Ryabkov, a exhorté Washington à donner une réponse immédiate aux propositions de garanties de sécurité – dans un contexte géopolitique qui se détériore progressivement : « Je pense qu’il n’y aura pas de refus [de la part des États-Unis] en tant que tel, mais qu’il y aura une tentative d’ajouter toutes sortes de souhaits, de conditions, toutes sortes d’idées supplémentaires juste pour renvoyer la balle de notre côté », a-t-il déclaré.
Et, comme on pouvait s’y attendre, c’est précisément la réponse initiale des États-Unis : les États-Unis « ne feront pas de compromis » sur l’expansion de l’OTAN, a réitéré la Maison Blanche vendredi. « Nous avons vu les propositions russes. Nous en discutons avec nos alliés et partenaires européens ».
Jake Sullivan, le conseiller américain à la sécurité nationale, a déclaré le même jour que si les Russes avaient une liste de préoccupations en matière de sécurité, il en allait de même pour les États-Unis et leurs alliés européens – et que Washington était prêt à négocier sur cette base. « Nous avons eu un dialogue avec la Russie sur les questions de sécurité européenne au cours des 20 dernières années », a déclaré Sullivan à un auditoire du Conseil des relations extérieures. « Nous l’avons eu avec l’Union soviétique pendant des décennies avant cela ».
Ce processus « a parfois donné lieu à des progrès, parfois à des impasses », a déclaré Sullivan, notant que les États-Unis prévoyaient « de mettre sur la table nos préoccupations concernant les activités russes qui, selon nous, nuisent à nos intérêts et à nos valeurs ». « Il est très difficile de voir des accords se concrétiser, a-t-il ajouté, si nous continuons à assister à un cycle d’escalade. »
Le « fait de mettre sur la table » les préoccupations de Sullivan concernant les activités incompatibles avec les intérêts et les valeurs des États-Unis a dominé les échanges entre les États-Unis et la Russie, la Chine et – par le biais d’intermédiaires – l’Iran tout au long du mandat de cette administration. Cela n’a pas été productif. Rien n’a été « concrétisé ». Les tensions n’ont fait que s’accroître.
Fyodor Lukyanov, considéré comme proche de la vision du monde du Kremlin et connu pour conseiller les hauts fonctionnaires, estime que l’Occident n’acceptera probablement pas les exigences de la Russie, car cela serait politiquement impossible. George Friedman, de l’ancienne génération de Stratfor liée à la CIA, est tout à fait d’accord : il existe des clauses qui garantissent que les États-Unis rejetteront le document.
Les exigences de la Russie ne sont pas nouvelles. Elles reflètent une position que la Russie exprime depuis des années. La question est donc la suivante : pourquoi un État lancerait-il une proposition dans les termes durs d’un ultimatum, si ce n’est pour réveiller délibérément les esprits, avant que les questions ne passent de la sphère diplomatique à la sphère militaire.
Il y a peu de signes indiquant que les États-Unis ou l’Europe sont en train de sortir de leur longue sieste stratégique. L’Occident, cependant, est tellement pris par la politique des mèmes qu’il est presque certain qu’il considérera les propositions comme n’étant rien de plus qu’un nouveau récit russe, à reléguer aussi rapidement que possible dans les méandres d’une discussion sans fin, impliquant non seulement les partenaires de l’OTAN, mais aussi l’UE.
Du point de vue des États-Unis et de l’OTAN, le fait même d’envisager que la Russie fixe ses propres lignes rouges en matière de sécurité est une hérésie – comme l’a affirmé le secrétaire général de l’OTAN (la veille de la publication des deux documents par la Russie) : « L’OTAN est aux côtés de l’Ukraine. Tous les Alliés soutiennent la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Et nous ne reconnaissons pas l’annexion illégale de la Crimée par la Russie… L’OTAN continuera de vous [le président Zelensky] apporter un soutien concret… Le message que nous adressons aujourd’hui à la Russie est qu’il appartient à l’Ukraine, en tant que nation souveraine, de décider de sa propre voie, et aux 30 Alliés de l’OTAN de décider quand l’Ukraine sera prête à devenir membre. Ce qui est important maintenant, c’est que nous nous concentrions sur les réformes qui permettront à l’Ukraine de répondre aux normes de l’OTAN ».
Si cela devient la réponse finale des États-Unis, nous verrons d’autres mesures destinées à démontrer la détermination de la Russie à modifier le statu quo, quoi qu’en dise l’Occident. Dans de nouveaux commentaires, le vice-ministre russe des affaires étrangères, Alexander Grushko, a souligné l’urgence de ces propositions, les tensions étant à un point de basculement. Le ministre a ajouté que si Moscou est repoussée ou ignorée dans ces tentatives d’élaboration de garanties de sécurité, la Russie sera contrainte d’adopter ses propres « contre-menaces ».
La question qui se pose maintenant est de savoir ce que la Russie va faire, lorsque les États-Unis s’engageront dans la voie du « nous discutons avec la Russie depuis des dizaines d’années sur ces questions » – autrement dit, quel est le problème, pourquoi se presser ?
Eh bien, l’Occident a été étonné lorsque, soudainement, le pied russe s’est posé en Syrie, et que le renversement du gouvernement syrien par Washington a été bloqué par la force militaire russe. Le message d’aujourd’hui est le suivant : soit vous « finnisez » 1 l’Ukraine, soit la Russie le fera pour vous.
- La finlandisation désigne la neutralité de la Finlande durant la guerre froide. Ne pas rejoindre l’OTAN était vital pour la souveraineté nationale. Source ↩
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Comme les pourparlers n’ont mené à rien, la Russie va être obligée de réagir
Les négociations de lundi entre les États-Unis et la Russie sur les demandes de sécurité de la Russie ont été, comme prévu, un échec.
La principale demande de la Russie, à savoir mettre fin à la poussée de l’OTAN vers ses frontières en excluant l’adhésion de l’Ukraine et de la Géorgie, a été rejetée. Un article du NYT, pour une fois réaliste, n’a même pas essayé de cacher le désastre :
Les pourparlers sur l’Ukraine. Les États-Unis et la Russie bloquent sur l’expansion de l’OTAN.
Le vice-ministre des affaires étrangères, Sergei A. Ryabkov, principal négociateur de la Russie, a insisté après la réunion sur le fait qu’il était « absolument obligatoire » que l’Ukraine ne devienne « jamais, ô grand jamais, » membre de l’OTAN.
Son homologue américaine, la secrétaire d’État adjointe Wendy Sherman, a répété que les États-Unis ne pourraient jamais prendre un tel engagement car « nous ne permettrons à personne de claquer la politique de la porte ouverte de l’OTAN », et elle a déclaré que les États-Unis et leurs alliés ne resteraient pas inactifs si la Russie cherchait à modifier les frontières internationales « par la force ».
La discussion entre tous les membres de l’OTAN et la Russie à Bruxelles a eu des résultats similaires. Les demandes essentielles de la Russie ont été rejetées et un tas de choses avec lesquelles l’OTAN aimerait limiter les avantages de la Russie ont été proposées pour détourner l’attention des questions essentielles.
Comme l’a résumé le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg :
La Russie a soulevé aujourd’hui les propositions qu’elle a publiées en décembre et qui visent à répondre à ses préoccupations en matière de sécurité. Elle demande notamment de ne plus admettre de nouveaux membres à l’OTAN. Et de retirer ses forces des alliés de l’Est. De leur côté, les Alliés ont réaffirmé la politique de la porte ouverte de l’OTAN. Et le droit pour chaque nation de choisir ses propres critères de sécurité.
Bon d’accord. La Russie va certainement choisir ses propres critères de sécurité. Et l’OTAN ne les appréciera pas.
La liste de souhaits de l’OTAN pour les discussions futures comprend ces points :
Les Alliés aimeraient discuter des moyens concrets d’accroître la transparence des exercices militaires, de prévenir les incidents militaires dangereux et de réduire les menaces spatiales et cybernétiques. Les Alliés ont également proposé d’examiner la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération. Notamment pour aborder les limitations réciproques des missiles et les politiques nucléaires. En ce qui concerne les lignes de communication, les Alliés souhaitent étudier les moyens d’améliorer les canaux de communication civils et militaires, et la possibilité de rétablir nos bureaux respectifs à Moscou et à Bruxelles.
Aucune de ces mesures n’est prioritaire pour la Russie et, comme elle ne manquera pas de le faire remarquer, c’est l’OTAN qui, en octobre, a pris l’initiative de rompre les canaux de communication civils et militaires en expulsant huit membres de la mission russe auprès de l’OTAN, à Bruxelles.
L’alliance a également réduit de moitié la taille de la mission russe auprès de l’OTAN, dont le siège est à Bruxelles, passant de vingt à dix postes accrédités – les huit fonctionnaires russes expulsés plus deux autres postes qui seront désormais supprimés.
La Russie a réagi à ce comportement scandaleux en fermant son poste à Bruxelles.
Après la réunion d’aujourd’hui, la secrétaire d’État adjointe Wendy Sherman a ajouté une nouvelle exigence américaine à sa liste :
Mme Sherman, numéro deux du département d’État qui dirige la délégation américaine lors de réunions distinctes en Europe cette semaine, a déclaré que la réunion OTAN-Russie s’était terminée par « un défi sobre » lancé à la Russie « pour qu’elle n’aggrave pas les tensions, qu’elle choisisse la voie de la diplomatie, qu’elle continue à s’engager dans un dialogue honnête et réciproque afin qu’ensemble nous puissions trouver des solutions qui renforcent la sécurité de tous ».
Le secrétaire adjoint a déclaré que la délégation russe n’a ni pris d’engagement, ni rejeté les offres de l’OTAN concernant des discussions de suivi. La délégation n’a pas non plus pris l’engagement de procéder à une désescalade, a dit M. Sherman, mais il a ajouté qu’elle n’a pas rejeté la désescalade.
« Les actions de la Russie ont provoqué cette crise et c’est à la Russie de désescalader les tensions et de donner à la diplomatie la chance de réussir…. Il n’y a eu aucun engagement de désescalade. Il n’y a pas eu non plus de déclaration selon laquelle il n’y en aurait pas. »
Il n’y a rien à désescalader. Un certain nombre de troupes russes stationnées en Russie sont là pour surveiller les frontières russes. Ils l’ont toujours fait et continueront à le faire. Ce sont les États-Unis, et non la Russie, qui exagèrent leur nombre, aujourd’hui avec des « hélicoptères supplémentaires » que personne n’a vus :
Bien que les mouvements de troupes aient ralenti, il y a encore 100 000 militaires près de la frontière et les Russes y ont maintenant positionné des avions d’attaque supplémentaires, ont déclaré des responsables américains. Les hélicoptères d’attaque et de transport, ainsi que les avions de chasse d’attaque au sol, constitueraient un avantage crucial pour la Russie, si M. Poutine décidait d’envahir l’Ukraine.
Alexander Mercouris souligne (vidéo) que les États-Unis ont déclenché l’affaire actuelle lorsqu’ils ont poussé l’Ukraine, en mars 2021, à relancer une guerre contre ses provinces orientales rebelles du Donbass. La Russie a répondu en mettant rapidement sur pied une force suffisamment importante pour détruire l’armée ukrainienne.
Cela a calmé le problème ukrainien pendant un certain temps, mais les États-Unis et l’OTAN ont continué à faire pression sur la Russie avec des vols de bombardiers près des frontières russes et des navires de guerre dans la mer Noire. Qu’attendaient-ils d’autre qu’une réponse de la Russie ?
Les États-Unis ne peuvent rien faire contre le positionnement des troupes en Russie. Exagérer leur nombre ne fait que renforcer la pression. Les fausses lamentations constantes sur les « renforcements militaires russes » n’aident pas à calmer les choses.
La « désescalade » doit se produire du côté américain. Sinon, ce sera à la Russie de s’engager dans l’escalade. Tel est l’avertissement lancé par le président russe Vladimir Poutine au président américain Joe Biden. Mais il ne semble pas que les États-Unis l’aient compris.
Les négociations sont vouées à l’échec car la partie « occidentale » rejette les principales demandes de la Russie. Les « mesures militaro-techniques » promises seront mises en œuvre en Europe, en Asie et probablement aussi en Amérique latine. Étant donné que la Russie a présenté, au cours de la dernière décennie, un certain nombre de modèles d’armes révolutionnaires, nous pouvons nous attendre à de nouvelles surprises que les États-Unis seront incapables d’égaler.
Le fait est que la Russie est capable de se défendre et de défendre ses alliés contre les attaques militaires et les tentatives de révolution colorée fomentées par les États-Unis, comme au Belarus et au Kazakhstan.
Le fait que les États-Unis n’aiment pas cela n’est pas le problème de la Russie.
Par Moon of Alabama – Le 12 janvier 2022
NOTES de H. Genséric
[1]
Ultimatum
russe à l’Occident
- La
Russie pose des exigences sérieuses et met en garde contre une « confrontation
».
- Décryptage
de la conversation téléphonique Biden-Poutine du 30 décembre 2021
- Les
tambours de guerre sont en train de battre
- Biden
l'atlantiste contre Poutine l'eurasien. Par Alexandre Douguine
- Le
compte à rebours géostratégique va commencer
Hannibal GENSÉRIC
Tremblez en Russie !! Ce matin les média français ont annoncé que la France prend le commandement de la force d'intervention...
RépondreSupprimerAlors Mr Poutine ont fait moins le malin ? Macron vous observe.
Merci pour cet instant dhumour,
SupprimerMacron l'insoumis au sein de l'armée Française est maintenant le général en chef. Va t-il emmerder la Russie?
SupprimerQue le nouveau commandant de la force d'intervention nous montre qu'il est capable de faire trembler le Mali. Et là, nous saurons qu'il peut égratigner la Russie.
SupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
RépondreSupprimerAvant la première guerre mondiale les usa en installent une hystérie de la peur du socialiste et communiste aux peuples américains et au monde entier avec publicités de l’extrémise pour mieux s’accaparer des richesses par leur multinationale qui ne respecte aucun peuple dans même au us comme avec big pharma par exemple, et qu’avec leur richesse on pousser l’Allemagne en 39/45 à ne pas respecter et que signer une non-agression contre URSS. Les multinationales n’ont jamais respecté les droits humain, la devise tous pour un à 1%.
RépondreSupprimerL’arrogance Anglo-Saxon n’a pas de limite et il devra y avoir un vainqueur et un perdant…on voit bien que la Russie essaye d’éviter la guerre mais ce sera la guerre pour éviter l’humiliation et la guerre….
RépondreSupprimerL’arrogance Anglo-Saxon ?? Depuis quand les anglo-saxons sont-ils la lumière sur les nations et la tribu élue ??
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