mardi 17 mars 2015

LIBYE : La pétaudière du sud Toubou



La réunion entre les différentes parties libyennes s’est tenue le 10 et 11 mars à Alger sous l’égide des Nations unies qui parlent d'"un grand pas". Pourtant dans le Sud libyen, les Toubous revendiquent l'indépendance.
Aussi bien que sous le Roi Idriss que sous Kadhafi, la Libye n’a jamais eu de parlement. Quatre ans après la « révolution » ce pays en a deux, deux gouvernements qui s’affrontent. L’un à Tripoli contrôlé par Fadjr Libya, groupe islamiste dirigé par Abdelhakim Belhadj, un ex-djihadiste soutenu par le Qatar. L’autre à Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, sans doute influencée par l’œuvre immortelle de Bernard-Henri Lévy : « le sermon de Tobrouk ». Sans oublier les milices et autres groupes islamistes tels que l’EI, Aqmi (al-Qaida au Maghreb islamiste).

Entre cécité et double langage

La Libye est une vraie poudrière, la somalisation est à l'oeuvre. Aucune armée étrangère n’est prête à s’engager dans le bourbier libyen. Pour les soldats des pays limitrophes, la question de mourir pour Tripoli ou Tobrouk ne se pose pas. En l’absence de solution militaire, seule une approche politique peut laisser entrevoir une issue à terme.  Bernardo Leon, représentant personnel du secrétaire général de l’ONU déclare juste avant la tenue du premier dialogue inter-libyen : « un accord politique ou la destruction ». L’un n’empêche pas forcement l’autre, car ce processus nécessite beaucoup de temps et le pays s’enfonce d’une part, d’autre part qui mettrai les moyens nécessaires pour appliquer sur le terrain un éventuel et hypothétique accord.
Pourtant, l’heure serait à l’optimisme. Dès la clôture du sommet d’Alger, le représentant de l’ONU annonce : « Il s'agit là, d'un pas important pour la paix en Libye car les gens qui sont venus, ici à Alger, sont de vrais leaders politiques qui décident. Nous avons travaillé sur deux questions importantes, à savoir celle relative au futur gouvernement ainsi que la sécurité». Et il ajoute : « c’est un grand succès » ! En effet tous les Libyens présents à Alger se sont mis d’accord pour condamner le terrorisme et s’engager pour le combattre. Quelle avancée!

Vers une nation toubou?

L’intensité des bonnes intentions tente à faire oublier la complexité de la pétaudière libyenne. Parmi les éléments du désordre libyen, figure en bonne place le problème des Toubous. Ces derniers, libyens noirs considérés par Kadhafi comme citoyens de seconde zone, ont été arabisés par la contrainte dans la foulée de la folie du livre vert. Le Guide les a même déchus de leur nationalité en 2009. Ils se retrouvent avec des armes provenant des arsenaux de la Grande Jamahiriya, contrôlant un vaste territoire riche en eau et en pétrole et surtout propice à tous les trafics : drogue, armes, immigrés clandestins.

Les Toubous entendent, désormais se faire entendre en revendiquant l’indépendance de leur territoire. Les plus modérés parlent de fédéralisme. Le territoire des Toubous est la première porte d’entrée pour les migrants africains qui échouent au large des cotes italiennes. Sans oublier que c’est dans cette vaste région où pullulent les djihadistes échappés du Nord Mali suite au déclenchement de l’opération Cerval. C’est aussi le lieu où évolue, semble-t-il, le terroriste algérien Bel Mokhtar qui a revendiqué l’attentat contre un restaurant français à Bamako. De ce fait aucune solution durable ne peut s’esquisser sans le concours actif des Toubous. Seulement parmi les conditions posées par la communauté internationale se place en tête l’intégrité du territoire libyen. Et cela face à des aspirations indépendantistes Toubous de plus en plus nettes. La quadrature du cercle.     

Le général Haftar lorgne vers Moscou

Le général Khalifa Haftar, considéré comme le patron de l’armée du gouvernement officiel libyen, celui de Tobrouk lorgne vers Moscou. Un choix logique après l’accueil triomphal réservé par Sissi à Poutine lors de son passage au Caire. Le maréchal- président étant le supporteur numéro 1 d’Haftar.
Le général libyen Haftar lorgne vers MoscouLe but du général de Tobrouk, libérer le pays du poids de ses milices, à commencer par Al Fajr Libya, filiale d’al Qaida puis lutter aussi contre les colonnes de l’EI, l’Etat Islamique. Il ne lui restera plus alors qu’à faire la peau de Belhadj, le chef de la milice Al Watan qui, à Tripoli, se rêve patron de toute la Libye.
Un vaste programme pour Haftar et ses sponsors. L’armement russe devrait remplacer celui que Tripoli prévoyait d’acheter à l’Ukraine, pays dont on sait que ses soldats sont assez peu fringants dans leur usage.
Hannibal GENSERIC