samedi 17 juin 2017

USA. Les "hystéries" anti russe, anti Iran et anti Qatar ont une même motivation: le marché du Gaz



l'Union européenne (UE) a été choquée et étourdie lorsque le Sénat américain a révélé hier que la vérité derrière le mème [1] de l’" Hystérie anti Russe " qui balayait l'Amérique depuis des mois, était artificiellement provoqué par les entreprises énergétiques géantes des États-Unis, qui cherchent à détruire les approvisionnements de l’Europe en gaz russe, afin de capturer ce business de plusieurs centaines de milliards $, et ce, en violation de toutes les lois internationales. De la même manière, la nouvelle " hystérie anti Qatar" et l'ancienne "hystérie anti iranienne" accusant ces deux pays d’être les premiers suppôts du terrorisme dans le monde, vise le même objectif : éliminer deux concurrents tout aussi sérieux que la Russie des marchés mondiaux du gaz. L’outil aux mains américaines est toujours le même : des sanctions économiques imposées à la Russie, à l’Iran et au Qatar.

En effet, le Sénat des États-Unis vient d’adopter, par un vote de 98-2, un «projet de loi de sanction russe». Les sénateurs, aussi menteurs que leurs médias, prétendent que ce projet de loi est en réaction à l'ingérence russe, qui n’a jamais été prouvée, dans l'élection présidentielle américaine de 2016. Mais le véritable but de ce projet de loi viole le droit international, affecte les entreprises européennes, et a pour objectif réel de bénéficier aux secteurs pétrolier et gazier américains, ont déclaré,  en colère, Berlin et Vienne.
N'ayant rien à voir avec l'intervention supposée de la Russie aux élections américaines, ce «projet de loi de sanction russe» du Sénat américain n'est rien d’autre qu'un «instrument de guerre économique» destiné à détruire la sécurité énergétique existante de l'Union européenne avec la Russie. Il a pour but de remplacer le gaz russe par celui des compagnies de gaz américaines.  Parlant pour l'ensemble de l'UE, l'Allemagne et l'Autriche ont vertement répliqué en déclarant :

«L'approvisionnement de l’Europe en énergie ne concerne que l’Europe, et non pas les États-Unis!
Nous ne pouvons pas accepter le fait de menacer les entreprises européennes, qui contribuent au développement du système européen d'approvisionnement en énergie, par des sanctions extraterritoriales qui violent le droit international.
Les sanctions en tant qu'instrument politique ne devraient pas être liées à des intérêts économiques qui menacent les entreprises allemandes, autrichiennes et les autres entreprises européennes qui participent aux projets d'approvisionnement en gaz tels que Nord Stream II avec la Russie ou qui les financent. Ces menaces  avec des pénalités sur le marché américain ajoutent un aspect absolument nouveau et très négatif dans les relations entre les États-Unis et l'Europe.
La déclaration précise en outre que l'intention de Washington d'imposer de nouvelles sanctions à la Russie n'est guidée ni par des raisons politiques ni humanitaires, mais par un intérêt économique.
"Ce problème concerne en réalité les ventes de gaz condensé des États-Unis [vers l’Europe] afin de chasser les sociétés russes d'approvisionnement en énergie du marché européen. L'objectif réel [de ces sanctions] est de fournir des emplois à l'industrie gazière et pétrolière américaine ".

Le représentant commercial de la Russie aux États-Unis, Aleksander Stadnik, indique que ces sanctions du Sénat des États-Unis créent des obstacles pour compagnies d'énergie de Russie, d'Iran, du Qatar et d'autres, tout en facilitant l’accès aux marchés étrangers pour les entreprises américaines. Il a ajouté: "Pour l’Amérique, cela est devenu une pression manifeste pour son industrie du pétrole et du gaz  avec l'utilisation d'instruments non commerciaux et de méthodes interdites".
Poutine à Medvedev , à propos des nouvelles sanctions américaines contre la Russie :
"ça m'en touche l'une sans faire bouger l'autre !"

Pourquoi le GNL américain pose-t-il un problème ?

- D'abord, parce que les volumes à venir sont colossaux : les cinq usines de liquéfaction actuellement en construction outre-Atlantique vont représenter une production de 65 millions de tonnes par an d'ici à fin 2018. « C'est l'équivalent d'un nouveau Qatar  ! », note un industriel. A titre de comparaison, en 2015, la production mondiale de gaz naturel liquéfié (GNL) a atteint, selon Wood Mackenzie, 250 millions de tonnes.
- Ensuite, les exportations américaines sont basées sur un modèle totalement différent de ce qui se faisait jusqu'à présent. Alors que les opérateurs des usines du Qatar ou d'Australie ont pré-vendu la quasi-totalité de leur production sur le long terme (20 ans par exemple), à des utilisateurs finaux et à des prix indexés sur le cours du pétrole, les exploitants américains comme Cheniere n'ont prévendu qu'une partie de leur production, sans que l'acheteur soit engagé sur la destination finale, et à des prix indexés, eux, sur le prix du gaz aux États-Unis. « Plus flexibles, les contrats permettent de diriger le GNL américain vers les marchés les plus rémunérateurs ». Un changement majeur, alors que les marchés du gaz sont aujourd'hui très cloisonnés dans trois zones, les États-Unis, l'Europe, et l'Asie, avec des prix très différents.
- Enfin, en raison de ce qu'on appelle la «fracturation hydraulique», les États-Unis ont largement dépassé leur capacité de stockage de gaz naturel qu'ils produisent actuellement. Dans le but de vendre ce qu'ils surproduisent, ils ont entamé un processus pour détruire les accords internationaux de longue date de la Russie avec l'UE, fournissant des approvisionnements énergétiques bon marché. Ils croient pouvoir traiter la Russie comme ils l’ont fait, depuis des lustres avec l’Iran, et comme ils ont commencé à le faire avec le Qatar.

Or, les exportations russes de gaz vers l’Europe ont atteint un niveau record en janvier 2017.
En décembre 2016, le négociant de matières premières Glencore et le Qatar Investment Authority, le fonds souverain du pays, ont acquis une participation de 19,5 % dans Rosneft, la compagnie pétrolière d’État russe, pour un montant de 11 milliards de dollars.
Résultat : le Qatar a obtenu un accès plus facile au marché européen et est devenu un partenaire de poids de la Russie. 

Alors que l'Union européenne reçoit 34% de ses approvisionnements en gaz naturel en provenance de Russie via des pipelines, le «schéma» américain, comme en témoignent ces sanctions du Sénat américain, consisterait à remplacer le gaz naturel russe bon marché par le «Gaz Naturel Liquéfié, GNL», qui serait expédié par grands navires-citernes vers le marché européen.
La seule société américaine qui exporte actuellement du GNL sur le marché européen,  est le géant de l'énergie de Houston, au Texas, Cheniere Energy, qui a l’habitude de verser  des « pots de vin » faramineux aux sénateurs et autres  législateurs américains (ces "pots-de-vin" sont appelés des donations [Link and Link]). Elle a expédié, la semaine dernière, le premier navire-citerne de GNL américain vers la Pologne, ennemi traditionnel de la Russie. Depuis l'ouverture de son terminal d'exportation au début de l'année dernière, Cheniere a expédié 44 pour cent de ses exportations en Amérique latine et 28 pour cent en Asie. En plus de l'expédition inaugurale de la semaine dernière en Pologne, la société a effectué des livraisons dans d'autres pays européens comme le Portugal, l'Espagne et les Pays-Bas.
Bien que certains experts du Kremlin croient que la Chambre des représentants des États-Unis ne passera jamais ce «projet de loi de sanction russe» du Sénat, le président Poutine a néanmoins ordonné des manœuvres massives de toutes les forces de missiles nucléaires de la Fédération, car il considère que la mise en œuvre cette loi équivaudrait à "un acte de guerre". Naturellement les grands médias de propagande ne soufflent mot de ces manœuvres gazières, qui sont derrière toutes les sanctions américaines.

Iran, Russie et Qatar en tête

Selon BP, les plus importantes réserves de gaz naturel se trouvent en Russie et au Moyen-Orient. Le classement des plus grandes réserves est le suivant :
  • L’Iran, avec 34 020 milliards de m3 de réserves, un niveau en augmentation constante depuis 1995 (le pays disposait alors d’un peu plus de 19 000 milliards de m3 de gaz naturel).
  • La Russie, avec 32 640 milliards de m3 de réserves, un niveau globalement stable depuis 1992.
  • Le Qatar, avec 24 530 milliards de m3 de réserves, un niveau en très légère baisse depuis 2001 – après une forte augmentation, faisant passer les réserves qataries de 8 500 milliards de m3 en 1995, à 25 780 milliards de m3 en 2001 !
  • Le Turkménistan, avec 17 480 milliards de m3 de réserves de gaz naturel.
  • Les États-Unis, avec 9 770 milliards de m3 de réserves

Avec le quartet gazier Algérie / Russie / Iran / Qatar en train de se constituer en une sorte d'OPEP du gaz, les Américains ne savent plus comment briser cette concurrence sérieuse, d'autant plus que leur gaz est non seulement beaucoup plus cher, mais ses procédés d'extraction (fracturation hydraulique) sont infiniment plus polluants que tous les autres. Alors ils veulent faire payer aux autres pays, surtout européens, des "sanctions" contre les concurrents, tout en obligeant ces Européens à acheter le gaz américain au prix fort. C'est aussi cela, le rôle de vassal des Américains que joue l'UE depuis des lustres.

NOTE

[1] Un mème internet est un élément ou un phénomène repris et décliné en masse sur internet. C'est un anglicisme venant d'« Internet meme ». Il peut être prononcé de plusieurs façons : « mème » ou encore « meem ».
C'est une acception récente du terme mème, qui définit ce phénomène dans sa globalité. D'après l’Oxford English Dictionary, un « mème » est un élément d'une culture ou d'un ensemble de comportements qui se transmet d'un individu à l'autre par imitation ou par un quelconque autre moyen non-génétique.
Hannibal GENSERIC