Les
États-Unis quitteront-ils la Syrie, si cela évite une flotte russe installée au
Yémen ?
La question
semble étrange, mais si la Russie réussit ses négociations sur le Yémen, elle
se posera bientôt. Une publication des
néoconservateurs états-uniens a récemment fait connaître une nouvelle
intéressante, mais de source peu sûre, sur le Yémen.
La Russie joue le rôle de médiateur dans des négociations pour une solution
politique au conflit du Yémen, hors des canaux de l’ONU, ce qui pourrait être
un moyen d’installer des bases navales au Yémen. La Russie poursuit des
négociations politiques avec les Émirats arabes unis et l’ancien président
yéménite, Ali Abdullah Saleh, en commençant par discuter du futur gouvernement
yéménite. Le soutien de Saleh envers les Houthis est essentiel pour que le
groupe Houthis/Saleh conserve son influence sur le nord et le centre du Yémen.
Les Émirats arabes unis peuvent voir ce règlement comme un moyen d’arrêter
l’expansion de l’influence de l’Iran au Yémen et de limiter les coûts
supplémentaires associés à la guerre. Saleh avait déjà exprimé sa volonté
d’accorder des droits pour l’installation de bases militaires russes au Yémen.
Une base permettrait à la Russie de projeter son pouvoir dans l’une des voies
de transit maritime les plus fréquentées au monde, qui mène à la mer Rouge et
au détroit de Bab al Mandab, un goulet maritime mondial.
En août
2016, l’ancien président yéménite Saleh avait effectivement fait une offre à la Russie
:
« Dans
la lutte contre le terrorisme, nous joignons nos efforts et offrons toutes les
installations. Nos aéroports, nos ports… Nous sommes prêts à fournir cela à la
Fédération de Russie », a déclaré Saleh dans une interview à Sanaa.
Personne
(sauf la Russie?) n’a pris Saleh au sérieux à ce moment-là. Il n’était pas, et
n’est toujours pas, en mesure de maîtriser Aden, dans le sud du Yémen, ni aucun
autre port Yéménite pertinent.
J’ai
également douté de ce récent rapport. Effectivement, jusqu’au début des années
1990, l’Union soviétique avait des bases dans le sud du Yémen et des milliers
de conseillers et formateurs militaires travaillaient dans le pays. Mais la
Russie n’a actuellement pas les ressources navales, ni d’intérêt immédiat, pour
ouvrir une nouvelle base dans la région. En tous cas, je le pensais.
Mais une
source bien informée au Yémen a dissipé mes doutes. Elle a confirmé le rapport.
La Russie négocie avec les Émirats arabes unis, l’alliance Houthis/Saleh et les
différents groupes du Sud Yémen, au sujet d’un accord de paix et le fait depuis
six mois. L’accord comprendrait des droits de base à Aden pour la marine russe.
Les signaux
lumineux doivent clignoter au CENTCOM, au Pentagone et au Conseil national de
sécurité. Au cours des vingt-cinq dernières années, la mer d’Arabie, le golfe
d’Aden et la mer Rouge étaient principalement contrôlés par les États-Unis. Que
la Chine ait récemment ouvert une base de « lutte contre la
piraterie » à Djibouti suscite déjà des inquiétudes. Et
maintenant, voilà les Russes qui arrivent !!!
La guerre
saoudienne contre le Yémen, soutenue activement par les États-Unis, ne mène
nulle part. Les Saoudiens perdent quotidiennement des soldats, à cause
d’incursions yéménites (vidéo) dans le sud de
l’Arabie saoudite. Il n’y a aucune chance que les forces soutenues par l’Arabie
saoudite puissent s’emparer de la région contrôlée par les Houtis/Saleh, au
nord du Yémen, ni sa capitale, Sanaa. Les Émirats arabes unis ont soutenu la
guerre saoudienne avec des forces capables. Mais les Émirats arabes unis ne veulent
que le port d’Aden et ses installations de chargement de pétrole à proximité,
pour son entreprise de gestion portuaire DP World. Les Saoudiens
veulent que les ports soient des débouchés pour leurs exportations de pétrole,
loin de leurs ports du Golfe Persique, que l’Iran pourrait facilement bloquer.
Mais ils veulent aussi contrôler tout le Yémen.
Les
Saoudiens ont engagé al-Qaïda au Yémen, comme force combattante proxy. Mais ni
les États-Unis, ni les Émirats arabes unis n’adhèrent à ce stratagème. Les
forces des EAU au Yémen ont été attaquées par al-Qaïda. Les États-Unis
craignent qu’elle ne devienne au Yémen une source potentielle d’attaques
internationales. Depuis le début de l’année, les forces spéciales des
États-Unis et des EAU attaquent ou bombardent un
certain nombre de zones tenues par al-Qaïda au Yémen. Les Saoudiens ont été
surpris, mais n’ont pas pu protester. Al-Qaïda était leur dernier joker dans le
jeu. Ils l’ont perdu.
Les
Saoudiens font marche arrière sur leur
plan d’invasion d’Hodeidah, port situé sur la côte de la mer Rouge. Le port est
actuellement le seul, par lequel l’aide alimentaire est expédiée dans les
régions du nord, assiégées et affamées. L’ONU a protesté contre toute attaque
et les États-Unis ont retiré leur soutien à l’opération. Les Houthis et Saleh
accepteront vraisemblablement un contrôle de l’ONU sur le port. Alors que les
Saoudiens prétendent que celui-ci est utilisé pour la contrebande d’armes en
provenance d’Iran, les Houthis savent bien que ce n’est pas le cas.
La peur saoudienne d’une
forteresse iranienne au Yémen est sans fondement. Le prétendu soutien iranien
aux Houthis n’a jamais été prouvé concrètement. Au cours de ces plus de deux
années de guerre, aucun Iranien n’a été tué, capturé ou même vu au Yémen. Les
missiles balistiques utilisés par les Houthis contre l’Arabie saoudite sont des vieux modèles
soviétiques, dont des missiles de défense aérienne SA-2 / S-75 modifiés localement.
L’armée yéménite en avait acheté et caché beaucoup, alors que l’Iran n’en a
jamais acquis ni utilisé. Les fournitures militaires qu’utilisent les Houthis
ne sont pas d’origine iranienne, mais ont été volées aux livraisons saoudiennes
à leurs combattants proxy du Yémen. Les Houthis se contentent de capturer, ou
même d’acheter, tout ce dont ils ont besoin.
Des
manifestations récentes ont eu lieu à Aden contre l’actuel président du Yémen,
la marionnette des États-Unis/saoudiens, Hadi. Il y a résidé pendant quelques
semaines, mais a dû fuir pour rejoindre sa suite dans un hôtel de luxe à Riyad,
en Arabie Saoudite. Alors que Hadi contrôle et est officiellement responsable
d’Aden, aucun salaire gouvernemental n’a été payé, les services publics sont
fermés et divers gangs se battent pour contrôler les quartiers de la ville. Le
siège du parti Islah, aligné sur les Frères musulmans et qui soutient Hadi, a
été incendié.
Les Émirats
Arabes Unis commencent à en avoir assez :
Les Émiratis commencent à se fatiguer de ces querelles. Les dirigeants, qui
espéraient qu’Aden soit un modèle pour le reste du Yémen, craignent maintenant
que laisser le sud en mode pilote automatique ne puisse que condamner le pays à
l’instabilité. Et cela pourrait gagner toute la péninsule arabique. Des
milliers de combattants qu’ils ont formés ont fui (après avoir récolté leur
salaire). Motiver les recrues à s’aventurer vers le nord est une tâche
difficile, même avec la promesse de primes. Ceux qui étaient heureux de se
battre pour leur propre maison semblent peu enthousiastes à se battre pour
celle de quelqu’un d’autre.
Si
l’alliance Saleh/Houthi peut faire la paix avec les mouvements du sud qui ont
soutenu jusqu’à présent Hadi, la guerre peut se terminer en quelques mois. La
Russie peut modérer les négociations et fournir, dans une certaine mesure, des
garanties. Contrairement aux États-Unis, elle est perçue comme neutre et sobre,
par toutes les parties en conflit. Les EAU et les Saoudiens devront payer le carnage
qu’ils ont causé. Les Émirats arabes unis obtiendront probablement les droits
commerciaux du port d’Aden pour les affaires de DP World. Les Saoudiens
n’obtiendront qu’une certaine paix à l’intérieur de leurs frontières. Mais en
ce moment, les Saoudiens seraient susceptibles d’accepter un tel accord – ne
serait-ce que pour garder la face et terminer cette calamiteuse aventure au
Yémen.
En ce qui
concerne le port naval et les droits de base russes, ce seront d’excellents
atouts dans les négociations sur la Syrie avec les États-Unis. Si ceux-ci
insistent sur le contrôle de la Syrie orientale, les Russes peuvent envoyer des
sous-marins, un destroyer et d’autres combattants à Aden et installer des
défenses aériennes et maritimes, très capables de garder leurs navires et le
port en toute sécurité. Si les États-Unis acceptent de quitter la Syrie, seule
une petite corvette russe rouillée sera basée à Aden, sans défense aérienne, et
cela suffirait probablement. Le Pentagone et la Maison Blanche auraient un choix
à faire : garder la primauté sur les mers de la région ou avoir la menace
constante d’une « flotte russe » sur le dos. Est-ce qu’une
occupation, pleine de problèmes, de la Syrie Orientale en vaut vraiment la
chandelle ?
Manifestations multipliées à Aden
Selon les sources locales au
Yémen, de très violents affrontements se poursuivent à Aden entre les
mercenaires, les uns liés à Riyad, les autres, à Abou Dhabi.
Le siège du Congrès yéménite pour la réforme (Islah), parti se revendiquant des Frères musulmans et qui est désormais un allié de Riyad, a été incendié par les mercenaires des Émirats arabes unis.
Les tensions à Aden, « siège du gouvernement » fantoche du président démissionnaire Mansour Hadi, ont éclaté il y a quatre semaines, quand ce dernier a décidé de limoger le gouverneur pro-émirati du port du Sud yéménite. Le siège du parti, situé dans la localité de Kritar, a fait l’objet d’un assaut nocturne, les gardiens ayant également été enlevés par les assaillants.
Selon le site almashhad-alyemeni, Aden, déjà le théâtre d’assassinats ciblés, d’attentats et de règlements de compte, connaît une nouvelle recrudescence de violences depuis que le président démissionnaire multiplie les décisions allant à rebours des intérêts d’Abou Dhabi. Les manifestations se multiplient pour exiger « le départ de Hadi », dont les portraits sont brûlés par les manifestants.
La coalition, qui poursuit sans répit son agression contre le Yémen depuis 2015, est scindée en deux : les Émirats arabes unis ne tolèrent pas l’alliance de Riyad avec les « fréristes d'Islah » et les décisions qu’une telle alliance a déclenchée dans sa foulée.
Le port d’Aden est depuis le début de l’année 2016 aux mains de Hadi et de ses mercenaires. Outre l’insécurité, la population souffre aussi de pénurie de denrées alimentaires et les mercenaires se plaignent fréquemment des arriérés de paiement.
Le siège du Congrès yéménite pour la réforme (Islah), parti se revendiquant des Frères musulmans et qui est désormais un allié de Riyad, a été incendié par les mercenaires des Émirats arabes unis.
Les tensions à Aden, « siège du gouvernement » fantoche du président démissionnaire Mansour Hadi, ont éclaté il y a quatre semaines, quand ce dernier a décidé de limoger le gouverneur pro-émirati du port du Sud yéménite. Le siège du parti, situé dans la localité de Kritar, a fait l’objet d’un assaut nocturne, les gardiens ayant également été enlevés par les assaillants.
Selon le site almashhad-alyemeni, Aden, déjà le théâtre d’assassinats ciblés, d’attentats et de règlements de compte, connaît une nouvelle recrudescence de violences depuis que le président démissionnaire multiplie les décisions allant à rebours des intérêts d’Abou Dhabi. Les manifestations se multiplient pour exiger « le départ de Hadi », dont les portraits sont brûlés par les manifestants.
La coalition, qui poursuit sans répit son agression contre le Yémen depuis 2015, est scindée en deux : les Émirats arabes unis ne tolèrent pas l’alliance de Riyad avec les « fréristes d'Islah » et les décisions qu’une telle alliance a déclenchée dans sa foulée.
Le port d’Aden est depuis le début de l’année 2016 aux mains de Hadi et de ses mercenaires. Outre l’insécurité, la population souffre aussi de pénurie de denrées alimentaires et les mercenaires se plaignent fréquemment des arriérés de paiement.
Plan russe : Choïgou en Israël
Selon les médias russes, le
ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s’est entretenu avec son
homologue iranien, le général Hossein Dehqan, au sujet des dernières
évolutions en Syrie, au moment où une trêve élargie entre en vigueur
dans quatre grandes provinces syriennes.
Ria Novosti, qui rapporte cette information, affirme que les entretiens portaient essentiellement sur les quatre zones de désescalade à mettre en place en Syrie, un plan élaboré par les Russes et signé à Astana par l’Iran, qui représente l’axe de la Résistance, et par la Turquie, qui représente les groupes armés.
Le ministre russe de la Défense a dans le même temps reçu son homologue turc Fikri Isik, également au sujet de ce plan.
Toujours d’après cette information, le général Choïgou s’apprête à se rendre dans les Territoires occupés palestiniens, où il entend rencontrer le ministre israélien des Affaires militaires et s’entretenir avec lui de l’initiative russe. L’une des quatre zones concernées par le plan russe se trouve dans le sud de la Syrie, région limitrophe du sud du Liban et du nord d’Israël. C’est une vaste zone qui couvre, entre autres, Quneitra, le Qalamoun et le Golan occupé, où Israël et la Jordanie agissent contre l’armée syrienne et le Hezbollah par terroristes takfiristes interposés. La visite de Choïgou en Israël intervient alors que le régime israélien a mené depuis 2011 plus de 20 frappes aériennes ou balistiques contre le territoire syrien.
Ces dernières semaines, plusieurs tirs de missiles israéliens ont d’ailleurs visé les positions de l’armée syrienne dans le sud de la Syrie. La dernière frappe, elle, a visé l’aéroport international de Damas. Ces attaques consécutives ont valu à Israël la convocation de son ambassadeur en poste à Moscou au ministère russe des Affaires étrangères. Avant son départ pour Israël, Choïgou a annoncé qu’il existe une très bonne coopération entre les renseignements russe, turc et iranien en Syrie, ce qui laisse entendre que le plan russe a des chances de réussir.
Depuis le 1er mai, la Russie a cessé de bombarder Idlib, Homs, la Ghouta orientale et le Sud syrien, soit les régions incluses dans le plan, tout en affirmant qu’elle n’hésiterait pas à reprendre ses raids à la moindre violation commise par les terroristes.
Quelque 42 000 terroristes se trouvent dans les quatre régions précitées, dont 14 500 à Idlib et 15 000 sur les frontières jordaniennes. Ces terroristes n’ont toujours pas officiellement donné leur feu vert à l’accord en question et attendent sans doute les ordres des parties qui les soutiennent (Riyad, Doha, Amman...). Le ministère russe de la Défense a très clairement annoncé dans un communiqué que la mise en place de ces zones ne signifiait nullement « la fin de la guerre contre le terrorisme », car l’armée syrienne « poursuivra ses opérations au sol contre les groupes armés même dans les régions concernées par la trêve ».
Ria Novosti, qui rapporte cette information, affirme que les entretiens portaient essentiellement sur les quatre zones de désescalade à mettre en place en Syrie, un plan élaboré par les Russes et signé à Astana par l’Iran, qui représente l’axe de la Résistance, et par la Turquie, qui représente les groupes armés.
Le ministre russe de la Défense a dans le même temps reçu son homologue turc Fikri Isik, également au sujet de ce plan.
Toujours d’après cette information, le général Choïgou s’apprête à se rendre dans les Territoires occupés palestiniens, où il entend rencontrer le ministre israélien des Affaires militaires et s’entretenir avec lui de l’initiative russe. L’une des quatre zones concernées par le plan russe se trouve dans le sud de la Syrie, région limitrophe du sud du Liban et du nord d’Israël. C’est une vaste zone qui couvre, entre autres, Quneitra, le Qalamoun et le Golan occupé, où Israël et la Jordanie agissent contre l’armée syrienne et le Hezbollah par terroristes takfiristes interposés. La visite de Choïgou en Israël intervient alors que le régime israélien a mené depuis 2011 plus de 20 frappes aériennes ou balistiques contre le territoire syrien.
Ces dernières semaines, plusieurs tirs de missiles israéliens ont d’ailleurs visé les positions de l’armée syrienne dans le sud de la Syrie. La dernière frappe, elle, a visé l’aéroport international de Damas. Ces attaques consécutives ont valu à Israël la convocation de son ambassadeur en poste à Moscou au ministère russe des Affaires étrangères. Avant son départ pour Israël, Choïgou a annoncé qu’il existe une très bonne coopération entre les renseignements russe, turc et iranien en Syrie, ce qui laisse entendre que le plan russe a des chances de réussir.
Depuis le 1er mai, la Russie a cessé de bombarder Idlib, Homs, la Ghouta orientale et le Sud syrien, soit les régions incluses dans le plan, tout en affirmant qu’elle n’hésiterait pas à reprendre ses raids à la moindre violation commise par les terroristes.
Quelque 42 000 terroristes se trouvent dans les quatre régions précitées, dont 14 500 à Idlib et 15 000 sur les frontières jordaniennes. Ces terroristes n’ont toujours pas officiellement donné leur feu vert à l’accord en question et attendent sans doute les ordres des parties qui les soutiennent (Riyad, Doha, Amman...). Le ministère russe de la Défense a très clairement annoncé dans un communiqué que la mise en place de ces zones ne signifiait nullement « la fin de la guerre contre le terrorisme », car l’armée syrienne « poursuivra ses opérations au sol contre les groupes armés même dans les régions concernées par la trêve ».
Hannibal GENSERIC