Le gouvernement nigérien a interdit la diffusion du dernier Charlie Hebdo.
Le président nigérien Mahamadou Issoufou, l’homme qui a livré sous
injonction de la France et de la Libye un des fils Kadhafi, Saadi, était
de la marche républicaine de Paris. Droit à la caricature ? Oui. Droit
au blasphème ? Oui, mais, ne pas s’attaquer aux autres religions que la
sienne ou celle de ses parents. « Je Suis Charlie » est devenu la
nouvelle religion inviolable alors que, Charlie, lui, viole tout et…tue.
Avec tout le fric qu’ils se sont fait (7 millions d’exemplaires
vendus), ils peuvent vivre 3 ans, sans caricaturer Mohammed, les seules
UNE qui leur apportaient du…fric. Environ 300 chrétiens sont actuellement
sous protection militaire à Zinder, deuxième ville du Niger, où de
violentes manifestations contre la caricature de Mahommed en Une de Charlie Hebdo ont fait à ce jour 10 morts et 45 blessés.
Oui, Charlie tue !
Ce ne sont donc pas
seulement les croqueurs de Charlie qui sont tués, mais Charlie tue
aussi. Oui, ce sont des actes insensés, actes de petits fous qui
confondent tout. 255 chrétiens étaient recensés samedi dans une caserne,
a indiqué cette source sécuritaire occidentale. Environ 70 autres, une
cinquantaine d’adultes et une vingtaine d’enfants, étaient par ailleurs
retranchés dans une église évangélique, protégés par une centaine de
gendarmes et de policiers.Ceux-ci
encerclent ce bâtiment qui, contrairement aux autres églises de Zinder,
n’a pas été détruit car il est très proche d’une gendarmerie, ont
indiqué ces témoins. Vendredi, « les gendarmes ont lutté pendant 3
heures contre des manifestants qui chargeaient, et qu’ils ont repoussé
avec des gaz lacrymogènes », a raconté l’un d’entre eux, cadre du
ministère de la Santé.
« Ils étaient décidés à brûler toutes les
églises. Il ne reste que la nôtre », où « nous mangeons ensemble,
dormons ensemble et cotisons pour nous acheter de la nourriture », a
poursuivi ce père de trois enfants. « Les gens qui ont fait ça ne sont
pas des gens du quartier » mais ils ont eu recours à des ‘traîtres’ du
voisinage », a affirmé Innocent, employé d’une ONG. Un folie quand la
priorité pour la vie des Nigériens est ailleurs. Quel est l’intérêt de
tuer des innocents, qui ne sont pas forcément Charlie ? A Niamey, une
jeune barmaid a été brûlée vive, dans le bar qu’elle tenait. Pourquoi ?
« Hier, j’ai eu très peur. Ils sont venus
chez nous, ils ont voulu nous tuer », a témoigné Innocent, pour qui les
600 à 700 chrétiens de Zinder avaient jusque là « de très bons
rapports » avec les musulmans. Les manifestations anti-Charlie Hebdo
ont fait 5 morts et 45 blessés vendredi à Zinder, ancienne capitale du
Niger, où le Centre culturel franco-nigérien a été brûlé et au moins
treize églises saccagées dans le pays, sans compter les débits de
boissons. Le décompte des églises: 6 à Zinder, et 7 à Niamey, la
capitale, mais aussi à Agadez dont le bilan n’est pas connu…
Allain Jules
Sans grande surprise - Charlie Hebdo encule tout le monde finalement...Surtout la masse de veaux (dixit le Général) qui prend des vessies pour des lanternes.
"le principe de la liberté d'expression constitue un des
fondements de la République. [...] J'appelle donc chacun au plus grand
esprit de responsabilité, de respect et de mesure pour éviter tout ce
qui peut blesser les convictions d'autrui. [...] Je condamne toutes les
provocations manifestes, susceptibles d'attiser dangereusement les
passions." [Jacques Chirac, 08/02/2006]
Charlie à tout prix ?, par Frédéric Lordon
by Les-crises.fr DT
On
peut sans la moindre contradiction avoir été accablé par la tragédie
humaine et n’avoir pas varié quant à l’avis que ce journal nous
inspirait – pour ma part il était un objet de violent désaccord
politique. Si, comme il était assez logique de l’entendre, « Je suis
Charlie » était une injonction à s’assimiler au journal Charlie, cette
injonction-là m’était impossible. Je ne suis pas Charlie, et je ne
pouvais pas l’être, à aucun moment.
Je
le pouvais d’autant moins que cette formule a aussi fonctionné comme
une sommation. Et nous avons en quelques heures basculé dans un régime
de commandement inséparablement émotionnel et politique. Dès ses
premiers moments, la diffusion comme traînée de poudre du « Je suis
Charlie » a fait irrésistiblement penser au « Nous sommes tous
américains » du journal Le Monde du 12 septembre 2001. Il n’a pas fallu
une demi-journée pour que cette réminiscence se confirme, et c’est
Libération qui s’est chargé de faire passer le mot d’ordre à la première
personne du pluriel : « Nous sommes tous Charlie » — bienvenue dans le
monde de l’unanimité décrétée, et malheur aux réfractaires. Et puis
surtout célébrons la liberté de penser sous l’écrasement de tout
dissensus, en mélangeant subrepticement l’émotion de la tragédie et
l’adhésion politique implicite à une ligne éditoriale. Ceci d’ailleurs
au point de faire à la presse anglo-saxonne le procès de se montrer
hypocrite et insuffisamment solidaire (obéissante) quand elle refuse de
republier les caricatures. Il fallait donc traverser au moins une mer
pour avoir quelque chance de retrouver des têtes froides, et entendre
cet argument normalement élémentaire que défendre la liberté
d’expression n’implique pas d’endosser les expressions de ceux dont on
défend la liberté.
Mais
cette unanimité sous injonction était surtout bien faite pour que s’y
engouffrent toutes sortes de récupérateurs. Les médias d’abord, dont on
pouvait être sûr que, dans un réflexe opportuniste somme toute très
semblable à celui des pouvoirs politiques dont ils partagent le
discrédit, ils ne manqueraient pas pareille occasion de s’envelopper
dans la « liberté de la presse », cet asile de leur turpitude. A l’image
par exemple de Libération, qui organise avec une publicité aussi
ostentatoire que possible l’hébergement de Charlie Hebdo. Libération, ce
rafiot, vendu à tous les pouvoirs temporels, auto-institué dernière
demeure de la liberté d’expression ! — peut-être en tous les sens du
terme d’ailleurs. Et combien de la même farine derrière Libé pour faire
de la surenchère dans le Charlisme ?
«
Si cet homme qui, dit-on, riait de tout revenait en ce siècle, il
mourrait de rire assurément », écrit Spinoza dans une de ses lettres. Et
c’est vrai qu’il y a de quoi rire longtemps à voir ainsi les organes de
la soumission à l’ordre social entonner avec autant de sincérité l’air
de l’anticonformisme et de la subversion radicale. Rire longtemps...
enfin pas trop quand même, car il faudra bien songer un jour à sortir de
cette imposture.
Ce
sera sans l’aide du pouvoir politique, qui n’a jamais intérêt au
dessillement, et à qui l’union nationale a toujours été la plus fidèle
des ressources. Union nationale, et même internationale en l’occurrence,
dont une version carabinée nous aura été administrée. Fallait-il
qu’elle soit incoercible la pulsion récupératrice de François Hollande
de se faire reluire à la tête de Paris « capitale du monde » pour
convier, de proche en proche, jusqu’à Orban, Porochenko, et puis
Netanyahu, Lieberman, etc. de hautes figures morales, connues pour se
partager entre défenseurs de la liberté de la presse et amis du dialogue
interconfessionnel [1].
Par
bonheur, il s’est déjà trouvé suffisamment de voix pour s’inquiéter des
usages, ou plutôt des mésusages, que ce pouvoir ne manquera pas de
faire d’une mobilisation de masse qu’il s’empressera de considérer comme
un mandat.
Espérons
qu’il s’en trouvera également pour recommander à quelques
éditorialistes un court séjour en cellule de dégrisement, et pour leur
apporter le café salé. Dans la concurrence pour être à la hauteur de
l’Histoire, et même – pente aussi fatale que grotesque de l’information
en continu – pour être les premiers à « annoncer » l’Histoire, il était
logique que tous criassent à l’Histoire et à l’Historique à propos de la
manifestation d’hier. S’il est permis d’en rire, on dira que,
historique, elle l’a sans doute été sous quelque rapport, au moins pour
être la première du genre où le comptage de la police avait une chance
d’être supérieur à celui des organisateurs. On ne sache pas cependant
qu’il soit resté grand-chose des manifestations monstres de Carpentras
et du 1er mai 2002, effusions collectives qui avaient déjà hystérisé le
commentariat, mais dont on doit bien reconnaître que la productivité
politique aura été rigoureusement nulle.
On
aimerait beaucoup qu’il en aille autrement cette fois-ci, mais on ne
peut pas s’empêcher de poser en toute généralité la question de savoir
s’il n’y a pas un effet de substitution entre le degré de l’unanimité et
sa teneur politique possible. Par construction, arasant toute la
conflictualité qui est la matière même de la politique, la masse unie
est tendanciellement a-politique. Ou alors, c’est que c’est la
Révolution – mais il n’est pas certain que nous soyons dans ce cas de
figure…
Il
y aurait enfin matière à questionner la réalité de l’« union nationale »
qu’on célèbre en tous sens. Tout porte à croire que le cortège
parisien, si immense qu’il ait été, s’est montré d’une remarquable
homogénéité sociologique : blanc, urbain, éduqué. C’est que le nombre
brut n’est pas en soi un indicateur de représentativité : il suffit que
soit exceptionnellement élevé le taux de mobilisation d’un certain
sous-ensemble de la population pour produire un résultat pareil.
Alors
« union nationale » ? « Peuple en marche » ? « France debout » ? Il
s’agirait peut-être d’y regarder à deux fois, et notamment pour savoir
si cette manière de clamer la résolution du problème par la levée en
masse n’est pas une manière spécialement insidieuse de reconduire le
problème, ou d’en faire la dénégation. A l’image des dominants, toujours
portés à prendre leur particularité pour de l’universel, et à croire
que leur être au monde social épuise tout ce qu’il y a à dire sur le
monde social, il se pourrait que les cortèges d’hier aient surtout vu la
bourgeoisie éduquée contempler ses propres puissances et s’abandonner
au ravissement d’elle-même. Il n’est pas certain cependant que ceci
fasse un « pays », ou même un « peuple », comme nous pourrions avoir
bientôt l’occasion de nous en ressouvenir.
Il
y a une façon aveuglée de s’extasier de l’histoire imaginaire qui est
le plus sûr moyen de laisser échapper l’histoire réelle — celle qui
s’accomplit hors de toute fantasmagorie, et le plus souvent dans notre
dos. Or, l’histoire réelle qui s’annonce a vraiment une sale gueule. Si
nous voulons avoir quelque chance de nous la réapproprier, passé le
temps du deuil, il faudra songer à sortir de l’hébétude et à refaire de
la politique. Mais pour de bon.
Notes
[1]
Lire Alain Gresh, « D’étranges défenseurs de la liberté de la presse à
la manifestation pour “Charlie Hebdo” », Nouvelles d’Orient, 12 janvier
2015.