Or, quand tu les tiens...
Depuis l’imposition des sanctions occidentales en 2022, à
la suite de l’invasion de l’Ukraine, la Russie a engagé une stratégie
systématique de réduction de sa dépendance aux circuits financiers dominés par
l’Occident. Au cœur de cette transformation : une rupture progressive avec la
City de Londres, principal centre mondial de fixation des prix et de
compensation des transactions sur l’or.
Une rupture avec le système LBMA
L’exclusion de plusieurs institutions russes du London Bullion Market
Association (LBMA) a contraint Moscou à repenser sa place sur le marché
international de l’or. Ce marché, historiquement piloté depuis Londres, assure
une grande partie des échanges mondiaux via un système fondé sur la liquidité
en dollars et la certification occidentale des raffineries. La Russie,
producteur majeur d’or, a vu dans cette exclusion l’opportunité de redéfinir
ses circuits commerciaux en contournant les normes et plateformes
anglo-saxonnes.
Une bourse aurifère russe en construction
C’est dans ce contexte que la Russie prépare le lancement d’une nouvelle
bourse de l’or à Saint-Pétersbourg.
Officiellement annoncée en
juillet 2025, cette plateforme – développée avec le concours de
Goznak – a pour objectif de permettre des échanges d’or physique libellés en
roubles ou en devises alternatives au dollar. Destinée en priorité aux acteurs
nationaux et aux partenaires des BRICS, elle ambitionne de fixer des prix
domestiques indépendants des benchmarks londoniens. Si elle voit le jour d’ici
fin 2025, comme prévu, elle marquera une étape majeure vers la souveraineté
financière du pays.
Coopération sino-russe et circuits
alternatifs
En parallèle, la Russie renforce sa coopération avec la Chine pour
établir des circuits de négoce de l’or non liés à la City. Les exportations
russes de métaux précieux vers la Chine ont atteint un niveau record au premier
semestre 2025, avec une hausse de près de 80 % selon Bloomberg, pour un total
d’environ 1 milliard de dollars. Une part croissante de ces échanges est réalisée
via la Shanghai Gold Exchange ou des infrastructures asiatiques, réduisant
l’exposition au dollar américain.
Une stratégie globale d’autonomie
financière
Ce découplage du système financier occidental s’inscrit dans une
politique plus large de dédollarisation. Sur le plan intérieur, la Banque
centrale de Russie et les consommateurs privilégient désormais l’or physique
comme réserve de valeur. En 2024,
les achats domestiques ont
atteint 75,6 tonnes, un record. Par ailleurs, la Russie explore la
diversification de ses réserves officielles vers d’autres métaux stratégiques,
comme l’argent et les platinoïdes, afin de consolider son autonomie monétaire.
Vers un affaiblissement du pouvoir
financier londonien ?
En se détachant de la City et en tissant des alliances avec des
partenaires non occidentaux, Moscou contribue à l’émergence de nouveaux pôles
d’influence financière. Si la City reste encore une place centrale quant au
marché de l’or, la montée de la concurrence russe pourrait, à terme, fragiliser
son rôle hégémonique. La stratégie russe, bien que motivée par les sanctions,
révèle une volonté structurelle de redéfinir les rapports de force économiques
mondiaux, hors du cadre dollar-centré imposé depuis la fin de Bretton Woods.
La City face à un risque de déclassement
stratégique
La City de Londres est aujourd’hui la plus
puissante place financière au monde. Si Wall Street domine la finance
"visible" (actions, entreprises cotées, indices), la City règne sur
la finance "souterraine" ou structurelle : elle constitue le cœur
battant du système financier occidental, notamment grâce à son contrôle
historique du marché de l’or, la valorisation des actifs financiers mondiaux y
compris des devises, des matières premières et des valeurs fiduciaires. C’est
là que se cristallise une partie de la puissance économique de l’Occident.
En sortant de ce système, la Russie, non contente de défendre ses intérêts,
remet en cause un pilier fondamental de l’ordre financier international, dont
la City est l’épicentre. Si la Russie, rejointe par les pays des BRICS,
parvient à re-structurer le marché de l’or — avec ses propres mécanismes de
fixation des prix, ses propres devises d’échange et ses propres infrastructures
— cela pourrait gravement affaiblir Londres. Et par extension, l’influence de
la City sur les flux de capitaux mondiaux.
La City — et derrière elle l’Occident — acceptera-t-elle de voir s’éroder
une position de monopole acquise depuis trois siècles ? Ou considérera-t-elle
cette tentative de contournement comme une menace stratégique majeure, pouvant
justifier une réponse plus directe, voire conflictuelle ? La dédollarisation,
si elle se poursuit à grande échelle, ne représente pas seulement un ajustement
technique : elle pourrait être perçue comme une attaque frontale contre
l’architecture même de la domination financière occidentale. Et dans ce
contexte, le marché de l’or n’est peut-être qu’un premier front.
Une menace existentielle pour la City –
et ses maîtres silencieux
C'est un bouleversement qui ne restera pas sans conséquences. Détourner
le commerce mondial de l’or des circuits londoniens reviendrait à saper
l’infrastructure qui permet aux grandes fortunes et institutions — parmi
lesquelles les familles de la haute finance comme les Rothschild — de peser sur
les marchés, les monnaies et les divers politiques. Ces acteurs, qui depuis des
siècles façonnent l’ordre financier international en coulisse, ne resteront
probablement pas passifs face à une tentative de renversement d’un système dont
ils sont à la fois les architectes et les principaux bénéficiaires.
Dès lors, une question se pose : ce mouvement vers un système
multipolaire et désoccidentalisé — porté par la Russie et ses alliés —
pourra-t-il se déployer sans rencontrer de résistance frontale ? La perte
d’influence sur un marché aussi stratégique que l’or physique, qui conditionne
la valeur de toutes les monnaies fiduciaires, pourrait être perçue par certains
intérêts comme une ligne rouge. Laisser faire, pour ces puissances financières,
reviendrait à abandonner une position de contrôle vieille de plusieurs siècles.
Et l’Histoire a montré que ces empires-là ne cèdent jamais sans lutter. La guerre
n'est donc peut-être plus très loin, et pas pour les raisons que l'on avait
imaginées.
Source : France Soir
30 juillet 2025
Voir aussi :
Hannibal Genséric
BONUS: Pour les adorateurs de l' OR..:A la chute (programmée) de l'URSS il y avait entre 9.000 et 11.000 tonnes d'or (reliques du temps ou l'URSS sous Staline devait acheter des choses de l'étranger et DEVOIR les payer en OR!) TOUT cet or a pratiquement disparu.....comme par hasard....celui aussi d'Irak,de Libye, d'Ukraine.....et PRESK aussi celui du VENEZUELA....
RépondreSupprimerVers un système multipolaire et désoccidentalisé — porté par la Russie et ses alliés... Le plus vite possible sera le mieux, Adieu la city & consorts
RépondreSupprimereffectivement.La guerre s'amplifiera pour des raisons que l'on découvrent.Ils ont voulus taper la Russie au porte monnaie,le retour de baton arrive.que Poutine se méfie le diable va se déchaîner
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