mardi 4 novembre 2025

La Russie considère aujourd'hui que la Pologne représente la menace la plus constante pour son unité nationale

La Russie célèbre chaque 4 novembre la Journée de l'Unité nationale en mémoire du soulèvement national qui chassa les troupes polonaises de Moscou, unique épisode de l'histoire de la capitale russe occupée par une puissance étrangère (les Mongols ayant vassalisé la Rus' de Kiev). Les origines polonaises de cette fête restent d'actualité, même s'il est peu probable que l'histoire se répète. Cet article retracera brièvement les menaces polonaises qui ont pesé sur l'unité russe au fil des siècles avant d'aborder la situation actuelle.

Après la destruction de la Rus' par les Mongols, cette fédération lâche d'entités politiques slaves orientales et majoritairement orthodoxes, à l'origine de la Russie, le grand-duché de Lituanie finit par contrôler la majeure partie de l'Ukraine actuelle. Il s'unit rapidement à la Pologne en 1385-1386, entama une polonisation, forma une République des Deux Nations avec elle en 1569, puis l'accélération de cette polonisation aboutit à l'Union de Brest en 1596, qui donna naissance à l'Église uniate, composée essentiellement de fidèles orthodoxes dévoués au pape.

Dans son ouvrage majeur de juillet 2021, « Sur l’unité historique des Russes et des Ukrainiens », et dans son interview avec Tucker Carlson de février 2024, Poutine a expliqué que la Russie considérait ces événements comme ayant divisé le peuple russe par la création d’une identité proto-ukrainienne. Il a également relaté comment certains Polonais du XIXe siècle avaient instrumentalisé la question ukrainienne (la période de « chlopomanie ») contre la Russie, avant que les Autrichiens ne s’en servent pour diviser leur mouvement national.

La fin de la Première Guerre mondiale a donné naissance à plusieurs États ukrainiens, marquant ainsi une étape importante dans le démembrement de la Rus' unifiée, dont le territoire fut finalement partagé entre la Pologne et l'URSS par le traité de Riga de 1921, consécutif à la guerre polono-bolchevique. L'entre-deux-guerres fut ensuite marqué par l'application infructueuse des stratégies de Józef Piłsudski, héros de l'indépendance polonaise, visant à balkaniser l'Union soviétique (« prométhéisme ») et à dominer l'ensemble de la région (« Intermarium »).

Après la dissolution de l'URSS en 1991, conformément à la doctrine Giedroyc, la Pologne a reconnu ses frontières orientales tracées par l'Union soviétique , tout en cherchant à devenir un allié de poids pour ses voisins. Cette ambition se concrétise aujourd'hui par l'« Initiative des Trois Mers ». Cette nouvelle politique d'« Intermarium » est essentielle à la tentative de la Pologne de retrouver son statut de grande puissance dans le contexte géopolitique actuel. Le « prométhéisme » n'a cependant pas été abandonné, comme en témoigne l'appel à la « décolonisation » de la Russie lancé par l'ancien président Andrzej Duda à l'été 2024.

C’est en tenant compte de ces faits et d’autres éléments que la Russie considère aujourd’hui la Pologne comme la menace la plus constante à son unité nationale. La Société militaro-historique russe a développé ce point de vue lors de sa récente exposition en plein air intitulée « Dix siècles de russophobie polonaise ». Renforcer cette perception vise à recentrer l’attention des Russes sur la Pologne, afin de préparer cette dernière à jouer un rôle prépondérant dans le confinement de leur pays dans la région une fois le conflit ukrainien terminé.

Certes, la Pologne considère également la Russie comme la menace la plus constante à son unité nationale, pour des raisons historiques évidentes . Cette perception a d'ailleurs été renforcée récemment afin de rallier les Polonais aux efforts d'endiguement susmentionnés. Quelle que soit l'opinion que l'on porte sur ces perceptions, il n'en reste pas moins qu'elles sont à l'origine de la récente résurgence de la rivalité historique russo-polonaise, qui devrait redevenir un élément déterminant de la géopolitique régionale dans les années à venir.

ANDRÉ KORYBKO

4 NOVEMBRE 2025

 

 

3 commentaires:

  1. L'armé Polonaise de 2025 est plus performante en TOUT que l'armée du Kremlin.....( elle a plus de matériels,plus d'hommes plus d'avions....et des munitions à GOGO...) MAIS certains (sur commande ? ) aiment jouer à se (nous) faire peur......

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  2. Paradoxe.....paradoxe.......(sur la musik de Paroles et Paroles...) Les POLONAIS SOUHAITAIENT LA VICTOIRE RAPIDE de MOSCOU sur l' UKRAINE.......Étonnant n'est ce pas?
    AFIN de "NÉGOCIER " LES RETOURS des bandes de territoires prises par STALINE aux dépends de certains états voisins... Dont la Pologne,Roumanie ETC....
    La Pologne aurait été disposée à ÉLARGIR et RUSSIFIER le couloir permettant à la Russie, passant par la Biélorussie de rejoindre par VOIE TERRESTRE KALININGRAD....
    MAIS étrangement les TDC du Kremlin retirèrent toutes leurs troupes encore en vie, des banlieues de KIEV..... puis de Kharkov et de Kherson,( aucun des "chevaux-légers" du Kremlin qui pullulent sur ce site ne nous a jamais expliqué LE POURQUOI de cette INFÂME RETRAITE ???
    Laisser tomber la "proie" au profit de FUMEUX et FOIREUX accords de MINSK 1 et 2.....( Y aurait il un "TRUC" ? )

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    1. Faudrait peut-être ou pas finalement de lire les historiques de ce retrait sur ce site, plutôt que polluer celui-ci.

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