Cela se passait il y a quasiment deux ans, – comme quoi les passions
ont aussi leurs exigences chronologiques, un peu comme les anniversaires
un an sur deux. Bref, dans la deuxième moitié du mois d’avril 2014 l’on
eut l’écho d’une rencontre inhabituelle, en Mer Noire, entre un (ou
deux ?) Su-24 russe(s) et la frégate équipée du système AEGIS USS Donald Cook, de l’US Navy. Cette rencontre donna lieu quelques jours plus tard à des supputations extrêmement élaborées
sur son caractère, notamment selon l’hypothèse que le Su-24 avait en
fait réalisé une démonstration de l’efficacité de ses systèmes de guerre
électroniques en “aveuglant” le USS Donald Cooka au point de provoquer des troubles notables dans le chef de l’équilibre psychologique de l’équipage [1].
« ... Puis est apparue une information selon laquelle le Su-24 a
en fait effectué une véritable démonstration technologique
“opérationnelle” d’un système de guerre électronique de brouillage qui
aurait complètement aveuglé le système AEGIS du Donald Cook, le puissant
système électronique de défense aérienne, à capacités anti-avions et
antimissiles, qui forme l’essentiel de la défense anti-aérienne de la
flotte des USA. (Le système AEGIS est encore plus important que cela. Il
forme aussi une part très importante du grand réseau de missiles
antimissiles que les USA développent depuis plusieurs années,
officiellement contre l’Iran, mais opérationnellement avec des capacités
évidentes contre la Russie. Cela situe l’importance non seulement
militaire mais politique d’AEGIS.) Le système russe employé est désigné
comme le Khibiny. Après l’incident, le USS Donald Cook a relâché dans un
port roumain semble-t-il pour des réparations, et la nouvelle affirme
que 27 membres de l’équipage ont démissionné. La nouvelle a été diffusée
le 21 avril 2014 par une radio russe à destination de l’Inde, sur son site Indian.ruvr.ru. »
... Deux ans plus tard, donc, on retrouve la même unité, le USS Donald Cook,
mais cette fois à géographie complètement renversée, passant du Sud au
Nord, de la Mer Noire à la Mer Baltique. Cette fois, les mêmes avions de
type Su-24 ne viennent pas de Sébastopol mais de Kaliningrad. Ils ne
sont pas seuls, il y a aussi un hélicoptère Ka-27, et ce que nous
nommons d’une façon symbolique “l’incident” comprend en fait une série
d’incidents les 11 et 12 avril, de la part d’aéronefs russes venant de
la région de la ville de Kaliningrad, anciennement Königsberg, dans
l’enclave russe du même nom. Le(s) unité(s) US (sans doute avec des
éléments polonais) opéraient à peu près à 200 kilomètres au large de
Kaliningrad, lors de ce qui paraît être des manœuvres combinées de
l’OTAN. Le moins qu’on puisse dire, à voir certaines photos de l’US Navy
montrant un Su-24 passant à moins de 10 mètres du pont de la frégate
US, c’est que les pilotes russes ne prennent plus de gants. Vidéo
Base russe de Kaliningrad : Qui provoque qui ? |
Il y a eu de nombreuses exclamations effarées et furieuses de la part des divers porte-paroles US. RT-français présente sommairement et dans ses très grandes lignes l’incident :
« Washington s'est offusqué du vol d'un SU-24 russe à proximité du
destroyer américain Donald Cook, qui effectuait des exercices militaires
en eaux internationales en mer Baltique, avec un allié de l'OTAN, la
Pologne. Publiant la vidéo d’avions russes passant à proximité de son
navire de guerre, la marine américaine a déclaré avoir fait face à
plusieurs “manœuvres de vol agressives”, dont certaines à moins de 10
mètres, lundi et mardi.
» Le destroyer américain se trouvait dans les eaux
internationales, à une centaine de kilomètres au large de la base navale
russe de Kaliningrad, où il effectuait des manœuvres militaires. Selon
le témoignage d’un officiel américain au site d’information militaire
Defense News, les engins russes ont été identifiés comme un bombardier
SU-24 et un hélicoptère. Ceux-ci auraient volé à basse altitude, causant
ainsi l’effroi des membres de la Navy. Comme l’ont toutefois constaté
des membres du personnel du navire US, “aucun armement qui aurait pu
représenter une menace pour les opérations américaines en mer Baltique
n’était présent” sur les appareils. »
La relation de l’incident que donne RT.News
(anglais) est beaucoup plus détaillée et ne dissimule aucun des aspects
de la réaction US. Bien entendu, les médias US sont très diserts à
propos de cet incident (de cette série d’incidents), qui est en général considéré comme un acte de provocation délibéré et ressenti d’une façon très sérieuse, voire dramatique.
D’une façon générale, les autorités US étudient les circonstances de
l’incident (des incidents) pour décider s’il constitue une violation
d’un traité datant de 1973 entre les USA et l’URSS. (Ce traité a pour
but d’éviter les incidents en mer, entre les deux marines militaires, et
notamment avec l’interdiction des “simulation d’attaques aériennes”.)
On trouve notamment un article très détaillé dans Defense News
le 13 avril, qui développe d’autres circonstances dans les deux jours
concernés (interventions d’un couple Su-24 avec un hélicoptère Kamov
Ka-27 Helix, l’arrêt des évolutions d’un hélicoptère polonais
de crainte d’un incident aérien, etc.)
Il y a donc une différence très importante entre l’incident d’avril 2014 et celui d’avril 2016. Entretemps, un autre incident avec les mêmes protagonistes (Su-24 et frégate de l’US Navy) avait eu lieu le 30 mai 2015, avec la frégate USS Ross. Les deux incidents de 2014 et 2015, tous deux en Mer Noire, sont très similaires : il s’agit d’incidents de
démonstration opérationnelle et, éventuellement, d’intimidation de la
part des Russes, pour convaincre les USA de retirer leurs unités jugées
par les Russes un peu trop proches de la zone Ukraine-Russie où
la crise ukrainienne était en plein développement. (Il semble, dans les
deux cas, qu’il y ait eu effectivement repli US et, dans les deux cas,
le côté américaniste chercha essentiellement à minimiser les incidents,
notamment celui du 30 mai 2015 avec le USS Ross, pour ne pas donner l’impression éventuelle de céder aux Russes.)
Cette fois, les circonstances sont très différentes. Il n’y a pas de crise active en cours dans la zone et donc pas de circonstances opérationnelles actives comme il y avait en 2014 et 2015 avec la crise ukrainienne ; il y a des manœuvres otaniennes, ou dans un cadre otanien, au large de Kaliningrad, soit une opération de démonstration de force relevant plutôt de la communication. L’intervention russe relève dans ce cas, également, de la communication, consistant à montrer à la fois la vigilance et la puissance russes dans la surveillance et la veille autour de l’enclave de Kaliningrad. Il y a aussi un mécontentement russe devant des manœuvres de l’OTAN ou des évolutions de l’US Navy qui se déroulent face à un territoire russe. Cette fois, les autorités US ne cherchent absolument pas à minimiser l’affaire, au contraire ils ont tendance à la dramatiser. Ce n’est pas une surprise puisque nous sommes dans le domaine de la communication, donc de la gesticulation de part et d’autre. Les Russes, eux, semblent rester extrêmement calmes et ne présentent (jusqu’ici) aucun signe indiquant qu’ils regrettent l’incident, ou qu’ils l’attribuent à une “erreur”, etc. Le porte-parole du ministère russe de la Défense Igor Konachenkov a, comme commentaire, simplement rappelé que l’aviation russe « respectait entièrement les règles internationales de l’usage de l’espace aérienne au-dessus des eaux neutres [internationales] ».
On en reste donc à ce qui a été montré et le constat qu’on peut faire
est bien celui que les Russes entendent bien se montrer effectivement
d’une façon agressive, dans tous les cas du point de vue de la
communication. Pour eux, le fait même des évolutions de l’US Navy à si
faible distance des côtes russes représentent une forme de “provocation”.
Quoi qu’il en soit, le comportement russe montre une volonté d’affirmer
la puissance militaire de la Russie, y compris dans ces circonstances
qui sont désormais assez courantes du point de vue de l’OTAN. « Il y
a dix ans, peut-être l’OTAN, ou dans tous les cas l’US Navy,
n’aurait-elle pas fait cela, les manœuvres qu’elle fait actuellement
dans cette région précisément, observait ce matin une source européenne, mais
il est en revanche absolument certain que les Russes, il y a dix ans,
n’auraient jamais ‘riposté’ de cette façon si affirmée, presque
agressive. »
A ce point et en tenant compte de ce qu’on sait de cet incident, les
observations d’ordre politique sont inutiles tant on connaît bien les
positions des uns et des autres, d’où elles viennent, les
responsabilités, etc. Le point essentiel à retenir est bien ce
comportement des forces armées russes, qui semble constituer, lui, un
signal politique, ou politico-militaire, qui est d’une essence
différente des précédents incidents qu’on a détaillés et dont la
finalité était essentiellement une démonstration opérationnelle.
Il
s’agit d’une réaffirmation de la puissance russe, de la souveraineté
russe, et donc un avertissement à l’intention des USA, de l’OTAN, du
bloc-BAO.
Bien entendu, il devrait être interprété, dans le
bloc-BAO, comme un nouveau signe de la duplicité et des tendances
bellicistes, selon les habituels standards de narrative dans ce
cas, mais il s’agit bel et bien, considéré objectivement, de la
démonstration des limites de la patience russe vis-à-vis des évolutions
du bloc-BAO à l’encontre de la Russie.
Les Russes font savoir, sans
énervement ni intention quelconque, qu’ils sont prêts à affronter toutes les situations.
http://www.dedefensa.org/article/la-passion-du-su-24-pour-le-uss-cook
[1] Technologie Magrav. Encore un navire de guerre américain "détruit" par les Russes
L'OTAN S'INQUIETE DE L’ÉVOLUTION PERFORMANTE DES SOUS-MARINS RUSSES
Les
sous-marins russes devenant de plus en plus performants par leurs
caractéristiques techniques et leur armement, les projets de l'Otan de
réduire le financement de sa Marine suscitent une préoccupation
grandissante, selon l'amiral Mark Ferguson.
Moscou met au point des
sous-marins qui sont de plus en plus difficiles à repérer et à
surveiller pour la Marine américaine, a déclaré Mark Freguson,
commandant en chef de la Marine américaine en Europe, dans une interview
accordée à la chaîne télévisée CNN.
"Les sous-marins que nous observons sont beaucoup plus furtifs. Nous voyons que les Russes disposent de systèmes d'armes, de missiles de plus en plus perfectionnés qui sont capables de réaliser des frappes au sol à grande distance. Nous voyons également que leur niveau de préparation augmente au fur et à mesure qu'ils sont déployés dans des régions de plus en plus éloignées de leurs eaux territoriales", a indiqué l'amiral.
Selon lui, Moscou voit une menace dans l'expansion de l'Otan vers l'est et aspire à empêcher les États-Unis et leurs alliés d'agir dans les régions des anciennes républiques de l'Union soviétique.
Suite à l'évolution des sous-marins russes, les États-Unis et leurs alliés à l'Otan lancent un nouveau programme d'exercices anti-sous-marins et déploient de nouveaux armements, dont des avions de lutte anti-sous-marine P-8 Poseidon, a ajouté le militaire.
Actuellement, l'Otan dispose de 53 sous-marins, mais comme un certain nombre d'entre eux sont devenus obsolètes et vu les coupes budgétaires, ils seront au nombre de 41 d'ici 2020.
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Classe Akoula: les sous-marins nucléaires bientôt dotés de missiles de croisière Kalibr
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Actuellement, l'Otan dispose de 53 sous-marins, mais comme un certain nombre d'entre eux sont devenus obsolètes et vu les coupes budgétaires, ils seront au nombre de 41 d'ici 2020.